1. affecter [ afɛkte ] v. tr. <conjug. : 1>
• XIVe; lat. affectare « rechercher, poursuivre »
1 ♦ Prendre, adopter (une manière d'être, un comportement) de façon ostentatoire, sans que l'intérieur réponde à l'extérieur. ⇒ afficher, 1. étaler, feindre, simuler. Quoique très ému, « il affecta [...] la plus grande gaieté » (A. Daudet). « il affectait de garder une attitude insouciante » (Barrès)(cf. Faire semblant de).
2 ♦ (XVe) Vx Rechercher, ambitionner plus que tout. « Soupçonné par le peuple d'affecter la tyrannie » (Bossuet).
♢ Vx Aimer, employer avec prédilection. ⇒ affectionner. « ceux qui affectent ce langage » (Molière) . Affecter de : chercher à.
3 ♦ Par ext. (XVIIIe) (Choses) Revêtir volontiers, habituellement (une forme). « Les agates n'affectent pas autant que les cailloux la forme globuleuse » (Buffon). Fièvre affectant le type intermittent.
affecter 2. affecter [ afɛkte ] v. tr. <conjug. : 1>
• 1551; du lat. médiév. affectatus (→ 1. affectation), latinisation prob. de l'a. fr. afaitier → affaitement
1 ♦ Destiner, réserver à un usage ou à un usager déterminé. Les crédits que le budget a affectés à l'Éducation nationale. ⇒ imputer.
2 ♦ (1899; cf. 1. affectation) Procéder à l'affectation de (qqn). ⇒ désigner, nommer. « Il s'est fait affecter à la météo » (Martin du Gard).
⊗ CONTR. Désaffecter.
affecter 3. affecter [ afɛkte ] v. tr. <conjug. : 1>
• XVe; du lat. affectus → affect
1 ♦ Toucher (qqn) par une impression, une action sur l'organisme ou le psychisme. Tout ce qui affecte notre sensibilité. Être affecté d'une maladie, d'une infirmité, atteint. ⇒ affliger.
♢ Toucher en faisant une impression pénible. ⇒ émouvoir, frapper. Son échec l'a beaucoup affecté. — Pronom. S'affliger, souffrir. « Il s'affecterait de mon inconstance » (Rousseau).
2 ♦ Météorol. Exercer son action sur (qqch.). Les perturbations qui affectent le nord de la France.
3 ♦ (XVIIIe) Math. Modifier (une quantité) par un signe, un coefficient. Un nombre négatif est un nombre affecté du signe -.
● affecter verbe transitif (latin affectare, assigner) Destiner quelque chose à un usage particulier : Affecter un local à des représentations théâtrales. Désigner quelqu'un pour occuper une fonction, un poste : Affecter une recrue au service des transmissions. Accompagner une variable d'un signe, en particulier pour en modifier le sens, la valeur. En informatique, attribuer une valeur à une variable. ● affecter (homonymes) verbe transitif (latin affectare, assigner) ● affecter (synonymes) verbe transitif (latin affectare, assigner) Destiner quelque chose à un usage particulier
Synonymes :
- assigner
- imputer
- réserver
Désigner quelqu'un pour occuper une fonction, un poste
Synonymes :
- choisir
- désigner
- nommer
Contraires :
- déplacer
- muter
- renvoyer
En informatique, attribuer une valeur à une variable.
Synonymes :
- assigner
● affecter
verbe transitif
(latin affectare, chercher à atteindre)
Montrer avec ostentation une manière d'agir, d'être ou de penser qui n'est pas naturelle ; feindre des sentiments : Il affecte un air indifférent, en fait, il est très ému.
Prendre telle ou telle forme : Les cristaux affectent des formes géométriques.
● affecter
verbe transitif
(latin affectare, avec influence de affectus, sentiment)
Toucher, atteindre, concerner quelqu'un ou quelque chose, en parlant de quelque chose de pénible : Épidémie qui affecte toute une population.
Exercer sur quelqu'un, une partie du corps, une action fâcheuse : La paralysie a affecté tout le côté droit.
Toucher quelqu'un, l'émouvoir, le peiner : La nouvelle de sa mort nous a beaucoup affectés.
● affecter (homonymes)
verbe transitif
(latin affectare, chercher à atteindre)
● affecter (synonymes)
verbe transitif
(latin affectare, chercher à atteindre)
Montrer avec ostentation une manière d'agir, d'être ou de penser...
Synonymes :
- afficher
- faire montre de
- faire parade de
- montrer
- se piquer de
- simuler
Prendre telle ou telle forme
Synonymes :
- offrir
- présenter
- revêtir
● affecter (difficultés)
verbe transitif
(latin affectare, avec influence de affectus, sentiment)
→ affectionner
● affecter (homonymes)
verbe transitif
(latin affectare, avec influence de affectus, sentiment)
● affecter (synonymes)
verbe transitif
(latin affectare, avec influence de affectus, sentiment)
Toucher, atteindre, concerner quelqu'un ou quelque chose, en parlant de quelque chose...
Synonymes :
- frapper
- toucher
Exercer sur quelqu'un, une partie du corps, une action fâcheuse
Synonymes :
Toucher quelqu'un, l'émouvoir, le peiner
Synonymes :
- affliger
- frapper
- troubler
affecter
v. tr.
d1./d Destiner (qqch) à un usage. Affecter un véhicule au transport des denrées.
d2./d Donner une affectation à (qqn). On a affecté ce fonctionnaire à un poste plus intéressant.
|| (Afr. subsah.) (S. comp. de lieu.) Nommer à un poste. Il serait temps d'affecter ce jeune instituteur.
d3./d (Afr. subsah.) Syn. de muter.
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affecter
v. tr.
d1./d Feindre. Affecter la modestie. Il affecta de prendre pour argent comptant tous ces mensonges.
d2./d Prendre (une forme, une apparence). Les cristaux de sel marin affectent la forme cubique.
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affecter
v. tr.
d1./d Mettre dans une certaine disposition; influer, agir sur (l'esprit, les sens). Ces sons affectent désagréablement l'oreille.
d2./d Causer une impression pénible, de la peine. Ce deuil m'affecte douloureusement.
|| v. Pron. S'affliger, souffrir moralement de. Ce malade s'affecte beaucoup de son état.
d3./d MATH Munir de, adjoindre à, afin d'obtenir une variation. Affecter un nombre d'un coefficient, d'un exposant.
I.
⇒AFFECTER1, verbe trans.
A.— Rare, vieilli. [L'obj. désigne une chose] Montrer une grande prédilection pour, s'intéresser vivement à :
• 1. ... ce nom de Caracalla, emprunté d'un vêtement gaulois que le fils de Sévère affectoit.
F.-R. DE CHATEAUBRIAND, Études historiques, 1831, p. 106.
• 2. ... il avait à se faire un nom [Stenka Razine] ... Ce fut la politique de César, qui, avant d'affecter l'empire, passa huit ans en Gaule à guerroyer pour former ses invincibles légions.
P. MÉRIMÉE, Les Cosaques d'autrefois, 1865, p. 306.
B.— Recherché. [L'obj. désigne une forme phys., un type mor. ou soc.] Prendre nettement (telle forme, telle figure, etc.) :
• 3. Ces îles sont un amas de rochers qui affectent toutes sortes de figures; ...
Voyage de La Pérouse autour du monde, t. 2, 1797, p. 375.
• 4. La côte que nous venons de décrire (...) affecte une direction sensiblement Nord et Sud...
L. DE FREYCINET, Voyage de découverte aux terres australes, 1815, pp. 66-67.
• 5. C'est seulement avec le christianisme que le mariage affecta un autre caractère.
É. DURKHEIM, De la Division du travail social, 1893, p. 185.
• 6. ... il suffit ici d'un fil maintenu ou coupé pour que la vie affecte la forme sociale ou la forme individuelle.
H. BERGSON, L'Évolution créatrice, 1907, p. 261.
C.— Lang. cour. [L'obj. désigne une attitude ou une qualité phys. ou mor.] Adopter (une attitude) avec un certain degré d'ostentation et parfois d'insincérité. Synon. afficher, simuler.
1. [L'obj. est un nom abstr.] :
• 7. Là je voudrois te voir, telle que je t'ai vue,
De ta molle fourrure élégamment vêtue,
Affectant l'air distrait, jouant l'air endormi,
Épier une mouche, ou le rat ennemi, ...
J. DELILLE, L'Homme des champs, 1800, p. 123.
• 8. La marquise paraissait souffrante : elle avait les yeux battus. Cependant elle a affecté beaucoup de gaieté et a causé un peu de toutes choses. Puis, sans affectation, elle a demandé au major quel était ce jeune homme qu'il lui avait présenté et qu'elle avait revu chez la vicomtesse G...
P.-A. PONSON DU TERRAIL, Rocambole, t. 2, Le Club des valets de cœur, 1859, p. 181.
• 9. Il affectait avec ses collègues un ton d'égalité courtoise. Mais au fond, il avait pour eux un mépris tranquille et sans bornes.
R. ROLLAND, Jean-Christophe, La Révolte, 1907, p. 417.
• 10. Quelque mépris que j'eusse pour mon entourage, je m'étonnais de n'y rencontrer pas un qui fût à tout le moins capable d'apprécier l'habileté dont je faisais preuve en affectant, au plus fort de ma tragique passion, des dehors de mauvais sujet en quête d'aventures divertissantes et passagères.
G.-V. MILOSZ, L'Amoureuse initiation, 1910, p. 196.
• 11. Quand je parlais d'Albertine avec Andrée, j'affectais une froideur dont Andrée fut peut-être moins dupe que moi, de sa crédulité apparente.
M. PROUST, À la recherche du temps perdu, À l'ombre des jeunes filles en fleurs, 1918, p. 927.
• 12. Ne pas poser devant soi-même. Id est :ne pas affecter les qualités et les vertus que l'on souhaiterait d'avoir mais que l'on n'a pas.
A. GIDE, Journal, 1927, p. 851.
• 13. ... la vieille châtelaine affectait volontiers des convictions voltairiennes, bien qu'elle continuât d'entretenir avec les curés du voisinage des relations qui ne semblaient pas seulement de pure courtoisie.
G. BERNANOS, Un Crime, 1935, p. 799.
— [L'obj. est un pronom neutre] :
• 14. ... quand nous nous rencontrions, son air ennuyé, son affectation provinciale de ne rien affecter et d'éviter l'allusion, étaient réjouissants.
R. ABELLIO, Heureux les pacifiques, 1946, p. 197.
Rem. 1. Les idées d'ostentation et d'insincérité sont étroitement mêlées; l'idée d'ostentation est cependant dominante, voire seule présente, dans l'ex. 14. 2. Syntagmes rencontrés (verbe + subst.). Les subst. les plus fréq. sont : air (ex. 7 et, en outre F.-R. DE CHATEAUBRIAND, Les Natchez, 1826, p. 482; É. ZOLA, L'Œuvre, 1886, p. 78; A. FRANCE, L'Orme du mail, 1897, p. 192; ID., Le Crime de Sylvestre Bonnard, 1881, p. 327; H. QUÉFFELEC, Le Recteur de l'île de Sein, 1944, p. 203), allures (R. ROLLAND, Jean-Christophe, La Foire sur la place, 1908, p. 717), calme (É. ZOLA, Germinal, 1885, p. 1512; ID., L'Argent, 1891, p. 321), contenance (H. DE BALZAC, Eugénie Grandet, 1834, p. 63), façons de parler (E. MOSELLY, Terres lorraines, 1907, p. 40), gaieté (ex. 8 et, en outre, E.-D. DE LAS CASES, Le Mémorial de Sainte-Hélène, t. 1, 1823, p. 477; H. DE BALZAC, La Cousine Bette, 1846, p. 155), indifférence (E.-J. DELÉCLUZE, Journal, 1828, p. 158; ERCKMANN-CHATRIAN, L'Ami Fritz, 1864, p. 120; É. ZOLA, Nana, 1880, p. 1304), sang-froid (STENDHAL, L'Abbesse de Castro, 1839, p. 158; G. LEROUX, Rouletabille chez le tsar, 1912, p. 106), ton (ex. 9 et, en outre, M. PROUST, À la recherche du temps perdu, Du côté de chez Swann, 1913, p. 253; R. MARTIN DU GARD, Les Thibault, Épilogue, 1940, p. 801), tranquillité (R. ROLLAND, Jean-Christophe, Antoinette, 1908, p. 869).
2. [Le compl. est un verbe à l'inf.] Affecter de :
• 15. ... je vis tout cela, et n'en fis pas semblant; j'affectai même de n'avoir pas fait attention à ce qui avait été dit.
G. SÉNAC DE MEILHAN, L'Émigré, 1797, p. 1640.
• 16. Il mène Mme Martineau à la messe et reste à la porte, en affectant de ne jamais mettre le pied dans l'église, ce qui est un sujet de scandale chaque dimanche.
É. ZOLA, Son Excellence Eugène Rougon, 1876, pp. 250-251.
• 17. Ma femme se moque de moi sans se cacher. Solange affecte de prendre mes idées au sérieux, mais je sais bien que c'est uniquement par gentillesse.
H. DE MONTHERLANT, Pitié pour les femmes, 1936, p. 1176.
• 18. Ce n'était pas un de ces orages comme il en éclate au fond des cœurs et que l'on peut ne pas voir, que l'on peut affecter de ne pas voir ou même dédaigner de voir.
G. DUHAMEL, Chronique des Pasquier, Suzanne et les jeunes hommes, 1941, p. 213.
Rem. Syntagmes. Les verbes à l'inf. le plus fréquemment notés sont : croire (J. GUÉHENNO, Jean-Jacques, En marge des « Confessions », 1948, p. 67), douter (É. ZOLA, La Terre, 1887, p. 445; Ch. DE GAULLE, Mémoires de guerre, L'Unité, 1956, p. 5), ne pas entendre (G. BERNANOS, Un Crime, 1935, p. 781), ignorer (J. PÉLADAN, Le Vice suprême, 1884, p. 300; Ch. MAURRAS, Kiel et Tanger, 1914, p. 220; Ch. DE GAULLE, Mémoires de guerre, L'Appel, 1954, p. 14), parler (J. GUÉHENNO, op. cit. p. 125), savoir (É. ZOLA, L'Argent, 1891, p. 251), se taire (ALAIN-FOURNIER, Le Grand Meaulnes, 1913, p. 19), voir (Ch. DE GAULLE, Mémoires de guerre, L'Unité, 1956, p. 412), ne pas voir (J. GUÉHENNO, op. cit. p. 162).
II.
⇒AFFECTER2, verbe trans.
I.— Lang. commune
A.— Emploi trans. Produire un effet sur quelqu'un ou quelque chose de manière à y déterminer une action ou une modification. Synon. atteindre, impressionner, toucher.
1. [L'obj. désigne une chose] Produire un effet (principalement physique) :
• 1. L'articulation est donc, suivant moi, une modification du son, qui n'en est ni la voix ni le ton, qui ne les altère point, et qui en diffère en ce qu'elle n'affecte le son qu'au moment où il commence, et qu'ensuite elle ne s'y fait plus remarquer pendant tout le temps qu'il se prolonge. C'est proprement la manière dont le son commence à nous affecter, le résultat de la manière dont il commence à être produit.
A.-L.-C. DESTUTT DE TRACY, Éléments d'idéologie, Grammaire, 1803, p. 339.
• 2. La baisse réelle peut être générale, et affecter tous les produits à la fois, comme elle peut être partielle, et n'affecter que certaines choses seulement.
J.-B. SAY, Traité d'économie politique, 1832, p. 325.
• 3. Le sujet de la sensation n'est ni un penseur qui note une qualité, ni un milieu inerte qui serait affecté ou modifié par elle, il est une puissance qui co-naît à un certain milieu d'existence ou se synchronise avec lui.
M. MERLEAU-PONTY, Phénoménologie de la perception, 1945, p. 245.
• 4. Des transformations analogues pourraient, quelques années plus tard, affecter le Commissariat à l'énergie atomique français au profit de l'Électricité de France et de la direction des fabrications d'armements du ministère des armées.
B. GOLDSCHMIDT, L'Aventure atomique, 1962, p. 267.
— Spéc., au fig. Produire un effet pénible sur, nuire à :
• 5. Mon fils François a commis un pas de clerc pour une augmentation de capital. Là-dessus les gens brodent. Ils en seront pour leurs frais. Ça n'affecte en rien notre position et le papa Schoudler est là, derrière, soyez tranquille.
M. DRUON, Les Grandes familles, t. 2, 1948, p. 88.
2. [L'obj. désigne une pers.]
a) Produire un effet de nature physique, faire une impression sur :
• 6. Je reçois la sensation de la couleur jaune : je suis affecté; mais cela ne m'apprend rien. J'éprouve seulement une certaine modification accompagnée de plaisir ou de peine.
A.-L.-C. DESTUTT DE TRACY, Éléments d'idéologie, Idéologie proprement dite, 1801, p. 55.
• 7. Nous attribuons l'effet singulier qu'on nomme sensation ou sentiment, à une partie affectée de notre corps; aucune des matières qui composent cette partie affectée ne sent réellement et ne sauroit sentir. Mais l'effet très-remarquable auquel on donne le nom de sensation, et celui de douleur, lorsqu'il est trop intense, est le produit de la fonction d'un système d'organes très-particulier, dont les actes s'exécutent selon les circonstances qui les provoquent.
J.-B. LAMARCK, Philosophie zoologique, t. 2, 1809, p. 146.
• 8. Les fibres cérébrales affectées par les sensations de joie ou de peine paraissent comme détendues chez l'artiste, par ces excès d'émotions intellectuelles que nécessite, chaque jour, le culte de l'art...
Ph.-A.-M. DE VILLIERS DE L'ISLE-ADAM, Contes cruels, Sentimentalisme, 1883, p. 189.
• 9. ... considérons une sensation colorée rouge affectant un certain point de la rétine; et d'autre part une sensation colorée bleue affectant le même point de la rétine. Il faut bien que nous ayons quelque moyen de reconnaître que ces deux sensations, qualitativement différentes, ont quelque chose de commun.
H. POINCARÉ, La Valeur de la science, 1905, p. 91.
Cf. également ex. 1.
— Spéc. Produire un effet pénible :
• 10. La fièvre est une maladie qui affecte tout le système; il est à craindre que les poumons ne soient affectés.
NYSTEN 1814-20.
• 11. L'organisme est devenu plus susceptible aux maladies dégénératives. Il est affecté par les chocs nerveux et mentaux auxquels il est continuellement soumis, par les substances toxiques que fabriquent nos organes dans leurs désordres fonctionnels, par celles qui pénètrent en lui avec les aliments et avec l'air, par la carence des fonctions physiologiques et mentales essentielles.
A. CARREL, L'Homme, cet inconnu, 1935, p. 135.
• 12. L'inhibition peut n'affecter que la surface du geste, et rester un masque. Mais elle peut aussi être prise à son jeu et conduire progressivement ceux qu'elle frappe à l'apathie affective et motrice, et à l'inémotivité totale...
E. MOUNIER, Traité du caractère, 1946, p. 240.
Rem. La valeur péj. du verbe (effet pénible) résulte ici plus nettement du cont. que dans le cas d'un effet psychique ou mor.
— Par métaph. :
• 13. ... ces prétendus gains peuvent être, bien ou mal, à tort ou à raison, appréciés par des calculs numériques; tandis que l'inconvénient, tandis que la perte, affectant plusieurs parties du corps social, et l'affectant d'une manière indirecte, compliquée et générale, échappent entièrement au calcul.
J.-B. SAY, Traité d'économie politique, 1832, p. 206.
b) Produire un effet de nature psychique ou morale :
• 14. Au sortir de la Convention, je retourne au Vieux Cordelier; et selon que je suis affecté de la séance, une teinte de gaîté ou de tristesse se répand sur la page que j'écris...
C. DESMOULINS, Le Vieux Cordelier, 1793, p. 147.
— Spéc. Produire un effet pénible :
• 15. Les maladies vous découragent, l'infortune vous abat; les troubles politiques vous effraient, les révolutions de la nature vous glacent d'épouvante. Portez votre pensée sur les vrais maux qui vous assiègent, et que vous avez tous à supporter, et tous ces malheurs ne vous affecteront plus.
L.-C. SAINT-MARTIN, L'Homme de désir, 1790, p. 66.
• 16. Le sacrifice, volontaire ou forcé, résultant de l'impôt, affecte le contribuable en sa qualité de producteur, lorsqu'il altère ses profits, c'est-à-dire ses revenus; et il l'affecte en sa qualité de consommateur, lorsqu'il augmente ses dépenses en renchérissant les produits.
J.-B. SAY, Traité d'économie politique, 1832, p. 537.
• 17. Depuis quelque temps j'ai tant de chagrins qu'une jambe cassée est une bagatelle, près des autres. Cet accident-là n'affecte ni le cœur, ni les nerfs, ni l'esprit; ...
G. FLAUBERT, Correspondance, 1879, p. 198.
• 18. Georges ne me parle pas ainsi, madame; ses espérances sont restées les mêmes. La perte de ma dot ne l'a pas affecté une minute et je ne le trouve que plus impatient de m'épouser.
H. BECQUE, Les Corbeaux, 1882, III, 2, p. 200.
• 19. La mort de grand'mère ça l'avait beaucoup affectée. Elle en revenait pas! ...
L.-F. CÉLINE, Mort à crédit, 1936, p. 127.
Rem. Quand l'effet est psychique ou mor., la valeur péj. l'emporte plus nettement que dans le cas où l'effet est principalement phys.
B.— Emploi pronom. S'affecter. [En parlant de pers.] Se laisser gagner par un sentiment pénible (cf. A 2).
— S'affecter de qqc. (qui est cause de l'impression pénible) :
• 20. ... papa est si sensible, il s'affecte de si peu de chose, que je n'oserais jamais lui dire tout ce qui se passe en moi.
M. DE GUÉRIN, Correspondance, 1828, p. 20.
• 21. Malgré sa patience, le brave homme traversait une crise de découragement. Il s'affectait de certaines injustices, il trouvait son dévouement inutile.
R. ROLLAND, Jean-Christophe, Les Amies, 1910, p. 1132.
— Emploi abs. :
• 22. Le milieu social, la profession et la caste sont pour nombre d'entre eux des motifs suffisants de s'attribuer des sentiments et des opinions, jusqu'à des raisons de s'affecter et de se réjouir, des plaisirs et des peines.
J. DE GAULTIER, Le Bovarysme, 1902, p. 27.
• 23. ... il découvrait en lui (...) une ferveur fébrile, un tempérament ardent, bilieux, facile à s'affecter et sensible à l'excès à tout ce qui l'affecte.
J. GUÉHENNO, Jean-Jacques, Grandeur et misère d'un esprit, 1952, p. 86.
II.— MATH. Affecter d'un signe une quantité, un nombre. Munir une quantité quelconque d'un signe (signe plus ou moins, coefficient, etc.) de manière à la modifier par cette marque.
— P. ext., vx. Affecter (un résultat chiffré) d'une erreur de (tant ou tant) :
• 24. ... le medium de nos résultats, pour la détermination de la longitude par l'observation des distances de la lune au soleil, n'a pu, dans aucun cas, être affecté d'une erreur de plus d'un quart de degré; ...
Voyage de La Pérouse autour du monde, t. 2, 1797, p. 286.
— Au fig. Affecter une chose d'un certain coefficient. La qualifier comme comportant ou impliquant un certain degré de (+ subst. abstr. ou adj.) :
• 25. Plus on examine ces faits en eux-mêmes, moins on trouve qu'il y ait lieu de leur infliger un blâme quelconque ou de les affecter du moindre coefficient de mélancolie.
Ch. MAURRAS, L'Avenir de l'intelligence, 1905, p. 51.
• 26. ... l'équation personnelle du président affectait le problème d'un coefficient rien moins que favorable.
Ch. DE GAULLE, Mémoires de guerre, L'Appel, 1954, p. 182.
Rem. 1. Emploi attesté dep. BESCH. 1845; ignoré des dict. de l'Ac. Lar. 19e relève la loc. équation affectée, c'est-à-dire « élevée à plusieurs puissances différentes » mais précise qu'elle n'est plus usitée. 2. À l'époque mod. la constr. vire parfois à celle qui est analysée sous affecter3 « attribuer qqc. à qqc. »; cette dernière constr. est notamment à supposer sous affectation d'un coefficient à, qui a pour origine affecter un coefficient (un salaire, etc.), qui lui-même transpose affecter un salaire d'un coefficient (cf. affectation2, 3, rem.).
III.
⇒AFFECTER3, verbe trans.
1. [Le compl. est un inanimé] Affecter qqc. à qqc.
a) Vx. Attribuer (une fonction à qqc.) :
• 1. ... des mots placés, et même avec raison dans les mêmes cathégories, ont des fonctions tout-à-fait différentes, tandis que d'autres rangés dans différentes classes, en remplissent souvent de semblables; que quelques-uns appartiennent à deux classes, et que quelques autres ne jouent jamais le rôle affecté à ceux de la classe où on les a rangés; ...
A.-L.-C. DESTUTT DE TRACY, Éléments d'idéologie, Grammaire, 1803, p. 46.
b) Attribuer (une chose à une fonction, à un usage précis) :
• 2. ... le créancier ne pourra être tenu de se dessaisir du gage avant d'être entièrement payé de l'une et de l'autre dette, lors même qu'il n'y aurait eu aucune stipulation pour affecter le gage au paiement de la seconde.
Code civil, 1804, p. 374.
• 3. Un portier qui demeure dans cette cour, et dont la loge touche la porte du cloître, ouvre aux personnes du dehors un couloir par lequel on communique avec celles de l'intérieur au moyen d'un tour où l'on dépose les paquets, et de quatre parloirs grillés pour les visites. Le premier est plus spécialement affecté aux visites que reçoivent les religieuses; le second est destiné aux leçons particulières; le troisième, qui est le plus grand, est celui où les pensionnaires voient leurs parents; ...
G. SAND, Histoire de ma vie, t. 3, 1855, p. 86.
• 4. ... la forme poétique a été pendant des siècles affectée au service des enchantements.
P. VALÉRY, Variété 5, 1944, p. 154.
2. [Le compl. est une pers.] Affecter qqn à, dans. Le placer, par une décision consécutive à un examen de la situation, dans un emploi, dans une fonction spécialisés :
• 5. On affectera au soin des vergers, des fruitiers, des viviers, des colombiers et du menu bétail, les sept huitièmes des femmes devenues désœuvrées par la simplification des travaux du ménage.
Ch. FOURIER, Le Nouveau monde industriel, 1830, p. 19.
• 6. ... « Article premier : « M. Varincourcq, chef de bureau à la direction générale des dons et legs, spécialement affecté au service des hypothèques, est nommé chef du bureau des legs, en remplacement de M. de La Hourmerie, décédé. »
G. COURTELINE, Messieurs-les-Ronds-de-Cuir, 1893, 6e tabl., 2, p. 236.
• 7. Pas un seul Rhénan qui ne soit affecté à quelque chose, spécialisé.
M. BARRÈS, Mes Cahiers, t. 12, 1919-1920, p. 154.
• 8. ... je franchis le corps de garde. Je fus happé, affecté, versé au 2e peloton du 1er escadron, conduit à ma chambrée, ...
J. DE PESQUIDOUX, Le Livre de raison, t. 1, 1925, p. 208.
— En partic., dans l'armée. [L'obj. désigne un militaire devant être employé dans un service en dehors de la zone d'opérations] :
• 9. À la suite d'une appendicite mal guérie, on l'avait « versé » dans l'auxiliaire, et affecté à un ministère, à Paris.
H. DE MONTHERLANT, Le Songe, 1922, p. 9.
• 10. La guerre survint; Justin, qui terminait à Paris ses études de médecine, fut mobilisé, blessé d'un éclat d'obus, et affecté dans un hôpital de Paris.
M. ARLAND, L'Ordre, 1929, p. 57.
— P. ext. [En parlant d'un être quelconque] Affecter à (une classe, une espèce). L'y classer en vertu d'une considération rationnelle :
• 11. Un critère morphologique indique la possibilité d'affecter un être donné à telle ou telle espèce.
PLANTEFOL, Cours de botanique et de biologie végétale, t. 2, 1931, p. 63.
Rem. 1. On voit que le compl. est presque toujours introd. par la prép. à; mais affecter3 (du moins son emploi admin. et surtout milit. « donner une affectation ») porte une richesse de sens qui rend possibles l'usage de la prép. dans (cf. ex. 10) et même l'emploi abs. (cf. ex. 8). 2. Ex. 1 : affecter « assigner ». 3. Ex. 11 : affecter « classer ». 4. L'obj. inanimé de l'affectation est fréquemment une somme d'argent, qui peut être exprimée en chiffres : crédit (J. RENARD, Journal, 11 mai 1909, p. 1241), fonds (F. DE MIOMANDRE, Écrit sur de l'eau, 1908, p. 108), quotité saisissable (H. DE BALZAC, La Cousine Bette, 1846, p. 272), revenu (E. ABOUT, La Grèce contemporaine, 1854, p. 312), somme (Ch. FOURIER, Le Nouveau monde industriel, 1830, p. 82), 100 000 francs (E. RENAN, L'Avenir de la science, 1890, p. 218), 80 000 drachmes (E. ABOUT, op. cit., p. 125).
Affecter et ses dér. — Affecter, c'est conférer (parfois, à soi-même) une modalité ou une modification. Conforme à une volonté, la modification sera susceptible d'une volonté contraire (affecter1 et -3); échappant à toute volonté, elle pourra être ressentie péniblement (affecter2). Les critères de volonté et de pénibilité, ainsi que la présence d'un syst. anton., permettront donc la distinction. Affecter, ce peut être prendre une forme ou une attitude, par affectation de qqc. (affecter1) ou affection pour qqc. ou qqn (affecter1); celui qui fait preuve d'affectation est qualifié d'affecté; celui qui éprouve de l'affection (à laquelle, en ce sens, s'oppose la désaffection) est dit affectueux ou encore affectionné. Affecter3 signifie « conférer une destination à un homme ou à une chose »; la chose à laquelle on peut conférer une affectation (à laquelle, en ce sens, s'oppose désaffectation) sera parfois (dans la lang. jur.) dite affectable. Enfin (cf. affecter2), affecter peut signifier « exercer une atteinte quelconque », que cette atteinte soit forcément pénible (affection, affecté) ou qu'elle puisse être ressentie de différentes façons (affect, affectif) dont la douleur n'est pas forcément absente.
Prononc. ET ORTH. — 1. Forme phon. :[], j'affecte []. — Rem. FÉR. Crit. t. 1 1787 écrit affecter ou afecter avec un seul f. Enq. :/afe2kt/. Conjug. parler. 2. Dér. et composés. — Affect- : affectable (cf. Lar. encyclop.), affectant, affectataire, affectation, affecté, affectibilité, affectif, affection, affectionnativité (cf. Lar. 19e), affectionné, affectionnément, affectionner, affectionnivité, affectivement, affectivité, affectivo-moteur, affectueusement, affectueux, affectuosité.
Étymol. ET HIST. — 1. 1327 « prendre une manière d'agir, seulement en apparence, feindre » (J. DE VIGNAY, Mir. hist., 20, 85, éd. 1531 ds QUEM. t. 1 1959 : Lesquelles [vertus] s'aucun veult assemblement affecter, il n'en peult nulle entierement consuyvre); 2. a) 1393 « rechercher, désirer » (Le Menagier de Paris, éd. La Société des Bibliophiles françois, I, 225 ds T.-L. : Il est signe de gentil cuer, quant il affecte et desire bon nom et bonne fame); b) 1470 « avoir une prédilection pour » (Le Livre de la discipline d'amour divine, f 69 b, éd. 1537 ds VAGANAY, R. Ét. Rab., IX, 299 : Elle est... aux biens temporelz trop affectee); d'où « (d'un inanimé) avoir disposition à » (B. DE ST PIERRE, Ét. de la nat., 1 ds DG :Des arbres dans les climats de l'Inde affectent le port des herbes; 3. XVe s. « toucher par une impression physique ou morale » (CHASTELLAIN, Chronique, I, 64 ds QUEM. : Pour plus les affecter en son fait, se bailla spectacle a leurs yeux, et leur fit remonstrer la douloureuse et confuse mort de leur feu noble seigneur et prince son père), d'où p. anal., Ac. 1694 : On dit en termes de Medecine, La partie affectée, pour dire, La partie attaquée de quelque mal; 4. 1551 « imputer, réserver » (Lettres d'A. de Bourbon, p. 32, SHF ds Fr. mod., IV, p. 335 : De l'argent qui viendra de l'antree des dites terres... Je vous prie les mestre en vos coffres, car je les ay affectés pour mon parcq).
Empr. au lat. affectare « chercher à atteindre (qqc.) » attesté dep. PLAUTE, Aul., 575 ds TLL, 1181, 8, d'où 2; 1 dep. SÉNÈQUE, Suas., 3, 4, ibid., 1184, 6; 3 par influence de affection, ou du lat. affectus « sentiment »; 4 peut-être réfection d'apr. le lat. affectare, de l'a. fr. affaitier « préparer, dresser, disposer », voir affaiter, mais plus prob. empr. au lat. médiev. affectare « assigner » (1156, Constitutiones imperatorum, I, 159, 5 ds Mittellat. W. s.v., 350, 8 et ds NIERM. t. 1 1954-58 : libertatem habeant... ducatum affectandi cuicumque voluerint).
STAT. — Fréq. abs. litt. :1 865. Fréq. rel. litt. :XIXe s. : a) 2 681, b) 2 024; XXe s. : a) 3 343, b) 2 544.
BBG. — AC. CAN.-FR. 1968. — BAILLY (R.) 1969 [1946]. — BAR 1960. — BÉL. 1957. — BÉNAC 1956. — BONNAIRE 1835. — BRUANT 1901. — Canada 1930. — CAPUT 1969. — DUP. 1961. — DUPIN-LAB. 1846. — FOULQ.-ST-JEAN 1962. — GUIRAUD (P.). Le Champ morphosémantique du mot tromper. B. Soc. Ling. 1968, t. 63, n° 1, pp. 96-109. — Gramm. t. 1 1789. — GUIZOT 1864. — HANSE 1949. — KUHN 1931, p. 181. — LAF. 1878. — LAL. 1968. — LAV. Diffic. 1846. — NYSTEN 1814-20. — POPE 1961, § 745. — PRÉV. 1755. — RITTER (E.). Les Quatre dictionnaires français. Remarques lexicographiques. B. de l'Inst. nat. genevois. 1905, t. 36, pp. 341-342. — SARDOU 1877. — SOMMER 1882. — SPR. 1967. — Synon. 1818. — WEISE (G.). Maniera und pellegrino :zwei Lieblingswörter der italienischen Literatur der Zeit des Manierismus. Rom. Jahrb. 1950, t. 3, pp. 326-328.
1. affecter [afɛkte] v. tr.
ÉTYM. 1551; du lat. médiéval affectatus (→ 1. Affectation), latinisation probable de l'anc. franç. afaitier « arranger, disposer »; du lat. afficere, d'où, par le supin affectum, affectare (différent du verbe classique affectare).
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1 Appliquer à un certain usage. ⇒ Attribuer, consacrer, destiner (à). || Affecter un édifice à un service public, une résidence à qqn. || Affecter un immeuble à une hypothèque, une somme d'argent à l'extinction d'une dette. ⇒ Imputer (sur). — Au participe passé :
1 Il fallait donc qu'elle eût un séjour affecté.
La Fontaine, Fables, VI, 20.
2 (1928; → 1. Affectation). Admin. (surtout milit.). Désigner une personne pour remplir une fonction, occuper un poste. ⇒ Désigner, nommer. || Affecter qqn à un poste, à une fonction, à une unité.
2 Oh, il sait se débrouiller ! Il s'est fait affecter à la météo (…)
Martin du Gard, les Thibault, VIII, 10.
3 Ranger (dans une classe, une espèce). || Affecter une plante à telle espèce. ⇒ Classer.
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affecté, ée p. p. adj.
♦ || Les sommes déjà affectées et les sommes encore disponibles. — Les personnes affectées à ce poste.
♦ N. || Les affectés. || Affecté spécial : homme mobilisable, attaché à un emploi civil en cas de guerre.
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CONTR. Désaffecter. — (De 2.) Déplacer, muter.
DÉR. Affectable, affectataire. — V. 1. Affectation.
HOM. 2. Affecter, 3. affecter.
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2. affecter [afɛkte] v. tr.
ÉTYM. XIVe; du lat. affectare « chercher à atteindre, poursuivre, ambitionner », d'où « chercher à paraître, feindre ».
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1 Vx. Rechercher avec ambition, aspirer à.
1 L'empire de la mer que leur république affectait.
Bossuet, Disc. sur l'Hist. universelle, I, 8.
2 (XVIIIe). Mod. (Sujet n. de chose). Avoir une disposition à prendre telle ou telle forme. || Le sel marin affecte la forme cubique. || Cette maladie affecte des formes bizarres.
3 Vx. Avoir une prédilection excessive pour; prendre, par ostentation ou singularité (une manière d'être, d'agir, de parler, qui n'est pas naturelle). || Affecter de grands airs : faire l'important. ⇒ Plastronner, pontifier. || Affecter un genre : se donner un genre, jouer à. ⇒ Composer (se), étudier (s'). || Il affectait un air froid et distant.
2 Elle affecte toujours un ton de voix languissant et niais (…)
Molière, Critique de l'École des femmes, II.
3 La plupart de ceux qui affectent ce langage savent bien eux-mêmes qu'il est ridicule.
Molière, Critique de l'École des femmes, I.
4 Leur sévérité mystérieuse et leurs grimaces affectées (…) Les mines qu'elles affectèrent durant toute la pièce (…)
Molière, Critique de l'École des femmes, III.
5 (…) tout homme bien sage
Doit faire des habits ainsi que du langage,
N'y rien trop affecter, et sans empressement
Suivre ce que l'usage y fait de changement (…)
Molière, l'École des maris, I, 1.
♦ Pratiquer avec ostentation.
6 Il y a autant de faiblesses à fuir la mode qu'à l'affecter.
La Bruyère, les Caractères, XIII, 11.
♦ Affecter de… (et l'inf.).
a Vx. Chercher à…
7 Je serai fort ravi qu'on ne vous trouve point si belle, et vous m'obligerez de n'affecter point tant de la (le) paraître à d'autres yeux.
Molière, le Sicilien, VI.
b Mod. Prendre les apparences de…
8 On n'est jamais si ridicule par les qualités que l'on a que par celles que l'on affecte d'avoir.
La Rochefoucauld, Maximes, 289.
9 Il affectait (…) de paraître insensible, quoiqu'il ne fût que trop amoureux (…)
Molière, la Princesse d'Élide, II, Argum.
10 Et tout en mâchant sa douleur il affectait de garder une attitude insouciante et amusée (…)
M. Barrès, Un jardin sur l'Oronte, p. 214.
4 Feindre ou exagérer (un sentiment, une qualité). ⇒ Afficher, simuler. || Affecter la compassion : prendre un air affligé.
11 Quoique très ému lui-même, il affecta jusqu'au dernier moment la plus grande gaieté.
Alphonse Daudet, le Petit Chose, II, 9.
12 (…) assez pervers pour affecter les dehors d'une tendresse qu'il n'éprouvait pas.
France, le Petit Pierre, XXXIV.
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affecté, ée p. p. adj.
♦ Qui a de l'affectation. || Air affecté, manière affectée. ⇒ Affété (vx), apprêté, compassé, composé, contraint, étudié, factice, faux, feint, forcé, maniéré, outré, précieux, prétentieux, recherché. || Il est d'une douceur affectée. ⇒ Doucereux, emmiellé (vx), mielleux. || Une personne affectée, qui a des mines affectées. ⇒ Bégueule, collet (monté), façonnier, grimacier, minaudier, pimbêche, poseur, précieux. || Avoir une pudeur affectée. ⇒ Prude, pudibond. || Le savoir affecté d'un cuistre, d'un pédant. || Un langage, un style, un ton affecté. ⇒ Contourné, entortillé, maniéré, précieux.
13 La simplicité affectée est une imposture délicate.
La Rochefoucauld, Maximes, 289.
14 L'ignorance vaut mieux qu'un savoir affecté.
Boileau, Épîtres, IX, v. 101.
15 Une parole vaine et pleine d'ornements affectés (…)
Fénelon, Lettre à l'Académie, 4.
16 La fausse délicatesse de goût et de complexion n'est telle que parce qu'elle est feinte ou affectée.
La Bruyère, les Caractères, XI, 144.
17 (…) il a ce jargon de politesse doucereuse, pateline, et évidemment affectée qui caractérise nos gens de lettres (…)
Stendhal, Journal, 21 mai 1813, Œ. intimes, Pl., t. I, p. 1259.
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CONTR. (Du p. p.) Aisé, naturel, simple, sincère.
HOM. 1. Affecter, 3. affecter.
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3. affecter [afɛkte] v. tr.
ÉTYM. XVe; du lat. affectus. → Affect.
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1 Exercer une action sur, toucher (qqn) par une impression, une action sur (l'organisme, le psychisme). || Tout ce qui affecte notre sensibilité. — Agir sur (quelque chose).
1 (L'esprit de dictature) n'affecte pas seulement les choses de la politique.
G. Duhamel, Discours aux nuages, p. 50.
2 Un feu trop ardent, un trop grand bruit, une odeur trop forte (…) nous blessent et nous affectent désagréablement.
Buffon, Introd. à l'hist. nat. de l'homme.
♦ Méd. Exercer une action nuisible sur (un organe, l'organisme). ⇒ Affaiblir, altérer, attaquer, atteindre. || Usez modérément de ce remède : il affecte le cœur.
♦ Au passif. || Être affecté d'une maladie, atteint, touché.
3 Notre malade (…) est attaqué, affecté, possédé, travaillé de cette sorte de fièvre (…) Lesquels signes le dénotent très affecté de cette maladie.
Molière, Monsieur de Pourceaugnac, I, 8.
2 Exercer une action sur la sensibilité de (qqn). ⇒ Émouvoir, impressionner, toucher. || Les émotions qui l'affectent. Spécialt. Affliger, frapper. || Cette nouvelle, ce deuil, la mort de son frère l'a beaucoup affecté. — Au passif :
4 J'appellerai un sage un homme qui ne serait affecté dans la vie que par la souffrance physique.
Ed. et J. de Goncourt, Journal, t. I, p. 286.
5 Je devrais écrire à présent de quel cœur j'écoutais les déclarations du docteur et quelle prise j'offrais à l'alarme. Je ne me souviens pas d'en avoir été très affecté; soit que la mort ne m'effrayât pas beaucoup (…)
Gide, Si le grain ne meurt, II, I.
♦ Pron. S'affliger, souffrir. || Il s'affectait de toutes les injustices.
3 (XVIIIe). Math. || Affecter… de… : modifier (une quantité) en la dotant de (un signe, un coefficient). || Affecter un nombre d'un exposant. || Un nombre négatif est un nombre affecté du signe −.
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s'affecter v. pron.
♦ Réfl. (Personnes). || S'affecter de qqch. : y être sensible. || S'affecter des malheurs d'autrui.
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affecté, ée p. p. adj.
♦ Qui a reçu un effet physique, une impression. || La partie affectée de l'organisme. || Organes affectés. || « Mon estomac est affecté » (Maine de Biran, in T. L. F.). — Un homme profondément affecté.
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CONTR. (Du p. p.) Indifférent.
DÉR. Affectibilité.
HOM. 1. Affecter, 2. affecter.
Encyclopédie Universelle. 2012.