nourrir [ nurir ] v. tr. <conjug. : 2> I ♦
1 ♦ Élever, former, éduquer (surtout pass. et p. p.).Vx « J'ai été nourri aux lettres » (Descartes). — Mod. Nourri dans. « Félicité, bien que nourrie dans la rudesse » (Flaubert).
2 ♦ Vx Produire. « Et tout ce que l'Espagne a nourri de vaillants » (P. Corneille).
II ♦ Mod. Alimenter.
1 ♦ (XIe) Élever, alimenter (un enfant nouveau-né) en l'allaitant. ⇒ allaiter. Mère qui nourrit ses enfants. Nourrir un bébé au sein, par ext. au biberon.
2 ♦ (XIIIe) Entretenir, faire vivre (une personne, un animal) en lui donnant à manger ou en lui procurant les aliments nécessaires à sa subsistance. ⇒ alimenter. Nourrir un enfant à la cuillère. Nourrir un malade, un paralytique. Elle vient nourrir le chat. Poulet nourri au grain. Des bêtes qui ont été bien nourries, bien soignées. ⇒ nourri.
♢ Procurer, fournir les aliments à. ⇒ ravitailler. La pension loge et nourrit dix personnes. L'intendance les nourrit bien.
3 ♦ Pourvoir (qqn) de moyens de subsistance. ⇒ entretenir. C'est elle qui nourrit toute la famille, qui la fait vivre. Avoir trois personnes à nourrir, à sa charge. Une bouche à nourrir.
♢ (XVIe ) Fig. (sujet chose) Fournir, donner de quoi vivre à. — Loc. Ce métier, ce travail ne nourrit pas son homme. — Industrie qui nourrit des milliers d'ouvriers. Les inactifs que la société doit nourrir.
4 ♦ Absolt Constituer une subsistance pour l'organisme. Le pain nourrit (⇒ nourrissant) .
5 ♦ (Sujet chose) Pourvoir (l'esprit) d'une nourriture spirituelle. La lecture nourrit l'esprit. ⇒ former. Nourri de Kant et de Hegel.
6 ♦ (1530) Vieilli Entretenir (une chose) en augmentant l'importance, ou en faisant durer plus longtemps. Nourrir le feu, une lampe. ⇒ alimenter. Nourrir les sons : émettre des sons pleins et les soutenir (⇒ nourri, 2o) . Nourrir un exposé d'exemples choisis.
7 ♦ (XIIe) Entretenir en soi (un sentiment, une pensée). Nourrir un désir, des rancunes. Nourrir de vieilles haines pour (contre) qqn. Il nourrit l'espoir, l'illusion d'y parvenir. Nourrir un projet. ⇒ caresser, préparer. Il fallait « qu'elle eût nourri des pensées criminelles » (F. Mauriac). — « La solitude nourrit les pensées sombres » (Gautier).
8 ♦ Fin. Garder (des créances, des effets) en portefeuille, sans les mobiliser. Nourrir des effets de commerce.
III ♦ SE NOURRIR v. pron. (soi nourrir 1190)
1 ♦ Absorber tel ou tel aliment. Se nourrir de légumes, de viande, en consommer, en manger (⇒ -phage, -vore) . — Absolt Il faut vous nourrir. ⇒ s'alimenter, 1. manger, se sustenter. Conseils pour bien se nourrir. ⇒ diététique. Très affaibli, le malade ne se nourrit presque plus. Refus de se nourrir. ⇒ anorexie (cf. aussi Grève de la faim).
2 ♦ Fig. ⇒ s'abreuver, se repaître. Se nourrir d'illusions, de rêves. « Le monde se nourrit d'un peu de vérité et de beaucoup de mensonges » (R. Rolland).
⊗ CONTR. Sevrer; affamer, priver. — Jeûner.
● nourrir verbe transitif (latin nutrire) Donner à quelqu'un, un animal, un végétal les aliments nécessaires à sa vie, à son développement : Nourrir un bébé au lait de vache. Mettre de l'engrais pour nourrir une plante. Entretenir quelque chose en fournissant les éléments nécessaires à sa bonne conservation : Crème neutre qui nourrit le cuir. Apporter à la peau, par application de produits, des éléments qui lui font défaut. Produire, fournir ou constituer les aliments d'un groupe, d'une région ; ravitailler : La Brie nourrit la région parisienne. Fournir sa nourriture à quelqu'un : Elle ne nourrit pas ses employés de maison. Subvenir aux besoins de quelqu'un, à sa nourriture, à son entretien ; lui fournir un salaire qui le fait vivre : Il a cinq enfants à nourrir. Voilà un métier qui nourrit bien mal son homme. Fournir la matière de quelque chose, l'entretenir ; alimenter : Nourrir la conversation. Nourrir le feu. Entretenir quelque chose, un sentiment, une idée, les développer en soi : Nourrir des projets ambitieux. ● nourrir (difficultés) verbe transitif (latin nutrire) Orthographe Attention, nourrir s'écrit avec deux r (comme pourrir, et à la différence de mourir et courir). - Les dérivés s'écrivent avec deux s : nourrissage, nourrissant, nourrisseur, nourrisson, sauf nourrice et nourricier, qui s'écrivent avec un c. ● nourrir (expressions) verbe transitif (latin nutrire) Littéraire. Nourrir l'esprit de quelqu'un, lui donner une formation intellectuelle, développer ses idées, son jugement, etc. Familier. Nourrir un enfant, un petit, l'allaiter, en parlant de la mère. Nourrir sa couleur, la traiter en empâtements. Nourrir son style, lui donner de la vigueur. Nourrir son trait, lui donner de l'épaisseur. ● nourrir (homonymes) verbe transitif (latin nutrire) ● nourrir (synonymes) verbe transitif (latin nutrire) Donner à quelqu'un, un animal, un végétal les aliments nécessaires...
Synonymes :
- donner à manger
- engaver
- gaver
- gorger
Contraires :
- affamer
- faire jeûner
- priver
- sevrer
Produire, fournir ou constituer les aliments d'un groupe, d'une région ;...
Synonymes :
Fournir sa nourriture à quelqu'un
Synonymes :
Fournir la matière de quelque chose, l'entretenir ; alimenter
Synonymes :
Contraires :
- arrêter
- assécher
- atténuer
- écourter
- éteindre
- juguler
- stopper
Entretenir quelque chose, un sentiment, une idée, les développer en soi
Synonymes :
- caresser
- combiner (familier)
- échafauder
- ourdir
- tramer
Contraires :
- délaisser
nourrir
v.
rI./r v. tr.
d1./d Fournir en aliments (une personne, un animal). Nourrir un enfant. Nourrir des poules au maïs.
— Mère qui nourrit son bébé, qui l'allaite. Syn. alimenter.
d2./d Subvenir aux besoins matériels de (qqn). Nourrir sa famille.
|| Par ext. Son travail ne le nourrit pas.
d3./d Entretenir; faire durer. Le bois nourrit le feu.
d4./d Fig., litt. Entretenir intérieurement. Nourrir des craintes.
d5./d Fig. Former, instruire (l'esprit). La lecture nourrit l'intelligence.
rII./r v. Pron. Consommer (tel ou tel aliment). Se nourrir de lait.
— Absol. Manger.
⇒NOURRIR, verbe trans.
A. —Fournir les aliments nécessaires.
1. Qqn nourrit qqn (un enfant, un nourrisson) (de qqc.)
a) Alimenter de son propre lait un nouveau-né. [Cette femme] a dans sa mamelle une goutte de lait pour nourrir son fils, et dans ses haillons un coin de manteau pour l'envelopper (CHATEAUBR., Génie, t.1, 1803, p.261). Il lui conseillait de nourrir l'enfant qu'elle attendait, célébrait les douceurs de la famille (GUÉHENNO, Jean-Jacques, 1952, p.266).
♦Nourrir (un nouveau-né) de. Perdre un enfant qu'on a nourri de son lait et porté tout un an attaché à son sein (SAND, Lélia, 1839, p.400).
♦Absol. À l'époque, les mères nourrissaient elles-mêmes et longtemps (SARTRE, Mots, 1964, p.9).
♦Emploi pronom. réfl. Un nouveau-né se nourrit de qqn. Clotilde gardait son inconscient sourire, à le voir, si vigoureux, se nourrir d'elle (ZOLA, Dr Pascal, 1893, p.341).
— P. anal. [En parlant d'animaux] Les génisses pleines, qui doivent nourrir leurs enfants, étaient plus lentes dans le grand rythme (MONTHERL., Pasiphaé, 1936, p.112).
b) Alimenter quelqu'un (un enfant, un malade). Nourrir qqn à la cuillère. Elle donnait à boire à son enfant, elle le nourrissait au biberon, car elle avait été forcée de renvoyer la nourrice par économie (BALZAC, Illus. perdues, 1843, p.613).
— P. anal. Qqn nourrit un animal. Il avait demandé un chien à un camarade d'atelier et il avait eu celui-là très jeune. Il avait fallu le nourrir au biberon (CAMUS, Étranger, 1942, p.1156).
2. Qqn/qqc. nourrit qqn/un animal. Donner à manger à une personne, un animal.
— Qqn nourrit qqn. Nous étions mal habillés et mal nourris, souvent nos souliers étaient percés, nos pantalons déchirés et rapiécés et notre linge sale (KARR, Sous tilleuls, 1832, p.270). Le curé ne s'était nullement refusé à recevoir et à nourrir les soldats prussiens (MAUPASS., Contes et nouv., t.2, Mlle Fifi, 1881, p.159):
• 1. Parce qu'on a dans sa maison une femme et trois petits, il faut bien se remettre au travail. (...) il faut bien rapporter au nid de quoi nourrir toute la couvée.
GENEVOIX, Raboliot, 1925, p.168.
♦Nourrir qqn de, nourrir un animal de. Certains peuples, par leur position, sont réduits à vivre presque uniquement de poisson; ils en nourrissent pareillement leurs animaux de travail (BRILLAT-SAV., Physiol. goût, 1825, p.92).
Emploi pronom. réfl. Se nourrir de. Prendre pour aliment. Se nourrir de légumes, de riz. Les Quérolle, c'est des gens sérieux et regardants: ça se nourrit de rien, d'une soupe et d'un bout de fromage (MARTIN DU G., Vieille Fr., 1933, p.1035). Il me montra (...) les docks où il se nourrissait de bananes volées (BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p.423). Au fig. Se nourrir de rêves, d'illusions. Synon. se repaître de. Emploi abs. (Il faut) se nourrir. (Il faut) manger, se sustenter.
♦P. plaisant. Nourrir les poux, les puces. Emploi pronom. réfl. Les puces se nourrissent de. Tous les quinze ans, les générations de poux, qui se nourrissent de l'homme, diminuent d'une manière notable (LAUTRÉAM., Chants Maldoror, 1869, p.189).
— P. anal. [En parlant d'animaux] Dans le temps où les oiseaux nourrissent leurs petits, on a occasion d'observer un signe étonnant. Le nourrisson, dès qu'il aperçoit le nourricier, soulève un peu ses ailes, et leur imprime un tremblement de pauvre (ALAIN, Propos, 1925, p.660):
• 2. La cigale est ta proie, hirondelle inhumaine;
Et nourrit tes petits qui, débiles encor,
Nus, tremblants, dans les airs n'osent prendre l'essor.
CHÉNIER, Bucoliques, 1794, p.241.
— [P. méton.] Qqc. nourrit qqc. Pourvoir en produits alimentaires. Les plus généreux se font peu à peu agressifs à cause de l'absurde de cette invasion (...). Une seule province ne peut ni loger ni nourrir la France! (SAINT-EXUP., Pilote guerre, 1942, p.316).
3. Qqc. nourrit qqn/un animal. Être un aliment pour l'organisme. Les réservoirs des montagnes hydrauliques, c'est-à-dire les lacs, nourrissent une infinité de plantes, de poissons et d'oiseaux, qu'on ne trouve point ailleurs (BERN. DE ST-PIERRE, Harm. nat., 1814, p.227). L'herbe nourrit les animaux divers qui la broutent (CLAUDEL, Art poét., 1907, p.158).
— P. anal. Nourrir le bois, le cuir. Enduire le bois, le cuir avec de l'huile de lin, de la cire, du cirage, afin qu'il garde ses qualités mécaniques. Cette émulsion (...) est employée (...) pour nourrir le cuir (WURTZ, Dict. chim., 2esuppl., t.7, 1908, p.661).
4. Qqn/qqc. nourrit qqn. Pourvoir aux moyens d'existence de; subvenir aux besoins matériels de. Synon. entretenir. Nourrir sa famille; nourrir qqn à ne rien faire; nourrir une bouche inutile.
— En partic. Apporter une aide aux indigents. Se retirer dans le désert au pied d'une croix, pour panser les malades, pour nourrir les pauvres (CLAUDEL, Otage, 1911, II, 2, p.268).
— P. ext. Qqc. (un travail) nourrit qqn. Faire vivre; assurer un revenu, des ressources pour vivre. Il n'y a que la mauvaise littérature qui puisse nourrir son homme. La bonne ne le peut pas faire (VIGNY, Journal poète, 1832, p.946).
B. —Au fig. Qqn/qqc. nourrit qqn/qqc.
1. Qqn/qqc. nourrit qqc. Développer quelque chose en lui fournissant les ressources nécessaires. Nourrir la fièvre, la guerre. Cet événement artistique considérable [la venue à Paris du «Schillertheater» de Berlin] contribuera largement à nourrir les relations de culture entre la France et l'Allemagne (L'OEuvre, 12févr. 1941). La tradition inaugurée par Plotin, dont l'action sur saint Augustin fut si profonde, n'est pas éteinte! C'est elle qui avant de peser sur les siècles romans, nourrit l'art byzantin (HUYGHE, Dialog. avec visible, 1955, p.132).
— Spécialement
♦[En parlant d'une banque] Nourrir un crédit. Financer un crédit ,,à partir des dépôts qu'elle reçoit de ses clients`` (Gestion fin. 1979).
♦BEAUX-ARTS
DESSIN, GRAV. Nourrir son trait. Le faire large. Le rôle principal [de l'encre] est de nourrir les traits dessinés sur la pierre [lithographique] (CHELET, Lithogr., 1933, p.43).
PEINT. Nourrir sa couleur. Empâter la couleur. (Dict. XIXe et XXe s.).
♦LING., STYL. Nourrir son style. L'étoffer, lui donner de la force et de la vigueur, de la richesse (Dict. XIXe et XXe s.).
2. Qqn/qqc. nourrit qqn/qqc.
a) Apporter à quelqu'un et, p. méton., à quelque chose (coeur, âme, esprit) ce qui peut l'enrichir (sur le plan intellectuel ou moral). Nourrir l'âme, l'esprit, l'intelligence. C'est une chose bien certaine que les Paroles du Saint Livre nourrissent l'âme et même l'intelligence, à la manière de l'Eucharistie, sans qu'il soit nécessaire de les comprendre (BLOY, Journal, 1900, p.37).
b) Qqc./qqn nourrit qqn (à, dans) qqc.
) Vx, littér. [P. allus. à Racine] Élever, éduquer. Elle se tourna tout de suite, en pensée, vers ses camarades, parce qu'ils avaient été nourris dans le sérail [théâtre], parce qu'ils en connaissaient les familiers et les moeurs (DUHAMEL, Suzanne, 1941, p.80).
— Nourrir qqn à. Instruire dans l'étude de, former à. Il a été nourri aux lettres latines (Ac. 1935). La nièce des Bignon (...) avait été nourrie aux observances du palais et dans la religion de la justice (SAINTE-BEUVE, Port-Royal, t.4, 1859, p.111).
— Nourrir qqn dans. Former, éduquer selon certains principes, dans le respect de certaines valeurs. Il dit que l'enfance et la jeunesse devraient être nourries dans le culte de la plus haute beauté (BARRÈS, Cahiers, t.3, 1903, p.159). Le tout est d'être nourri dans les principes. Il faut bien penser avant que de penser (A. FRANCE, Île ping., 1908, p.200).
♦Loc. verb. fig. Nourrir un serpent dans son sein. Élever, assister quelqu'un qui se retourne ensuite contre soi. Bernadotte a été le serpent nourri dans notre sein; à peine il nous avait quittés, qu'il était dans le système de nos ennemis (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t.1, 1823, p.977).
) Vx, littér. Porter dans son sein; produire. (Dict. XIXe et XXe s.).
a) ) Entretenir un sentiment, une pensée dans l'esprit. Nourrir l'espérance, l'espoir, l'orgueil, la haine, l'imagination, la passion, la rêverie. Parmi les trente-neuf millions de Français qui ne passent jamais le seuil d'une librairie, quelques centaines de mille au hasard d'un voyage (...) pour nourrir quelques rêveries et susciter quelques images, ont une fois commis cet acte étrange (...): ils ont acheté un livre (MAURIAC, Journal occup., 1941, p.317).
) Entretenir un sentiment, une pensée pour, envers, contre quelqu'un. Je les hais, et de toute la haine que peut nourrir une âme basse de paria pour les castes supérieures (LARBAUD, Barnabooth, 1913, p.118). Un petit monde de commerçants (...) qui, tout en nourrissant une haine muette pour les fonctionnaires en général, ne parvenait pas à dépouiller, en présence de l'ennemi, le respect ancestral (ESTAUNIÉ, Ascension M. Baslèvre, 1919, p.7).
b) Former des projets. Nourrir le dessein, le projet de. L'espoir de vaincre la mer l'enfiévrait. Il avait conservé contre elle une rancune, depuis qu'il l'accusait sourdement de sa ruine (...). S'il n'osait l'injurier tout haut, il nourrissait l'idée de se venger un jour (ZOLA, Joie de vivre, 1884, p.903).
Prononc. et Orth.:[], (il) nourrit []. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. I. 1. 2e moitié Xe s. «élever un enfant» (Saint-Léger, éd. J. Linskill, 27); ca 1500 nourrir à «élever à» (PHILIPPE DE COMMYNES, Mémoires, éd. J. Calmette, I, p.69); 1636 nourrir dans «former dans» (CORNEILLE, Le Cid, vers 589: son bras nourri dans les alarmes); 1690 nourrir un serpent dans son sein «élever un ingrat» (FUR.); 2. 1636 «produire» (CORNEILLE, op. cit., vers 1560 : Et tout ce que l'Espagne a nourri de vaillants). II. 1. Mil. XIe s. «alimenter un enfant nouveau-né» (Alexis, éd. Chr. Storey, 32); ca 1180 «alimenter un animal» (MARIE DE FRANCE, Fables, 32-5 ds T.-L.); 2. ca 1100 «pourvoir à l'entretien complet de quelqu'un» (Roland, éd. J. Bédier, 2380); 3. ca 1225 «fournir des aliments nécessaires à un être vivant» (GAUTIER DE COINCI, Mir. de la Vierge, II, Mir. 22, éd. V. F. Koenig, IV, p.191); 4. ca 1500 «constituer un aliment pour un organisme» (Jardin de santé, I, 374 ds GDF. Compl.); 5. 1524-27 «faire vivre» (P.GRINGORE, Vie Ms. S. Loys, II, 29 ds IGLF: Nostre moulin certainement nous nourrist); 6. 1580 «former dans son esprit, méditer» (MONTAIGNE, Essais I, XXVI, éd. P. Villey, I, 174); 7. 1582 p. ext. «en parlant d'un pays, approvisionner en produits alimentaires» (R. GARNIER, Bradamante, 139, IV, p.11 ds IGLF: et mille autres et mille que l'Espagne et l'Afrique ont nourris). III. Verbe pronom. 1. ca 1269-78 «prendre des forces» (JEAN DE MEUN, Roman de la Rose, éd. F. Lecoy, 18943); 2. 1485 «prendre de la nourriture de» (Mist. du Viel Testament, XXXVII, 34658, IV, 330 ds IGLF: Courges, pompons se nourrissent dessoubz); 3. id. fig. (ibid., V, 3038, I, 116, ibid.: Or fault il que je me nourrisse Desormais de peine et tormens). Du lat. nutrire «nourrir, alimenter, entretenir». Fréq. abs. littér.:3798. Fréq. rel. littér.: XIXe s.: a) 6438, b) 4683; XXe s.: a) 5209, b) 5015.
DÉR. 1. Nourrissage, subst. masc. a) Agric. ,,Activité agricole qui s'applique à l'élevage et à l'engraissement des animaux domestiques`` (FÉN. 1970). b) Peauss. Action de graisser et de nourrir le cuir. Les produits extraits du pétrole brut possèdent encore de nombreux usages; sulfonées, certaines huiles conviennent au nourrissage des cuirs de chamoiserie (CHARTROU, Pétroles natur. et artif., 1931, p.148). — []. Att. ds Ac. dep. 1798. — 1re attest. 1482 «action d'élever du bétail» norrisaige (Franch. de Franquemont, Arch. mun. Montbéliard ds GDF.); de nourrir, suff. -age. 2. Nourrissement, subst. masc. Action de nourrir. Apic. ,,Fourniture artificielle de nourriture à une colonie d'abeilles soit pour compléter ses provisions, soit pour stimuler la ponte`` (Agric. 1977). — []. — 1res attest. a) fin XIIe s. «nourriture, aliment» nurissement (GREGOIRE LE PAPE, Homelies, p.59, Hofmann ds GDF.), b) 1907 «action de fournir de la nourriture à une ruche pendant la mauvaise saison» (Nouv. Lar. ill. Suppl.); de nourrir, suff. -ment1.
nourrir [nuʀiʀ] v. tr.
ÉTYM. XIIe; norir « élever », Xe; nodrir « allaiter », XIe; du lat. nutrire « allaiter », et par ext. « alimenter ».
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I Vx. Élever, former.
1 Vx. Éduquer, élever (surtout passif et p. p.) [→ Détour, cit. 1; 2. Loueur, cit.]. || « Il a été… nourri page du Roi » (Académie, 1694). || Nourri au jardin (cit. 9, Rabelais) de France. || Nourris ensemble et compagnons (cit. 2) d'école. — Nourrir un enfant à… (vx), dans… ⇒ Instruire (dans). || « J'ai été nourri aux lettres » (cit. 33, Descartes).
♦ Mod., littér. || Nourrir dans : donner par l'éducation, certaines habitudes, certaines idées (Cf. Sucer avec le lait…). || Être nourri dans les bons principes (⇒ Éducation). — Par ext. || Être nourri dans les alarmes (Corneille), aux alarmes (Bossuet), aux querelles (Boileau), habitué, formé.
1 (…) ce n'est pas raison de nourrir un enfant au giron de ses parents.
Montaigne, Essais, I, XXVI.
2 Et j'ai toujours été nourri par feu mon père
Dans la crainte de Dieu, Monsieur, et des sergents.
Racine, les Plaideurs, II, 4.
3 Nourri dans les forêts, il en a la rudesse.
Racine, Phèdre, III, 1.
4 Félicité, bien que nourrie dans la rudesse, fut indignée (…)
Flaubert, Trois contes, « Un cœur simple », III.
♦ ☑ (1690). Loc. fig. Nourrir un serpent dans son sein.
2 Vx. Élever dans son sein, produire. || L'Afrique nourrit des monstres (Furetière, 1690).
5 Et tout ce que l'Espagne a nourri de vaillants
Corneille, le Cid, V, 1.
6 (…) l'un des plus grands magistrats que la France ait nourris (…)
La Bruyère Disc. à l'Académie, 15 juin 1693.
———
II Mod. Alimenter.
1 (XIe; premier sens du lat. nutrire). Élever, alimenter (un enfant nouveau-né) en l'allaitant. ⇒ Allaiter; nourrice. || Mère qui nourrit ses enfants, qui les fait nourrir par une nourrice. || Nourrir un bébé au sein, à la mamelle. — Par ext. || Nourrir au biberon (cit. 1). — Par métaphore. || Le sein qui l'a nourri, sa nourrice, sa mère…
7 (…) dans un coin, le berceau (…) où dormaient un fils et une fille. Zélie nourrissait ses enfants elle-même, faisait sa cuisine, ses fleurs et son ménage.
Balzac, les Employés, Pl., t. VI, p. 943.
8 Ma mère eut à peine la force de me nourrir, et mourut.
E. Fromentin, Dominique, III.
♦ Absolt (d'une femme). Allaiter un, des enfants.
9 (…) Renée n'a pas le moindre danger à courir, car elle nourrit, l'enfant a très bien pris le sein, le lait est abondant (…)
Balzac, Mémoires de deux jeunes mariées, Pl., t. I, p. 242.
2 (XIIIe). Entretenir, faire vivre (une personne, un animal) en lui faisant absorber, et, par ext., en lui procurant les aliments nécessaires à sa subsistance. ⇒ Alimenter, manger (donner à), sustenter. || Action de nourrir. ⇒ Nutrition. || Gens qui ne semblent vivre que pour nourrir et engraisser (cit. 1) leur corps. || Nourrir un enfant à la cuiller. || Nourrir un malade, un paralytique… (qui ne peut se nourrir lui-même). — Procurer, fournir les aliments. ⇒ Ravitailler. || Le restaurateur, le gargotier (cit. 1) qui me nourrit. || La pension loge et nourrit dix personnes. || Tirer de la culture (cit. 1) tout ce qu'elle peut donner pour nourrir plus d'hommes. || Nourrir qqn de légumes, de viande… || L'intendance les nourrit bien.
10 (…) il les nourrit de la manne dans le désert (…)
Pascal, Pensées, X, 670.
11 Elle mangeait, mâchait, broyait, dévorait, engloutissait, mais avec l'air le plus léger (…) du monde (…) J'aurais pu faire ma fortune en la montrant dans les foires comme monstre polyphage. Je la nourrissais bien, et cependant elle m'a quitté (…) — Pour un fournisseur aux vivres, sans doute ?
Baudelaire, Spleen de Paris, XLII.
12 Pour prix de mon travail j'étais nourri, abondamment d'ailleurs, à la cuisine.
Céline, Voyage au bout de la nuit, p. 97.
13 La principale fonction de Louise et de maman, c'était de me nourrir; leur tâche n'était pas toujours facile. Par ma bouche, le monde entrait en moi plus intimement que par mes yeux et mes mains. Je ne l'acceptais pas tout entier (…) mes répugnances étaient si obstinées qu'on renonça à les combattre. En revanche, je profitai passionnément du privilège de l'enfance pour qui la beauté, le luxe, le bonheur sont des choses qui se mangent (…)
S. de Beauvoir, Mémoires d'une jeune fille rangée, p. 10.
♦ (Compl. n. d'animal). || Nourrir les volailles, les bêtes, leur porter leur nourriture. ⇒ Agrainer; paître (vx). || Nourrir des bestiaux de fourrage frais (→ Mettre au vert). || Oiseau qui nourrit ses petits. ⇒ Abecquer (→ Adopter, cit. 2). — Par plais. || Nourrir les moustiques, les puces, en être la proie.
14 Et nous alimentons nos aimables remords,
Comme les mendiants nourrissent leur vermine.
Baudelaire, les Fleurs du mal, Au lecteur.
♦ (En parlant des plantes). || La sève nourrit l'arbre. ⇒ Nourricier, nutricier.
♦ Fournir (une ville, un pays) de produits alimentaires. || Les régions qui nourrissent la capitale.
3 Pourvoir (qqn) de moyens de subsistance. ⇒ Entretenir. || Nourrir et élever ses enfants (→ Dispenser, cit. 9). || Jeune homme (cit. 158) pensionné et nourri par ses parents. || Nourrir son père (→ Gêner, cit. 23), sa mère et ses frères (→ Maçon, cit. 1). || C'est lui qui nourrit toute la famille, qui la fait vivre. || Avoir trois personnes à nourrir, à sa charge. || Nourrir qqn à ne rien faire. ☑ Une bouche (supra cit. 11.2) à nourrir. — Nourrir les indigents, les secourir (→ Honorable, cit. 2).
15 Ni l'un ni l'autre de ces deux commerces ne saurait à lui seul nourrir toute la famille, cinq bouches, si on compte la bonne, avec le père gâteux, Madame et Gaston qui a douze ans (…)
Aragon, les Beaux Quartiers, I, II.
♦ (1524-1527). Fig. Fournir, donner de quoi vivre à (le sujet désigne une terre, un métier, un gagne-pain…). ☑ C'est un métier qui ne nourrit pas son homme. || Le champ qui nourrit cette famille. || Industrie qui nourrit des milliers d'ouvriers.
16 (…) il s'était donné tout entier à la terre, qui, après l'avoir à peine nourri, le laissait misérable, inassouvi, honteux d'impuissance sénile (…)
Zola, la Terre, I, V.
4 (V. 1500). Sujet n. de chose. Constituer une subsistance pour l'organisme. || Aliments (cit. 1) qui empoisonnent au lieu de nourrir. || La fécule (cit. 1) nourrit parfaitement. || Les plantes qui nourrissent l'humanité (→ Culture, cit. 6).
17 Il y a des esprits-machines qui digèrent ce qu'ils apprennent comme le canard de Vaucanson digérait les aliments : digestion mécanique et qui ne nourrit pas.
Joseph Joubert, Pensées, IV, LX.
18 L'organisme a le singulier pouvoir de se construire lui-même, de fabriquer aux dépens des éléments du sang des substances qu'il utilise pour nourrir certains tissus, stimuler certaines fonctions.
A. Carrel, l'Homme, cet inconnu, III, VIII.
5 Développer, faire croître. || Le sol qui nourrit ces plantes (→ Aride, cit. 3).
19 Assur s'est élevé comme un grand arbre (…) le ciel l'a nourri de sa rosée (…)
Bossuet, IIe sermon. IVe dim. de Carême (1666), Sur l'ambition, II.
6 (1530). Entretenir (une chose) en augmentant l'importance, le volume (→ Gravier, cit. 3) ou en faisant durer plus longtemps. ⇒ Alimenter. || Nourrir un foyer, le feu. || Nourrir une lampe (→ Flamme, cit. 5). — Spécialt. || Nourrir le feu, la fusillade (→ ci-dessous, Nourri).
♦ Vx. || Nourrir un tableau de couleur, nourrir les couleurs. ⇒ Empâter. || Nourrir le trait, en calligraphie, le faire large et plein. — Nourrir les sons : émettre des sons pleins et les soutenir.
♦ Par métaphore et fig. || Le courage (cit. 9) nourrit les guerres.
20 (Elle) ne quittait pas sa maison deux heures par mois et nourrissait son activité par tous les soins qu'une servante dévouée donne à une maison.
Balzac, les Paysans, Pl., t. VIII, p. 205.
♦ Nourrir son style, lui donner de la force, de la vigueur. ⇒ Étoffer. || Nourrir un récit de détails vécus. || Nourrir un raisonnement de preuves convaincantes.
21 Quand on sait faire parler Gœthe, il est admirable; son éloquence est nourrie de pensées; sa plaisanterie est en même temps pleine de grâce et de philosophie (…)
Mme de Staël, De l'Allemagne, II, VII.
7 Fig. Pourvoir (l'esprit, une faculté psychique) d'une nourriture spirituelle. || La lecture nourrit l'esprit. ⇒ Former. || Nourrir son esprit des bons auteurs… (→ Creux, cit. 5; instance, cit. 1). || Les bonnes maximes (cit. 8) nourrissent la volonté.
22 Auprès des personnes qu'on aime, le sentiment nourrit l'esprit ainsi que le cœur, et l'on a peu besoin de chercher ailleurs des idées.
Rousseau, les Confessions, VII.
23 (…) des femmes qui, ayant eu un caractère et n'ayant pas négligé de nourrir leur raison, savent se créer une existence (…)
Laclos, les Liaisons dangereuses, CXIII.
24 Toute possession dont on ne communiquerait pas les avantages irriterait les désirs sans donner de contentement; elle fatiguerait le cœur, elle ne le nourrirait pas.
É. de Senancour, De l'Amour, p. 9.
♦ Nourrir d'idées, de sentiments. || Ces journaux nourrissent le public de balivernes. ⇒ Abreuver; → Imprévoyance, cit. 2. — Au p. p. || La bourgeoisie de 89, nourrie du grand siècle de la philosophie (→ Flottant, cit. 10). || Un jeune précepteur nourri de philosophie matérialiste (→ Fille, cit. 10).
25 (…) la tristesse douce du soir et la beauté de cette terre natale qui nous nourrit, non seulement de pain et de vin, mais encore d'idées, de sentiments et de croyances (…)
France, le Crime de S. Bonnard, Œ., t. II, II, p. 350.
8 (XIIe). Littér. Entretenir en soi (un sentiment, une pensée…). ⇒ Entretenir (cit. 17). || Nourrir un désir, un orgueil (→ Exigeant, cit. 6), des rancunes (→ Entêter, cit. 9). || Nourrir une haine (cit. 20), une hostilité (cit. 6). || Nourrir l'espoir, l'illusion de… — (1580). || Nourrir une idée. — Nourrir un projet. ⇒ Caresser, préparer. — Vx ou plais. || Nourrir de noirs desseins.
26 Ah ! si de ce soupçon votre âme est prévenue,
Pourquoi nourrissez-vous le venin qui vous tue ?
Racine, Britannicus, I, 1.
27 Je croyais donc pouvoir un peu nourrir des espérances par trop folles; mais j'oubliais la réussite de mon premier ouvrage : dans ce pays, ne comptez jamais sur deux succès rapprochés; l'un détruit l'autre.
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. III, p. 8.
28 (…) rappelez-vous avoir écrit (…) que vous ne nourrissez aucun dessein violent contre le gouvernement de la grande république nord-américaine (…)
G. Duhamel, Scènes de la vie future, I.
29 Mais si Jean avait jamais pu nourrir un soupçon, rien n'en subsistait, dès qu'ils étaient séparés.
F. Mauriac, la Pharisienne, VIII.
30 Elle mit une passion étrange à se charger : pour avoir agi ainsi en somnambule il fallait, à l'entendre, que depuis des mois, elle eût accueilli dans son cœur, qu'elle eût nourri des pensées criminelles.
F. Mauriac, Thérèse Desqueyroux, XIII.
♦ (Choses). || De quoi nourrir sa jalousie (→ Inoculer, cit. 7). || Souvenir qui nourrit des rancunes (→ Empoisonner, cit. 9).
31 Et c'est ce qui redouble et nourrit ma fureur.
Racine, Athalie, III, 3.
32 La solitude nourrit les pensées sombres.
Th. Gautier, le Roman de la momie, II.
♦ Vieilli ou littér. Faire naître et entretenir en autrui (un sentiment, une pensée). → Empire, cit. 7; enflammer, cit. 8; imiter, cit. 22.
33 (…) malgré ses injustices,
C'est ma mère, et je veux ignorer ses caprices.
Mais je ne prétends plus ignorer ni souffrir
Le ministre insolent qui les ose nourrir.
Racine, Britannicus, II, 1.
34 La vue constante de ce faste, de ces équipages splendides, de ce monde hautain, méprisant, nourrissait les envies, les haines.
Michelet, Hist. de la Révolution franç., II, VIII.
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se nourrir v. pron.
ÉTYM. (1190, soi nourrir).
1 (Absorber un aliment). ⇒ Consommer, manger, vivre (de). || Se nourrir de légumes (cit. 4), des fruits (cit. 2) de sa terre, de viande (⇒ -phage, -vore). || Se nourrir des miettes (cit. 5 et 8) tombées de la table du riche.
35 Rémonencq et sa sœur se nourrissaient de pain et de harengs, d'épluchures, de restes de légumes ramassés dans les tas d'ordures que les restaurateurs laissent au coin de leurs bornes.
Balzac, le Cousin Pons, Pl., t. VI, p. 615.
♦ Absolt. || Se nourrir. ⇒ Manger (→ Chocolat, cit. 1; gastronomie, cit.) || Il se nourrit bien, mal, insuffisamment. || Le malade refuse de se nourrir. ⇒ Alimenter (s'). || Ne plus pouvoir se nourrir (→ Héroïque, cit. 19). || Refus de se nourrir ⇒ Anorexie.
36 Pour se nourrir à l'économie en Amérique, on peut aller s'acheter un petit pain chaud avec une saucisse dedans, c'est commode, ça se vend au coin des petites rues, pas cher du tout.
Céline, Voyage au bout de la nuit, p. 187.
2 (1485). Par métaphore et fig. ⇒ Abreuver (s'), repaître (se). || Se nourrir d'illusions, de rêves. || Se nourrir de romans (→ Maladif, cit. 6). || Une idéologie (cit. 7) dont l'humanité se nourrira. || Passions dont l'âme se nourrit et s'empoisonne (cit. 17). || Le monde se nourrit d'un peu de vérité et de beaucoup de mensonges (→ Esprit, cit. 43). || Se nourrir de grec et de latin. ⇒ Apprendre.
37 (…) le cœur ne se nourrit point dans le tumulte du monde : les faux plaisirs lui rendent la privation des vrais plus amère, et il préfère sa souffrance à de vains dédommagements.
Rousseau, Julie ou la Nouvelle Héloïse, I, XXXIV.
38 Depuis assez longtemps il se nourrissait de poésie écrite et peinte, et il avait pu s'apercevoir que le commerce des abstractions n'était pas des plus substantiels.
Th. Gautier, Fortunio, « La toison d'or », II.
39 (…) ce cœur qui semble ne pouvoir se nourrir que de crainte ou d'espoir, et qui a tant de mal à se nourrir de ce qu'il a, alors même qu'il a tout.
Maeterlinck, la Sagesse et la Destinée, LVII.
♦ (Passif). || La jalousie se nourrit dans les doutes (→ Certitude, cit. 6). || « La chair des femmes se nourrit de caresses » (cit. 9).
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nourri, ie p. p. adj.
ÉTYM. (XIIe, n., « invité à une table »).
1 Vx. Élevé. || « Nourri dans le sérail » (→ Détour, cit. 1, Racine).
2 Alimenté. || Bien nourri (⇒ Gros); mal nourri (→ Filature, cit. 2). || Un rat des mieux nourris (→ Avent, cit. La Fontaine). || Race oisive et trop nourrie (→ Mangeur, cit. 3). || Logé (cit. 14) et nourri (→ 1. Être, cit. 100). || Pensionnaire logé, nourri, blanchi.
3 (1688, peint.; choses). Entretenu, continué ou renforcé. || Feu, incendie nourri. Spécialt. (1771). || Fusillade nourrie, feu, tir nourri. ⇒ Dense. — Son nourri (→ Médium, cit. 1). — Conversation nourrie. — Style nourri, raisonnement nourri. ⇒ Abondant, riche. || Manière large et nourrie.
40 Il n'y a peut-être pas dans la prose française de narration plus nourrie, plus ample et mieux tenue que celle de Saint Julien.
A. Thibaudet, Gustave Flaubert, p. 179.
41 (…) je n'entendais plus guère de conversations aussi solides et aussi nourries.
A. Maurois, Climats, I, VIII.
♦ Couleurs nourries, bien empâtées. || Trait nourri. || Lignes bien nourries (→ Forme, cit. 28).
♦ Vx. || Fruits, grains nourris, bien nourris, gros, pleins, remplis.
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CONTR. Sevrer. — Affamer, priver. — Couper (les vivres). — Éteindre (le feu). — Chasser, écarter (un sentiment). — Jeûner. — Maigre, sec.
DÉR. Nourrissage, nourrissant, nourrissement, nourrisseur. — V. Nourrisson, nourriture.
HOM. V. Nourricier, nourrissant, nourrisson.
Encyclopédie Universelle. 2012.