mortel, elle [ mɔrtɛl ] adj. et n.
• 1080; lat. mortalis
1 ♦ Sujet à la mort. Tous les hommes sont mortels. « Il importe de savoir si l'âme est mortelle ou immortelle » (Pascal). « Son âme avait presque abandonné son enveloppe mortelle » (Stendhal). — Dépouille mortelle. — (Choses) littér. Sujet à disparaître. ⇒ éphémère, périssable, temporel. « Nous autres civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles » (Valéry).
2 ♦ N. (XIIIe ) Littér. Être humain. ⇒ homme, 1. personne. Les dieux et les mortels. — Loc. Le commun des mortels. Un heureux mortel.
3 ♦ (fin XIIe) Qui cause la mort, entraîne la mort. ⇒ fatal. Maladie, blessure mortelle. Poison, mélange mortel (cf. Cocktail lytique). Dose mortelle. ⇒ létal; overdose. Coup mortel. ⇒ meurtrier. — Plaie d'argent n'est pas mortelle.
♢ (1080) Qui souhaite, cherche la mort de qqn. Son ennemi mortel.
♢ Péché mortel.
4 ♦ Par exagér. D'une intensité dangereuse. Un froid mortel. « la jalousie mortelle qui me déchirait le cœur » (abbé Prévost).
5 ♦ Extrêmement pénible. Un ennui, un silence mortel. « Voilà trois mortelles heures qu'on les laisse se morfondre » (A. Daudet).
♢ Fam. Extrêmement ennuyeux. ⇒ lugubre, 1. sinistre. C'est mortel, ces réunions. « c'était mortel comme d'habitude » (Sartre).
6 ♦ Fam. Très bon. Mortel, son dernier disque !
⊗ CONTR. Éternel, immortel.
● mortel, mortelle adjectif (latin mortalis) Qui est sujet à la mort, par opposition aux dieux, à l'Être éternel : L'être humain est mortel. Qui est susceptible de mourir à un moment ou à un autre : Nos civilisations sont mortelles. Qui cause ou est propre à causer la mort : Danger mortel. Maladie mortelle. Qui est d'une intensité douloureuse : Froid mortel. Jalousie mortelle. Qui est très fatigant, qui est très ennuyeux : Un ennui mortel. Un conférencier mortel. Qui souhaite la mort, qui va jusqu'à désirer la mort pour quelqu'un d'autre : Un ennemi mortel. ● mortel, mortelle (citations) adjectif (latin mortalis) Paul Valéry Sète 1871-Paris 1945 Nous autres, civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles. Variété, la Crise de l'esprit Gallimard ● mortel, mortelle (expressions) adjectif (latin mortalis) Littéraire. Dépouille mortelle, restes mortels, cadavre. Péché mortel, grave offense à Dieu qui fait perdre la vie de la grâce divine. ● mortel, mortelle (synonymes) adjectif (latin mortalis) Qui est sujet à la mort, par opposition aux dieux...
Contraires :
- immortel
Qui est susceptible de mourir à un moment ou à...
Synonymes :
- périssable
Qui cause ou est propre à causer la mort
Synonymes :
- fatal
Qui est d'une intensité douloureuse
Synonymes :
- cruel
- cuisant
Qui est très fatigant, qui est très ennuyeux
Synonymes :
- ennuyeux
- funèbre
- lassant
- lugubre
- pénible
- sépulcral
- sinistre
Qui souhaite la mort, qui va jusqu'à désirer la mort...
Synonymes :
- irréductible
● mortel, mortelle
nom
Être humain : Le commun des mortels.
● mortel, mortelle (citations)
nom
Jean de La Fontaine
Château-Thierry 1621-Paris 1695
Descartes, ce mortel dont on eût fait un dieu
Chez les païens, et qui tient le milieu
Entre l'homme et l'esprit […].
Fables, les Deux Rats, le Renard et l'Œuf
François Marie Arouet, dit Voltaire
Paris 1694-Paris 1778
Les mortels sont égaux ; ce n'est point la naissance,
C'est la seule vertu qui fait leur différence.
Le Fanatisme ou Mahomet le prophète, I, 4, Omar
Commentaire
Ces deux vers sont repris par Voltaire de sa propre tragédie Ériphyle, 1732 (II, 1, Alcméon).
Eschyle
Éleusis vers 525-Gela, Sicile, 456 avant J.-C.
Quand un mortel s'emploie à sa perte, les dieux viennent l'y aider.
Les Perses, 742 (traduction P. Mazon)
William Shakespeare
Stratford on Avon, Warwickshire, 1564-Stratford on Avon, Warwickshire, 1616
Chair à canon, chair à canon ! — Ils vous rempliront un trou aussi bien que des meilleurs. Eh ! mon cher, des mortels, des mortels.
… Food for powder, food for powder — they'll fill a pit as well as better ; tush, man, mortal men, mortal men.
Henry IV, IV, 2, Falstaff
● mortel, mortelle (expressions)
nom
Heureux mortel, personne qui a de la chance.
mortel, elle
adj. et n.
d1./d Sujet à la mort. Tous les hommes sont mortels.
— La dépouille mortelle de qqn, son cadavre.
|| Subst. être humain. Un heureux mortel.
— Le commun des mortels: les hommes en général.
d2./d Qui cause ou qui peut causer la mort. Danger mortel.
— Ennemi mortel d'une personne, ennemi implacable.
— RELIG CATHOL Péché mortel, qui entraîne la damnation.
d3./d Par exag. Extrême dans son genre. Ennui mortel.
|| Excessivement ennuyeux. Attente mortelle.
⇒MORTEL, -ELLE, adj. et subst.
I. — Adj. et subst.
A. — Adj. Qui est sujet à la mort.
1. [En parlant d'un être vivant (gén. un homme)] Il y avoit là devant nous une créature mortelle, convaincue de notre immortalité (STAËL, Allemagne, t.5, 1810, p.82). Je connais, monsieur, toute l'étendue de la perte que vous avez faite; mais, enfin, nous sommes tous mortels (JOUY, Hermite, t.5, 1814, p.108):
• 1. L'homme vint le dernier des animaux, parent de tous, et proche de quelques-uns. Les termes dont on le désigne encore aujourd'hui marquent son origine: on l'appelle humain et mortel.
A. FRANCE, Vie fleur, 1922, p.498.
2. [P. méton.]
— [En parlant du corps de l'homme] Cette fièvre qui (...) gonflait à la briser chaque veine, et disséquait chaque point de ce corps mortel en des millions de souffrances (DUMAS père, Monte-Cristo, t.2, 1846, p.680). Avec ces griffes légères que la moindre douleur imprime sur un visage mortel (MAURIAC, Journal 1, 1934, p.30).
♦[P. oppos. à la partie immatérielle de l'homme (l'âme, l'esprit)]
RELIG. Corps mortel, chair mortelle. Et, maudissant Don Juan, lui jeta bas Son corps mortel, mais son âme, non pas! (VERLAINE, Œuvres compl., t.1, Jadis, 1884, p.393).
Littér. Dépouille mortelle, restes mortels. Cadavre. Prêt à déposer sa dépouille mortelle dans la terre étrangère (CHATEAUBR., Mém., t.4, 1848, p.217). Le char emportant au Père-Lachaise les restes mortels de Charles Hugo (VERLAINE, Œuvres compl., t.5, Vingt-sept biogr. (E. de Goncourt), 1896, p.319).
Quitter sa dépouille, son enveloppe mortelle. Mourir. Quand l'âme aura quitté son enveloppe mortelle (MAINE DE BIRAN, Journal, 1815, p.81).
♦[P. oppos. à des êtres immatériels (dieux, anges)] Si les anges daignoient revêtir une forme mortelle pour apparoître aux hommes, ce seroit sous les traits de Maria (GENLIS, Chev. Cygne, t.2, 1795, p.54). S'il est vrai qu'un vers d'Homère ait subitement doué Phidias du sentiment de la majesté des dieux, lui ait appris à la représenter vivante à des regards mortels (DUSAULX, Voy. Barège, t.1, 1796, p.15).
La race mortelle. La race humaine. Je veux être par toi présent et favorable à la race mortelle (VALÉRY, Variété III, 1936, p.101).
— [En parlant de la condition de l'Homme] Existence, vie mortelle. Qu'il étoit étonnant d'oser trouver des conformités entre nos jours mortels et les éternels destins du maître du monde! (CHATEAUBR., Génie, t.2, 1803, p.166). 29 jeudi. Ascension — Quelle belle fin de la vie mortelle de Notre-Seigneur Jésus-Christ! (DUPANLOUP, Journal, 1851, p.142):
• 2. Par là, la phrase de Vinteuil avait, comme tel thème de Tristan par exemple, qui nous représente aussi une certaine acquisition sentimentale, épousé notre condition mortelle, pris quelque chose d'humain qui était assez touchant.
PROUST, Swann, 1913, p.350.
3. Au fig. [En parlant d'un inanimé] Qui peut périr, disparaître. Il y avait tout l'amour dans leurs sourires: mais ce n'était qu'un pauvre amour mortel (BEAUVOIR, Tous les hommes mort., 1946, p.47):
• 3. Nous autres, civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles; nous avions entendu parler de mondes disparus tout entiers, d'empires coulés à pic avec tous leurs hommes et tous leurs engins descendus au fond inexplorable des siècles...
VALÉRY, Variété III, 1936, p.201.
B. — Subst. Être humain.
1. Littér. Ranime-toi, foible mortel, à ce spectacle actif de la nature (SAINT-MARTIN, Homme désir, 1790, p.398):
• 4. Quelle est cette étoile qui file,
Qui file, file, et disparaît?
— Mon enfant, un mortel expire;
Son étoile tombe à l'instant.
BÉRANGER, Chans., t.2, 1829, p.200.
SYNT. Audacieux, aveugle, chétif, faible, grossier, humble, insensible, fortuné, malheureux, misérable, pauvre, perfide, vil mortel.
2. [En constr. dans des loc. figées]
♦Un(e) simple mortel(le). Une personne comme les autres. Après tout, Marie n'avait-elle pas été une simple mortelle, une faible femme qui avait connu toutes les misères de la vie (MONTALEMBERT, Ste Élisabeth, 1836, p.CIII).
♦Un heureux mortel. Une personne qui a de la chance. Je vous félicite, mon cher, vous êtes un heureux mortel (TAINE, Notes Paris, 1867, p.189).
♦Les mortels. L'ensemble des humains, l'humanité. La lumière du jour si chère aux mortels (CHATEAUBR., Martyrs, t.3, 1810, p.207).
♦Le commun des mortels. Le plus grand nombre des hommes. M. Godeau ne pouvait plus respirer l'air du commun des mortels qui lui était départi (JOUHANDEAU, M. Godeau, 1926, p.245).
II. — Adjectif
A. — Qui cause la mort. J'ai eu la bêtise de consulter un médecin (...) et bien entendu il m'a trouvé trois ou quatre maladies mortelles (MÉRIMÉE, Lettres ctesse de Montijo, t.2, 1841, p.47):
• 5. Quelle, et si fine, et si mortelle,
Que soit ta pointe, blonde abeille,
Je n'ai, sur ma tendre corbeille,
Jeté qu'un songe de dentelle.
VALÉRY, Charmes, 1922, p.118.
— Être mortel à, pour qqn, qqc. L'heure où l'ombre est mortelle Au voyageur suant qui s'arrête sous elle (BARBIER, Ïambes, 1840, p.127).
SYNT. Accident, breuvage, choc, combat, coup, danger, mal, péril mortel; balle, blessure, dose, émanation, maladie, menace, morsure, plaie mortelle.
♦Proverbe. Plaie d'argent n'est pas mortelle. Plaie d'argent n'est pas mortelle, dit-on; mais ces plaies-là ne peuvent pas avoir d'autre médecin que le malade (BALZAC, Illus. perdues, 1843, p.647).
♦RELIG. CATHOL. Péché mortel. Péché qui enlève à l'âme la grâce de la vie éternelle. Ils communient tous les dimanches! Je vous garantis qu'ils n'accepteraient pas de vivre en état de péché mortel (BEAUVOIR, Mém. j. fille, 1958, p.279).
B. — P. hyperb. [Caractérisant un subst. avec une valeur intensive]
1. Qui est pénible, désagréable ou ennuyeux à mourir.
— [Le subst. désigne des circonstances, un événement auquel une pers. est confrontée] Il y a de cette ville à cette autre dix mortelles lieues (Ac. 1798-1935). Deux heures, deux heures mortelles pour le pauvre amoureux se passèrent ainsi, sans que M. Müller vînt à bout de trouver l'étymologie de ranunculus (KARR, Sous tilleuls, 1832, p.25). Ce n'est pas de sa faute si je n'ai pas encore pris mal. Elle établit dans les wagons des courants d'air mortels (MAURIAC, Génitrix, 1923, p.362).
— [Le subst. désigne le sentiment éprouvé face à un événement pénible ou ennuyeux] Puisque nous voici ensemble, ma chère, dit-il en s'asseyant sur le sofa, au mortel déplaisir de Valentine, je suis résolu de vous entretenir d'une affaire assez importante (SAND, Valentine, 1832, p.278):
• 6. «Daïdha!!!» s'écria la foule... C'était elle.
Qui, sous l'horrible poids d'une angoisse mortelle,
Au vague bruit d'enfants, par son coeur entendu,
Était sortie au jour à ses pas défendu...
LAMART., Chute, 1838, p.895.
SYNT. Dégoût, ennui mortel; inquiétude, tristesse mortelle.
2. [En parlant d'un sentiment hostile] Qui est si aigu qu'il pourrait être homicide. Antipathie mortelle; ressentiment mortel. En butte à la haine mortelle de ces hommes dont il dénonçait les crimes (CLEMENCEAU, Vers réparation, 1899, p.184).
♦Ennemi mortel. Personne qui en hait une autre ou qui en est profondément haïe. Chacun y eût gardé la parole pendant vingt minutes et fût resté l'ennemi mortel de son antagoniste dans la discussion (STENDHAL, Souv. égotisme, 1832, p.131).
3. Qui évoque la mort, qui a les caractéristiques propres à la mort. À ces mots, une pâleur mortelle couvrit le visage de Corinne (STAËL, Corinne, t.2, 1807, p.339). Je n'entendais aucun bruit. Ce silence mortel finit par m'effrayer si bien que je me levai sur la pointe des pieds nus et marchai vers la clarté (DUHAMEL, Notaire Havre, 1933, p.188).
Prononc. et Orth.:[]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. Sens passif «sujet à la mort» 1. fin Xe s. om mortal (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 339); ca 1160 subst. plusor mortal (Eneas, 2285 ds T.-L.); 2. ca 1050 la mortel vithe (St Alexis, éd. Chr. Storey, 63); 3. 1269-78 richeces mortex (JEAN DE MEUN, Rose, éd. F. Lecoy, 5227). B. Sens actif 1. ca 1100 «qui souhaite la mort, qui porte la mort» sun mortel enemi (Roland, éd. J. Bédier, 461); ca 1120-50 mortel serpent [Satan] (Grant mal fist Adam, I, 2 ds T.-L.); 1155 mortel tirant (WACE, Brut, 6131, ibid.); 2. ca 1100 une mortel bataille (Roland, 658); id. mortel rage (ibid., 747); 1155 mortel häine (WACE, op. cit., 14410, ibid.) 1er quart XIIIe s. relig. chrét. pekié mortal (RENCLUS DE MOLLIENS, Miserere, 71, 1, ibid.); 3. 1572 mortel poison (AMYOT, Hommes illustres, Pompée, 50, éd. Gérard-Walter, t.2, p.261 ds Œuvres). C. «de mort, concernant la mort» 1130-40 cri mortel (GEOFFROI GAIMAR, Estoire des Engleis, éd. A. Bell, 4421: Li reis criad un cri mortel, L'aneme s'en vait ...); 1174-87 lit mortel (CHRÉTIEN DE TROYES, Perceval, éd. F. Lecoy, 4816). Empr. au lat. mortalis «sujet à la mort, périssable; humain, mortel; des mortels» — subst. «être humain» — ; «mortel, qui donne la mort», spéc. mortale crimen, mortalia delicta «péché mortel» dans la lang. chrét. Fréq. abs. littér.:3398. Fréq. rel. littér.:XIXes.: a) 7739, b) 4143; XXe s.: a) 3901, b) 3280. Bbg. HENNING (G.N.). Mortel, ange et démon. Mod. Lang. Notes. 1938, t.53, p.119.
mortel, elle [mɔʀtɛl] adj. et n.
ÉTYM. V. 1050; mortal, v. 980; du lat. mortalis, rac. mors. → Mort.
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1 Sujet à la mort; qui doit mourir. || Tous les hommes sont mortels (→ Laisser, cit. 39). || Êtres mortels (→ Échanger, cit. 6); des beautés mortelles (→ Humaniser, cit. 4). || « Il importe… de savoir si l'âme est mortelle ou immortelle » (cit. 5, Pascal). — Spécialt. (Relig.). Humain, périssable… || La nature changeante (cit. 1 et 2) et mortelle (Bossuet). || Vie mortelle (par oppos. à vie spirituelle). → Cours, cit. 16. — Enveloppe (cit. 4), chair mortelle. || Dépouille mortelle (→ Goupillon, cit. 2).
1 Justes, ne craignez pas le vain pouvoir des hommes;
Quelque élevés qu'ils soient, ils sont ce que nous sommes;
Si vous êtes mortels, ils le sont comme vous.
J.-B. Rousseau, Odes, I, 3.
2 (…) le premier crime, c'est moi (Jupiter) qui l'ai commis en créant les hommes mortels. Après cela, que pouviez-vous faire, vous autres, les assassins ? Donner la mort à vos victimes ? Allonc donc; elles la portaient déjà en elles; tout au plus hâtiez-vous un peu son épanouissement.
Sartre, les Mouches, II, II, 5.
♦ Par ext. (Choses). Sujet à disparaître, à finir (→ Civilisation, cit. 13, Valéry).
3 Tout est mortel, tout vieillit en ce monde (…)
Ronsard, Premier livre des poèmes, « Discours des choses humaines ».
2 N. (XIIIe). Littér., sauf dans certaines expressions. Être humain. ⇒ Homme, personne (→ Aïeul, cit. 7, Voltaire; égal, cit. 11; exception, cit. 1). || Les mortels, les pauvres, les simples mortels : l'espèce humaine. — Littér. || Les dieux et les mortels (→ Apaiser, cit. 5; esprit, cit. 35). || Le commun des mortels (→ Livre, cit. 42). — Allus. || « Glissez mortels, n'appuyez (cit. 29) pas ».
4 On n'entend dans les funérailles que des paroles d'étonnement de ce que ce mortel est mort (…)
Bossuet, Sermon pour IVe sem. carême, « Sur la mort » (1666).
5 Pendant que des mortels la multitude vile,
Sous le fouet du Plaisir (…)
Baudelaire, Nouvelles Fleurs du mal, VII.
6 Ah, ce n'était qu'une petite mortelle, après tout; mais une si douce petite mortelle.
Valery Larbaud, Amants, heureux amants…, I.
♦ (1694). Fam. || Un heureux mortel : un homme qui a de la chance.
7 — Et comme ça, heureux mortels, vous partez en permission ?
Courteline, le Train de 8 h 47, II, II.
3 (Fin XIe). Qui cause la mort, entraîne la mort. ⇒ Fatal. — REM. Dans ce sens, mortel ne se dit plus, comme au XVIIe s., d'armes, d'instruments… : un couteau mortel (Racine, Iphigénie, III, 6). || Maladie (cit. 3) mortelle. || C'est grave mais ce n'est pas mortel. || Cas mortel (→ Épidémie, cit. 3). || Danger mortel, de mort (→ Avouer, cit. 27). || Plaie, blessure mortelle (→ Homicide, cit. 9). — ☑ Prov. Plaie d'argent (supra cit. 58) n'est pas mortelle. || Coup (cit. 10) mortel. ⇒ Meurtrier (→ Gorge, cit. 1). || Poison mortel (→ Aliment, cit. 1). || D'un effet rapidement mortel. ⇒ Foudroyant. — Par ext. || Pâleur mortelle : indice de mort (→ Évanouissement, cit. 3).
♦ Par métaphore. || Coup (cit. 35) mortel. || « D'une atteinte imprévue (cit. 1) aussi bien que mortelle ».
♦ Spécialt. Relig. Qui entraîne la mort de l'âme. || Péché mortel (par oppos. à véniel).
4 (V. 1131). Par exagér. Qui fait souffrir cruellement et dangereusement. || Froid mortel (→ Flageoler, cit. 1). || Chaleur mortelle (→ Été, cit. 2). || Frisson mortel (→ Annonciation, cit. 2). || Jalousie (cit. 18), peine, douleur mortelle (→ Idée, cit. 25). || Angoisses (cit. 7), transes mortelles. || Frayeur, terreur mortelle. || Regret mortel (→ Cause, cit. 27). || Mortel affront (cit. 1).
8 Un mortel désespoir sur son visage est peint.
Racine, Phèdre, V, 5.
9 Vous me mettez dans des embarras mortels; dîner avec Vautrin (…) c'est lui serrer la main, c'est abjurer, avouer les torts, c'est promettre de n'en plus avoir.
Sainte-Beuve, Correspondance, 1218, 11 juin 1841.
♦ Mortel à… ⇒ Fatal, funeste. || Tout nous peut être mortel (→ Justesse, cit. 4). || Ennui (cit. 26) mortel au cœur.
5 (1080). Qui souhaite, qui cherche la mort de qqn. || Ennemi (cit. 3) mortel (→ Furet, cit. 1). — Haine (cit. 30), aversion mortelle (→ Faction, cit. 3).
10 Il y avait des jours où ils étaient les meilleurs amis du monde, et d'autres où ils étaient ennemis mortels.
Diderot, Jacques le fataliste, Pl., p. 552.
6 Extrêmement pénible. ⇒ Lugubre, pénible. || Silence mortel. || Cette soirée est d'une tristesse mortelle. || Attendre trois mortelles heures, trois heures pénibles, douloureuses ou simplement ennuyeuses… ⇒ Long (→ Arme, cit. 2). Fam., par exagér. Très ennuyeux, sinistre.
10.1 (…) nous nous rendons à la Scala, où l'on joue deux actes de l'opéra de Marino Faliero (…) L'opéra est un peu mortel, tant les acteurs sont médiocres chanteurs, et tant les chanteurs sont détestables acteurs.
Rodolphe Töpffer, Voyages en zigzag, p. 45.
11 (Il) baissa lentement la tête, si bien que son menton touchait sa poitrine. Un silence mortel survint, qui dura très longtemps, peut-être un quart d'heure.
G. Duhamel, Salavin, VI, XXVI.
12 J'ai dîné chez Jacques, c'était mortel comme d'habitude.
Sartre, l'Âge de raison, I.
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CONTR. Immortel. — Vivifiant.
DÉR. Mortellement.
Encyclopédie Universelle. 2012.