peser [ pəze ] v. <conjug. : 5>
• 1050 fig. « être pénible à »; lat. pop. °pesare, class. pensare (→ 1. penser), de pendere « peser »
I ♦ V. tr. (v. 1165)
1 ♦ Déterminer le poids, la masse de (qqch.) par comparaison avec des poids, des masses connus. Peser un objet avec une balance, sur une bascule. Peser dans sa main. ⇒ soupeser. Qui peut, ne peut pas être pesé (⇒ pondérable; impondérable) . Pronom. (réfl.) « Il monta sur la balance automatique et se pesa pour voir s'il n'avait pas engraissé » (Sartre).
2 ♦ (v. 1190) Apprécier, examiner avec attention. ⇒ considérer , estimer, 1. juger. Je me suis amusé « à peser chaque chose à la balance de la raison » (Rousseau). Peser ses chances de réussite. ⇒ évaluer. Peser le pour et le contre. ⇒ comparer (cf. Mettre en balance). Absolt « Lecteur sensé, pesez, décidez; pour moi, je me tais » ( Rousseau). « écrivains et gens du monde s'appliquent à peser chaque mot et chaque locution pour en fixer le sens, pour en mesurer la force et la portée » (Taine ). Peser ses mots : faire attention à ce qu'on dit. — Loc. Tout bien pesé : après mûre réflexion.
II ♦ V. intr.
A ♦ (v. 1165) (Concret)
1 ♦ Avoir tel ou tel poids. ⇒ 1. faire. « Il pesait cent deux kilos, et ça paraissait à peine » (Aragon). Les cent kilos qu'il a pesé autrefois. Qui pèse peu (⇒ léger) , lourd (⇒ lourd, pesant) . Elle ne pèse rien, pas plus qu'une plume.
♢ Fam. Représenter telle valeur. Patron, groupe qui pèse 30 milliards de chiffre d'affaires. ⇒ valoir.
♢ Absolt Avoir un poids, subir les effets de la pesanteur.
2 ♦ PESER SUR, CONTRE : exercer une poussée, une pression. ⇒ appuyer, pousser, presser. Peser sur un levier (⇒ pesée) . Peser sur, contre une porte pour l'ouvrir. Fardeau, charge qui pèse sur les épaules. — Par ext. Aliment indigeste, qui pèse sur l'estomac. « Le ciel lourd d'un soir d'été pesait sur la ville et sur la grande avenue » (Maupassant). Absolt « L'homme est fragile et le génie pèse » (Chateaubriand).
B ♦ (Abstrait)
1 ♦ (1050) PESER À : être pénible, difficile à supporter. ⇒ coûter, ennuyer, fatiguer, importuner. Cette démarche me pèse. La solitude lui pèse. « L'argent qu'il avait reçu lui pesait si fort qu'il le jeta » ( R. Rolland).
2 ♦ PESER SUR : constituer une charge pénible. ⇒ accabler, opprimer. Remords qui pèse sur la conscience. Menace qui pèse sur qqn. Les charges qui pèsent sur lui sont accablantes. — Une responsabilité écrasante pèse sur vous. ⇒ incomber, retomber. « cinquante francs, pour des gens comme nous, ça commence à peser » (Sand).
3 ♦ Exercer une pression morale. « j'ai horreur de peser sur la décision d'autrui » (Romains). ⇒ influer. Élément qui pèse le plus dans une décision. ⇒ prépondérant. — Loc. Peser dans la balance. Ne pas peser lourd : avoir peu de poids, d'importance. Cet argument, son avis ne pèse pas lourd. « Je suis sûre qu'il me préfère à toute autre; mais absente, je ne pèse pas lourd » ( F. Mauriac).
● peser verbe intransitif (latin populaire pesare, du latin classique pensare, de pendere, peser) Avoir un certain poids, une certaine masse : Ce sac pèse trois kilogrammes. Avoir un grand poids : Cette valise pèse trop lourd, je ne pourrai pas la porter. Familier. Avoir telle fortune, telle valeur financière : Ce banquier pèse dix millions de dollars. Avoir de l'importance, de l'autorité : Que pèse ce groupe face aux syndicats ? En parlant du grand gibier, enfoncer profondément les pieds dans le sol. ● peser verbe transitif Déterminer, à l'aide d'instruments de mesure et par comparaison avec l'unité, la masse d'un corps : Peser un paquet sur une bascule. Examiner attentivement quelque chose : Avez-vous bien pesé tous les risques ? ● peser verbe transitif indirect Exercer une pression sur, contre quelque chose : Peser sur un levier. Constituer une charge pour quelqu'un : Les impôts pèsent inégalement sur les contribuables. Exercer sur quelqu'un une influence, une pression morale : Ces considérations pèsent sur le choix des clients. Être pénible à supporter : La solitude lui pèse. Incomber à quelqu'un, le concerner : Des soupçons pèsent sur vous. ● peser (citations) verbe transitif Émile Chartier, dit Alain Mortagne-au-Perche 1868-Le Vésinet 1951 Penser (peser) est fonction de peseur, non fonction de balance. Histoire de mes pensées Gallimard Bible L'écriture tracée c'est : Mené, Teqél et Parsin. Voici l'interprétation de ces mots. Mené : Dieu a mesuré ton royaume et l'a livré ; Teqél : tu as été pesé dans la balance et ton poids se trouve en défaut ; Parsin : ton royaume a été divisé et donné aux Mèdes et aux Perses. Ancien Testament, Livre de Daniel V, 25-28 « Mesuré, pesé, divisé » Commentaire Ces trois mots, empruntés à la « Bible de Jérusalem », parurent en lettres de feu au banquet de Balthazar, roi de Chaldée, pour annoncer sa ruine. ● peser (expressions) verbe transitif Peser ses mots, ses paroles, les choisir soigneusement, en mesurer toute la portée. ● peser (homonymes) verbe transitif pesée nom féminin ● peser (synonymes) verbe transitif Examiner attentivement quelque chose
Synonymes :
- apprécier
- calculer
- mesurer
● peser (expressions)
verbe transitif indirect
Peser à la main, en parlant d'un cheval, s'appuyer sur le mors avec excès.
Peser sur la conscience de quelqu'un, lui être un poids moral, lui causer des remords.
Peser sur l'estomac, donner une impression de lourdeur, être indigeste.
● peser (homonymes)
verbe transitif indirect
● peser (synonymes)
verbe transitif indirect
Constituer une charge pour quelqu'un
Synonymes :
- accabler
Exercer sur quelqu'un une influence, une pression morale
Synonymes :
- compter
Être pénible à supporter
Synonymes :
- écraser
- étouffer
- excéder
Incomber à quelqu'un, le concerner
Synonymes :
- retomber
- tomber
● peser (difficultés)
verbe intransitif
(latin populaire pesare, du latin classique pensare, de pendere, peser)
Accord
1. Peser v.i = avoir un certain poids. Le participe passé ne varie pas : les quatre kilos que le linge a pesé sont réduits à deux maintenant qu'il est sec.
2. Peser v.t. = déterminer le poids de. Le participe passé s'accorde : les valises que nous avons pesées.
● peser (expressions)
verbe intransitif
(latin populaire pesare, du latin classique pensare, de pendere, peser)
Ne pas peser lourd, avoir peu d'importance, d'effet, de poids.
● peser (homonymes)
verbe intransitif
(latin populaire pesare, du latin classique pensare, de pendere, peser)
pesée
nom féminin
peser
v.
rI./r v. tr.
d1./d Mesurer le poids de. Peser des marchandises. Peser un bébé.
|| v. Pron. Mesurer son propre poids.
d2./d Fig. évaluer avec soin par l'esprit, examiner attentivement. Bien peser une décision.
— Pp. Tout bien pesé: tout bien considéré.
d3./d (oc. Indien) Emmener (qqn) de force. Il a fallu le peser chez le coiffeur.
— Saisir (qqch) avec vigueur. Elle a pesé ses clés et s'est enfuie.
rII./r v. intr.
d1./d Avoir un certain poids. Ce paquet pèse trois kilos.
d2./d Peser sur: exercer une force, une pression sur. Peser sur un levier.
— (oc. Indien, Québec, Suisse) Appuyer sur. Peser sur le bouton de l'ascenseur.
|| Fig. Cela a pesé sur ma décision, cela l'a influencée.
— Aliment qui pèse sur l'estomac, indigeste.
d3./d Fig. Peser à (qqn): être difficile, pénible à supporter pour (qqn). L'oisiveté lui pèse.
⇒PESER, verbe
I. —Empl. trans. dir. Qqn pèse qqc. ou qqn.
A. —Déterminer le poids d'un corps, à l'aide d'instruments qui permettent de le comparer à un poids pris comme unité de mesure. Peser qqc. avec une balance, une bascule; peser un enfant sur une bascule, un pèse-personne. Don Simuel (...) pèse Sequins et diamants, perles et dinars d'or (LECONTE DE LISLE, Poèmes trag., 1886, p.158). L'épicier pour peser le poivre prend une balance plus fine que pour peser le savon (BARRÈS, Cahiers, t.3, 1903, p.79).
— Empl. pronom. réfl. Je viens de me peser. J'ai engraissé de trois cent dix grammes (MAUPASS., Contes et nouv., t.1, 25 jours, 1885, p.713):
• 1. —Vous aimez le gros Emmanuel. Quelle joie il eut, le jour où nous nous pesions, d'être moins lourd à lui seul que nous deux ensemble. Il vous aime.
GIRAUDOUX, Simon, 1926, p.110.
B. —Mesurer la densité d'(un liquide). Peser du lait. Peser un vin. Mesurer la densité d'un vin afin d'évaluer son degré alcoolique (d'apr. DUVAL 1959).
C. —Au fig.
1. [Le compl. d'obj. dir. désigne une chose abstr.] Examiner en se livrant à une réflexion approfondie, une chose que l'on veut apprécier, évaluer. Peser un acte, un vote, une décision; peser ses chances; peser les paroles de qqn. Il nous arrive de peser des motifs, de délibérer, alors que notre résolution est déjà prise (BERGSON, Essai donn. imm., 1889, p.126). J'estime que j'ai le devoir de vous parler; et je parle. Oubliez-moi, comme je m'oublie, et pesez ce que je dis (ROLLAND, J.-Chr., Amies, 1910, p.1127). Baudelaire (...) a essayé de peser les mérites respectifs d'Ingres et de son rival (VALÉRY, Variété II, 1929, p.153):
• 2. Pendant des heures et des heures je pesais toutes les raisons bonnes ou mauvaises pour ou contre mes chances de paternité, m'énervant en des suppositions inextricables...
MAUPASS., Contes et nouv., t.2, Fils, 1882, p.321.
♦Peser si. Il vous faut peser si ce vous sera un mode de vie plus abondant en voluptés de partir avec mesdemoiselles vos soeurs pour être fanatique, en Gaule, ou de demeurer à faire de l'ironie et du dilettantisme avec Néron (BARRÈS, Jard. Bérén., 1891, p.175).
— Expressions
♦Peser le pour et le contre. Évaluer les avantages et les inconvénients d'une chose avant de faire un choix, de prendre une décision. Hennedyck pesait le pour et le contre, et balançait. Ce fut le peuple, le menu peuple, qui lui montra la voie (VAN DER MEERSCH, Invas. 14, 1935, p.129):
• 3. ... son envie de lâcher la boîte le lendemain, mitigée de sa crainte des complications s'il donnait suite à son projet. Sa nature hésitante d'oiseau balançait. Il gagnait de l'énervement, à peser le pour et le contre sans trouver l'énergie d'une détermination.
COURTELINE, Ronds-de-cuir, 1893, 2e tabl., p.76.
♦Peser ses mots, ses paroles. Choisir soigneusement les mots qui traduisent exactement sa pensée, en mesurer la portée. On est toujours injuste quand on attaque des professeurs. Je pèse mes mots et si j'ai un ton irritant, qu'on m'excuse (BARRÈS, Cahiers, t.2, 1898, p.3). Cornebille ne parla pas si vite, parce qu'il était prudent et pesait ses paroles (BOYLESVE, Leçon d'amour, 1902, p.197).
♦Tout bien pesé. Après mûre réflexion, en fin de compte. Je ne puis (...) me blâmer d'avoir laissé courir mon esprit après plusieurs suppositions —extravagantes, romanesques —mais les seules après tout, oui, tout bien pesé, dont je pouvais espérer qu'elles me mèneraient un peu plus loin qu'une psychologie vulgaire (GRACQ, Beau tén., 1945, p.142).
♦Enlevez, c'est pesé! (fam.). C'est une affaire conclue. [Le banquiste, voulant une réconciliation:] Donnons-nous une bonne poignée de main (...) Enlevez, c'est pesé (RICHEPIN, Morts biz., 1876, p.901).
2. [Le compl. d'obj. dir. désigne une pers.] Apprécier, juger. La Tricon, tranquille, examinait fixement le prince, en femme qui pèse un homme d'un regard (ZOLA, Nana, 1880, p.1219).
II. —Empl. intrans.
A. —Qqn/qqc. pèse. Avoir un poids, du poids.
1. Être soumis à la pesanteur, aux lois de la gravitation. Regardez la pierre comme elle pèse. Elle roule vers le fond du ravin (SAINT-EXUP., Citad., 1944, p.560).
2. Être lourd, faire sentir son poids. Vois, l'automne déjà visite les jardins, Et les jours où les bois seront nus sont prochains. Les fruits pèsent, la vigne est transparente et blonde (Ch. GUÉRIN, Coeur solit., 1904, p.38):
• 4. Lemoine soupesa son sac. —Ce qu'il est lourd, fit-il. Qu'est-ce que tu as pu foutre là-dedans... Tu y a mis des pavés? —Juste ce qu'on m'avait dit. —C'est les cartouches qui pèsent, intervint le caporal...
DORGELÈS, Croix de bois, 1919, p.9.
— P. métaph. Pour la première fois, il sentit peser sa trentaine (MARTIN DU G., Thib., Sorell., 1928, p.1172):
• 5. ... vingt fois sur le métier remettre notre ouvrage. À quoi s'oppose le conseil que Barrès donnait à Maurice Martin du Gard (...) de prendre l'habitude d'écrire «au courant de la plume», sans chercher jamais à parfaire (...). On acquiert certaine qualité de prestesse et de virulence; et la phrase va de l'avant sans rien de plus «qui pèse ou qui pose», devançant souvent la pensée.
GIDE, Journal, 1946, p.291.
3. P. anal. Donner une impression de pesanteur, de gêne physique. Bras qui pèse (comme du plomb); avoir les jambes qui pèsent. Quand elle est là cette fatigue, maintenant, quand on la sent peser dans le haut des cuisses, ah! dieu, comment se défendre? (GIONO, Gd troupeau, 1931, p.156).
4. [Parfois avec un compl. prép. à valeur circ.] Avoir de l'importance, être prépondérant. Argument, élément qui pèse dans une décision; nos actes pèsent. Et, si pas un mot ne fut prononcé de l'indemnité de cinq cents francs, de la plus-value des terrains, cela pesa dès lors au fond de tout ce qu'ils disaient (ZOLA, Terre, 1887, p.178). Comme il était anxieux le soir où il m'a dit: «Mon oeuvre est encore devant moi!» Il tient à ce que cette oeuvre pèse, à ce qu'elle reste (BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p.42):
• 6. Au lieu des rivalités et intrigues, qui naguère opposaient les voisins, il s'établit, entre Lagos, Douala, Brazzaville, Léopoldville, Khartoum, une solidarité personnelle des gouverneurs qui pesa lourd dans l'effort de guerre et le bon ordre de l'Afrique.
DE GAULLE, Mém. guerre, 1954, p.115.
B. —Qqn/qqc. pèse + compl. d'obj. interne (subst. ou adv.) spécifiant le poids. Avoir pour poids. Peser dix kilos, une tonne; peser lourd, peser peu. Ils recoururent à un ouvrage moins difficile (...) où ils acquirent la certitude que dix litres d'air pèsent cent grammes (FLAUB., Bouvard, t.1, 1880, p.59). Mon père, qui a été un moment président de la Société des 100 kilos parce qu'il en pesait 150 (CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p.197).
— Absol., vx. [En parlant d'une monnaie] Avoir le poids légal. Cette pièce d'or ne pèse pas (LITTRÉ).
— Au fig.
1. (Ne pas) peser lourd, peser peu, peser qqc. (+ compl. prép. ou subordonnée introduisant un élément de comparaison). [Le suj. désigne une pers., un ensemble de pers., une chose] Avoir une certaine importance, une certaine valeur / ne pas avoir d'importance, de valeur. Ne pas peser lourd auprès de qqc., aux yeux de qqn. Il sentit le peu que pèse tout l'orgueil du monde, au prix d'un peu d'amour (ROLLAND, J.-Chr., Matin, 1904, p.218). On saura ce que pèsent des détrousseurs de diligence devant les soldats de l'empereur (POURRAT, Gaspard, 1925, p.137). Mes répugnances personnelles, il s'en fout; son amitié ne pèse pas lourd quand il a décidé de se servir de vous (BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p.141):
• 7. Le prince aurait dit au juge d'instruction, en attirant son attention sur certains papiers: «Mais prenez donc connaissance de ce que pèse la conscience d'un journaliste». Ici, un paquet de lettres compromettantes pour un journaliste, dont j'ai incomplètement entendu le nom...
GONCOURT, Journal, 1883, p.232.
♦[Avec compl. d'obj. interne indir.] Peser de son poids. Y avait-il pourtant un homme de guerre qui pesât de son poids dans les destins de l'empire? (THARAUD, Dingley, 1906, p.86).
2. Peser + indication chiffrée. Avoir telle importance, telle valeur; représenter. Firme qui pèse dix milliards de francs; groupe sidérurgique qui pèse vingt millions de tonnes. Les Vosges «pèsent» environ 1/100e du trafic ferroviaire national (La Vie du Rail, 30 janv. 1972 ds GILB. 1980).
III. —Empl. trans. indir.
A. — Peser sur, contre
1. Appuyer fortement, exercer une poussée, une pression. Synon. pousser, presser. Peser sur un levier, sur une porte. Le baiser de son ami vint peser doucement sur sa bouche (A. FRANCE, Lys rouge, 1894, p.368). Et il pesa sur le couvercle de la malle. Trop pleine, elle se mit à craquer et à bomber dans le milieu. Il pesa dessus avec le genou (RAMUZ, A. Pache, 1911, p.105). Je sentais son genou peser contre le mien (ABELLIO, Pacifiques, 1946, p.175):
• 8. De ses mains, Renée pesait sur le bras de Gilbert. —Gilbert! appela-t-elle. Il y avait dans sa voix un tel déchirement, que Gilbert tressaillit et se tourna vers elle. —Tu m'aimes, dis, Gilbert?
ARLAND, Ordre, 1929, p.324.
— MAN. [Le suj. désigne un cheval] Peser à la main. S'appuyer exagérément sur le mors (d'apr. TONDRA Cheval 1979).
♦Région. (Canada). Peser sur le champignon, le gaz. Appuyer sur l'accélérateur, accélérer. —Allez, montez! (...). —Vas-y Albert! Pèse vite, pèse sur le champignon! (J. GODBOUT, Kid Sentiment, 1968, p.10 ds Richesses Québec 1982, p.1772). Le chauffeur (...) nous a crus quand on lui a dit que c'était urgent; il a pesé assez fort sur le gaz pour brûler les semelles de ses pneus (R. DUCHARME, L'Hiver..., 1973, p.43 ds Richesses Québec 1982, p.1772).
2. Insister davantage. Peser sur une note, sur une syllabe. M. de Charlus pesait tellement sur chaque mot, et de plus, pour être entendu du notaire, il les criait tous si fort, que tout ce jeu de scène eût suffi à déceler ce qu'il cachait pour des oreilles plus averties que celles de l'officier ministériel (PROUST, Sodome, 1922, p.988).
3. Au fig.
a) Exercer une influence, une pression morale. Peser sur la décision de qqn, sur l'opinion française. Il y a des actes... des secrets... qui pèsent sur toute l'existence... qui imposent, pour toujours, la solitude du coeur... (MARTIN DU G., Taciturne, 1932, II, 13, p.1305). Puis-je avoir votre promesse solennelle, à vous aussi, que vous ne pèserez pas sur elle pour empêcher le divorce? (MONTHERL., Démon bien, 1937, p.1287):
• 9. Enfin, on ne fait appel en vous qu'au bon citoyen, à l'honnête homme. Personne ne songe à peser sur votre indépendance, et c'est pourquoi je répète que vous êtes le maître absolu de l'affaire, comme du reste l'a voulu la loi.
ZOLA, Bête hum., 1890, p.106.
b) Constituer une présomption de culpabilité. Reproche qui pèse sur qqn. Je me rends parfaitement compte des soupçons qui pèsent sur moi. Le juge d'instruction et M. Frédéric Larsan (...) ne sont pas loin de me croire coupable (G. LEROUX, Myst. ch. jaune, 1907, p.101). Toutes les anciennes charges qui pesaient contre Dreyfus s'évanouissent à l'examen (MARTIN DU G., J. Barois, 1913, p.413):
• 10. L'assassinat de la veuve Houssieu, qui avait ému toute la région, excitait encore la curiosité. Personne n'ignorait que des charges accablantes pesaient sur un garçon boucher de dix-neuf ans, nommé Lecoeur...
A. FRANCE, Orme, 1897, p.209.
B. — Peser sur
1. Faire sentir un poids, faire pression. Fardeau qui pèse sur les épaules. Je soupçonnai qu'une lourde somnolence pesait sur mon esprit (A. FRANCE, Bonnard, 1881, p.352). De la lassitude pèse pourtant sur tous, les faces sont jaunies, les paupières rougies (BARBUSSE, Feu, 1916, p.252).
— En partic. Peser sur l'estomac. Être difficile à digérer. On en était à manger un pain moitié seigle, moitié pomme de terre, qui pesait sur l'estomac comme une masse de plomb (POURRAT, Gaspard, 1930, p.57).
2. Au fig.
a) Donner une sensation d'oppression, d'étouffement. Il y a dans le charme tahitien beaucoup de cette tristesse étrange qui pèse sur toutes ces îles d'Océanie (LOTI, Mariage, 1882, p.67). Je restais là (...) entre ces murs rapprochés. Prisonnier dans ces murs comme dans les pensées, simples et horribles, que je ne pouvais chasser. J'aimais sentir ces murs peser sur moi (VERCORS, Sil. mer, 1942, p.14):
• 11. Entre les solitudes sur lesquelles pèsent la stagnation des eaux et des marécages, l'immobilité des forêts de conifères et de bouleaux (...) la circulation des cours d'eau représente le mouvement et la vie...
VIDAL DE LA BL., Princ. géogr. hum., 1921, p.190.
— En partic. [À propos d'un regard] Au bout d'un semestre, ma mère me retira du cours: on n'y travaillait guère et puis elle avait fini par se lasser de sentir peser sur elle le regard de ses voisines quand c'était mon tour d'être félicité (SARTRE, Mots, 1964, p.65).
b) Donner une impression de gêne morale. Angoisse, inquiétude, remords, qui pèse sur la conscience, sur le coeur de qqn. Il faut (...) nous délivrer de ce cauchemar Esterhazy-Dreyfus qui pèse si lourdement sur la conscience publique (CLEMENCEAU, Iniquité, 1899, p.431).
c) Constituer une menace. Elle était restée trois jours avec lui, trois jours de fête sur lesquelles pesait un après bien sombre, autant dire trois jours de grâce (LOTI, Pêch. Isl., 1886, p.112). À quoi distingue-t-on les êtres sur lesquels va peser un événement très grave? (MAETERL., Trésor humbles, 1896, p.50).
— En partic. Constituer une charge pénible. Responsabilité qui pèse sur qqn. Les forces d'écrasement qui pèsent sur les prolétaires (JAURÈS, Ét. soc., 1901, p.LXV).
♦Impôts qui pèsent sur qqn; hypothèques qui pèsent sur une propriété. Ils étaient (...) soustraits aux lourdes charges qui pesaient sur le serf. On les voit exemptés de tailles et de corvées (FARAL, Vie temps st Louis, 1942, p.55).
C. — Peser à (qqn)
1. Paraître lourd, être une gêne. Ces vêtements me pèsent. Elle ne pouvait se tenir debout à la fenêtre, tant son ventre lui pesait (ADAM, Enf. Aust., 1902, p.158). Mes yeux me pèsent (J. BOUSQUET, Trad. du sil., 1936, p.63). Elle allait doucement. Le paquet lui pesait. Elle se sentait lasse (VAN DER MEERSCH, Empreinte dieu, 1936, p.239).
— Expressions
♦Peser à la main. Mélanie se faisait vieille; son panier pesait à son bras (A. FRANCE, Pt Pierre, 1918, p.191).
♦Peser à l'estomac. Être difficile à digérer. Sous leur croûte dorée, les beignets vous brûlaient la langue, s'amollissaient de farine onctueuse, de pomme fondante, pesaient à l'estomac comme du pain sans levain (GENEVOIX, Raboliot, 1925, p.135).
2. Au fig.
a) Donner une sensation d'oppression, d'étouffement. C'est fiévreux, ce delta, le ciel vous pèse. On est trempé de sueur du matin au soir, et les nuits ne sont jamais comme ici, un repos (ARAGON, Beaux quart., 1936, p.180).
b) Être pénible. La lecture, la solitude me pèse. Il n'y a rien qui me pèse plus que de dire, même pour les choses les plus indifférentes: «C'est fini, absolument fini pour toujours!» (RENAN, Souv. enf., 1883, p.402). Ce n'est pas bien de ne pas me donner la part de vos soucis... C'est donc si grave?... Un gros secret qui vous pèse? Dites-le moi? (H. BATAILLE, Maman Colibri, 1904, II, 6, p.18). Dis-moi que je ne te pèse jamais, même à cette heure où tu étais seul autrefois (CHARDONNE, Épithal., 1921, p.178):
• 12. ... c'est facile de désirer vivre dans un monastère, de raconter à Dieu qu'on voudrait bien s'y abriter, quand l'existence de Paris vous pèse, mais lorsqu'il s'agit d'y émigrer pour tout de bon, c'est autre chose!
HUYSMANS, En route, t.1, 1895, p.241.
D. —Expr. Le coeur me pèse de. Le coeur me pèse, de tout ce que j'ai à vous donner. Aimez-moi seulement un petit brin de ce que je vous aime, et l'éternité nous prendra dans ses bras (MONTHERL., J. filles, 1936, p.946).
Prononc. et Orth.:[], (il) pèse []. Att. ds Ac. dep. 1694. Conjug. Change e en è devant syll. muette: pèse, pèserais. Étymol. et Hist.A. Intrans. 1. ca 1050 fig. impers. «être pénible à quelqu'un, causer de la peine» surtout dans l'expr. ce poise moi (Alexis, éd. Chr. Storey, 460); 2. ca 1170 «avoir un poids déterminé» (Rois, éd. E. R. Curtius, I, XVII, 7, p.32); 1640 fig. (OUDIN Curiositez: esprit pesant .i. lent); 1819 fig. (BOISTE: ne pas peser lourd, être sans importance, sans force); 3. ca 1200 «faire sentir son poids» (Chanson de Guillaume, éd. D. McMillan, 720); spéc. 1636 (MONET: Cheual qui Pese, qui s'apuie sur la bride, et la surcharge); 1342 fig. peser sur «donner une impression de pesanteur, d'oppression, de gêne physique ou morale» (JEAN BRUYANT, Pauvreté et Richesse ds Ménagier de Paris, éd. Sté Bibliophiles, t.2, p.5b); spéc. 1689 «exercer une certaine influence» (SÉVIGNÉ, Lettres, éd. M. Monmerqué, t.9, p.263); 4. ca 1200 «avoir du poids, être lourd» (Chevalier cygne, 210 ds T.-L.); 1680 phys. adj. (RICH.: Pesant. C'est tout ce qui est porté comme de soi-même en bas, qui tend en bas); 1690 (FUR.: Peser. Avoir de la densité, de la gravité). B. Trans. 1. 1188 absol. (le plus souvent trans.) peser «mesurer le poids d'un corps en le comparant à un poids pris comme unité» (AIMON DE VARENNES, Florimont, 11478 ds T.-L.); d'où de nombreux comp. tels que pese-liqueur 1674 (J. B. DENIS, Rec. de mém. con. s. les arts et les sc., 183 ds Fonds BARBIER); 2. 1197 fig. peseir «apprécier en comparant, examiner attentivement» (HÉLINANT, Vers de la mort, XXXII, 3 ds T.-L.); 1538 peser ses paroles «les choisir soigneusement, en mesurer toute la portée» (EST. d'apr. FEW t.8, p.193b); 1671 (POMEY: Il lût posément la lettre, et pesant sur châque mot [et singulas expendens voces, vel, et suam cuique voci tribuens vim]); 1738 tout bien pesé «après mûre réflexion» (ROLLIN, Hist. anc. OEuv., t.XI, 1re part., p.288 ds POUGENS d'apr. LITTRÉ, s.v. pesé). Du lat. (n) «peser» et «apprécier», dénom. de pensum, supin de pendere de mêmes sens, v. aussi penser. Le sens «être pénible, causer de la peine» que l'on trouve dans les lang. rom. cf. l'esp. pesar (XIIes. ds AL.), l'ital. pesare (1300-13 ds BATT.), non att. en lat., a dû exister dans la lang. pop. Fréq. abs. littér.:3807. Fréq. rel. littér.:XIXes.: a) 4638, b) 4762; XXes.: a) 5279, b) 6504. Bbg. BONN. 1920, p.8. —GOHIN 1903, p.346. — KLEIBER (G.). Le Mot ire en a. fr. (XIe-XIIIes.). Paris, 1978, pp.208-210. —LYER (S.). Part. prés. actif avec le sens passif. Archivum Romanicum. 1932, t.16, p.303.
peser [pəze] v. [CONJUG. lever.]
ÉTYM. 1050, au sens fig. « être pénible à… », var. peiser, poiser; du lat. pensare (→ Penser), lat. vulg. pesare, dér. de pendere « peser ».
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1 Cour. Déterminer le poids de (qqch.) par comparaison avec un poids connu. || Peser un objet avec une balance, au trébuchet (⇒ Trébucher), à la bascule. || Peser le chargement d'une voiture, la tare d'une marchandise. ⇒ Tarer. || Peser un livre dans sa main. ⇒ Soupeser. || Qui peut, ne peut pas être pesé. ⇒ Pondérable; impondérable. || Peser pour doser. || Peser qqch. avec de faux poids (→ Langage, cit. 19). — Il faut peser cet enfant. || Médecin (cit. 8) qui pèse un malade. — Pron. || Se peser.
1 Il monta sur la balance automatique et se pesa pour voir s'il n'avait pas engraissé depuis la veille.
Sartre, l'Âge de raison, IX.
♦ Par métaphore. || « Peser des œufs de mouche dans des balances (cit. 2) de toile d'araignée » (Voltaire). || Peser chaque chose à la balance (cit. 10) de la raison.
2 Tous ces poèmes sont faits avec un soin, une clarté et une délicatesse extrêmes; on voit que l'auteur, dans ses longs loisirs laborieux, pesait chaque vers, chaque mot, chaque syllabe dans des balances d'or (…)
Th. Gautier, Portraits contemporains, Brizeux.
2 (V. 1190). Fig. Apprécier, examiner avec attention, en comparant avec un étalon, pour déterminer la valeur, les avantages et les inconvénients… ⇒ Apprécier, balancer, calculer, considérer, estimer, examiner, juger (→ Balance, cit. 10; estimation, cit. 3). || Les mains de Dieu (cit. 44) pèsent le mal et le bien. || Peser les circonstances (→ Cas, cit. 11; froidement, cit. 3), les conséquences… || Pesons le gain et la perte. ⇒ Balance (mettre en), comparer (→ Gager, cit. 2, Pascal). ☑ Peser le pour et le contre (cit. 31) : réfléchir aux suites, aux avantages, aux inconvénients d'un projet… (→ Énergie, cit. 12; hésiter, cit. 5; octroyer, cit. 4). ☑ Peser ses mots, ses paroles, les employer après réflexion. || Parler en pesant ses mots (→ aussi Fédéral, cit. 1). || Peser mûrement (cit. 2) le parti à prendre. || Bien peser qqch. ⇒ Approfondir, étudier (→ Détruire, cit. 23). — Au p. p. Délibéré. || Une parole lente, pesée (→ Étriqué, cit. 3). || Lettres pesées, concertées (→ Indigeste, cit. 3). ☑ Tout bien pesé… : après mûre réflexion (→ Jouer, cit. 39). || Tout pesé, tout examiné (cit. 4). || Se sentir pesé, jugé, inspecté (cit. 2). — || « Je ne compte pas mes emprunts (cit. 8), je les pèse » (Montaigne). — Absolt. || Pesez, décidez (→ ci-dessous, cit. 4, Rousseau).
3 Ce n'est pas assez de compter les expériences, il les faut peser (…)
Montaigne, Essais, III, VIII (→ Conclusion, cit. 3).
4 Lecteur sensé, pesez, décidez; pour moi, je me tais.
Rousseau, les Confessions, XI.
5 J'avoue que, tout bien pesé, la tentative des réformateurs politiques de 89 me semble plus hardie, quant à son objet, et surtout plus inouïe que celle des réformateurs sociaux de nos jours.
Renan, l'Avenir de la science, Œ. compl., t. III, p. 755.
6 Avec un scrupule admirable et une délicatesse de tact infinie, écrivains et gens du monde s'appliquent à peser chaque mot et chaque locution, pour en fixer le sens, pour en mesurer la force et la portée (…)
Taine, les Origines de la France contemporaine, I, t. I, p. 296.
7 (…) d'autres événements récents furent examinés, commentés, tournés sous toutes leurs faces, pesés à leur valeur, avec ce coup d'œil pratique et cette manière de voir spéciale des marchands de nouvelles, des débitants de comédie humaine à la ligne, comme on examine, comme on retourne et comme on pèse, chez les commerçants, les objets qu'on va livrer au public.
Maupassant, Bel-Ami, I, II.
7.1 (…) un homme sérieux, bien vêtu, réservé, n'ouvrant la bouche que pour articuler avec soin, des mots pesés et choisis.
G. Duhamel, les Compagnons de l'Apocalypse, VIII.
♦ Peser que… (vx. → Évangile, cit. 3). — Peser si…
8 Une semaine s'écoulerait avant que Rhadidja arrivât à Marrakech. Il pesa s'il l'attendrait, et finalement le trouva inutile. Le lendemain, il partit pour la montagne.
Montherlant, les Lépreuses, II, XIV.
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II V. intr.
1 Avoir tel ou tel poids. || Peser deux grammes, cinquante kilos, une tonne… ⇒ Faire (→ Écritoire, cit. 1). ☑ Ça pèse des tonnes : c'est très lourd.
9 Il pesait cent deux kilos, et ça paraissait à peine.
Aragon, les Beaux Quartiers, II, IX.
♦ Peser peu (⇒ Léger), beaucoup (⇒ Lourd, pesant). || Peser lourd. ☑ Ne pas peser plus qu'une plume : être très léger. — Par exagér. || Elle ne pèse rien (→ Malade, cit. 12).
♦ ☑ Par métaphore. Cela ne pèse pas un grain (cit. 32), une once : cela n'a guère d'importance. || Cela ne pèse pas une once devant…, à côté de… (→ Autorité, cit. 29). ☑ Tout cela ne pèserait pas lourd (cit. 33) si… — Fig., vx. Valoir.
10 (…) le héros (…) et (…) le grand homme (…) mis ensemble ne pèsent pas un homme de bien.
La Bruyère, les Caractères, II, 30.
11 Il s'agit de la vérité scientifique et tout le reste ne pèse rien.
G. Duhamel, Chronique des Pasquier, VI, XVI.
12 Je suis sûre qu'il me préfère à toute autre; mais absente, je ne pèse pas lourd; c'est comme ça qu'il est.
F. Mauriac, la Fin de la nuit, II.
♦ Absolt. a Avoir un poids, subir les effets de la pesanteur. || La règle par laquelle les corps pèsent, gravitent (→ Inverse, cit. 2).
2 Peser sur…, contre… : exercer une poussée, une pression. ⇒ Appuyer, charger, haler (bas), pousser, presser. || Peser sur un levier. ⇒ Pesée (→ Ouvre-boîte, cit. 1). || Peser sur, contre une porte pour l'ouvrir.
13 Il est monté au village, il a pesé de l'épaule contre la porte, à la maison de la Mamèche; la porte s'est étalée à plat sur le plancher et il est entré.
J. Giono, Regain, II, II.
♦ (Le sujet désigne ce qui est pesant). || Fardeau, charge qui pèse sur les épaules. — Absolt. || Fardeau qui pèse. ⇒ 2. Farder (vx).
14 (…) cette croûte gelée de deux ou trois pieds d'épaisseur au plus, où pesaient sur le même point des milliers de curieux et un nombre considérable de chevaux (…)
Th. Gautier, Voyage en Russie, IX.
♦ Par ext. Donner une impression de poids (en parlant d'une partie du corps). || Son bras pèse comme du plomb (→ Hémiplégie, cit. 2). — Spécialt. || Aliment lourd, indigeste, qui pèse, pèse sur l'estomac.
15 Ton corps est abattu du mal de ta pensée;
Tu sens ton front peser et tes genoux fléchir.
A. de Musset, Poésies nouvelles, « Lettre à Lamartine ».
♦ Par métaphore. Donner une sensation de poids, d'oppression… || « Quand le ciel (cit. 32) bas et lourd pèse comme un couvercle… » (Baudelaire). || Atmosphère (cit. 7) étouffante qui pèse sur la foule. || « Le monstrueux édifice pèse sur vous » (→ Étouffer, cit. 14; et aussi espérance, cit. 7; mystérieux, cit. 3). || « L'universelle nuit pèse sur l'univers » (→ Étendre, cit. 54).
16 Le ciel lourd d'un soir d'été pesait sur la ville et sur la grande avenue où commençaient à sautiller sous les feuillages les refrains alertes des concerts en plein vent.
Maupassant, Fort comme la mort, II, I.
♦ (Sujet abstrait). || Rien ne pèse tant qu'un secret (→ Difficile, cit. 1). || « Sans rien en lui qui pèse ou qui pose » (→ Impair, cit. 1, Verlaine).
17 Les mêmes défauts qui dans les autres sont lourds et insupportables, sont chez nous comme dans leur centre; ils ne pèsent plus, on ne les sent pas.
La Bruyère, les Caractères, XII, 72.
18 L'homme est fragile et le génie pèse.
Chateaubriand, Vie de Rancé, p. 124.
B Abstrait.
1 (Sujet n. de chose). || Peser sur… : faire sentir son poids, constituer une charge pénible. ⇒ Accabler, opprimer… (→ Bouillonnement, cit. 1; courber, cit. 9). || Le fardeau (cit. 17) qui pèse sur sa vie. || Inquiétude, terreur qui pèse sur le cœur, sur l'âme (→ Incarner, cit. 11; néant, cit. 9). || Les remords pèsent sur la conscience. || Malédiction (cit. 14), menace (cit. 7) qui pèse sur… ⇒ Assombrir. — En Prusse, le joug (cit. 4) militaire pèse sur vos idées. || Faire peser le joug de la tyrannie sur… ⇒ Appesantir. — Impers. || Il pèse sur lui un soupçon, un reproche… (→ Facilité, cit. 16). — Les charges (cit. 26) qui pèsent sur qqn. — Une responsabilité écrasante pèse sur vous. ⇒ Incomber, retomber (→ aussi Acariâtre, cit. 2). — La classe sur laquelle pèsent les impôts (cit. 1). || Inscriptions (cit. 5), hypothèques qui pèsent sur une propriété. ⇒ aussi Grever. — Absolt. Être lourd, pénible à supporter.
19 (…) cinquante francs, pour des gens comme nous, ça commence à peser.
G. Sand, la Mare au diable, V.
20 De la lassitude pèse pourtant sur tous, les faces sont jaunies, les paupières rougies (…) Tous, depuis quelques jours, nous nous courbons et nous avons vieilli.
H. Barbusse, le Feu, II, XX.
♦ Peser à (qqn) : être pénible, difficile à supporter. ⇒ Coûter, dégoûter, ennuyer (cit. 13), fatiguer, importuner, peine (faire). || « Que ces vains ornements (cit. 2), que ces voiles me pèsent ! » (Racine). || La solitude lui pèse (→ Effrayer, cit. 12). || Cette vie lui pèse. ⇒ Étouffer (→ 1. Flétrir, cit. 13).
21 Après cela, comment me reçois-tu ? avec une politesse glacée, et en tranchant du seigneur. On dirait que mes visites commencent à te peser.
A. R. Lesage, Gil Blas, VIII, XIII.
22 (…) l'argent qu'il avait reçu lui pesait si fort qu'il le jeta en passant par le soupirail d'une cave.
R. Rolland, Jean-Christophe, Le matin, I, p. 115.
23 Plus rien ne me pesait. Dans la rue, je marchais aussi légèrement que dans mes rêves.
R. Radiguet, le Diable au corps, p. 64.
2 (Sujet n. de personne ou de chose). Exercer une pression morale; avoir une importance décisive. || Peser sur la décision de qqn. ⇒ Influencer, intimider. || Peser d'un poids énorme dans la création de… (→ Christianisme, cit. 9). || Peser dans la balance (cit. 17) pour un parti. || Élément qui pèse le plus dans une décision. ⇒ Prépondérant.
24 (…) j'ai horreur de peser sur la décision d'autrui. Si j'invite un camarade à dîner, et s'il n'accepte pas tout de suite, je n'insiste jamais, tant je crains d'entreprendre sur sa liberté, et tant je suis loin de considérer ma compagnie comme une aubaine hors de discussion.
J. Romains, le Dieu des corps, II.
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pesé, ée p. p. adj.
♦ Voir à l'article (cit. 5, 7.1 et supra).
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DÉR. Pesable, pesette, peseur, peson.
COMP. Pèse-acide, pèse-alcool, pèse-bébé, pèse-esprit, pèse-grains, pèse-lait, pèse-lettre, pèse-liqueur, pèse-moût, pèse-sel, pèse-vin.
Encyclopédie Universelle. 2012.