1. fruit [ frɥi ] n. m. I ♦
1 ♦ (Au plur.) Vx ou littér. Produits de la terre en général, qui servent à la nourriture des êtres humains, des animaux. — Cour. Les fruits de la terre. — (av. 1798) Loc. cour. FRUITS DE MER : animaux marins comestibles à l'exclusion des poissons. ⇒ coquillage, crustacé; calmar, oursin, 1. seiche. Plateau de fruits de mer.
2 ♦ Production des plantes apparaissant après la fleur; bot. Ovaire développé de la fleur des plantes phanérogames qui contient et protège les ovules devenus graines. ⇒ péricarpe; fécondation, pollinisation. Les plantes à fleurs n'ont pas toutes des fruits et les graines peuvent être nues. Fruit charnu (⇒ 3. baie, drupe) , et (bot.) fruit sec (⇒ akène, capsule, caryopse, follicule , gousse, pyxide, samare, silique) . Fruit déhiscent, indéhiscent. Fruit composé. ⇒ grain, grappe, 2. régime. Le pédoncule, la peau, la chair, la pulpe, les graines, les pépins, le noyau d'un fruit. Fruits légumiers des plantes herbacées (⇒ légume) :aubergine, avocat, citrouille, concombre, courge, courgette, melon, potiron, tomate. Fruits servant d'épices, de condiment : olive, piment, poivre, vanille.
3 ♦ Cour. Fruit (2o) comestible, lorsqu'il est sucré, que l'on consomme généralement au dessert, parfois comme accompagnement (canard à l'orange, porc aux pruneaux, dinde aux marrons, etc.). Fruit sauvage, cultivé. Culture des fruits. ⇒ arboriculture, pomologie; fruiterie, verger. Fruit sain; taché, tavelé, véreux, pourri. Fruit vert, mûr, blet; fruit aqueux, juteux, fondant, cotonneux, farineux, pierreux. Fruit doux, sucré, savoureux, succulent; aigre, aigrelet, sur, suret, acide; parfumé. Principes nutritifs des fruits. ⇒ fructose, pectine, suc, vitamine. — Fruits du même genre que l'orange. ⇒ agrume. Fruits frais, crus. Corbeille, coupe de fruits. Salade, macédoine de fruits. Mordre dans un fruit. Éplucher, dénoyauter, équeuter, évider, peler un fruit. Écorce, pelure, trognon, zeste de fruits. — Fruits secs, fruits séchés. — Fruits cuits. ⇒ compote, confiture, gelée, marmelade. Fruits confits, déguisés. Fruits au sirop. Fruits à l'eau-de-vie. Fermentation et distillation des fruits. ⇒ alcool, eau-de-vie, vin. Jus, sirop de fruit. Miel de fruits. ⇒ 1. rob. Pâte de fruits. Gâteaux aux fruits. ⇒ charlotte, clafoutis, fraisier, framboisier, tarte. Cake aux fruits. — Fruits rouges : airelle, cassis, fraise, framboise, groseille, mûre, myrtille. Fruits à noyau : abricot, brugnon, cerise, mirabelle, nectarine, pêche, prune, quetsche. Fruits à pépins : citron, clémentine, coing, cornouille, mandarine, melon, nèfle, orange, pamplemousse, poire, pomme, raisin, sorbe, tangerine. Fruits exotiques : ananas, anone, arbouse, banane, caroube, corossol, datte, durian, figue, fruit de la passion, gingembre, grenade, grenadille, goyave, jambose, jujube, kaki, kiwi, kumquat, lime, litchi, mangoustan, mangue, maracuja, noix de coco, papaye, pastèque, physalis, ramboutan, sapotille. Fruits farineux : châtaigne, faine, marron. Fruits oléagineux : amande, cacahouète, noisette, noix. — C'est au fruit qu'on connaît l'arbre. — LE FRUIT DÉFENDU : fruit de l'arbre de la science du bien et du mal que Dieu avait défendu à Adam et Ève de manger. ⇒ 1. pomme. Fig. Chose dont on doit s'abstenir, et par ext. Chose qu'on désire d'autant plus qu'on doit s'en abstenir. « Ces vols n'avaient que le vol pour mobile. Il ne s'y mêlait ni lucre ni goût du fruit défendu » (Cocteau). — (1831) Fig. FRUIT SEC : intellectuel qui n'a rien donné de ce qu'il semblait promettre. ⇒ raté. — FRUIT VERT, se dit d'une jeune fille qui n'est pas encore épanouie.
II ♦
1 ♦ (XIIe; d'apr. le lat. ecclés.) Littér. Enfant, considéré comme produit de sa mère, de l'union des sexes. « Le fruit de vos entrailles est béni » (« Je vous salue Marie », prière). Le fruit d'une union, d'un mariage, de l'amour.
2 ♦ (XVIe; d'apr. le lat. jurid.) Dr. Au plur. Produits que donne une chose à intervalles périodiques, sans altération ni diminution de sa substance. ⇒ rapport, revenu, usufruit. Fruits naturels; fruits industriels; fruits civils. Fruits pendants par branches ou par racines : produits agricoles encore sur pied, non récoltés.
III ♦ (Xe) Fig. Résultat avantageux (que produit qqch.). ⇒ avantage, profit, récompense. « était-ce possible de perdre, en un quart d'heure, le fruit d'un an de travail ? » (Zola).
♢ AVEC FRUIT, SANS FRUIT : avec, sans profit. Il a lu avec fruit les auteurs classiques. ⇒ utilement. Ses efforts furent sans fruit. ⇒ infructueux .
♢ Par ext. Produit, effet bon ou mauvais de qqch. ⇒ conséquence, effet, produit, résultat. Le fruit de profondes réflexions. Le fruit de l'expérience. Une telle erreur ne tarda pas à porter ses fruits.
fruit 2. fruit [ frɥi ] n. m.
♦ Techn. Diminution d'épaisseur qu'on donne à un mur à mesure qu'on l'élève, l'inclinaison ne portant que sur la face extérieure du mur et la face intérieure restant verticale.
● fruit nom masculin (latin fructus) Organe végétal, issu du développement de l'ovaire, à la suite de la fécondation des ovules, et qui, à maturité, contient les graines. (Le fruit sert d'organe de protection pendant le développement des graines, puis participe à leur dissémination.) Produit comestible de certains végétaux, de saveur généralement sucrée. Littéraire. Enfant par rapport à ses parents ; produit de la génération : Le fruit d'un amour illégitime. Effet, résultat, produit bon ou mauvais de quelque chose : Je vous livre le fruit de mes réflexions. Résultat heureux, profit, avantage tiré de quelque chose : Recueillir le fruit de son travail. Bénéfice obtenu de la vente du fromage produit par une fruitière, que se partagent les membres de celle-ci. ● fruit (citations) nom masculin (latin fructus) René Char L'Isle-sur-la-Sorgue, Vaucluse, 1907-Paris 1988 Le fruit est aveugle. C'est l'arbre qui voit. Feuillets d'Hypnos Gallimard René Daumal Boulzicourt, Ardennes, 1908-Paris 1944 Tout poème naît d'un germe, d'abord obscur, qu'il faut rendre lumineux pour qu'il produise des fruits de lumière. Poésie noire et poésie blanche Gallimard abbé Jacques Delille Clermont-Ferrand 1738-Paris 1813 Académie française, 1774 Le melon savoureux, la figue succulente, Et ces raisins ambrés qui parfument les airs. Les Jardins Pierre Emmanuel, pseudonyme littéraire devenu le patronyme légal de Noël Mathieu Gan, Pyrénées-Atlantiques, 1916-Paris 1984 Il reste dans le fruit les dents de l'origine… Tombeau d'Orphée Seghers Jean Giono Manosque 1895-Manosque 1970 Les jours sont des fruits et notre rôle est de les manger. Rondeur des jours Charlot Antoine de Saint-Exupéry Lyon 1900-disparu en mission aérienne en 1944 Fruits et racines ont même commune mesure qui est l'arbre. Citadelle Gallimard Jules Supervielle Montevideo, Uruguay, 1884-Paris 1960 Laissez le fruit mûrir au fond de son loisir Et sans que le pourrisse un brusque repentir. Le Forçat innocent, Supplique Gallimard Paul Valéry Sète 1871-Paris 1945 Comme le fruit se fond en jouissance, Comme en délice il change son absence Dans une bouche où sa forme se meurt […]. Charmes, le Cimetière marin Gallimard Paul Verlaine Metz 1844-Paris 1896 Voici des fruits, des fleurs, des feuilles et des branches Et puis voici mon cœur, qui ne bat que pour vous. Romances sans paroles, Green Messein Bible Déjà même la cognée se trouve à la racine des arbres ; tout arbre donc qui ne produit pas de bon fruit va être coupé et jeté au feu. Évangile selon saint Luc, III, 9 Aleksandr Sergueïevitch Pouchkine Moscou 1799-Saint-Pétersbourg 1837 Ce que nous recherchons, c'est le fruit défendu. Sans lui, le Paradis n'est pas pour nous le Paradis. Eugène Onéguine, VIII, 27 ● fruit (expressions) nom masculin (latin fructus) Littéraire. Avec fruit ou sans fruit, utilement ou inutilement, avec profit ou sans profit. Fruit défendu, fruit dont Adam et Ève mangèrent malgré la défense de Dieu ; plaisir interdit et qui en est d'autant plus désirable. Fruit de la Passion, nom usuel du fruit de la grenadille. Fruit rare, chose précieuse par sa rareté. Fruit sec, fruit naturellement dépourvu de pulpe, comme la noix, ou desséché pour être consommé en l'état, comme les raisins secs, les figues sèches, etc. ; personne qui a déçu toutes les espérances qu'on fondait sur elle. Fruit vert, jeune personne qui n'a pas encore atteint son plein épanouissement. Porter ses fruits, être efficace, donner de bons résultats : Cet enseignement a porté ses fruits. ● fruit (synonymes) nom masculin (latin fructus) Effet, résultat, produit bon ou mauvais de quelque chose
Synonymes :
- conséquence
- dénouement
- effet
- rançon
Résultat heureux, profit, avantage tiré de quelque chose
Synonymes :
- bénéfice
- produit
- récompense
- revenu
● fruit
nom masculin
(moyen français frit, de effriter, amenuiser)
Obliquité donnée à la face extérieure d'un mur, sa base étant en avant de l'aplomb du sommet.
fruit
n. m.
rI./r
d1./d Production des plantes phanérogames qui succède à la fleur après fécondation et qui renferme les graines. Fruit charnu, à pépins, à noyau. Fruit comestible.
|| Spécial. Produit de l'arbre fruitier. Fruit mûr, juteux.
|| (Antilles fr., oc. Indien) Fruit à pain: fruit de l'arbre à pain.
|| Loc. RELIG Fruit défendu, celui de l'arbre de la science du bien et du mal, auquel Adam et ève ne devaient pas toucher; fig. chose dont il est interdit de jouir et qui en est d'autant plus désirée. L'attrait du fruit défendu.
d2./d (Plur.) Produits de la nature, en tant qu'ils servent aux hommes; les produits de la chasse, de la pêche. Les fruits de la terre.
|| Loc. Fruits de mer: nom donné à divers crustacés et mollusques comestibles.
rII./r Fig.
d1./d Litt. Le fruit d'une union, d'un mariage, l'enfant né de cette union, de ce mariage.
d2./d Avantage, bénéfice tiré d'une activité. Recueillir le fruit de son travail.
|| Avec fruit: avec profit, utilement. Lire avec fruit.
|| (Plur.) DR Revenus issus des capitaux.
Encycl. Bot. - Le fruit, résultat de l'évolution d'un carpelle ou du pistil, est spécifique des plantes à fleurs (phanérogames); il contient les graines résultant de l'évolution des ovules. On classe les fruits en trois catégories: fruits secs indéhiscents (akènes, caryopse des graminées); fruits secs déhiscents (follicule, gousse, silique, etc.); fruits charnus (baies et drupes). Les faux fruits (ananas, fraise, etc.) sont des fruits auxquels se sont incorporées des parties de la fleur ou de l'inflorescence autres qu'un carpelle ou que le pistil. Les fruits composés résultent de la soudure de plusieurs fruits (une framboise résulte de la soudure de petites drupes).
I.
⇒FRUIT1, subst. masc.
I.— Production du végétal qui succède à la fleur.
A.— BOT. Organe végétal, issu du développement de l'ovaire fécondé, qui succède à la fleur et contient les graines nécessaires à la reproduction. « Il y a eu de la fleur, mais pas de fruits; il a fait froid au moment que le fruit commence à se faire et la sève s'est arrêtée » (ALAIN-FOURNIER, Corresp. [avec Rivière], 1911, p. 281). Chaque fleur se doit de faner pour son fruit (...) celui-ci, s'il ne tombe et meurt, ne saurait assurer des floraisons nouvelles (GIDE, Nouv. Nourr., 1935, p. 277).
SYNT. Le fruit du chêne, du frêne; fruit sec (dépourvu de pulpe), charnu; fruit à noyau, à pépin(s).
B.— Spécialement
1. Produit comestible des végétaux que l'on consomme le plus souvent comme dessert. Souvent, le fruit que l'insecte a piqué ou que le bec de l'oiseau a entamé est le plus vermeil et le plus savoureux (SAND, Lélia, 1839, p. 364). Des carrés étaient plantés de figuiers, de pêchers, d'amandiers, d'oliviers, de grenadiers et autres arbres à fruit (GAUTIER, Rom. momie, 1858, p. 241) :
• 1. Moi, je taille mes arbres. Je les dirige. Je les pince. Je vois pousser les jeunes boutures, et, quand je mange un fruit à table, je peux dire : « Voilà un fruit que je connais ».
RENARD, Journal, 1892, p. 117.
SYNT. Fruit vert, mûr, pourri; fruits confits, secs (dont on a provoqué la dessication pour les conserver); fruit précoce, tardif; fruit juteux, sucré, acide; cueillir des fruits; fruits de saison; corbeille de fruits; fruits frais, congelés, au sirop, en conserve; fruits déguisés (sorte de petits fours).
♦ Petits fruits (région.). Baies comestibles diverses, comme les airelles, fraises des bois, framboises, groseilles, etc. Nous nous sommes nourris, mes petits camarades et moi, aux « petits fruits », comme les gens de mon pays appellent les myrtilles, les framboises, les airelles et les fraises des bois, les groseilles et les cassis (G. BORGEAUD, Le Voyage à l'étranger, Paris et Lausanne, 1974, p. 126).
— Vieilli, p. méton., au sing. Dernier service d'un repas et ce qu'on y sert. Servir le fruit (Ac. 1932). Synon. usuel dessert. Elle propose (...) pour le fruit, des poires tapées et des noix sèches (POURRAT, Gaspard, 1922, p. 160) :
• 2. ... « Demandez au maître d'hôtel s'il a du bon chrétien. — Du bon chrétien? Je ne comprends pas. — Vous voyez bien que nous sommes au fruit, c'est une poire. »
PROUST, Sodome, 1922, p. 1010.
— P. compar. Tomber comme un fruit mûr (en parlant d'une chose). Se produire naturellement, sans qu'on ait forcé les circonstances. Ce n'est pas lui qui pose la question, elle s'est posée d'elle-même, elle est sortie toute seule — tombée comme un fruit mûr (BERNANOS, M. Ouine, 1943, p. 1459).
— Au fig., fam.
♦ Fruit sec [P. réf. au fruit qu'on a laissé se dessécher, et qui a perdu sa saveur] Élève qui, faute de réussir au terme de ses études, doit renoncer à la carrière qu'il envisageait. Fruit sec des concours (FLAUB., Bouvard, t. 2, 1880, p. 28). Des écrivains scientifiques, fruits secs de l'École Polytechnique (...) discutaient la science actuelle avec un mépris et une certitude que personne ne pouvait combattre (CHAMPFL., Avent. Mlle Mariette, 1853, p. 89).
P. ext. Personne qui a déçu les espoirs qu'on fondait sur elle :
• 3. STÉPHAN. — Ses tantes l'ont élevé, je lui envoyais les revenus du petit domaine que lui a légué sa mère (...) c'est un fruit sec, pauvre en esprit et en cœur. Si vous lisiez les lettres qu'il m'envoie! On croirait qu'il parle à un domestique.
CAMUS, Possédés, 1959, 1re part., 1er tabl., p. 932.
♦ Fruit vert [P. réf. au fruit qui n'est pas arrivé à maturité] Très jeune fille. C'était un cœur de femme encore enfant, ravie À sa mère inconnue en venant à la vie; Fruit vert que mûrissait la prostitution (LAMART., Chute, 1838, p. 986).
— [P. allus. à la Bible]
♦ [Matthieu, 12, 33] Proverbe. On connaît l'arbre à son fruit. ,,On connaît les personnes à leurs œuvres et les choses à leurs résultats`` (Ac. 1932).
♦ [Genèse, 3, 3] Le fruit de l'arbre de vie. Fruit de l'arbre de la connaissance que Dieu avait défendu à Adam et Ève de manger :
• 4. ... ouvrez la Bible (...), vous verrez dans ce livre, Dieu interdire à l'homme le fruit de l'arbre de vie, qui communique la science du Bien et du Mal.
SÉNAC DE MEILHAN, Émigré, 1797, p. 1843.
Au fig. Fruit défendu. Chose d'autant plus désirée qu'elle est interdite. L'attrait du fruit défendu. Les œillères que l'on met aux filles (...) ne font que les émoustiller davantage, en leur inspirant le désir du fruit défendu (BOYLESVE, Leçon d'amour, 1902, p. 53) :
• 5. Son inquiétude de femme de quarante ans rôdait autour de l'inquiétude de cette puberté (...). Sans s'en rendre compte, elle lui eût donné le goût du fruit défendu, s'il avait eu besoin qu'on lui en donnât le goût.
MONTHERL., Bestiaires, 1926, p. 503.
— P. allus. littér. (cf. VERLAINE, Poèmes saturn., 1866, p. 82). Le ver est dans le fruit :
• 6. ... nous serons sûrement victorieux des Boches, nous ne le serons pas des ennemis du dedans, le ver est dans le fruit, il n'y a plus rien à faire, rien à espérer.
GREEN, Journal, 1944, p. 154.
2. Au plur., littér. Produits issus de la terre, d'une façon générale :
• 7. ... un propriétaire a cédé à quelques socialistes un hectare de terrain en pleine campagne. Ils le feront clore, y mettront quelques animaux et, sans travailler, y vivront « des fruits de la terre ».
RENARD, Journal, 1895, p. 271.
— P. anal. Fruits de mer. Crustacés, coquillages comestibles provenant de la mer. Les chercheurs de fruits de mer trouvent [l'oursin]. Ils le coupent en quatre et le mangent cru, comme l'huître (HUGO, Travaill. mer, 1866, p. 257).
C.— P. anal., littér. Enfant par rapport à sa mère, avant sa naissance ou quand il vient de naître. Le fruit de l'hymen; le fruit d'un amour illégitime (cf. entrailles A 2). « M. de Chamery, votre père (...) était mon parent éloigné (...), nous nous aimions, et il m'épousa. Vous fûtes le premier fruit de notre amour ... » (PONSON DU TERR., Rocambole, t. 4, 1859, p. 23) :
• 8. ... tu t'es livrée (...) à ce chien errant avec ce fruit d'un autre dans ton sein, et (...) le premier éveil de la vie de mon enfant se mêlait au soubresaut de la mère, toute piquée du délice d'un double adultère?
CLAUDEL, Part. midi, 1949, III, p. 1135.
II.— A.— P. ext., littér.
1. Profit, avantage que l'on retire de quelque chose. Recueillir le fruit de ses efforts; jouir du fruit (des fruits) de son travail :
• 9. ... si je généralise encore plus le mot fruit [it. ds le texte], comme on fait dans le sens métaphorique, en disant, par exemple, que la science est le fruit du travail, que les découvertes sont le fruit de la réflexion, ce mot fruit ne renferme plus que l'idée d'être produit par un être quelconque...
DESTUTT DE TR., Idéol. 1 1801, p. 108.
— Loc. adv. Avec fruit, sans fruit. Avec, sans profit. Étudier avec fruit un auteur; consulter avec fruit une étude. Ce livre (...), je l'ai lu, et avec d'autant plus de fruit, qu'il est écrit dans ma langue (GENLIS, Chev. Cygne, t. 2, 1795, p. 164).
— P. métaph. ou au fig. Faire du/son fruit, porter des/ses fruits. Obtenir du succès, des résultats heureux. L'amoureux s'aperçut enfin que sa patience allait porter ses fruits (GOBINEAU, Pléiades, 1874, p. 328). Elle n'a pas cessé de faire son fruit, la vieille doctrine de l'union des contraires, formulée par Héraclite, par Hippocrate (MONTHERL., Olymp., 1924, p. 308) :
• 10. Quand le roi d'Espagne fut mort, les réformes de Colbert avaient porté leur fruit, la France avait des finances saines, une armée, les moyens de sa politique.
BAINVILLE, Hist. Fr., t. 1, 1924, p. 238.
2. Résultat bon ou mauvais, effet de quelque chose. Les fruits de l'expérience. L'éloquence est un fruit des révolutions; elle y croît spontanément et sans culture (CHATEAUBR., Génie, t. 2, 1803, p. 108) :
• 11. Mes pensées pourront vous paraître étranges, mais elles sont le fruit des réflexions que m'ont inspirées les catastrophes de nos quarante dernières années.
BALZAC, Méd. camp., 1833, p. 151.
B.— Au plur., DROIT. Revenu régulier que fournit un bien à intervalles périodiques, sans altération ni appauvrissement de sa substance. Les fruits civils sont les loyers des maisons, les intérêts des sommes exigibles, les arrérages des rentes (Code civil, 1804, art. 584, p. 108) :
• 12. ... l'usufruitier d'un domaine recueille, pendant toute la durée de l'usufruit, les fruits naturels ou industriels de la terre, ceux qu'elle produit spontanément et ceux qu'en obtient la culture...
JAURÈS, Ét. soc., 1901, p. 164.
♦ Fruits pendants par branches ou par racines. Fruits des arbres qui ne sont pas encore cueillis, récoltes sur pied (cf. Code civil, 1804, art. 585, p. 108).
— P. anal., au sing. Ce que rapporte une activité ou un bien. La courtisane qui vivait au théâtre du fruit de ses débauches (DUPUIS, Orig. cultes, 1796, p. 525). Le fruit de ses économies, placé d'abord avantageusement, lui a été remboursé en papier (FIÉVÉE, Dot Suzette, 1798, p. 95) :
• 13. Qui ne sait que la certitude de jouir du fruit de ses terres, de ses capitaux, de son labeur, ne soit le plus puissant encouragement qu'on puisse trouver à les faire valoir?
SAY, Écon. pol., 1832, p. 133.
REM. 1. Fruitarien, ienne, adj. [En parlant d'un régime alimentaire] Qui ne comporte que des fruits. Il n'est pas impossible d'imaginer des régimes fruitariens à peu près équilibrés (BOULAY, Arboric. et prod. fruit., 1961, p. 12). 2. Fruitarisme, subst. masc. Doctrine selon laquelle l'homme pourrait ne s'alimenter que de fruits (cf. MACAIGNE, Précis hyg., 1911, p. 274).
Prononc. et Orth. :[]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. a) Xe s. fruit esperitiel (St Léger, éd. J. Linskill, 215); b) 1120-50 « bénéfice, produit tiré de quelque chose » (Gd mal fist Adam, I, 88 ds T.-L.); c) ca 1165 « enfant considéré comme le produit de la génération » (B. DE STE-MAURE, Troie, 22936 ds T.-L.); 2. ca 1165 « production de la plante apparaissant après la fleur » (ID., ibid., 1161); 3. av. 1798 fruits de mer (J. CASANOVA [trad. de l'ital.], Histoire de ma vie, XI, 271 ds Fr. mod. t. 42, p. 281). Empr. au lat. class. fructus (dér. de frui « jouir de ») « usage, possession; rapport, revenu, avantage; fruits des arbres et de la terre »; les sens 1 a et c viennent du lat. chrét. (v. BLAISE); sens 3 prob. calque de l'ital. frutti di mare (Redi, XVIIe s. ds BATT.). Fréq. abs. littér. :6 310. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 11 805, b) 7 057; XXe s. : a) 8 608, b) 7 802.
DÉR. Fruitage, subst. masc., vx. Toute sorte de fruits comestibles. Des fruitages en terrines débordantes à l'œil, mais au fond largement pourvu de feuilles de rhubarbe (GUÈVREMONT, Survenant, 1945, p. 168). — []. — 1re attest., 1re moitié XIVe s. collectif de fruit (Dit des Paintres ds JUBINAL, Nouv. recueil de contes, dits, fabliaux, t. 2, p. 97); de fruit1, suff. -age.
BBG. — ARVEILLER (R.). Fr. mod. 1974, t. 42, p. 281. — DARM. 1877, p. 128. — DUCHÁ (O.). Déficiences du lex. Ét. rom. Brno. 1974, n° 7, pp. 15-16. — QUEM. DDL t. 8 (s.v. fruitarien); 13. — ZOPFI (F.). Zeugnisse alter Zweisprachigkeit im Glarnerland. Vox rom. 1952, t. 12, p. 305.
II.
⇒FRUIT2, subst. masc.
TECHNOL., vieilli. Diminution d'épaisseur qu'on donne à un mur à mesure qu'on l'élève, sur la face extérieure uniquement. Donner du fruit à une muraille. Il ne faut pas élever le mur tout à fait à plomb, il faut lui donner un peu de fruit, il faut qu'il ait un peu de fruit (Ac. 1835, 1878).
Prononc. et Orth. :[]. Ds Ac. 1740-1932. Étymol. et Hist. 1576 frid, frit (VIGEN., Comm. de Cesar, Annot., p. 182 ds GDF.); 1676 donner du fruit à une muraille (FÉLIBIEN). Frid, frit déverbal de effriter2 « amenuiser », altéré en fruit sous l'infl. de fruit1. Bbg. Archit. 1972, p. 73.
1. fruit [fʀɥi] n. m.
ÉTYM. XIIe; au sens 2., v. 1165; « bénéfice », v. 1120; fruit esperituel (spirituel), Xe; du lat. fructus, proprt « revenu, production » (→ Fructi-), de frui « faire usage de ».
❖
———
1 (V. 1283). Au plur. Produits de la terre, qui servent à la nourriture des hommes et des animaux. — REM. Dans ce sens, ne s'emploie plus que dans l'expression les fruits de la terre, à cause de la confusion possible avec le sens botanique. || « Les prières des Rogations sont instituées pour la conservation des fruits de la terre. En ce sens on y comprend les blés, les foins, les avoines, vesces, lin, légumes, etc. » (Dict. de Trévoux, 1771, art. Fruit). || Les premiers fruits de la terre. ⇒ Prémices.
1 (…) vous oubliez que les fruits sont à tous, et que la terre n'est à personne !
Rousseau, De l'inégalité parmi les hommes, II.
2 Heureux l'homme qui se nourrit des fruits de sa terre et trouve en son pays même la satisfaction de sa vie.
Gide, Nouveaux prétextes, Journal sans dates, II.
♦ ☑ Loc. cour. (Av. 1798, Casanova; ital. frutti di mare). Fruits de mer : produits comestibles de la mer (mollusques). ⇒ Coquillage, huître, échinodermes [oursins], crustacés. || Restaurant où l'on déguste des fruits de mer. || Plateau de fruits de mer.
3 (…) quelques coquillages frais, semblables à des moules, et qu'on appelle frutti di mare, fruits de mer, composaient pour nous ce frugal dîner (…)
Lamartine, Graziella (1852), II, I.
4 On vendait des « fruits de mer » dans des petites boutiques foraines, au bord du trottoir.
P. Mac Orlan, la Bandera, II.
4.1 — C'est pas des bêtes, rétorqua Julia, c'est des fruits. Chez tous les écaillers convenables ça s'appelle des fruits de mer.
R. Queneau, le Dimanche de la vie, p. 135.
2 (XIIe). Production des plantes apparaissant après la fleur; (bot.) ovaire développé de la fleur des plantes phanérogames qui contient et protège les ovules devenus graines. ⇒ Fécondation, pollinisation; ovaire, péricarpe (endocarpe, épicarpe, mésocarpe). — REM. Les plantes à fleurs n'ont pas toutes des fruits et les graines peuvent être nues (gymnospermes); on appelle abusivement et couramment fruit certaines graines, ou des productions végétales (réceptacle, etc.) contenant le véritable fruit (fraise, figue, cône…). || Fleur qui se fane (cit. 16) pour faire place au fruit. || Fruit charnu (⇒ Baie, drupe), fruit sec (bot.). ⇒ Akène, capsule et pyxide, caryopse, follicule, gousse, samare, silique, sycone. || Fruit déhiscent, indéhiscent. || Fruit à pépins, fruit à noyau. || Noyaux (cit. 1), pépins de fruits. || Parties d'un fruit. ⇒ Aigrette, brou, carpelle, chair, cloison, coque, cupule, diaphragme, écale, graine, induvie, loge, noyau, peau, pédoncule, pépin, pulpe, pyxide, quartier, valve. || Ligne de suture d'un fruit déhiscent. || Fruit valvacé (univalve, quadrivalve…). || Fruit désigné par le nombre de ses graines (monosperme, polysperme, etc.). || La tomate, le potiron sont des fruits. || Fruit simple, composé (⇒ Grappe, régime; grain). || Plante désignée par le nombre, l'aspect de ses fruits. ⇒ Carpo-, -carpe, préf. et suff., du grec karpos (gymnocarpe, hétérocarpe, sarcocarpe…). || Fruit allongé, arrondi, ové, ovoïde. || Fruit angleux. || Couleurs vives de certains fruits. || Taches, panachures, striures d'un fruit. || Duvet de fruit. || Fruit prolifère. || Fruits comestibles (→ ci-dessous, 3.). || Fruit légumier des plantes herbacées (⇒ Légume; ex. : tomate, concombre, courge). || Fruits servant d'épices, de condiment (ex. : piment, poivre, vanille).
5 Dès que la fleur est fécondée, sa mission est terminée : elle perd ses couleurs et son parfum, les pétales ainsi que les étamines se flétrissent et tombent, le style et le stigmate se dessèchent. Toutes les forces vives se concentrent désormais dans l'ovaire, dont le développement produira le fruit, tandis que les ovules fécondés deviendront des graines.
P. Vallery-Radot, le Grand Mystère de la cellule…, p. 34.
6 Le fruit peut être charnu ou sec. Le fruit est charnu lorsque les parois de l'ovaire (péricarpe) s'épaississent et se transforment en une masse molle dont les cellules sont gorgées de sucs nutritifs; le fruit est sec lorsque le péricarpe demeure mince et devient un tissu dur dont les cellules sont plus ou moins lignifiées.
A.-L. Guyot, la Biologie végétale, p. 115.
3 (1690, Furetière). Cour. Fruit (2.) comestible, lorsqu'il est sucré et qu'on peut le consommer au dessert. || Fruit sauvage, fruit cultivé. || Fruits des régions tempérées; fruits exotiques, fruits tropicaux (→ Agrume, cit. 2; bananier, cit. 1.). || « Le pays des fruits d'or » (→ Fleurir, cit. 2). || Fruit d'un arbre fruitier. — Fruit vermeil, doré. || Fruit à peau fine, à peau épaisse, à peau lisse, veloutée, rugueuse, duvetée. || Fruit sain; fruit piqué, taché, tavelé, véreux, pourri (→ Couteau, cit. 2). || Maturité des fruits : fruit vert, fruit mûr, éclaté, fruit blet. || Consistance des fruits : fruit aqueux, juteux, fondant, cotonneux, farineux, graveleux, grumeleux, pierreux. || Fruit sans pépins. || Goût, parfum des fruits : fruit doux, sucré, savoureux, succulent, aigre, aigrelet, sur, suret, acide, amer, odorant, parfumé. || Principes nutritifs des fruits (⇒ Fructose, pectine, suc, vitamine). || Fruits du genre de l'orange. ⇒ Agrume. — Culture des fruits. ⇒ Arboriculture, pomologie, pomoculture; et aussi fruitier, verger; serre. || Arbre (cit. 11) à fruits ou arbre fruitier. || Arbre qui donne, porte de beaux fruits (→ Espalier, cit. 3); arbre stérile, qui ne donne aucun fruit. || Arbre saisonnier, qui donne des fruits tous les deux ans. || Branche couverte, chargée de fruits, qui courbe (cit. 13), fléchit (cit. 14), plie sous le poids des fruits (→ Étai, cit. 2). || Fruit qui se forme, se noue, se développe, grossit, mûrit, tourne, se colore, se noue. ⇒ Nouaison; aoûtement, maturation, maturité, véraison. — Le soleil cuit les fruits; la gelée tardive les fait couler (⇒ Coulure). || Fruit qui se cotonne, se ride, se dessèche, pourrit, tombe. || Sulfater des fruits. || Mettre des fruits en sac, sous cloche. || Fruit de saison; fruit précoce, tardif. || Fruit forcés en terre. ⇒ Forçage; primeurs (→ Facticité, cit. 1). || Récolte des fruits. || Fruits vendus sur le pied. || Cueille, cueillette (cit. 1) des fruits à la main, avec un cueilloir, un sécateur, une gaule (⇒ Gauler). → Crépitation, cit. 1 || Coloration artificielle des fruits. || Réfrigération (⇒ Froid), emballage des fruits. ⇒ Emballage. || Expédition, transport des fruits. || Meurtrir, patiner des fruits en les maniant sans précaution. — Consommation des fruits. || Fruits frais, crus. || Corbeille, coupe, pyramide de fruits. || Éplucher des fruits; dénoyauter, équeuter, évider, peler des fruits. || Écorce, pelure, trognon, zeste de fruit. || Manger, croquer un fruit. || Mordre un fruit, dans un fruit. || Épreindre, presser un fruit pour en exprimer, en boire le jus. || Jus de fruit frais, en bouteille, en boîte. || Jus de fruit naturel, sans colorant. || Salade, macédoine de fruits. || Purée de fruits crus. ⇒ Coulis. || Quartier, tranche de fruit. || Fruits au sucre, à la crème, à la glace, au sirop, au kirsch, au rhum. || Conservation des fruits frais au naturel, au vinaigre, à l'eau-de-vie. || Distillation des fruits (⇒ Alcool, eau-de-vie, vin). || Essence de fruits (→ Extraire, cit. 9). || Fruits cuits. ⇒ Compote, confiture, gelée, marmelade. || Miel de fruits. ⇒ Rob. || Fruits candis; fruits confits. ⇒ Condit (→ Aussi, cit. 52.). || Pâte de fruits. || Gâteaux aux fruits. ⇒ Charlotte, clafoutis, tarte. || Cake aux fruits. || Bonbons fourrés aux fruits. || Sorbets, glace aux fruits. — Séchage des fruits sur claie. || Fruit tapé, aplati, séché. ⇒ Figue (sèche), prune, pruneau, raisin (sec)… → aussi Mendiant. — REM. On emploie dans le langage courant « fruit sec » pour « fruit séché », cette appellation n'ayant aucun rapport avec le classement botanique des fruits en fruits secs et fruits charnus.
♦ Régional (Suisse). || Petits fruits : baies comestibles (airelles, fraises des bois, groseilles, etc.).
6.1 Nous nous sommes nourris, mes petits camarades et moi, aux « petits fruits », comme les gens de mon pays appellent les myrtilles, les framboises, les airelles et les fraises des bois, les groseilles et les cassis.
Georges Borgeaud, le Voyage à l'étranger, p. 126.
♦ (1704, Trévoux, in D. D. L.). || Fruits rouges (baies rouges : groseilles, framboises, etc.). || Salade de fruits rouges.
➪ tableau Principaux fruits comestibles ou non.
7 Qu'il soit comme le fruit en naissant arraché (…)
Racine, Athalie, I, 2.
8 (…) il n'y a d'heureux que les enfants qui cueillent un fruit et le portent à leurs lèvres sans penser à autre chose (…)
A. de Musset, André del Sarto, I, 3.
9 L'esprit languit comme les fleurs
Dont naissent les fruits savoureux
Que nous regardons mûrir Sur la colline ensoleillée
Apollinaire, Calligrammes, « Les collines ».
10 Les fruits étaient là; leur poids courbait, lassait déjà les branches (…)
Gide, les Nourritures terrestres, VIII.
11 Dans tous les pays du Monde, les arboriculteurs et les acheteurs de récolte ont une certaine tendance à cueillir les fruits avant leur complète maturité. Ils cherchent à les soustraire le plus rapidement possible aux hasards du climat et aux attaques éventuelles des parasites. Ils savent qu'un fruit bien mûr supporte moins les longs voyages qu'un fruit encore vert.
Paul Robert, les Agrumes dans le monde, p. 205.
♦ Les fruits, symbole de l'automne (⇒ Fructidor), de l'abondance. || Pomone, déesse des fruits. || Le fruit du lotus, célèbre dans l'antiquité. — ☑ Allus. bibl. C'est au fruit qu'on connaît l'arbre (cit. 41). — ☑ Juger l'arbre (cit. 42) d'après les fruits.
♦ ☑ (1682, Bossuet). Loc. Le fruit défendu (→ Arbre, cit. 49) : fruit de l'arbre de la science du bien et du mal, que Dieu avait défendu à Adam et Ève de manger. ⇒ Pomme. || Le fruit qui tenta Ève (→ Allégorie, cit. 2). || Ève invita Adam à manger du fruit défendu.
12 La femme considéra donc que le fruit de cet arbre était bon à manger; qu'il était beau et agréable à la vue. Et en ayant pris, elle en mangea et en donna à son mari, qui en mangea aussi.
Bible (Sacy), Genèse, III, 6.
13 (Saint Grégoire de Nazianze) dit que nous avons goûté en Adam le fruit défendu : qu'en lui nous avons violé la loi de Dieu, et qu'aussi nous avons été chassés en lui du paradis (…)
♦ (1829, Boiste). Fig. || Le fruit défendu : chose dont on doit s'abstenir, et, par ext., chose qu'on désire d'autant plus qu'on doit s'en abstenir. || L'attrait du fruit défendu.
14 Le dîner chez les Mannheim avait donc pour lui l'attrait de la nouveauté, et même du fruit défendu. L'Ève qui lui présentait ce fruit le rendait plus savoureux.
R. Rolland, Jean-Christophe, La révolte, I, p. 422.
15 — « Il a bien assez affaire avec les livres du couloir et avec ceux de sa chambre. Attendons qu'il les ait tous lus », ripostait ma mère.
— Ne craignez-vous pas de prêter à ceux du cabinet un attrait de fruit défendu ?
Gide, Si le grain ne meurt, I, VII, p. 197.
♦ Allus. littér. || « Les fruits passeront la promesse des fleurs » (→ Faucille, cit. 2, Malherbe). || « Voici des fruits, des fleurs… » (→ Cœur, cit. 74, Verlaine). || « Abattre (cit. 4, Balzac) l'arbre pour en avoir les fruits ». ☑ « Couper l'arbre (cit. 37, Montesquieu) au pied et cueillir le fruit ».
16 La tête de Capet était si haute que les petits bourreaux furent obligés de l'abattre pour prendre sa couronne, comme les Caraïbes coupaient le palmier afin d'en cueillir le fruit.
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. VI, p. 263.
♦ Par compar. || Peau fine, duvetée, veloutée comme celle d'un fruit. || Mûrir comme un fruit (→ Croître, cit. 4). ☑ Tomber comme un fruit mûr (→ Essaim, cit. 2).
17 Le reste de sa barbe était tondu ras, et ses joues colorées avaient gardé un velouté frais, comme celui des fruits que personne n'a touchés.
Loti, Pêcheur d'Islande, I, I.
18 Il regardait ses dents, ses yeux, sa peau, ce visage étalé qu'elle offrait comme un fruit.
Martin du Gard, les Thibault, t. II, p. 47.
♦ Par métaphore. || Le fruit lumineux des lanternes vénitiennes (→ Accordéon, cit. 2). || Un fruit de chair (cit. 21 et 31).
19 La douleur est un fruit; Dieu ne le fait pas croître
Sur la branche trop faible encor pour le porter.
Hugo, les Contemplations, I, XXIII.
20 En littérature, en gastronomie, il est certains fruits qu'on mange à pleine bouche dont on a le gosier plein, et si succulents que le jus vous entre jusqu'au cœur.
Flaubert, Correspondance, 35, 11 oct. 1839.
21 Les filles aux yeux creux, de leurs corps amoureuses,
Caressent les fruits mûrs de leur nubilité (…)
Baudelaire, Pièces condamnées, « Lesbos ».
22 Chair ! ô seul fruit mordu des vergers d'ici-bas,
Fruit amer et sucré qui jutes aux dents seules
Des affamés du seul amour (…)
Verlaine, Jadis et Naguère, « Luxures ».
23 Les fleurs tardives que la joie fit éclore dans mon cœur que je croyais à jamais stérile portèrent des fruits.
Proust, les Plaisirs et les Jours, p. 152.
24 (Taine n'utilisait sa théorie de l'art) que pour mieux montrer l'étroite solidarité qui unit l'œuvre d'art aux circonstances dont elle lui paraissait issue, il ne voyait toujours en elle que les fruits de l'arbre de l'histoire; le fruit a sa constitution originale mais il demeure un produit de l'arbre.
René Huyghe, Dialogue avec le visible, p. 422.
♦ ☑ Loc. (1831). Fruit sec, se dit des jeunes gens qui, faute de réussir au terme de leurs études, voient se fermer la carrière à laquelle ils étaient destinés, et, plus généralement, d'une personne qui n'a rien donné de ce qu'elle semblait promettre. ⇒ Raté.
25 Enfin, il y a chance pour des jeunes gens, qui plus tard peuvent se montrer supérieurs, de sortir de l'École (École polytechnique) sans être employés, faute de présenter aux examens définitifs la somme de science demandée. On les appelle des fruits secs, et Napoléon en faisait des sous-lieutenants ! Aujourd'hui le fruit sec constitue en capital une perte énorme pour les familles, et un temps perdu pour l'individu.
Balzac, le Curé de village, Pl., t. VIII, p. 692.
25.1 (…) un personnel politique mal préparé, qui n'avait pas fait ses classes. Non certes des fruits secs, mais des fruits verts.
F. Mauriac, le Nouveau Bloc-notes 1958-1960, p. 119
♦ ☑ (XXe). Fruit vert, se dit d'une jeune fille qui n'est pas encore épanouie (→ Fleur, cit. 27; et aussi espérer, cit. 11).
25.2 (…) les enfants ne me prennent pas au sérieux. Mais tout ce que dit Vierron, c'est parole d'Évangile… Regarde Yvette. Elle est entichée de lui. Et, entre parenthèses, si ce type est un vieux cochon qui aime les fruits verts (…)
Jean-Louis Curtis, le Roseau pensant, p. 110-111.
♦ ☑ Sentir son fruit. ⇒ Sentir. — ☑ Loc. Le ver est dans le fruit.
♦ (1580, Montaigne). Par ext. (Vx). Mets donné au dernier service et consistant en fruits. ⇒ Dessert. || Servir le fruit (Académie). || En être au fruit (→ Assiette, cit. 19; copieux, cit. 1). — REM. En ce sens, fruit est toujours employé au singulier.
26 (…) il se lève (de table) avant le fruit (…)
La Bruyère, les Caractères, XI, 7.
———
II
1 (XIIe; d'après le lat. ecclés.). Littér. || Le fruit de… : enfant, considéré comme produit de sa mère, de l'union des sexes. || Le fruit de vos entrailles est béni (→ Entrailles, cit. 5). || Le fruit d'une union, d'un mariage, de l'amour (→ Entrailles, cit. 6).
27 Elle porte en ses flancs un fruit de cet amour (…)
Corneille, Sertorius, III, 2.
28 (Rome) ne reconnaît point les fruits illégitimes
Qui naissent d'un hymen contraire à ses maximes.
Racine, Bérénice, II, 2.
29 Lucrèce est fille du marquis de Marialva et la mienne : elle est le fruit de notre union (…)
A. R. Lesage, Gil Blas, XII, I.
30 Le premier fruit de notre amour devait serrer ce doux lien (…)
Rousseau, Julie ou la Nouvelle Héloïse, III, Lettre XVIII.
31 (…) j'étais plus heureux que la nouvelle épouse qui sent pour la première fois son fruit tressaillir dans son sein.
Chateaubriand, Atala, Les chasseurs.
32 Si jusque-là la timidité de Louis XVI auprès de sa jeune épouse avait été extrême, sa passion à ce moment ne l'était pas moins, et cette enfant, qui en était le premier fruit, devait être en grande partie son image.
Sainte-Beuve, Causeries du lundi, 3 nov. 1851, t. V, p. 87.
2 (XVIe; d'après le lat. jurid.). Dr. Au plur. « Produits que donne une chose à intervalles périodiques, sans altération ni diminution de sa substance » (Capitant). ⇒ Rapport, revenu. — (1804). || Fruits naturels; fruits industriels; fruits civils. || Fruits pendant par branches ou par racines : produits agricoles encore sur pied, non récoltés. || Les fruits naturels ou industriels pendant par branches ou par racines sont des biens immeubles. || Les fruits peuvent appartenir au propriétaire de la chose, au bénéficiaire d'un usufruit légal ou conventionnel (⇒ Usufruit), au locataire, au possesseur de bonne foi.
33 Les fruits naturels sont ceux qui sont le produit spontané de la terre. Le produit et le croît des animaux sont aussi des fruits naturels. Les fruits industriels d'un fonds sont ceux qu'on obtient par la culture.
Code civil, art. 584.
34 Les fruits civils sont les loyers des maisons, les intérêts des sommes exigibles, les arrérages des rentes. Les prix des baux à ferme sont aussi rangés dans la classe des fruits civils.
Code civil, art. 584.
35 Le simple possesseur ne fait les fruits siens que dans le cas où il possède de bonne foi : dans le cas contraire, il est tenu de rendre les produits avec la chose au propriétaire qui la revendique.
Code civil, art. 549.
♦ (Déb. XXe). Au sing. || Cultiver une terre à moitié fruit, en partageant la récolte, le revenu avec le propriétaire.
———
III (Xe). Fig. (Le, les fruits de…). Résultat avantageux (que produit qqch.). ⇒ Avantage, profit. || Recueillir, récolter le fruit de son travail (→ Ardeur, cit. 45), de ses efforts (→ Déséquilibre, cit. 1). || Jouir du fruit, des fruits de son travail. || Perdre, se laisser ravir le fruit de la victoire. || Il n'en a tiré aucun fruit. || Quel fruit vous revint-il de tout cela ? || Est-ce là le fruit de vos soins, de votre indulgence ? ⇒ Récompense. — ☑ Loc. Vx. Faire du fruit : obtenir des résultats.
36 Quel fruit de ce labeur pouvez-vous recueillir ?
La Fontaine, Fables, XI, 8.
37 La dame était si avare, qu'elle ne me faisait pas la moindre part des fruits qu'elle recueillait de mon industrie et de mes peines.
A. R. Lesage, Gil Blas, X, XII.
38 (…) était-ce possible de perdre, en un quart d'heure, le fruit d'un an de travail ? Qu'avaient-ils fait pour être punis de la sorte ?
Zola, la Terre, II, II.
♦ ☑ Avec fruit, sans fruit : avec profit, sans profit. || Espèces (cit. 33) qui se croisent avec fruit || Travailler avec fruit. ⇒ Utilement. || Il a lu avec fruit les auteurs classiques. || On consultera avec fruit cette étude de X (→ Dépourvu, cit. 3). || Ses efforts ne furent pas sans fruit. ⇒ Infructueux.
39 N'allez pas sur des vers sans fruit vous consumer.
Boileau, Art poétique, I.
40 (…) un volume entier de ses Mémoires pour servir à l'histoire des insectes. On peut le lire avec fruit et sans ennui.
Maeterlinck, la Vie des abeilles, I, II.
♦ (V. 1225). Produit, effet bon ou mauvais (de qqch.). ⇒ Conséquence, effet, produit, résultat. || Cette décision est le fruit de profondes réflexions (→ Examen, cit. 4). || Le fruit de l'expérience (cit. 28). || Une telle erreur ne tarda pas à porter ses fruits. || L'abondance (cit. 9) est le fruit d'une bonne administration. || Le bonheur (cit. 27), fruit de la paix. || Les fruits de l'étude (cit. 4).
REM. Ce sens très ancien de « produit » se confond souvent avec l'emploi métaphorique de fruit en botanique, celui-ci étant le « produit de l'arbre ». Dans des expressions comme « porter ses fruits, recueillir les fruits de… », l'image de l'arbre qui porte des fruits (au sens I., 2.) s'impose à l'esprit.
41 (…) si je ne recueillais pas plus de fruit de mon jardin, que j'en recueille de mon amour.
Molière, la Comtesse d'Escarbagnas, I, 4.
42 On croirait que cet ouvrage (Hamlet) est le fruit de l'imagination d'un sauvage ivre.
Voltaire, Dissertation sur la tragédie, III.
43 (…) la foi dogmatique est un fruit de l'éducation.
Rousseau, les Confessions, II.
44 L'ennui, fruit de la morne incuriosité (…)
Baudelaire, les Fleurs du mal, Spleen et Idéal, LXXVI.
45 La guerre est le fruit de la faiblesse des peuples et de leur stupidité. On ne peut que les plaindre, on ne peut leur en vouloir (…)
R. Rolland, Au-dessus de la mêlée, p. 6.
46 Ma lettre était le fruit de longues réflexions.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. III, XXIII, p. 325.
47 Toute publicité finit par porter ses fruits.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. V, IX, p. 74.
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DÉR. Fruitage, fruité, fruiter, fruiterie, fruiteux, 1. fruitier. — 2. Fruitier, fruitière.
COMP. Affruiter, défruiter, effruiter, fruitarien, fruiticulteur, fruiticulture, presse-fruits.
HOM. 2. Fruit.
————————
2. fruit [fʀɥi] n. m.
ÉTYM. 1680; frit, frid, 1576 (→ Effriter, 1.), et anc. franç. effruiter « épuiser, amoindrir ».
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1 (1680). Techn. Diminution d'épaisseur qu'on donne à un mur à mesure qu'on l'élève, l'inclinaison ne portant que sur la face extérieure du mur et la face intérieure restant verticale.
2 (XXe). Inclinaison légère des colonnes (d'un temple grec).
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COMP. Contre-fruit.
HOM. 1. Fruit.
Encyclopédie Universelle. 2012.