opposer [ ɔpoze ] v. tr. <conjug. : 1> I ♦
1 ♦ (1312) Alléguer (une raison qui fait obstacle à ce qu'une personne a dit, pensé). ⇒ invoquer, objecter, prétexter. « Il refuse ? Quel prétexte vous a-t-il opposé ? » (F. Mauriac). Il n'y a rien à opposer à cela. ⇒ répondre, rétorquer. On lui oppose qu'il est trop jeune.
2 ♦ (XVIe) Mettre en face, face à face pour le combat. Opposer une armée puissante à l'ennemi.
♢ Opposer une personne à une autre, la faire entrer en lutte, en compétition avec une autre. ⇒ armer, dresser, exciter (contre). Des questions d'intérêt les opposent. ⇒ diviser. Conflit qui oppose deux pays. — Sport Match qui oppose deux équipes.
3 ♦ (XVIe) Placer (qqch.) en face pour faire obstacle. Opposer une digue aux crues d'un fleuve. — Présenter (un obstacle). La résistance qu'oppose le mur.
♢ (Abstrait) « quand on oppose à leur agitation le silence et la froideur » (Montaigne). — Dr. Opposer l'incapacité du mineur avec qui on a contracté (⇒ opposabilité, 2o) .
♢ (1762) Juxtaposer (des éléments opposés); mettre en opposition, en contraste. Opposer deux couleurs, le noir au blanc.
5 ♦ (XVIIe) Cour. Montrer ensemble, comparer (deux choses totalement différentes) (cf. Mettre en balance, en contraste, en face). Opposer le courage et la lâcheté, à la lâcheté. « J'ai choisi Burrhus pour opposer un honnête homme à cette peste de cour » (Racine). — Par ext. Mettre en comparaison, en parallèle avec. Quels orateurs pouvait-on opposer à Cicéron, à Sénèque ?
♢ Donner, présenter comme totalement différent, ou comme contraire. Il est absurde d'opposer l'âme au corps.
II ♦ S'OPPOSER v. pron.
1 ♦ (1495) (Personnes) Faire obstacle ou mettre obstacle. ⇒ contrarier, contrecarrer, contredire, empêcher, interdire (cf. Être, aller, s'élever, se dresser contre). Parents qui s'opposent à un mariage. S'opposer aux décisions, aux volontés de qqn. Je m'y oppose formellement. Il s'oppose à ce que vous preniez de telles responsabilités.
♢ Agir contre, résister à (qqn); agir à l'inverse de (qqn). ⇒ braver, contrer, résister (cf. Se dresser contre, tenir tête à). Enfant qui s'oppose ouvertement à son père (cf. Heurter de front). « En toutes choses, d'instinct, je m'opposais à lui » (France). — Absolt Le moi se pose en s'opposant.
2 ♦ (1667) Être en face pour faire obstacle. Rare Armée qui s'oppose à une autre (cf. Faire front, faire face).
♢ Cour. (Abstrait) Faire obstacle. ⇒ empêcher, 1. entraver. Les préjugés s'opposaient aux progrès de la science. Leur religion s'y oppose. ⇒ défendre, interdire. Rien ne s'oppose plus à leur union.
3 ♦ Faire contraste. Couleurs qui s'opposent. — Être totalement différent (⇒ opposé), être le contraire. ⇒ 1. différer. « Haut » s'oppose à « bas », est opposé à « bas » (⇒ opposition) .
⊗ CONTR. Accorder, acquiescer, appuyer, céder. Coopérer, correspondre, ressembler. Concilier, rapprocher, réconcilier.
● opposer verbe transitif (latin opponere, placer devant, avec l'influence de poser) Mettre, placer des choses vis-à-vis, face à face : Opposer deux statuettes dans une vitrine. Faire entrer deux personnes, deux groupes en lutte, les dresser l'un contre l'autre : Le conflit a opposé un petit pays à un envahisseur puissant. Faire s'affronter deux personnes, deux groupes, les mettre face à face dans une compétition, un débat : Match qui oppose deux équipes internationales. Mettre côte à côte des choses qui font contraste ; comparer des choses, des personnes différentes de façon à en faire ressortir les différences : Opposer deux théories dans une dissertation. Opposer deux hommes politiques. Placer quelque chose comme obstacle : Les ingénieurs ont opposé un barrage à la montée des eaux. Exercer une force de résistance, une action, une force contraire : La porte n'a opposé que peu de résistance à leurs coups répétés. Présenter à quelqu'un quelque chose comme contradiction, objection : Opposer un argument à un adversaire. ● opposer (expressions) verbe transitif (latin opponere, placer devant, avec l'influence de poser) Opposer un refus, une résistance, refuser, résister. ● opposer (synonymes) verbe transitif (latin opponere, placer devant, avec l'influence de poser) Faire entrer deux personnes, deux groupes en lutte, les dresser...
Synonymes :
- élever contre
- jeter contre
Contraires :
- accorder
- réconcilier
Mettre côte à côte des choses qui font contraste ; comparer...
Synonymes :
- dresser contre
Contraires :
- comparer
Présenter à quelqu'un quelque chose comme contradiction, objection
Synonymes :
- alléguer
- avancer
- invoquer
- mettre en avant
- répondre
opposer
v.
rI./r v. tr.
d1./d Présenter, mettre en face de (comme réplique, résistance, obstacle, etc.). Je lui ai opposé mes intérêts. Opposer une digue à un torrent.
— DR Opposer la caducité d'un acte.
d2./d Mettre en lutte, en rivalité.
d3./d Mettre en vis-à-vis; disposer de manière à faire contraste. Opposer deux miroirs.
d4./d Comparer en soulignant les différences. Opposer Aristote à Platon.
rII./r v. Pron.
d1./d Faire obstacle. S'opposer à une entreprise.
d2./d S'affronter. Orateurs, armées qui s'opposent.
d3./d être vis-à-vis; former un contraste. Ornements qui s'opposent.
⇒OPPOSER, verbe trans.
I. A. —[Correspond à opposition A] Rare. Placer deux choses face à face, mettre vis-à-vis. Opposer une porte feinte à la porte d'entrée (Ac.). Mais sur la tranche que ces plateaux de molasse opposent aux vallées, se succèdent des bourgs ou villages (VIDAL DE LA BL., Princ. géogr. hum., 1921, p.176). Ça vous plaît qu'il ait cinq doigts à chaque main et qu'il puisse opposer le pouce aux autres doigts (SARTRE ds Lar. Lang. fr.).
B. —1. [Correspond à opposition B 1] Mettre en contraste. Opposer deux couleurs. Courbet et Manet avaient échoué à rendre l'éclat et les délicatesses de la lumière, parce qu'ils ne savaient guère qu'opposer le clair et le sombre, le noir et le blanc (HOURTICQ, Hist. art, Fr., 1914, p.428). C'est merveille de voir la liberté avec laquelle (...) [Mozart] serre et desserre les formes, varie les timbres et oppose les voix (GHÉON, Prom. Mozart, 1932, p.208).
2. Mettre en balance deux choses, deux personnes différentes.
a) Mettre en parallèle de manière à faire valoir les différences ou ressemblances. On osa la juger [la doctrine d'Aristote] et la combattre; on lui opposa Platon (CONDORCET, Esq. tabl. hist., 1794, p.121):
• 1. Crédules et abstraits, ils opposent le fond à la forme; opposition qui n'a de sens que dans le monde pratique, celui dans lequel il y a échange immédiat de paroles contre actes et d'actes contre paroles.
VALÉRY, Variété III, 1936, p.26.
— En partic. Mettre en concurrence. Si la duchesse eût daigné avoir recours à la moindre coquetterie, elle eût conquis ce coeur, par exemple, en lui opposant un rival (STENDHAL, Chartreuse, 1839, p.145).
b) Présenter comme totalement différent. Cette femme a été conduite machinalement à faire cette phrase par l'antithèse banale des deux mots bon et bête que l'on oppose fort souvent l'un à l'autre dans notre langue (DELÉCLUZE, Journal, 1826, p.357):
• 2. Je crois qu'il n'y a pas là deux mondes séparés, le spirituel et le matériel, et qu'il est vain de les opposer. Ce sont deux aspects d'un même et unique univers; comme il est vain d'opposer l'âme et le corps.
GIDE, Journal, 1949, p.338.
C. —Opposer à
1. Placer quelque chose de manière à faire obstacle à quelque chose. Ce sont les maladies qui, parfois, déciment les écrevisses sans que l'on puisse rien opposer au fléau (COUPIN, Animaux de nos pays, 1909, p.407).
— [Dans un cont. métaph.] C'est par centaines de mille que les paysans russes de la terre noire se précipitaient en Sibérie, si le gouvernement russe n'eût opposé une digue à l'irruption trop brusque du flot (VIDAL DE LA BL., Princ. géogr. hum., 1921, p.46).
— En partic.
♦Répondre par. M. de Vaudreuil crut donc devoir opposer la ruse à la ruse (BAUDRY DES LOZ., Voy. Louisiane, 1802, p.90). Elle ne lui a pas fait un seul reproche; elle ne lui a opposé que le refus le plus obstiné et la plus terrassante douceur (BARB. D'AUREV., Mémor. pour l'A... B..., 1864, p.438). Ayant ouvert, il crut reconnaître de ces gens dont Monsieur de Meillan lui disait qu'il fallait leur opposer la plus grande inertie (MIOMANDRE, Écrit sur eau, 1908, p.242).
♦Alléguer, objecter. Aimer d'un même amour des êtres dissemblables à des époques différentes, est peut-être le plus sûr des arguments à opposer aux négateurs de l'immortalité (MILOSZ, Amour. initiation, 1910, p.127):
• 3. Quelle objection juridique pourrait opposer la société bourgeoise après les précédents légaux qu'elle-même a créés?
JAURÈS, Ét. soc., 1901, p.235.
2. [L'obj. désigne des pers.] Mettre en face de quelqu'un, face à face pour un combat, une compétition. Comment oseraient-ils me combattre seuls (...) N'eussent-ils que mille hommes à t'opposer, ils te les opposeraient (A. FRANCE, Voie glor., 1915, p.64). Abusant de la servitude militaire, ils vont jusqu'à nous opposer les poitrines de certaines troupes professionnelles (DE GAULLE, Mém. guerre, 1954, p.422).
— JEUX, SPORTS. Un débat entre l'Est et l'Ouest incarné par une partie d'échecs qui oppose deux champions qui sont aussi, de plus ou moins bon gré, champions de leurs systèmes politiques respectifs (Télérama, 10 avr. 1985, p.29).
— Faire s'affronter. C'est là tout le sens du conflit qui oppose Ingres à Delacroix (HUYGHE, Dialog. avec visible, 1955, p.206).
II. —Empl. pronom.
A. —Rare. ,,Être en face, vis-à-vis`` (ROB., Lar. Lang. fr.).
B. —1. Contraster (avec). La basse harmonique se dégage de la mélodie, s'oppose à elle et en souligne l'articulation (SCHAEFFNER, Orig. instrum. mus., 1936, p.61):
• 4. Il y a aussi les autres coiffures (...) surmontées d'aigrettes de fleurs raides, dont les couleurs s'opposent deux par deux et se marient étrangement.
ARTAUD, Théâtre et son double, 1938, p.71.
2. Être le contraire de. Le beau s'oppose au laid. Les yeux saillants, à fleur de tête, s'opposent aux yeux profondément enfoncés (RICHER, Nouv. anat. artist., t.2, 1920, p.123). Pour la logique de l'inconscient le terme composé amour-haine s'oppose à l'indifférence (CHOISY, Psychanal., 1950, p.41).
C. —S'opposer à. Faire obstacle à quelque chose/quelqu'un.
1. Résister (à), combattre. Deux champions qui s'opposent. Les forces allemandes qui s'opposaient à l'avance de l'armée (JOFFRE, Mém., t.1, 1931, p.437).
2. [Le suj. désigne une ou des pers.]
a) Interdire. Toute une famille s'oppose à un mariage (BALZAC, Cous. Bette, 1846, p.363). Je m'oppose à la vente! (R. BAZIN, Blé, 1907, p.261):
• 5. Je n'ai pas besoin de vous dire que je m'oppose formellement à un pareil émiettement. Nos généraux et nos états-majors ne le cèdent en rien aux leurs. Nous refusons absolument de laisser employer nos moyens en détail par nos alliés.
DE GAULLE, Mém. guerre, 1954, p.636.
♦S'opposer à ce que + subj. Et moi je m'oppose à ce qu'on le prenne [ce monsieur] (BECQUE, Corbeaux, 1882, III, 3, p.165).
b) Agir contre quelqu'un, braver quelqu'un. Mon grand mobile en m'opposant à Bock n'avait pas été de sauver un principe, mais de me trouver sur place quand les fouilleurs arriveraient à la trappe (AMBRIÈRE, Gdes vac., 1946, p.348).
3. Empêcher, faire obstacle à. Ici, rien ne restait du monde, qu'une nuit à laquelle Tchen s'accordait d'instinct comme à une amitié soudaine: ce monde nocturne, inquiet, ne s'opposait pas au meurtre (MALRAUX, Cond. hum., 1933, p.187). L'abstraction pour Rambert était tout ce qui s'opposait à son bonheur (CAMUS, Peste, 1947, p.1291).
Prononc. et Orth.:[], [o-], (il) oppose [], [o-]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. 1176 oposer «objecter» (CHRÉTIEN DE TROYES, Cligés, éd. A. Micha, 4364); 2. a) ca 1224 «résister, se mettre en opposition» (Compl. de Jerus., ap. BARTSCH, Lang. et litt. fr., 376, 10 ds GDF. Compl.); b) 1431 part. prés. subst. «qui s'oppose à» (Enq., ap. VARIN, Arch. admin. de Reims, 1, 48, ibid.); 1751 «hostile au pouvoir établi» (VOLTAIRE, Louis XIV, 37 ds LITTRÉ); c) 1580 «placer de façon à faire obstacle» (MONTAIGNE, Essais, éd. P. Villey, L. II, XII, p.598); d) 1671 «opposer une personne à une autre» (MOLIÈRE, Psyché, Prol.); 3. a) 1321 «placer (une chose) vis-à-vis d'une autre» (Donat. Font.-les-Blanches ds GDF. Compl.); b) 1681 part. passé subst. «chose ou personne d'une nature directement contraire» (MENESTRIER, Abrégé méthod. des principes héraldiques, p.155); c) 1873 «côté opposé, revers d'une monnaie» (Journ. Off., 18 févr., p.1186, 3e col. ds LITTRÉ Suppl. 1877). B. Mil. XIIe s. verbe pronom. «se rebeller, désobéir» (Jeu d'Adam, éd. W. Noomen, 595); 1480 s'opposer à «refuser son accord à» (Mystere V. Testament, éd. J. de Rothschild, II, 334); 2. 1845-46 à l'opposé «au contraire» (BESCH.); 1857 à l'opposé de «du côté opposé à» (FROMENTIN, Été Sahara, p.99). Empr. au lat. opponere «placer devant», «se dresser contre quelqu'un», «opposer comme obstacle, comme objection», francisé d'apr. poser. Fréq. abs. littér.:4213. Fréq. rel. littér.: XIXe s.: a) 7071, b) 2897; XXe s.: a) 3993, b) 7930.
opposer [ɔpoze] v. tr.
ÉTYM. 1165, v. intr., « faire une objection »; du lat. opponere, de ob- et ponere (→ Poser), refait d'après poser.
❖
1 (1636). Rare. Placer en face de…; mettre vis-à-vis. || Opposer deux objets (⇒ Adosser, affronter), deux motifs décoratifs… (→ ci-dessous, Opposé, 1.). || Opposer un objet à un autre.
♦ (1762). Fig. Juxtaposer (des éléments opposés); mettre en opposition (2.), en contraste. || Opposer deux couleurs. || Opposer les ombres aux lumières.
2 (XVIIe). Cour. Montrer ensemble, comparer (deux choses totalement différentes). ⇒ Balancer, comparer (→ Mettre en balance, en contraste, en face…) || Opposer une chose à son contraire (cit. 13). || Opposer le vice à la vertu (→ Agneau, cit. 3), le vice et la vertu.
1 J'ai choisi Burrhus pour opposer un honnête homme à cette peste de cour (…)
Racine, Britannicus, 2e préface.
2 (…) nous estimerons qu'un verdict est absurde en l'opposant au verdict qu'en apparence les faits commandaient.
Camus, le Mythe de Sisyphe, p. 47.
♦ Par ext. (En parlant de personnes, de choses comparables en nature ou en valeur). Mettre en comparaison, en parallèle avec… || Quels orateurs pouvait-on opposer à Cicéron, à Sénèque ? (Académie).
♦ Donner, présenter comme totalement différent, ou comme contraire. || Il est vain d'opposer l'âme au corps (→ Matériel, cit. 2). || Gautier oppose l'art et la morale. || Opposer deux cultures (→ Ignorant, cit. 13). || Opposer le joli (cit. 7) au beau. || Opposer et comparer (cit. 3) des synonymes. — Conception qui oppose l'être au devenir (cit. 14).
3 (1580). Placer (qqch.) en face pour faire obstacle; présenter (un obstacle). || Opposer une digue à la mer, aux crues d'un fleuve. ⇒ Élever (contre). Par métaphore. || Opposer une digue (cit. 4) aux désordres, aux passions… || La famille oppose à l'étranger un bloc (cit. 6) sans fissure. || La résistance qu'un objet nous oppose (→ Immatérialisme, cit.).
♦ (Abstrait). || Opposer sa volonté à celle de quelqu'un. || Opposer la force à la force. ⇒ Répondre (répondre à la force par la force). || « Le juste opposera le dédain à l'absence » (→ Muet, cit. 9, Vigny). || Il oppose à l'amour un cœur inaccessible (→ Attaquer, cit. 22). — Forcer les résistances qu'on nous oppose (→ Arme, cit. 34). || Opposer la force d'inertie (cit. 4). || Nous n'avons rien à leur opposer que notre innocence. || Écolier qui oppose une impassibilité (cit. 2) dédaigneuse aux professeurs. || Elle opposa à ma fougue un refus (→ Inébranlable, cit. 8).
3 Ceux qui ont à négocier avec des femmes têtues peuvent avoir essayé (éprouvé) à quelle rage on les jette, quand on oppose à leur agitation le silence et la froideur (…)
Montaigne, Essais, II, XXXI.
4 Mais dans l'âge des illusions, de l'inexpérience et des besoins, où les séducteurs nous assiègent pendant que la misère nous poignarde, que peut opposer une enfant à tant d'ennemis rassemblés ?
Beaumarchais, le Mariage de Figaro, III, 16.
5 (…) je résolus d'opposer l'impertinence à l'impertinence.
Balzac, le Lys dans la vallée, Pl., t. VIII, p. 1028.
6 C'est ce jour-là (20 juin 1792) que Louis XVI, à la foule qui l'insultait et le menaçait, opposa son courage résigné et tranquille et coiffa le bonnet rouge qui lui était tendu.
J. Bainville, Hist. de France, XVI, p. 359.
7 (…) donner sans retard aux peuples menacés un moyen d'opposer leur veto radical à la politique périlleuse des gouvernements.
Martin du Gard, les Thibault, t. VI, p. 170.
♦ Dr. || Opposer l'incapacité (cit. 6) du mineur avec qui on a contracté (⇒ Opposable; opposabilité).
4 (1312). Spécialt. Alléguer (une raison qui s'oppose à ce qu'une personne a dit, pensé). ⇒ Alléguer, objecter, prétexter. || Il a opposé à ma demande les difficultés de trésorerie. || J'opposerai à ceci que nous n'avons aucune preuve. || Vainement opposerait-on le consentement de la victime, qui n'est pas justificatif (→ Duel, cit. 5). || Il n'y a rien à opposer à cela. ⇒ Répondre.
8 — Il refuse ?… Quel prétexte-vous a-t-il opposé ? — Il a dit qu'il n'avait pas le temps… — Allons donc ! Il a dû trouver d'autres raisons (…)
F. Mauriac, le Sagouin, I, p. 13-14.
5 (1580). Mettre en face, face à face pour le combat. || Opposer une armée puissante à l'ennemi. || Il lui oppose des troupes fraîches (1. Frais, cit. 31). || Opposer aux escadres ennemies des escadres d'égale valeur (→ Globalement, cit.). || Les mirmillons et les rétiaires qui leur sont opposés (→ Gladiateur, cit. 2). — Spécialt. (Sports). || Match qui oppose les boxeurs X et Y, les équipes de Paris et de Reims.
♦ (1728). Fig. || Opposer une personne à une autre, la faire entrer en lutte contre une autre, en compétition avec une autre. ⇒ Armer, braquer, dresser, exciter (contre). || L'amour des beaux esprits… ne pouvait m'opposer un moins noble adversaire (cit. 4). || Des questions d'intérêt les opposent. ⇒ Désaccorder, diviser. || Querelle qui oppose deux amis, conflit qui oppose deux pays.
9 Le ridicule excès d'un fol entêtement
Va jusqu'à m'opposer une petite fille !
Molière, Psyché, Prologue.
10 (…) leurs vaines tentatives pour combattre ces barbares ou pour les opposer les uns aux autres.
Michelet, Hist. de France, II, III.
——————
s'opposer v. pron.
1 Rare. Être en face, faire face. || Le Nord s'oppose au Midi. — (Récipr.). Se faire face. || Statues qui s'opposent de chaque côté d'un portail.
2 (XIXe). Faire contraste. || Couleurs qui s'opposent.
♦ Être totalement différent (⇒ Opposé), être le contraire. ⇒ Différer. || Le beau s'oppose au laid. || Haut s'oppose à bas. ⇒ Opposition. || La vie spirituelle s'oppose à la vie corporelle (→ Embarrasser, cit. 26). || L'austérité (cit. 12) de Michel-Ange s'oppose à la manière de Vinci. — (Récipr.). || Pays qui s'opposent par leurs différences (→ Équilibre, cit. 20). || Les livres de Balzac s'opposent et se complètent (→ Épauler, cit. 4). || Inégalités qui s'opposent et se compensent (cit. 8). — Absolt. || Le moi se pose en s'opposant.
11 Courage actif et courage passif. Différents jusqu'à s'opposer.
Gide, Journal, 2 sept. 1914.
3 (1667). Être en face pour faire obstacle. || Armée qui s'oppose à une autre. ⇒ Face, front (faire face, front).
♦ Fig. Faire obstacle. ⇒ Empêcher, entraver. || Le péché s'oppose à la joie de l'âme (cit. 53). || Sentiment qui s'oppose à l'examen critique (→ Culpabilité, cit. 3). || Les préjugés s'opposaient au progrès de la science (→ Dissection, cit. 1). || Leur religion, leur conviction s'y oppose. ⇒ Défendre, interdire.
12 (…) les âmes élevées doivent être presque toujours malheureuses, et d'autant plus malheureuses qu'elles méprisent l'obstacle qui s'oppose à leur félicité.
Stendhal, Souvenirs d'égotisme, p. 167.
4 (V. 1330). Sujet n. de personne. Faire obstacle ou mettre obstacle. ⇒ Aller (contre, à l'encontre), contrarier, contre (être, s'élever, se dresser contre), contrecarrer, contredire, empêcher, interdire (→ Faire opposition, rompre en visière, se jeter à la traverse, barrer la route…). || Parents qui s'opposent à un mariage (→ Attendre, cit. 119). || Personnes qui s'opposent à l'exécution d'une loi (→ Attroupement, cit. 1), à la liberté du commerce (→ Exportation, cit. 1), à un progrès. ⇒ Courant (remonter le courant, être à contre-courant). || Propriétaire qui s'oppose à un échange d'appartement (→ Contester à quelqu'un le droit de…; et aussi échangiste, cit. 1). || S'opposer aux volontés de quelqu'un (→ Dragon, cit. 6), aux décisions de l'Église (⇒ Désobéir, cit. 3), à une opinion (⇒ Réagir [contre], réfuter)… || Je m'y oppose formellement. || Elle s'y opposa d'un non impérieux (cit. 7) de la tête. ⇒ Protester. || S'opposer à une erreur. ⇒ Démentir (→ Exister, cit. 5).
13 Aussitôt que je vous vis, je ne pus m'empêcher de vous aimer. Ma raison ne s'y opposa point.
Scarron, le Roman comique, I, XIII.
14 C'est plus souvent par orgueil que par défaut de lumières qu'on s'oppose avec tant d'opiniâtreté aux opinions les plus suivies (…)
La Rochefoucauld, Maximes, 234.
15 N'était-il pas aussi ridicule que téméraire à un homme obscur, de s'opposer à un mouvement philosophique tellement irrésistible qu'il avait produit la Révolution ?
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. II, p. 201.
16 Une classe n'est égoïste que lorsqu'elle s'oppose, dans son intérêt étroit, à l'avènement d'une forme sociale nouvelle, préparée par le mouvement des choses et par le travail des esprits.
Jaurès, Hist. socialiste, t. IV, p. 374.
♦ S'opposer à ce que… (suivi du subjonctif; → Milieu, cit. 6, Romains). || Je m'oppose à ce que vous preniez de telles responsabilités. — REM. Ce tour un peu lourd que ne donne pas Académie, 8e éd., est utile lorsque l'action ou l'état exprimé par le verbe n'a pas de substantif correspondant.
♦ (XIVe). Fig. Agir contre, résister à (qqn); agir à l'inverse de (qqn). ⇒ Braver, désobéir, dresser (se), résister (→ Tenir tête à…). || Enfant qui s'oppose ouvertement à son père (→ Heurter de front). || D'instinct (cit. 35) je m'opposais à lui. || S'opposer en paroles. || S'opposer à un chef, à un gouvernement. ⇒ Adversaire, opposant. — Récipr. || Personnes qui s'opposent. ⇒ Affronter (s'), lutter. — Absolt. || Fallait-il s'opposer ou faire la part du feu ? ⇒ Face (faire face); → Louvoyer, cit. 4.
17 L'individu, en tant que créature, ne peut s'opposer qu'au créateur.
Camus, l'Homme révolté, p. 76.
——————
opposé, ée p. p. adj. et n. m.
1 (1549). Se dit (au plur.) de choses situées de part et d'autre et plus ou moins loin d'un axe réel ou imaginaire, et qui sont orientées face à face, dos à dos (⇒ Symétrique); et (au sing.) d'une de ces choses par rapport à l'autre. — (1868). Bot. || Feuilles opposées et feuilles alternées (la tige étant l'axe de symétrie). — (1718). Géom. || Angles opposés par le sommet, dont les côtés sont en prolongement l'un de l'autre et qui ont même mesure. || Côtés, angles opposés d'un carré. || Vecteurs opposés, parallèles, de même longueur mais de sens contraire — Côtés opposés d'une feuille de papier (⇒ Endroit, envers; recto, verso), d'une pièce (⇒ Face, pile; avers, revers). — (1690). Blason. || Pièces opposées, semblables mais posées en sens contraire. — Les pôles sont diamétralement opposés. || Antipodes (cit. 1), qui marchent les pieds opposés aux nôtres. — Une desserte (2. Desserte, cit.) occupait le panneau opposé aux fenêtres. || Le fourré du fusain (cit. 1) opposé à la maison. ⇒ Vis-à-vis (de). || Du côté opposé (→ Franger, cit. 5); au bout opposé (→ Fusiller, cit. 5); sur la rive opposée. ⇒ Autre. — Par ext. Alg. || Nombres opposés, qui ont même valeur absolue et sont de signe contraire, comme 5 et −5 (ces nombres ayant une position symétrique par rapport à zéro).
♦ (1743). De sens contraire. ⇒ Inverse. || Directions opposées, dans la direction opposée. || Déviations (cit. 2) égales et de sens opposés. || En sens opposé. ⇒ Contre-biais (à), contre-bord (à), contre-poil, contresens, envers, rebrousse-poil (à). || Rangé en sens opposé. ⇒ Tête-bêche. || Position opposée à la normale. ⇒ Renversé. || Mobiles qui vont en sens opposé en s'éloignant l'un de l'autre, en se rapprochant l'un de l'autre. ⇒ Croiser (se). || Vitesses égales et opposées (→ Équilibre, cit. 3). || Muscles qui produisent des mouvements opposés. ⇒ Antagoniste.
3 (1640). Qui s'oppose, qui est aussi éloigné, aussi différent que possible dans le même genre, le même ordre d'idées. ⇒ Contraire. — REM. Opposé est moins précis que contraire dont le sens est proche d'« inverse »; mais il implique une idée de conflit que contraire ne comporte pas toujours. || Des natures, des caractères opposés. ⇒ Antagonique, dissemblable (→ Être aux antipodes). || Esprits opposés par leurs méthodes et leurs buts (→ Famille, cit. 33). || Ils ont des goûts opposés (→ Gage, cit. 13), des opinions opposées. ⇒ Discordant, divergent, incompatible, inconciliable. || Les défauts opposés à ceux que nous avons (→ Faible, cit. 16). || Ce sont choses opposées (→ C'est le feu et l'eau). || Personnalité faite d'éléments opposés (→ Hétérogène, cit. 5). || Aimer des choses opposées (→ Éclectisme, cit. 1). || Concilier des intérêts opposés (→ Dextérité, cit. 4), unir les qualités les plus opposées (→ Drame, cit. 5). || Donner tour à tour des opinions opposées (→ Souffler le chaud et le froid). || Solutions opposées. ⇒ Alternative, dilemme (→ Le pour et le contre). || Principes, termes opposés. ⇒ Antinomique, antithétique, contradictoire. || Cela est opposé à la raison. ⇒ Répugner. || L'esclavage est opposé au droit naturel (→ Esclave, cit. 1). || Une chose diamétralement (cit. 1 et 2) opposée au bon esprit, à la bonne compagnie. || La vie anachorétique (cit.) si opposée à l'esprit juif. ⇒ Antipathique (vx). || Rien n'est plus opposé à leur vocation (→ Femme, cit. 61). || Mot qui peut s'entendre dans un sens opposé au sens courant (→ Galant, cit. 3). || Mots de sens opposé. ⇒ Antonyme; versus. || « L'un » est opposé à « l'autre », « ici » est opposé à « là ». — Logique. || « Deux termes sont dits opposés quand ils sont ou corrélatifs, ou contraires, ou contradictoires; deux propositions, quand ayant même sujet et même prédicat elles diffèrent soit en qualité, soit en quantité, soit à la fois en qualité et en quantité » (Lalande).
18 On ne peut pas ménager l'un et l'autre; et l'esprit du père et celui du fils sont des choses si opposées, qu'il est difficile d'accommoder ces deux confidences ensemble.
Molière, l'Avare, I, 1.
19 (…) pour être si opposées dans nos lectures, nous n'en sommes pas moins bien ensemble (…)
Mme de Sévigné, 817, 9 juin 1680.
20 Le sérieux et la gaieté sont l'un et l'autre trop prononcés, dans les romans de Wieland, pour être réunis; car, en toute chose, les contrastes sont piquants, mais les extrêmes opposés fatiguent.
Mme de Staël, de l'Allemagne, II, IV.
21 L'Europe admet alors la coexistence de doctrines, d'idéals, de systèmes tout opposés. C'est là la caractéristique d'une civilisation du type « moderne ».
Valéry, Variété V, p. 264.
4 Qui s'oppose (à), se dresse contre ⇒ Adversaire, contraire, contre, défavorable, ennemi, hostile. || Opposé à quelqu'un. ⇒ Braqué (contre); adversaire, rival. || Être opposé à tous les excès (→ Bizarrerie, cit. 6). || Une personne violemment opposée à tout changement. || Personne, faction opposée. ⇒ Dissident, opposant, rebelle. || Politique de bascule, qui s'appuie sur des partis opposés. || La fortune lui est opposée. ⇒ Adverse. || Mesure opposée à la liberté. ⇒ Attentatoire.
5 N. m. (1873). Côté opposé, direction opposée. || L'opposé du nord est le sud. || L'envers est l'opposé de l'endroit. — (1681, abstrait). Ce qui est opposé (au sens 2). ⇒ Contraire. || La déclamation est l'opposé de l'éloquence (→ Genre, cit. 22). || Prendre pour certain l'opposé de ce que dit le menteur (→ Mensonge, cit. 7). || Soutenir l'opposé d'une opinion. ⇒ Contrepartie, contre-pied. || Les opposés. ⇒ Extrême, pôle (fig.). — Fam. || Cet enfant est tout l'opposé de son frère (→ C'est le jour et la nuit).
22 (…) il faut souvent toute une vie pour acquérir les vertus qui sont l'opposé des erreurs dans lesquelles l'homme a précédemment vécu.
Balzac, Séraphîta, Pl., t. X, p. 573.
♦ ☑ (1845). Loc. adv. À l'opposé : du côté opposé. ⇒ Opposite. || Vous avez pris une mauvaise direction, la gare est à l'opposé.
23 À l'opposé, en diagonale (sur le ring), l'Allemand n'avait plus forme humaine (…) Les soigneurs déroulaient des serviettes de leurs poches (…)
Paul Morand, Champions du monde, p. 110.
♦ D'une manière opposée, contraire. ⇒ Contraire (au contraire). || Ce garçon est travailleur, à l'opposé, son frère est incapable d'un effort soutenu.
♦ ☑ Loc. prép. (1857). À l'opposé de… : du côté opposé à… || Le nord est à l'opposé du sud.
24 À l'opposé du marabout, il n'y a que des pierres, des pierres au fond du ravin (…)
E. Fromentin, Un été dans le Sahara, p. 99.
♦ D'une nature, d'une manière opposée à… ⇒ Contradiction (en), contre, encontre (à l'), rebours (à). || Des qualités qui sont à l'opposé de sa nature (→ Anxieux, cit. 4). || Leur esprit était à l'opposé de celui que le roi restaurait (→ Inconséquence, cit. 5). || À l'opposé de X, Y pense que rien n'est perdu. ⇒ Contraire (au contraire de), contrairement (à).
25 (…) ceci est à l'opposé de tes discours habituels contre la faiblesse, la sensiblerie, etc. Tu passes à l'ennemi.
Montherlant, les Olympiques, p. 123.
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CONTR. Accorder, adapter, coaliser, concilier, concorder, conjuguer, nuancer, rapprocher, réconcilier. — Accéder, accommoder, acquiescer, appuyer, céder, compatir, concéder, concourir, conformer, consentir, convenir, convertir, coopérer, correspondre, ressembler. — (De opposé). Contigu; adéquat, analogue, approchant, comme, conforme, congénère, correspondant, identique, semblable. — Même (la même chose); avenant (à l'avenant), pareillement.
DÉR. Opposable, opposant.
Encyclopédie Universelle. 2012.