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indifférent

indifférent, ente [ ɛ̃diferɑ̃, ɑ̃t ] adj.
• 1314; lat. indifferens
I(Choses et personnes)
1(1633) Sans intérêt, sans importance, de peu de conséquence. Parler de choses indifférentes (cf. De la pluie et du beau temps). Impers. « Il n'est pas indifférent que le peuple soit éclairé » (Montesquieu).
2(1671) Qui n'intéresse pas, ne touche pas. « Ces personnes, ni amies ni indifférentes, avec lesquelles nous avons des relations de loin en loin » (Balzac). Spécialt Qui n'inspire aucun sentiment amoureux. Je vous assure qu'elle m'est indifférente. (Choses ) Son sort m'est indifférent.
3(XVIIIe) Qui ne tend pas vers telle chose plutôt que vers telle autre. Sc. Sur lequel ne s'exerce en tel ou tel sens aucune force capable de modifier son état, sa place. Une sphère homogène placée sur un plan horizontal est en équilibre indifférent. Log., automat. État indifférent, qui peut prendre indifféremment la valeur vrai ou faux. — Psychol. États indifférents, qui ne seraient marqués ni de plaisir ni de douleur.
4Qui, d'un côté comme de l'autre, présente un intérêt (ou une absence d'intérêt) égal; qui n'importe ou ne touche ni plus ni moins. égal (cf. C'est la même chose, c'est bonnet blanc et blanc bonnet; fam. c'est kif-kif). Ici ou là, cela m'est indifférent (cf. Ne faire ni chaud ni froid). Il est indifférent de faire ceci ou cela.
N'importe quel (dans une annonce). Âge, sexe indifférent.
II(Personnes)
1(1636) vx Impartial.
2Qui ne s'intéresse pas (à), qui n'est pas préoccupé de (qqch. ou qqn). insensible. Indifférent à qqch. 1. froid, impassible, imperturbable, insoucieux. Indifférent à tout, à son sort, au destin. résigné, fataliste. Vos difficultés ne me laissent pas indifférent. Il est resté indifférent à ses avances. Indifférent à qqn. Elle m'est indifférente.
Subst. Il n'a rencontré que des indifférents.
3Spécialt Qui marque de l'indifférence en amour. Subst. « Le Bel Indifférent », pièce de Cocteau.
4Qui n'est touché par rien ni par personne. C'est un homme indifférent, rien ne peut l'émouvoir. blasé, égoïste, 1. froid, insouciant, sec. Il tâchait « de cacher sa curiosité, de paraître indifférent » (R. Rolland). Par ext. Air, visage indifférent. dédaigneux, détaché, 1. froid.
Subst. « L'Indifférent », tableau de Watteau.
⊗ CONTR. Important, intéressant. Intéressé, partial. Déterminé, différent. — Attentif, curieux, sensible.

indifférent, indifférente adjectif (latin indifferens, -entis) Qui ne présente aucun motif de préférence, qui est neutre, égal : Choix indifférent. Qui ne suscite chez quelqu'un aucun sentiment particulier, aucune réaction précise, qui n'a à ses yeux aucun intérêt : La politique le laisse indifférent. Qui n'éprouve aucun sentiment, aucun intérêt particulier pour quelqu'un ou quelque chose : Les gens sont indifférents ; rien ne les touche.indifférent, indifférente (difficultés) adjectif (latin indifferens, -entis) Construction 1. Indif-férent à, à l'égard de : être indifférent aux autres et à leur opinion ; elle est assez indifférente à l'égard de ses succès. 2. Il est indifférent que (+ subjonctif) : il est indifférent que vous partiez aujourd'hui ou demain pourvu que vous arriviez avant lundi.indifférent, indifférente (expressions) adjectif (latin indifferens, -entis) Équilibre indifférent, équilibre présenté par un système quel que soit l'état dans lequel on le place. ● indifférent, indifférente (synonymes) adjectif (latin indifferens, -entis) Qui ne présente aucun motif de préférence, qui est neutre...
Synonymes :
- égal
Qui ne suscite chez quelqu'un aucun sentiment particulier, aucune réaction...
Synonymes :
- blasé
- désintéressé
- détaché
- étranger
- flegmatique
- impassible
- imperméable
- inattentif
- incrédule
- insoucieux
- sceptique
- sourd
Contraires :
- enthousiaste
- passionné
Qui n'éprouve aucun sentiment, aucun intérêt particulier pour quelqu'un ou...
Synonymes :
- égoïste
- froid
- inhumain
- insensible
- sans-coeur
- sec
indifférent, indifférente nom Personne qui ne manifeste aucune sensibilité, aucune réaction particulière aux choses et aux gens qui l'entourent : Ne joue pas les indifférents, tu es ému.

indifférent, ente
adj. et n.
d1./d Qui ne présente aucun motif de préférence. Il est indifférent de suivre ce chemin ou l'autre. Cela m'est indifférent.
d2./d Peu important. Conversation indifférente.
d3./d Insensible, qui ne s'intéresse pas. Il est indifférent à ses intérêts.
|| Subst. Un(e) indifférent(e).
d4./d PHYS équilibre indifférent: état d'un corps qui reste dans la position qu'on lui donne quelle que soit cette position (par oppos. aux équilibres stable et instable).

⇒INDIFFÉRENT, -ENTE, adj.
I. — Qui n'est pas concerné; qui n'est pas plus concerné par une chose que par une autre; qui est insensible, détaché.
A. — 1. [En parlant d'une pers. ou d'une collectivité]
a) Absol. Lecteur, observateur, promeneur, témoin indifférent; monde indifférent; présence indifférente; (ne pas) être, demeurer, rester indifférent (devant qqc.). Il regarde, spectateur indifférent. Il laisse faire (MUSSET ds Revue des Deux Mondes, 1833, p. 734). Au lycée, elle avait paru vivre indifférente et comme absente des menues tragédies qui déchiraient ses compagnes (MAURIAC, Th. Desqueyroux, 1927, p. 183). Des réverbères centenaires faisaient des ronds dans le brouillard. L'avenue était vide, la ville indifférente (MORAND, Homme pressé, 1941, p. 129). V. apparence ex. 18; distrait II A ex. de Michelet.
Rem. Dans la mesure où différent n'est pas l'anton. de indifférent, l'usage de ce dernier dans une phrase négative est fréq. Le corps social dans son ensemble se trouve informé de tous les aspects d'une difficulté qui ne peut le laisser indifférent (Univ. écon. et soc., 1960, p. 62-12).
Emploi subst. Jusqu'aux chaleureux indécis (...) qui cédaient à cet impérieux besoin de participer qui s'empare des indifférents, des moutonniers (ARNOUX, Roi, 1956, p. 267). V. convaincu II B 2 ex. de Gide, École femmes :
1. Sensible un instant aux douceurs de l'affection et aux sourires de la destinée, il était froissé des jours, des semaines entières par la maladresse d'un indifférent.
SAND, Hist. vie, t. 4, 1855, p. 442.
En partic.
) [En matière relig.] J'avais été un fervent chrétien au milieu des désordres de ma jeunesse, et ma famille avait été bouleversée par ma conversion. Je suis devenu indifférent (LARBAUD, Barnabooth, 1913, p. 348).
Emploi subst. :
2. Il [le Directoire] compta faire beaucoup pour la propagande en imposant le calendrier révolutionnaire et le culte décadaire : ce fut sans succès; car, outre les croyants, il indisposa ainsi les indifférents en troublant leurs habitudes.
LEFEBVRE, Révol. fr., 1963, p. 501.
) [Dans le domaine des relations amoureuses] Jean la considérait, par-dessus son épaule. Elle le laissait presque indifférent, presque calme maintenant. À peine songeait-il à l'embrasser (ROY, Bonheur occas., 1945, p. 100).
Emploi subst. J'amenai la conversation sur le caractère des femmes. Chéron vint à me dire qu'il y en avait de trois sortes, les amoureuses, les curieuses et les indifférentes (FRANCE, Pierre bl., 1905, p. 314). Le Bel Indifférent [titre] (COCTEAU, Théâtre poche, 1949, p. 67) :
3. Moi, j'aime l'amour, mais j'ai horreur de la sentimenterie. Si j'admire Suzanne, par exemple, c'est seulement parce que j'ai le culte de la beauté. D'ailleurs, j'ai fondé, à Paris, le Club des indifférents.
DUHAMEL, Suzanne, 1941, p. 152.
b) [Avec compl. désignant l'objet de l'indifférence]
) Indifférent à + subst. Indifférent à la fatigue, au ridicule, aux contradictions, aux rumeurs; indifférent à la musique. Il quitta l'appui du balcon et se promena un moment de long en large sur la terrasse, aussi indifférent aux bruits de la fête qu'aurait pu l'être un passant dans la rue (PONSON DU TERR., Rocambole, t. 1, 1859, p. 60). Indifférent aux lazzi de ses camarades, Vaton souffrait au contraire de tout mépris émané d'Augustin (MALÈGUE, Augustin, t. 1, 1933, p. 92). Ce libertin [Benjamin Constant] n'a jamais été indifférent à Dieu (MAURIAC, Mém. int., 1959, p. 90) :
4. ... il l'était [homme de lettres], il le serait jusqu'à sa mort (...) parce qu'il aurait toujours à dire, incapable d'être indifférent au bonheur et au malheur des hommes et de se taire sur la justice et l'injustice.
GUÉHENNO, Jean-Jacques, 1952, p. 198.
) Indifférent en + subst. (rare). Indifférent en politique jusqu'à ces dernières semaines, je n'ai connu d'autre gouvernement que la République, je n'en ai pas servi d'autre, je n'en vois pas d'autre possible (DE VOGÜÉ, Morts, 1899, p. 112).
2. [P. méton., en parlant d'un élément du visage, d'une expression, d'une attitude, d'un sentiment, d'une manifestation de l'activité intellectuelle]
a) Absol. Qui marque l'indifférence éprouvée par quelqu'un. L'attente continuelle et indifférente de la mort (VIGNY, Serv. et grand. milit., 1835, p. 24). La relation de mon corps avec le corps d'autrui est une relation de pure extériorité indifférente (SARTRE, Être et Néant, 1943, p. 277).
SYNT. Geste, regard, sourire, ton, visage indifférent; voix indifférente; lèvres indifférentes; zèle indifférent; brutalité, curiosité, pitié, précision, sérénité, tranquillité indifférente; paroles, remarques indifférentes.
Loc. fig. Voir qqc. d'un œil indifférent. Laisser faire sans réagir. Elle [l'Égypte] verra d'un œil indifférent le dilettante d'Hellas visiter et décrire ses monuments, le parvenu romain les relever (FAURE, Hist. art, 1909, p. 55).
b) [Avec compl. désignant l'objet de l'indifférence] Elle l'a reconnu le Crouïa-Bey, reprit-elle d'une voix indifférente à la teneur des propos qu'elle supportait (QUENEAU, Pierrot, 1942, p. 96).
B. — P. anal. Les religions hostiles ou indifférentes dès leur naissance aux images (Arts et litt., 1935, p. 58-5).
Littér. [En parlant d'un élément naturel, d'un objet]
Absol. Ciel, temps indifférent; nature, neige, nuit, terre indifférente. La pluie, seule, tombait très droite, silencieuse, serrée, indifférente comme si, du fond des âges, elle eût choisi, pour y ensevelir sa chute, cette rue banale et endormie (CARCO, Homme traqué, 1922, p. 41) :
5. ... comme si Madrid entière eût répondu par un indifférent tocsin, au-dessus du roulement du canon de la cité universitaire, les horloges de la ville, l'une après l'autre, commencèrent à sonner neuf heures.
MALRAUX, Espoir, 1937, p. 728.
[Avec compl. désignant l'objet de l'indifférence] L'espace jouissait d'être infini, homogène et parfaitement indifférent à tout ce qui se passait dans son auguste sein (VALÉRY, Variété IV, 1938, p. 138). Au-dessus de ces destins éphémères, si sanglants qu'ils nous apparaissent, les grandes constellations brillent indifférentes aux passions criminelles (MAURIAC, Journal 3, 1940, p. 287).
C. — Spécialement
1. BOT. (Essence) qui s'accommode aussi bien d'un sol calcaire que d'un sol siliceux (d'apr. Forest. 1946).
2. CHIMIE
a) Qui ne réagit pas, inerte. On dépose [sur le tissu] (...) une pâte indifférente (réserve) qui empêche que dans ces endroits se fixent les couleurs (OVIO, Vision coul., 1932, p. 215).
b) Oxyde indifférent. Synon. de amphotère (s.v. amph(i)-, amph(o)-). Les oxydes indifférents, pouvant jouer le rôle soit d'acide, soit de base, suivant le cas (LEBEAU, COURTOIS, Pharm. chim., t. 1, p. 117).
3. MÉCAN., PHYS. Équilibre indifférent. Équilibre qui persiste quelle que soit la position que l'on donne à un corps autour de son point ou de son axe de suspension (d'apr. Lar. encyclop.). On dit qu'une hélice est équilibrée dynamiquement lorsqu'elle est en équilibre indifférent autour de son axe de rotation (GUILLEMIN, Constr., calcul et essais avions, 1929, p. 224).
4. PHILOS. ANC. Matière indifférente. Matière inerte. Les divers degrés d'activité des monades ne sont [pour Anaxagore] que la distinction entre la matière subtile et la matière indifférente (SENANCOUR, Rêveries, 1799, p. 185).
II. A. — Qui ne suscite ni adhésion, ni rejet; qui ne suscite ni plus ni moins d'adhésion qu'autre chose; qui est neutre, quelconque ou ressenti comme tel.
1. Absolument
a) [En parlant d'une chose] Chose, événement, lieu, son, spectacle, sujet (de conversation) indifférent; rapports indifférents. Longue, mince, avec une tête forte aux cheveux indifférents, mais des yeux! (VERLAINE, Œuvres compl., t. 4, Mém. veuf, 1886, p. 214). L'habitation de M. Lampre (...) était une de ces grandes bâtisses indifférentes, telles qu'il en prospère dans tous les bourgs (HUYSMANS, Oblat, t. 2, 1903, p. 89) :
6. Ainsi qu'il arrive au début de tous les repas, la conversation roula d'abord sur des objets indifférents : quelques mots échangés çà et là, point d'allusion à la situation présente...
SANDEAU, Mlle de La Seiglière, 1848, p. 154.
Emploi subst. masc. sing. à valeur de neutre :
7. Mon ami, j'ai ces temps-ci, en marchant dans les rues, beaucoup observé les visages des femmes. Presque toutes celles que j'ai vues passer avaient le front sombre, les traits détendus dans l'ennui, l'air installé dans l'indifférent.
NOAILLES, Nouv. espér., 1903, p. 321.
b) [En parlant d'une manifestation de l'activité intellectuelle, du comportement] Sous l'influence de sentiments divers, cette phrase d'abord indifférente (...) devient vivante par l'effet de l'accent (D'INDY, Compos. mus., t. 1, 1897-1900, p. 31). Et il remâche encore cette dernière injure lorsque au téléphone, au milieu de propos indifférents, Marcel avait ajouté : « J'oubliais de te dire que je me marie aujourd'hui » (MAURIAC, Ce qui était perdu, 1930, p. 18).
2. [Avec déterminant]
a) [Le déterminant est un adv. ou une loc. à valeur adv. désignant le domaine dans lequel la chose est indifférente] Les actes sont (...) indifférents en tant que physiques : la conscience de chacun les fait, seule, bons ou mauvais (VILLERS DE L'I.-A., Contes cruels, 1883, p. 8). Des nuances acoustiquement indifférentes (SAUSSURE, Ling. gén., 1916, p. 66) :
8. ... puisqu'il n'y a rien dans la civilisation qui présente ce critère de la moralité, elle est moralement indifférente. Si donc la division du travail n'avait pas d'autre rôle que de rendre la civilisation possible, elle participerait à la même neutralité morale.
DURKHEIM, Division trav., 1893, p. 16.
b) [Le déterminant est un compl. désignant à qui (ou à quoi) la chose est indifférente] Ces preuves partielles préalables, dont la combinaison n'est nullement indifférente à la science (COMTE, Philos. posit., t. 4, 1839-42, p. 301). Le calcium nous apparaîtra alors comme un élément indifférent pour la plante (PLANTEFOL, Bot. et biol. végét., t. 1, 1931, p. 326). Elle craignait de tomber dans une torpeur où tout lui deviendrait indifférent (ROY, Bonheur occas., 1945, p. 406) :
9. Un policier était tout près. Tchen voulut demander si Chang-Kaï-Shek était mort, mais il voulait cela dans un autre monde; dans ce monde-ci, cette mort même lui était indifférente.
MALRAUX, Cond. hum., 1933, p. 354.
3. Loc. verb.
a) C'est indifférent, cela est indifférent (à qqn). Cela n'a aucune importance (pour quelqu'un). Cette vérité [abjurée par Galilée] ne valait pas le bûcher. Qui de la terre ou du soleil tourne autour de l'autre, cela est profondément indifférent. Pour tout dire, c'est une question futile (CAMUS, Sisyphe, 1942, p. 16) :
10. Faites ce que vous voudrez. Humiliez-vous, si cela vous plaît, dans la société des petites sottes que vous introduisez chez moi et même à qui vous me priez de donner des leçons de musique. Tout cela m'est indifférent ou presque indifférent.
DUHAMEL, Cécile, 1938, p. 167.
b) Il est indifférent (à qqn) de + inf.; il est indifférent que + subj. C'est égal, sans importance (pour quelqu'un) de/que. « (...) Est-ce que je ne l'aime plus? L'ai-je jamais aimé? » Elle ne savait pas et il lui était indifférent de savoir (FRANCE, Lys rouge, 1894, p. 71). V. façon II B 1 ex. de France :
11. ... ma participation est la seule chose importante. Si c'était la chose à faire qui importait, il serait indifférent qu'elle fût faite par l'un ou par l'autre, pourvu que quelqu'un en général s'en chargeât, car dans l'objectivisme de l'acte tous les agents sont interchangeables...
JANKÉL., Je-ne-sais-quoi, 1957, p. 220.
[Dans une phrase négative] :
12. ... il ne peut être indifférent au philologue ou au simple lettré, qui sait la valeur d'Homère, de Platon et d'Euripide, de Térence et de Virgile, que pendant un millénaire on ait lu, admiré, appris par cœur ces auteurs en Égypte.
L'Hist. et ses méth., 1961, p. 505.
B. — [En parlant d'une pers. ou d'une catégorie de pers.] Être indifférent à qqn. Ne susciter en lui ni sympathie, ni antipathie particulière. Pourquoi sa mort m'attristerait-elle? Je lui fus toujours indifférent (RENARD, Journal, 1909, p. 1222). Les malheureux lui étaient indifférents (MONTHERL., Célibataires, 1934, p. 854) :
13. ... je ne la détestais pas, mais elle m'était tellement indifférente que, quand nous avons appris qu'elle était très mal, mon mari lui-même a été étonné et m'a dit : « On dirait que cela ne te fait rien. »
PROUST, Prisonn., 1922, p. 240.
En partic. [Dans le domaine des relations amoureuses] Qui ne suscite ni amour, ni haine. Claire : (...) moi, je vous déteste... Conrad : En vérité?... Oh! merci, merci, madame! (...). Je ne craignais qu'une chose, c'était de vous demeurer indifférent (DUMAS père, Cachemire vert, 1850, 7, p. 283) :
14. Avec Albertine aussi, il pouvait se permettre d'être lui-même. Chose paradoxale, il y tenait un peu aussi parce qu'elle lui était indifférente. Elle ne le passionnait plus. Avec elle, pas de surprise, pas de drame.
VAN DER MEERSCH, Invas. 14, 1935, p. 155.
III. — BIOL. Synon. rare de indifférencié :
15. ... les myoblastes ne dégénèrent pas; ils se transforment en éléments morphologiquement et fonctionnellement indifférents. Nous verrons que c'est là peut-être le seul cas indiscutable de dédifférenciation, au sens que Champy avait donné à ce terme.
J. VERNE, Vie cellul., 1937, p. 94.
REM. Indifférencieux, subst. masc., hapax, synon. (supra I A 1 a ). Je voudrais (...) pouvoir vous prendre la taille quand la nécessité se présente. Comme cela, par amitié, par enthousiasme. Hop! Rien à craindre, Suzanne! Pas sentimental! Pas gémissant pour un sou. Hop! Président du club des Indifférencieux! (DUHAMEL, Suzanne, 1941, p. 153).
Prononc. et Orth. : [], fém. [-]. Ac. 1694-1740 : -diffe-, ensuite -diffé-. Étymol. et Hist. [1314 « sans différence », H. DE MONDEVILLE, attesté indirectement d'apr. son dér. indifféremment] 1. fin XIIIe-début XIVe s. « sans différence, sans distinction » (Glossaire rom., 9543 ds T.-L.); 2. 1529 « ni bon, ni mauvais (d'une action) » (BONIVARD, Jardin d'antiquité, 28 r° d'apr. FEW t. 4, p. 646a); 3. 1634 « sans intérêt, sans importance (ici d'un entretien) » (CORNEILLE, La Veuve, éd. Ch. Marty-Laveaux, t. 1, acte I, scène 1); 4. 1643 « qui n'est point sensible (ici à l'amour) » (ROTROU, Bélisaire, IV, 2 ds LITTRÉ). Empr. au lat. indifferens « indifférent, ni bon, ni mauvais », « qui ne se préoccupe pas de ». Fréq. abs. littér. : 3 602. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 4 564, b) 4 358; XXe s. : a) 5 604, b) 5 717.

indifférent, ente [ɛ̃difeʀɑ̃, ɑ̃t] adj. et n.
ÉTYM. Fin XIIIe-déb. XIVe, « sans différence, sans distinction » (cf. le dér. indifferanment, 1314; → Indifféremment); lat. indifferens « indifférent; ni bon, ni mauvais; qui ne se préoccupe pas de »; de in- (→ 1. In-), et differens, -entis. → Différent.
———
I
1 Vx. (Personnes). Qui n'est pas en faveur d'un parti plutôt que d'un autre. Impartial.
1 Quand il est question de juger si on doit faire la guerre et tuer tant d'hommes, condamner tant d'Espagnols à la mort, c'est un homme seul qui en juge, et encore intéressé : ce devrait être un tiers indifférent.
Pascal, Pensées, V, 296.
2 (1641). Choses. Qui ne tend pas vers telle chose plutôt que vers telle autre. || La matière est d'elle-même indifférente au repos ou au mouvement (Hatzfeld). || Mot en lui-même indifférent, opposé à un mot aux acceptions précises (→ Abandonner, cit. 6).
Sc. Sur lequel ne s'exerce aucune force capable de modifier son état, sa place. || Une sphère homogène placée sur un plan horizontal est en équilibre indifférent. || Espace (cit. 6) homogène, vide et indifférent.
2 (…) tout son corps étant indifférent de lui-même au repos et au mouvement, et ayant cette inertie qui est un attribut de la matière (…)
Voltaire, Éléments de la philosophie de Newton, III, IV.
Psychol. || États indifférents, qui ne seraient marqués ni de plaisir ni de douleur.
(Sens moral). Qui ne tend pas davantage vers le bien que vers le mal, qui n'est en soi ni bon ni mauvais. || Toute loi, fût-elle indifférente, doit être appliquée ou abrogée (cit. 2).
3 (…) lorsqu'on a quelque bon dessein, ou même (…) quelque dessein qui n'est qu'indifférent (…)
Descartes, Discours de la méthode, III.
3 (Déb. XVIe; choses). Qui, d'un côté comme de l'autre, présente un intérêt (ou une absence d'intérêt) égal; qui n'importe ou ne touche ni plus ni moins. || Être indifférent à qqn, ne pas présenter pour lui plus (ou moins) d'intérêt. || Ici ou là cela m'est indifférent. Égal; → Je n'ai aucune préférence; cela ne me fait ni chaud ni froid. || Il est indifférent de penser, de faire ceci ou cela (→ Abstenir, cit. 2; filiation, cit. 3; hérétique, cit. 4). || Il est indifférent à qqn d'avoir, de faire telle ou telle chose (→ Fongible, cit. 1; héroïsme, cit. 3).
4 J'appris à Thalès, le premier de vos sages, que le vivre et le mourir était indifférent; par où, à celui qui lui demanda pourquoi donc il ne mourait, il répondit très sagement : « Parce qu'il est indifférent » (C'est la Nature qui parle).
Montaigne, Essais, I, XX.
5 La maladie ou la santé lui devinrent indifférentes.
Fléchier, Dauphine, in Littré.
6 Il est indifférent que ce soient les chrétiens ou les musulmans qui souffrent, il n'y a que l'homme qui soit digne d'intéresser l'homme.
G.-T. Raynal, Hist. philosophique, XI, 9.
7 La langue avait autrefois des impersonnels : il ne me chaut pas. Aujourd'hui, elle use surtout de peu importe, n'importe. On dit aussi : il m'est indifférent, égal : il m'est indifférent qu'elle vienne ou ne vienne pas se fixer ici;peu m'importe que son opinion soit favorable ou non.
F. Brunot, la Pensée et la Langue, p. 552.
———
II (Sans idée de « différence », d'« opposition » ou de « choix entre deux choses »).
1 (Mil. XVIIe). Personnes. Qui ne s'intéresse pas à, qui n'est pas préoccupé de (qqch. ou qqn). Insensible.
a (Indifférent à qqch.). || Être indifférent, indifférente aux malheurs d'autrui, à toute misère (→ Apaiser, cit. 29), aux événements extérieurs (→ Flegmatique, cit. 2), à l'opinion (→ Haut, cit. 94). Inattentif. || Indifférent à tout (→ Cour, cit. 10). || Indifférent à son sort, au destin. Résigné. || Indifférent à l'argent. Désintéressé.Indifférent quant à, à l'égard de, devant, envers, vis-à-vis de qqch., qqn.Vx. || Indifférent sur qqch.Être indifférent en politique, sur un sujet.(Sans compl.). || Il restait absolument indifférent. → ci-dessous, cit. 10. || Assister (cit. 2) à la vie en spectateur indifférent. || Laisser qqn indifférent. || Ce qui le laissait indifférent le blesse (cit. 15) aujourd'hui.(Avec un nom d'abstraction). || Âme indifférente, cœur indifférent.
8 (…) il est froid et indifférent sur les observations que l'on fait (…)
La Bruyère, les Caractères, VIII, 62.
9 Mais à ces doux tableaux mon âme indifférente
N'éprouve devant eux ni charme ni transports (…)
Lamartine, Méditations, L'isolement.
10 Parmi ces éblouissements, Lamartine marchait tranquille, indifférent presque, comme un grand seigneur que rien n'étonne et qui se sent au niveau de tous les hommages.
Th. Gautier, Portraits contemporains, Lamartine.
11 Hostile à l'univers plutôt qu'indifférent.
Baudelaire, les Fleurs du mal, Tableaux parisiens, XC.
12 Très peu sensible aux choses qui nous entouraient, tandis que son élève en était à ce point absorbé, assez indifférent au cours des saisons pour se tromper de mois comme il se serait trompé d'heure (…)
E. Fromentin, Dominique, III.
13 À vrai dire, je demeure indifférent à vos disputes, parce que j'en sens l'inanité.
France, le Mannequin d'osier, XVII, Œuvres, t. XI, p. 431.
14 (…) il ne lui était pas possible, en effet, de douter que cet homme souffrît, et cette souffrance ne la laissait pas indifférente, bien au contraire, elle la remuait (…)
J. Green, Léviathan, I, IX.
15 Il est venu là (…) se tenant le ventre ou le côté, comme tant d'autres qui, une fois touchés, se lèvent du sillon et s'en vont debout dans la fusillade, indifférents à tout nouveau danger.
J. Chardonne, les Destinées sentimentales, p. 349.
Spécialt (en matière de religion). Incrédule.
16 Je n'ai jamais rien su de ses opinions religieuses. Il me paraissait être plus indifférent qu'incrédule.
Balzac, Gobseck, Pl., t. II, p. 627.
b Qui n'est pas ému, concerné par qqn. || Être indifférent à qqn, lui être indifférent. || Il m'est indifférent. Indifférer (fam.).(Sans compl.). || Vie d'auberge où l'on coudoie (cit. 1) des hommes toujours nouveaux et toujours indifférents. || Mère indifférente qui ne s'occupe guère de ses enfants. || Il souffrait de voir des amis autrefois dévoués aujourd'hui indifférents.
REM. Avec un complément, indifférent prête parfois à ambiguïté. Être indifférent à qqn peut signifier qu'on ne lui porte aucun intérêt (→ infra, cit. 17 et 23), ou bien, au contraire — et c'est le cas le plus fréquent, de nos jours — qu'on n'est, de sa part, l'objet d'aucun intérêt. Quand le complément est un pronom personnel placé avant l'adjectif, aucune équivoque n'est possible. Cet homme m'est indifférent (→ infra, cit. 19) signifie « cet homme ne m'intéresse pas, me laisse indifférent ».
17 (…) je ne suis pas indifférente à cet enfant et à vos affaires (…)
Mme de Sévigné, 1214, 11 sept. 1689.
18 La vie commune n'était plus que le contact obligé de deux êtres liés l'un à l'autre, passant des journées entières sans échanger une parole, allant et venant côte à côte, comme étrangers désormais, indifférents et solitaires.
Zola, la Bête humaine, p. 279.
19 Qu'est-ce que cela peut vous faire (de le voir moins) ? À moi, cela me ferait plaisir. Et vous dites vous-même qu'il vous est indifférent.
A. Maurois, Climats, I, IX.
N. || Un indifférent, une indifférente. || Il avait beau se plaindre, il ne rencontrait que des indifférents.
20 Allez vivre au milieu d'indifférents, qui vous demanderont d'un air distrait : « Comment vous portez-vous ? », mais qui s'enfuiront si vous répondez sérieusement; des gens qui n'écouteront pas vos plaintes (…)
Alain, Propos, 1907, Sollicitude.
Spécialt. Qui marque de l'indifférence en amour. || Femme indifférente. Cruel. || Elle souffrait de le trouver indifférent.N. || Une indifférente (→ Aimer, cit. 43). || Le Bel Indifférent, pièce de J. Cocteau.
21 Phèdre seule charmait tes impudiques yeux;
Et pour tout autre objet ton âme indifférente
Dédaignait de brûler d'une flamme innocente.
Racine, Phèdre, IV, 2.
22 L'on suppose un homme indifférent, mais qui voudrait persuader à une femme une passion qu'il ne sent pas (…)
La Bruyère, les Caractères, III, 68.
23 (…) on voit des hommes, indifférents aux femmes les plus belles, en aimer passionnément certaines qui nous semblent laides.
Proust, À la recherche du temps perdu, t. XI, p. 113.
24 Guitta revient à Barbazac pour des courts séjours seulement et elle y mène une existence recluse, auprès d'un mari indifférent.
J. Chardonne, les Destinées sentimentales, p. 33.
c Par métaphore (en parlant de la nature, des choses qui paraissent ignorer l'homme). || Tout est indifférent à tout (→ Création, cit. 8). || Ambiance (cit. 1) indifférente ou hostile.
2 Qui n'est touché par rien ni personne. || C'est un homme indifférent, rien ne peut l'émouvoir. Apathique, blasé, égoïste, froid, insouciant, passif, sec; (fam.) je-m'en-foutiste.
25 Christophe réfléchissait : il pensait que quand on est grand, on ne s'étonne plus de rien, on est fort, on connaît tout. Et il tâchait d'être grand, lui aussi, de cacher sa curiosité, de paraître indifférent.
R. Rolland, Jean-Christophe, L'aube, I, p. 23.
N. m. || L'Indifférent, tableau de Watteau.
Qui exprime cette indifférence. || Air (cit. 7), regards (→ Assouvir, cit. 15), expression (cit. 37), visages (→ Glouton, cit. 1) indifférents. Dédaigneux, détaché, étranger, froid. || Une courtoisie indifférente (→ Habituel, cit. 2).
26 Ce qu'elle disait était difficilement intelligible, mais le ton détaché, indifférent de ses propos contrastait avec une certaine volubilité.
J. Green, Adrienne Mesurat, p. 282.
3 (1671). Qui n'intéresse pas, ne touche en rien. a (Personnes). || Ces personnes ni amies ni indifférentes, que l'on appelle des connaissances (cit. 32). || C'est un ami d'enfance qui m'est devenu indifférent.
27 Je vais me faire, pour mon instruction, un petit dictionnaire à l'usage des rois. Mon ami signifie mon esclave. Mon cher ami veut dire vous m'êtes plus qu'indifférent.
Voltaire, Correspondance, 1122, 18 déc. 1752.
N. Personne qui est indifférente (au locuteur), qui n'intéresse, n'émeut pas.
28 On peut laisser penser aux indifférents ce qu'ils veulent; mais c'est un crime de souffrir qu'un ami nous fasse un mérite de ce que nous n'avons pas fait pour lui.
Rousseau, Émile, V.
29 Nous connaissons le caractère des indifférents, comment pourrions-nous saisir celui d'un être qui se confond avec notre vie, que bientôt nous ne séparerons plus de nous-même, sur les mobiles duquel nous ne cessons de faire d'anxieuses hypothèses perpétuellement remaniées ?
Proust, À la recherche du temps perdu, t. V, p. 158.
Spécialt. Qui n'inspire aucun sentiment amoureux. || Je vous assure qu'elle m'est indifférente (→ Haïr, cit. 14). || Il ne lui est peut-être pas indifférent, mais elle n'en laisse rien paraître.N. || Je n'ai pas l'impression que vous le traitiez en indifférent.
30 Mais ce sera, sans doute, et j'en serais garant,
Un billet qu'on envoie à quelque indifférent (…)
Molière, Don Garcie, II, 5.
31 Le soir du bal où nous étions ensemble, vous m'aviez dit au revoir comme on ne le dit pas à une indifférente (…)
Loti, Pêcheur d'Islande, II, XI.
b (Choses). || Chose indifférente à qqn. || Tout cela m'est indifférent. || Son sort m'est indifférent. || Un plaisir qui rend les malheurs de la vie comme indifférents (→ Brièveté, cit. 3). || Cet auteur traite de sujets qui me sont indifférents.
32 — L'opinion des Parisiens, m'est tout à fait indifférente, dit-il. Je vis pour moi, ou, si vous voulez pour vous deux.
Balzac, la Fausse Maîtresse, Pl., t. II, p. 22.
33 L'Italien ne vient pas à l'Opéra pour voir les héros d'opéra, mais pour se voir, pour s'entendre, pour caresser, pour attiser ses passions. Tout le reste lui est indifférent.
R. Rolland, Voyage musical au pays du passé, p. 191.
(Impers.). || Je ne tiens plus à eux, il m'est indifférent de les quitter (→ Gâter, cit. 39). || Cela m'est un peu indifférent.
(1633). Sans compl. en à. Sans intérêt, sans importance, de peu de conséquence. || Causer de choses indifférentes (→ De la pluie et du beau temps). || Aborder les sujets les plus indifférents. || Conversations, entretiens indifférents. || Rien n'est indifférent (→ Atome, cit. 15). || Ce n'est pas une chose indifférente, loin de là !
34 (…) ce n'est pas une chose indifférente pour la dépense que le bel air et le bon air dans une maison comme la vôtre (…)
Mme de Sévigné, 1211, 31 août 1689.
35 (…) un de ces visages indifférents qu'on voit à tout le monde et qu'on ne remarque à personne.
Marivaux, le Paysan parvenu, I.
36 Il vaut mieux qu'elle écrive dix phrases inutiles, que d'en omettre une intéressante; et souvent ce qui paraît indifférent ne l'est pas.
Laclos, les Liaisons dangereuses, CI.
37 Le caractère distinctif de ces pieuses familles est une discrétion sans bornes, et l'on s'y tait sur toutes les choses, même sur les indifférentes.
Balzac, le Médecin de campagne, Pl., t. VIII, p. 492.
38 (…) elle parlait de choses indifférentes ou frivoles.
Valery Larbaud, Fermina Marquez, XII.
(Impers.). || Il n'est pas indifférent de…, que…
39 Il n'est pas indifférent que le peuple soit éclairé.
Montesquieu, l'Esprit des lois, Préface.
40 Mais il n'est pas indifférent de constater qu'un grand inventeur de roman (Balzac) savait voir la réalité avec de bons yeux (…)
Émile Henriot, les Romantiques, p. 325.
CONTR. Intéressé, partial. — Déterminé, différent. — Ambitieux, anxieux, attentif, avide, curieux, désireux, envieux, préoccupé, soucieux. — Dévot. — Compatissant, dévoué, émotif, fervent, impressionnable, sensible. — Amoureux, brûlant, brûlé, enflammé, frappé, touché. — Complice, cordial, ému, éperdu, fiévreux; attendrissant, désirable; important, intéressant.
DÉR. Indifféremment, indifférentisme, indifférentiste, indifférer.

Encyclopédie Universelle. 2012.