camp [ kɑ̃ ] n. m. I ♦
1 ♦ Zone provisoirement ou en permanence réservée pour les rassemblements de troupes de toutes armes, soit pour des manœuvres, des exercices (camp d'instruction), soit pour des essais, des études (camp d'expérimentation).⇒ campement. Reconnaissance, choix de l'emplacement d'un camp. Camp retranché, fortifié : zone fortifiée organisée défensivement en permanence. — Camp léger : camp provisoire remplaçant les casernes d'une garnison, utilisé pendant les périodes de formation des jeunes recrues. — Camp volant (cf. ci-dessous 5o).
♢ DE CAMP. Maréchal, aide de camp.
2 ♦ Camp (de prisonniers) : lieu d'hébergement où sont groupés des prisonniers de guerre. ⇒ oflag, stalag. Barbelés, miradors, baraquements d'un camp.
♢ Zone d'habitations sommaires édifiées pour une population qui fait l'objet d'une ségrégation. Camps de réfugiés. Les camps palestiniens. — Camps de déportés. (1906) CAMP DE CONCENTRATION : lieu où l'on groupe, en temps de guerre ou de troubles, les suspects, les étrangers, les nationaux ennemis. — Camps d'extermination, où furent affamés, suppliciés et exterminés certains groupes religieux ou ethniques (Juifs, Tziganes), politiques et sociaux. Les camps de la mort. Absolt Revenir des camps.
♢ Camp de travail. ⇒ goulag. Camp de redressement.
3 ♦ Espace de terrain où s'installent des campeurs. ⇒ camping. Feux de camp. Camp scout. Passer l'été en camp. Camp de vacances. Camp de nudistes; camp nudiste. — Par ext. Faire un camp dans les Alpes.
♢ CAMP DE BASE : campement où sont déposés matériel et ravitaillement et qu'utilisent des alpinistes, des explorateurs polaires comme relais ou position de repli.
4 ♦ (Symbole de la vie militaire) La vie du camp. Lit de camp : lit (pliant, léger) facilement transportable.
5 ♦ CAMP VOLANT : (vx) espace où est organisée une unité légère, très mobile, chargée d'inquiéter et d'observer l'ennemi. Par méton. Un camp volant : nomade vivant en permanence en campement mobile.
♢ Loc. Vivre en camp volant : vivre d'une manière instable, sans s'installer. « Vivre en camp volant à l'hôtel dans le désordre des malles à moitié défaites » (Loti). — Lever le camp; fam. fiche, ficher, foutre le camp : s'en aller, partir. ⇒ décamper. Fiche-moi le camp de là ! — La peinture fiche le camp, ne tient pas.
6 ♦ Groupe qui s'oppose à un autre, se bat contre lui. Le camp victorieux. « L'espoir changea de camp, le combat changea d'âme » (Hugo). — Constituer deux camps. Les joueurs sont distribués en deux camps (⇒ équipe) . Changer de camp. La balle est dans votre camp. — Entrer dans le camp adverse. ⇒ côté, faction, groupe, 1. parti. Choisir son camp. Passer dans le camp de l'opposition.
II ♦ (sous l'infl. de l'angl. amér. camp) Région. (Canada) Camp (d'été). ⇒ chalet, villa. Passer la fin de semaine au camp. — Camp de pêche, de chasse. ⇒ pavillon.
♢ Camp de bûcherons. ⇒ chantier.
⊗ HOM. Kan, khan, quand, quant.
● camp nom masculin (forme normande de champ) Lieu de stationnement ou d'instruction d'une formation militaire ; cette formation elle-même. Terrain de camping, ou tout lieu où l'on campe, où l'on s'établit de manière provisoire ; l'ensemble des installations et des personnes qui y vivent : Camp de vacances au bord d'un lac. Lieu où, pour des raisons exceptionnelles ou politiques, sont rassemblées et installées (de façon très sommaire) des personnes ; l'ensemble des installations et des personnes qui y vivent : Camp de réfugiés. Équipe, dans certains jeux ou sports : Diviser le groupe en deux camps. Groupe de personnes, de partis, de pays, etc., qui s'oppose par ses conceptions, son idéologie, ses intérêts, etc., en particulier sur le plan politique, à un autre groupe ou ensemble : Dans quel camp êtes-vous ? ● camp (citations) nom masculin (forme normande de champ) Jean-François Casimir Delavigne Le Havre 1793-Lyon 1843 Académie française, 1825 Silence au camp ! la vierge est prisonnière. Messéniennes André Malraux Paris 1901-Créteil 1976 La vraie barbarie, c'est Dachau ; la vraie civilisation, c'est d'abord la part de l'homme que les camps ont voulu détruire. Antimémoires Gallimard ● camp (expressions) nom masculin (forme normande de champ) Camp de concentration, camp dans lequel sont rassemblés, sous surveillance militaire ou policière, soit des populations civiles de nationalité ennemie, soit des prisonniers ou des détenus politiques, soit des groupes ethniques, sociaux ou religieux. (→ concentration.) Camp de la mort, d'extermination, durant la Seconde Guerre mondiale, camps organisés par les nazis en Europe centrale et destinés à éliminer physiquement les populations juive, slave et tsigane. (→ concentration.) Camp retranché, portion de terrain entourée d'une enceinte fortifiée ; ensemble du terrain destiné à servir de point d'appui à une armée. Camp de travail, lieu de détention où les condamnés sont astreints à des travaux forcés. Camp volant, installation passagère ; situation provisoire. Fiche(r) [familier] ou foutre (populaire) le camp, décamper, s'en aller ; s'abîmer, se dégrader : Fiche le camp d'ici ! Tout fiche le camp, plus rien ne fonctionne. Lever le camp, plier ses bagages et ranger le matériel pour partir ; ou, familièrement, partir, quitter un lieu. Lit de camp, lit constitué d'une toile tendue sur un châssis repliable. ● camp (homonymes) nom masculin (forme normande de champ) khan nom masculin quand adverbe interrogatif quant préposition qu'en pronom ● camp (synonymes) nom masculin (forme normande de champ) Lieu de stationnement ou d'instruction d'une formation militaire ; cette formation...
Synonymes :
- bivouac
- quartiers
Terrain de camping, ou tout lieu où l'on campe, où...
Synonymes :
- camping
Groupe de personnes, de partis, de pays, etc., qui s'oppose...
Synonymes :
- clan
- coterie
- faction
- groupe
- parti
Camp
n. m.
d1./d Espace de terrain où des troupes, des forces militaires, stationnent. Camp volant, provisoire. Camp retranché: place forte.
d2./d Espace de terrain servant de lieu d'internement ou d'habitat provisoire. Camp de prisonniers, de réfugiés. Camp de concentration: V. concentration et nazisme.
|| (Maurice) Camp sucrier: cité ouvrière rattachée à l'industrie sucrière.
d3./d Lieu où des campeurs, des alpinistes dressent leurs tentes.
d5./d Parti, faction. Il a changé de camp.
d6./d Dans certains jeux, terrain de base d'une équipe.
— Chacune des équipes qui s'opposent.
d7./d (Québec) Camp ou campe: cabane de bois construite en forêt, aménagée sommairement pour servir d'abri.
— Par ext. Emplacement comportant plusieurs camps. Un camp forestier.
————————
Camp
(Maxime Du). V. Du Camp.
⇒CAMP, subst. masc.
I.— ART MILIT.
A.— Terrain généralement clos et fortifié sur lequel des troupes s'installent en ordre avec des tentes ou des baraques pour se loger, s'entraîner ou se défendre; tentes et matériel disposés sur ce terrain. On força le camp, on fit un nombre prodigieux de prisonniers; enfin cette bataille fut décisive (Mme DE GENLIS, Les Chevaliers du Cygne, t. 3, 1795, p. 303).
♦ Camp volant. Camp installé très sommairement et pour une courte durée par une troupe ou un groupe de campeurs en déplacement.
♦ Camp retranché. Place forte entourée d'une ceinture de forts.
♦ Lit de camp. Lit léger pliant ou démontable comme ceux que l'on installe sous la tente; p. anal., lit de corps de garde, formé de matelas posés sur un plancher incliné (cf. Lar. 20e).
♦ La vie des camps. (Au fig.). La vie militaire. La fréquentation des cours et des camps (SÉNAC DE MEILHAN, L'Émigré, 1797, p. 1894).
SYNT. a) Camp + adj. Camp avantageux, fortifié, inexpugnable, ouvert, stable ou permanent. b) Camp de + subst. Camp de manœuvres, d'instruction. Camp où l'on rassemble des troupes pour les instruire en les faisant manœuvrer (cf. Ac. 1835-1932; Lar. 19e; JOFFRE, Mémoires, t. 1, 1931, p. 83). Camp de rassemblement. Lieu où l'on concentre des troupes avant d'entrer en campagne. Camp d'aviation. Terrain équipé où est installée une formation d'aviation militaire. c) Subst. + de + camp. L'enceinte, le fossé, le front, la garde, les quartiers, les tentes du camp. d) Verbe + camp. Asseoir, dresser, établir, mettre, poser son camp en tel endroit, devant telle ville pour l'assiéger; assaillir, attaquer, piller un camp; se retrancher dans son camp.
— Spéc., MOY. ÂGE. Terrain aménagé pour les tournois où deux parties s'affrontent; champ clos. Donner le camp aux combattants. P. ext. Combat en champ clos. Demander le camp, être juge de camp, prendre le camp. Fam. Prendre le camp. Déguerpir, se retirer. On lui fit prendre le camp (Ac. 1798-1878). Les juges du camp l'ont résolu ainsi : demain seulement le champ te sera ouvert (Mme COTTIN, Mathilde, t. 2, 1805, p. 148).
B.— P. méton.
1. Installations d'un camp; un camp bien ordonné.
— Lever le camp. Démonter les installations d'un camp pour s'installer ailleurs. P. ext. Partir rapidement, déguerpir. Pop., fam. Foutre, ficher le camp. Même sens : Partir rapidement, déguerpir. :
• 1. Je n'y trouve que l'occasion de m'en aller. Je ne sais pourquoi on dit : f... le camp. C'est lever le camp qu'il faudrait. F... le camp, c'est le planter et stare.
VALÉRY, Correspondance [avec Gide], 1926, p. 504.
♦ Au fig. [En parlant d'animés] Se dégrader. Tout fout le camp avec la République (E. et J. DE GONCOURT, Journal, 1870, p. 651).
2. Troupes qui campent. Le camp était tranquille; tout le camp fut alarmé; donner l'alarme au camp (Ac. 1798-1932). Le camp se réveille, mille feux s'allument (CHATEAUBRIAND, Génie du Christianisme, t. 2, 1803, p. 205) :
• 2. ... l'attente continuait, lorsque, vers deux heures et demie, une sourde agitation, peu à peu croissante, gagna le camp entier, des ordres coururent, on fit évacuer les prairies, toutes les troupes montèrent, ...
ZOLA, La Débâcle, 1892, p. 103.
— Proverbe et fig., vx. L'alarme est au camp. ,,Se dit en parlant de ce qui met tout d'un coup plusieurs personnes dans une grande inquiétude`` (attesté de Ac. 1798 à 1878).
— Camp volant (cf. supra I A). Corps de troupes légères (cavalerie) qui observait et harcelait l'ennemi. Il commande (commandait) un camp volant (Ac. 1798-1932). Fig. et fam. Être (vivre) en camp volant. Être installé de manière provisoire et sommaire. Vivre en camp volant à l'hôtel (LOTI, Mon frère Yves, 1883, p. 241). Absol. Un camp volant. Un nomade (attesté ds les dict. sauf. Ac. à partir du Nouv. Lar. ill.). Parfois aussi passait un couple de camps volants, de vanniers nomades qui vendent des paniers et des « charpagnes » aux paysans (MOSELLY, Terres lorraines, 1907, p. 65).
— Aide de camp. Cf aide2. Maréchal de camp. Cf. maréchal.
C.— [P. réf. aux troupes de deux camps ennemis]
1. JEUX et SP. Équipe opposée sur une des deux parties du terrain à une équipe adverse occupant l'autre partie du terrain. Aux barres, à la paume, on se constitue en deux camps (Ac. 1932) :
• 3. Chaque faute dans un camp donne un point au camp adverse. (...) Un compteur-chanteur informe en basque le public des péripéties de la lutte. Chaque camp se compose de trois pelotari, dont l'un est chef de groupe. La couleur des ceintures et des bérets distingue les camps : rouge et bleu.
PESQUIDOUX, Chez nous, 1921, p. 171.
2. P. ext., domaines de la pol., de la philos., de la litt. Groupe de personnes soutenant la même cause contre un autre groupe soutenant une cause adverse. Le camp adverse; changer de camp; le pays est partagé en deux camps (Ac. 1932). Le portrait de Machard qui fait courir tout Paris. Eh bien, qu'en dites-vous? Êtes-vous dans le camp de ceux qui approuvent ou dans le camp de ceux qui blâment? (PROUST, Du côté de chez Swann, 1913, p. 374).
II.— P. ext.
A.— Terrain clos équipé d'installations de type militaire où sont placés d'autorité certains types de personnes. Camp de prisonniers (de guerre), camp disciplinaire, camp de travail, camp de réfugiés; s'évader du camp.
♦ Camp d'internement, de concentration, de déportation, d'extermination; camp de la mort lente, de représailles (cf. AMBRIÈRE, Les Grandes vacances, 1946, p. 303). Terrains étroitement surveillés où sont détenues en temps de guerre ou de troubles internes des personnes considérées comme suspectes. Les charniers des camps de déportation (DE GAULLE, Mémoires de guerre, 1959, p. 171); les horreurs, les sévices, les tortures des camps; être torturé, mourir dans un camp de concentration :
• 4. ... camp de Royallieu à Compiègne : un camp sans travaux forcés, sans chambre de torture, sans gaz asphyxiants, sans four crématoire, un camp anodin en apparence, un camp de repos, si l'on peut dire. (...). Il [le bourreau] laissait tranquilles ses victimes : il ne s'agissait que de les laisser mourir peu à peu de faim.
MAURIAC, Le Bâillon dénoué, 1945, p. 476.
• 5. La destruction de l'homme affirme encore l'homme. La terreur et les camps de concentration sont les moyens extrêmes que l'homme utilise pour échapper à la solitude. La soif d'unité doit se réaliser, même dans la fosse commune. S'ils tuent des hommes, c'est qu'ils refusent la condition mortelle et veulent l'immortalité pour tous.
CAMUS, L'Homme révolté, 1951, p. 304.
B.— Terrain où s'installe un groupe de campeurs. Camp scout, camp de vacances; Camp de base; feux de camp. Camp nudiste (AYMÉ, La Jument verte, 1933, p. 23) :
• 6. L'originalité des camps de vacances réside moins dans l'organisation matérielle des camps que dans celle des activités et des programmes proposés... Différents types d'organisation peuvent être rencontrés :
1) le camp lourd, fixe, véritable colonie sous tente.
2) le camp fixe.
3) le camp itinérant ou camp volant.
4) la caravane ouvrière.
Liaisons sociales, n° 345, 29 mars 1956, p. 22.
Rem. On rencontre ds la docum., appartenant à la famille a) Campe, subst. fém., région. Cabane de bûcherons construite en forêt. Une vieille campe de bûcheron (GENEVOIX, Match à Vancouver, Laframboise et Bellehumeur, 1942, p. 10). Attesté ds Canada 1930. b) Campion, subst. masc., région. Nomade, romanichel. Près d'une roulotte abandonnée dans le champ, un couple de bohémiens, vêtus de hardes de couleurs vives, se caressait, sur le talus, au bord de la route. Angélina rougit : — Regarde-moi donc ces campions (G. GUÈVREMONT, Le Survenant, 1945, p. 211).
Prononc. et Orth. :[]. Le groupe -mp est muet et la voyelle précédente nasale dans camp, champ, clamp (cf. FOUCHÉ Prononc. 1959, p. 425). Ds Ac. 1694-1932. Homon. quand, quant. Étymol. et Hist. 1. Ca 1450 lit de can « lit pliant ou démontable en usage dans les campements militaires » (Myst. Vieux Testament, éd. J. de Rothschild, t. 2, p. 303); fin XVe s. lit de camp (COMMYNES, Mémoires, éd. J. Calmette, t. 1, p. 237); fin XVe s. « terrain sur lequel une armée s'établit ou se retranche pour sa défense » tenir ung camp (ID., ibid., II, 272 ds IGLF Litt.); a) 1548 camp volant « camp provisoire » (Th. SEBILLET, Art poetique fr., éd. F. Gaiffe, p. 102); 1883 fig. vivre en camp volant à l'hôtel (LOTI, loc. cit.); b) 1671 lever le camp (POMEY); 1836 fam. et pop. foutre le camp (STENDHAL, Lucien Leuwen, p. 21); c) 1690 aide de camp (FUR.); d) 1921 camp d'aviation (GIRAUDOUX, Suzanne et le Pacifique, p. 74); 2. 1543 p. ext. « corps d'armée établi dans un camp » (Amadis, IV, 17 ds HUG.); 3. 1927 camp de concentration (PROUST, Le Temps retrouvé, p. 747); 4. 1813 « groupe de personnes du même bord qui s'oppose à un autre groupe » camp des créanciers (JOUY, L'Hermite de la Chaussée d'Antin, t. 3, p. 173); 1831 pol. (LAMARTINE, Correspondance, p. 153); 1904 fig. changer de camp (FRAPIÉ, La Maternelle, p. 282). Plus prob. forme normanno-pic. ou prov. de champ qu'empr. à l'ital. campo (WIND, p. 65; EWFS2) spéc. terme milit. au XIIIe s. (ds BATT.). Fréq. abs. littér. :3 397. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 5 825, b) 3 373; XXe s. : a) 3 442, b) 5 598. Bbg. DARM. Vie 1932, p. 142. — DUCH. 1967, § 9.6, 12.2, 40, 70.7. — GOTTSCH. Redens. 1930, p. 320, 322, 323, 456. — GOUG. Mots t. 1 1962, p. 63. — KOHLM. 1901, p. 35. — QUEM. 2e s. t. 2 1971, p. 12. — SAR. 1920, p. 37. — WIND 1928, p. 8, 9, 65, 141, 196, 201.
camp [kɑ̃] n. m.
ÉTYM. Fin XVe; lit de can, v. 1450; forme normanno-picarde ou provençale de champ; lat. campus.
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1 Zone provisoirement ou en permanence réservée pour les rassemblements de troupes de toutes armes, soit pour des manœuvres, des exercices (camp d'instruction), soit pour des essais, des études (camp d'expérimentation). ⇒ Bivouac, campée (rare), campement, cantonnement, quartier. || Établir son camp. || Reconnaissance, choix de l'emplacement d'un camp. ⇒ Castramétation. || Aller, arriver au camp. || Se retrancher dans un camp. || S'emparer du camp ennemi. || Camp retranché, fortifié : zone fortifiée, organisée défensivement en permanence (→ Arrière-garde, cit. 1; asseoir, cit. 6).
1 Rome est dans notre camp, et notre camp dans Rome (…)
Corneille, Horace, I, 3.
2 Un camp d'instruction (…) est un terrain jalonné de tranchées invraisemblables où des officiers qui ne font pas la guerre apprennent à la faire à des camarades chevronnés.
A. Maurois, les Discours du Dr O'Grady, X, p. 99.
♦ Camp léger : camp provisoire remplaçant les casernes d'une garnison, utilisé pendant les périodes de formation des jeunes recrues. — Camp volant (→ ci-dessous, 6.).
♦ Par métonymie. Le camp et les troupes qui y sont installées. || La vie du camp. || Donner l'alarme au camp. — (1671). || Lever le camp : quitter le camp en démontant les installations (au fig., → ci-dessous, 5.).
♦ ☑ Loc. Maréchal de camp. — ☑ Aide de camp. ☑ Lit de camp (facilement transportable).
♦ Vieilli. || Table de camp.
♦ Allus. hist. || Le Camp du Drap d'or, où se rencontrèrent en 1520 François Ier et le roi d'Angleterre (près d'Ardres).
2 Spécialt. || Camp de prisonniers et, absolt, camp où sont groupés des prisonniers de guerre. || Barbelés, miradors, baraquements d'un camp. || Les camps allemands des deux guerres mondiales. ⇒ Offlag, stalag.
2.1 Il s'agissait d'un camp de dimensions modestes, puisqu'il ne comprenait que quatre doubles baraques de bois, juchées sur de courts pilotis, couvertes de toile goudronnée (…) cernées par deux clôtures de barbelés dont l'intervalle était rempli par des chevaux de frise entremêlés.
M. Tournier, le Roi des Aulnes, 1970, p. 174.
♦ (1906). || Camp de concentration : lieu où l'on groupe en temps de guerre ou de troubles, sous la surveillance des autorités militaires ou policières, les suspects, les étrangers, les nationaux ennemis… — REM. Cette définition administrative ne correspond pas à l'usage courant du syntagme, qui, depuis la chute du nazisme, est appliqué aux camps d'extermination (→ ci-dessous, et l'adj. concentrationnaire).
2.2 Vous savez que c'est une affreuse espionne, s'écriait Mme Verdurin (…) Je le sais et d'une façon précise, elle ne vivait que de ça. Si nous avions un gouvernement plus énergique, tout ça devrait être dans un camp de concentration. Et allez donc !
Proust, le Temps retrouvé, Pl., t. III, p. 765.
3 Un Français, en 1900, aurait été profondément bouleversé si quelque vaticinateur s'était avisé de décrire les camps de concentration, les cruautés hitlériennes, les fours crématoires, les charniers, la misère de ces personnes que l'on dit, pudiquement, « déplacées »
G. Duhamel, Manuel du protestataire, I, p. 20.
♦ Camps d'extermination, où furent affamés, suppliciés et exterminés certains groupes ethniques (Juifs, Tsiganes), politiques (communistes) et sociaux (homosexuels…), notamment par le régime nazi. — Absolt. || Les camps.
3.1 Je vais rejoindre le Comité rassemblé pour ériger un monument à Jean Moulin. Ceux qui le composent sont les délégués des organisations de résistance, des déportés, des rescapés des camps d'extermination.
Il y a vingt ans que je pense aux camps. L'horreur et la torture ont passé dans presque tous mes livres, en un temps où l'on ne connaissait encore que le bagne.
Malraux, Antimémoires, Folio, p. 600.
♦ ☑ Loc. Les camps de la mort : les camps d'extermination.
3.2 Il fallait porter l'étoile jaune (…) La jeune sœur de Maurice, Anna, fut arrêtée (…) Elle se trouvait dans le métro (…) Un contrôleur la fit descendre, l'amena au chef de quai. Elle ne revint jamais des camps de la mort.
J. Ferniot, Pierrot et Aline, 1973, p. 146.
♦ Camp disciplinaire, camp de redressement, de représailles, camp de travail : lieu d'internement collectif et massif, où une discipline très dure, des conditions de travail inhumaines sont souvent imposées à des personnes, pour des raisons politiques. ⇒ Goulag.
3.3 L'existence des camps de travail n'est pas un phénomène accidentel et dont on pourrait espérer un jour l'abolition (…) On a (…) procédé à la création systématique d'un sous-prolétariat ne recevant en échange d'un travail maximum qu'un strict minimum vital : un tel ajustement n'est possible qu'en système concentrationnaire.
S. de Beauvoir, les Mandarins, 1954, p. 296-297.
♦ Camp de réfugiés, camp de transit, où sont maintenues par la contrainte des personnes « déplacées » (→ ci-dessus, cit. 3), des populations ségréguées, indésirables pour un pouvoir politique, etc.
♦ Absolt. || Les camps, selon les contextes, désigne les camps de concentration, d'extermination (→ ci-dessus, cit. 3.1 et 3.2), de travail forcé, de regroupement, et, en général, tout système policier où les personnes sont contraintes de vivre et travailler dans des conditions collectives, forcées et inhumaines. || Un évadé des camps. || Lutter contre les camps et la torture.
♦ Par métonymie. || Le camp : les personnes qui sont gardées dans le camp. || Tout le camp a été rassemblé devant les baraquements.
3 (1921). || Camp d'aviation : ensemble des installations nécessaires à une formation aérienne militaire.
4 Beaucoup de villes, pour le pilote, ne sont qu'un camp d'aviation, qu'un terrain d'atterrissage. Qu'il aille à Melbourne ou à Chungking, à Calcutta ou à New York, à Tunis ou à Rio, il verra des pistes, des hangars, un camion d'essence, du sable, de la terre battue et peut-être au loin quelques arbres.
A. Maurois, Études littéraires, t. III, p. 264.
4 Rare. Espace de terrain où l'on campe, aménagé pour camper. ⇒ Campement, camping (cour.; pour lever les ambiguïtés, on dit parfois camp de camping). || Passer ses vacances dans un petit camp des Alpes.
♦ Spécialt (dans un groupe organisé sur un modèle plus ou moins militaire, au moins à l'origine). Terrain où se réunissent les membres d'une association; réunion de campeurs. || Un camp scout. || Un camp de jeunesse (en 1941-44 : chantiers de jeunesse). — Par ext. (dans d'autres formes de collectivités). || Revenir au camp après une excursion. — Un camp de vacances : camp fixe (⇒ Colonie), camp itinérant. || Camp de nudistes; camp nudiste, naturiste.
4.1 Je sais qu'il ne prend jamais son plaisir sans avoir éteint ou tiré les rideaux; hors des camps nudistes où elle se voile miraculeusement d'innocence, la nudité des femmes lui inspire le même éloignement sacré qu'à son bisaïeul de Claquebue.
M. Aymé, la Jument verte, 1933, p. 23.
5 Je me mets à chantonner une ânerie que les gars des camps de jeunesse aimaient bien : « Avec l'ami Bidasse / On n'se quitte jamais /… »
Jacques Laurent, les Bêtises, 1971, p. 319.
♦ ☑ Loc. Feu de camp.
♦ (1924). || Camp de base : campement où sont déposés matériel et ravitaillement et qu'utilisent des alpinistes, des explorateurs polaires comme relais ou position de repli.
5 ☑ Loc. fig. (Du sens I., A., 1). Lever le camp : s'en aller, partir après une étape (qu'il s'agisse ou non d'un camp au sens 4, par exemple); par ext. ⇒ Décamper (→ Cheminer, cit. 2).
6 (…) Nous levons le camp pour monter vers Jérusalem.
Loti, Jérusalem, II.
♦ ☑ (1836). Fam. Ficher le camp, foutre le camp : s'en aller, partir rapidement. ⇒ Filer (→ Ficher, cit. 6). || Il va falloir ficher le camp sans demander notre reste. || Allez, fichez le camp ! — Fous (cit. 2) le camp ! || Fous-moi le camp de là !
6.1 Je n'y trouve que l'occasion de m'en aller. Je ne sais pourquoi on dit : f… le camp. C'est lever le camp qu'il faudrait. F… le camp, c'est le planter et stare.
Valéry, Correspondance avec Gide, 1926, in T. L. F.
7 — « Foutre le camp ! » gronda-t-il en bloquant les mâchoires. « Foutre le camp ! »
Martin du Gard, les Thibault, t. IV, p. 262.
♦ ☑ Var. : foutre son camp, foutre son petit camp.
7.1 — (…) Je l'ai entendu dire qu'il se chargeait de ton compte. Hier matin, il était avec un agent de la Gestapo. Je serais toi, je foutrais mon camp. — Où ça, mon camp ? — À Paris, chez ton vieux.
Francis Carco, les Belles Manières, 1945, p. 76.
♦ (Surtout foutre le camp; sujet non humain). Se dégrader, se perdre. || Tout fout le camp, dans ces immeubles modernes ! || La plomberie commence à foutre le camp. — (Abstrait). || La morale fout le camp. || « Tout fout le camp avec la République » (Goncourt, Journal, 1870). || Je regardais tout qui fichait (cit. 5.2) le camp.
6 ☑ Loc. (1548). Camp volant, s'est dit de l'espace où est organisée une unité légère très mobile, chargée d'inquiéter et d'observer l'ennemi. — ☑ (1833). Fig. Vivre en camp volant : vivre d'une manière instable, sans installation définitive (cf. Comme l'oiseau sur la branche).
8 La semaine qui suivit fut une de ces périodes agitées comme on en traverse dans les existences maritimes : vivre en camp volant à l'hôtel dans le désordre des malles à moitié défaites, ignorant la route qu'on prendra demain (…)
Loti, Mon frère Yves, LX, p. 144.
♦ Par métonymie. || Un camp volant ou un camp-volant. ⇒ Bohémien, nomade.
8.1 D'abord nous autres, tu comprends, c'est pas pareil, nous sommes mariés, nous avons deux petits, c'est autre chose, nous sommes pas des camps-volants.
Thyde Monnier, le Figuier stérile, p. 186.
7 Vx (au pluriel). || Camps : armées. ⇒ Guerre, ost (vx), troupe. || La vie des camps. — REM. Ce sens est archaïque, du fait du développement du sens 2, absolt.
9 Ce prince n'a pas plus de grâce, lorsqu'à la tête de ses camps et de ses armées, il foudroie une ville qui lui résiste (…)
La Bruyère, Disc. de réception à l'Académie.
B (1813). Se dit de deux ou plusieurs groupes qui s'opposent, se combattent. || Les deux camps; l'un et l'autre camp. || Être dans un camp, pour un camp contre l'autre (cf. Être de l'autre côté de la barricade). — ☑ Loc. La balle est dans votre camp (par allus. au sens sportif; → ci-dessous). || Le camp victorieux.
♦ ☑ Changer de camp (fig.; sujet n. de chose) :
10 L'espoir changea de camp, le combat changea d'âme.
Hugo, les Châtiments, V, 13, 2.
11 (…) en juillet 1918, la victoire changea de camp.
A. Maurois, Terre promise, XXVII, p. 183.
♦ (En sport, jeu, etc.; 1875, in Petiot). || Les joueurs sont distribués en deux camps. || Constituer deux camps. ⇒ Équipe.
11.1 Un jour qu'on allait jouer aux barres, Mlle Nelly Kossichef, la sœur cadette de Marie, assignait à chacun le camp où il se trouverait. Elle tirait chacun par l'épaule, disant : « Vous, vous serez dans mon camp; vous, dans celui de Marie ». En arrivant à Jean (…) elle dit en riant : « Oh ! non, vous, vous êtes pour le camp de Marie, cela vous fait trop de plaisir (…) »
Proust, Jean Santeuil, Pl., p. 218.
♦ (1813). Polit. Parti, groupe (opposé à d'autres). || Passer au camp, dans le camp de l'opposition. ⇒ Avec.
♦ (Dans un conflit intellectuel) ⇒ Côté, faction, groupe, parti.
12 Nous nous sommes jetés dans le camp d'Aristote.
Massillon, Panégyrique de saint Bernard.
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II Régional (Canada), sous l'influence de l'amér. camp. || Camp (d'été). ⇒ Chalet, villa. || Passer la fin de semaine au camp. — Camp de pêche, de chasse. ⇒ Pavillon. — (1859). || Camp de bûcherons, ou chantier.
13 La population des camps, comme on appelle en Californie les centres miniers, est un peu différente de celle des placers. Voici par exemple la manière dont se groupaient les habitants de Coulterville en 1859.
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DÉR. Camper, camping.
COMP. Décamper.
HOM. Quand, quant.
Encyclopédie Universelle. 2012.