1. lire [ lir ] v. tr. <conjug. : 43> I ♦
1 ♦ Suivre des yeux en identifiant (des caractères, une écriture). Lire des lettres, des caractères, des numéros. Lire une écriture difficile, un manuscrit. ⇒ déchiffrer. Écriture qu'on ne peut lire. ⇒ illisible. Lire les caractères russes, chinois, arabes. « Elle savait mal lire le petit caractère » (France). « Sur le mur de la cellule [...] je viens de lire les graffiti amoureux » (Genet).
♢ Absolt Être capable de lire une écriture. Apprendre à lire à un enfant. Savoir lire et écrire. Lire couramment. Lire mal; commencer à lire. ⇒ ânonner, épeler. Ne savoir ni lire ni écrire : être analphabète. Savoir très mal lire (⇒ illettrisme) .
♢ Par ext. (en parlant d'un autre sens que la vue) Lire le braille.
2 ♦ Prendre connaissance du contenu de (un texte), par la lecture. Lire une lettre. Lire qqch. sur une affiche. J'ai lu cela dans un livre. J'ai lu dans le journal qu'il était mort. — Absolt Signer sans avoir lu. Lire entre les lignes.
♢ Spécialt Lire de façon suivie (un texte, un livre...) pour s'informer, s'instruire, se distraire. Lire une histoire, un roman, des vers. « N'ayant rien à lire, j'écris » (Stendhal). Lire son bréviaire. Lire le journal, les petites annonces. Lire qqch. avec passion (⇒ avaler, dévorer) , négligemment (⇒ feuilleter, parcourir) . Fam. Lire en diagonale. ⇒ survoler. — Lire en vue de trouver un renseignement. ⇒ compulser, consulter. Lire plusieurs fois. ⇒ relire. Vouloir tout lire. « La chair est triste, hélas ! et j'ai lu tous les livres » (Mallarmé). Avoir qqch. à lire en voyage. — Lire un auteur. Les personnes « qui attendent pour me lire que l'on m'ait traduit en français » (Valéry). — Ça se lit facilement, ça peut se lire, ça se laisse lire, en parlant d'un ouvrage. Livre, auteur qui mérite d'être lu. — Lire une langue étrangère, un auteur étranger dans sa langue. Lire Goethe dans le texte. Lire l'allemand. « Il lisait très bien le français, mais il ne l'avait jamais parlé » (Mme de Staël).
♢ Absolt Passer du temps à lire. ⇒fam. bouquiner . Aimer lire. ⇒ lecteur, liseur. Lire beaucoup. User ses yeux à lire. « lire au lit toute la nuit » (Beauvoir). « Je lis comme je voudrais qu'on me lise; c'est-à-dire : très lentement » (A. Gide).
3 ♦ (XIe) Énoncer à haute voix (un texte écrit) soit pour s'en pénétrer, soit pour en faire connaître à d'autres le contenu. Débit, diction de celui qui lit. Lire qqch. tout bas, tout haut. Lire des vers. ⇒ réciter. Lire un discours devant l'Assemblée. ⇒ prononcer. Lire un arrêt, un jugement; une prière (cf. Leçon, légende).
♢ Spécialt Faire la lecture. « Elle lisait bien, douée d'une espèce de don spécial d'accentuation juste » (Maupassant). Lire qqch. à qqn. Elle lui lisait le journal.
4 ♦ Déchiffrer (un système signifiant, un code) de manière à en maîtriser le contenu. Lire une partition, des notes, de la musique. Lire un message chiffré. ⇒ décoder. Lire un graphique, une carte. — Cette image est difficile à lire (⇒ lisible) .
5 ♦ Effectuer la saisie de l'information de (une bande magnétique) en vue d'une reproduction sonore. ⇒ lecture (8o).
6 ♦ Inform. Reconnaître (des informations) pour les transmettre à une autre unité. Lire un fichier.
II ♦ Fig.
1 ♦ Déchiffrer, comprendre (ce qui est caché) par un signe extérieur. Lire l'avenir dans les lignes de la main, le marc de café, les astres. « Faire des prédictions en lisant dans les cartes » (Romains). — Trouver le sens de. Lire les lignes de la main.
2 ♦ Discerner, reconnaître comme par un signe. ⇒ découvrir, pénétrer. Lire un sentiment sur le visage, dans les yeux de qqn. Lire jusqu'au fond de la pensée, de l'âme. « Si tu pouvais lire dans mon cœur, tu verrais la place où je t'ai mise ! » (Flaubert). — Lire dans le jeu (IV, 1o) de qqn.
⊗ HOM. Lyre; lis : lie; lirai : lierai (lier); lûtes : lute (luter), lutte (lutter).
lire 2. lire [ lir ] n. f.
• 1592; it. lira, de même o. que livre → 2. livre
♦ Unité monétaire italienne.
● lire verbe transitif (latin legere) Reconnaître les signes graphiques d'une langue, former mentalement ou à voix haute les sons que ces signes ou leurs combinaisons représentent et leur associer un sens : Lire le chinois, le braille. Il ne sait ni lire ni écrire. Prendre connaissance du contenu d'un texte par la lecture : Lire le journal. S'adonner à la lecture des livres : Cet enfant ne lit pas assez. Énoncer à voix haute un texte écrit, pour le porter à la connaissance d'autrui : Lire une histoire aux enfants. Savoir reconnaître de la musique, des notes en les parcourant des yeux. Comprendre, pouvoir interpréter un ensemble de signes autres que ceux de l'écriture, une image, etc. : Médecin qui lit une radio. Lire un graphique. Comprendre quelque chose, l'interpréter d'une certaine façon : Une statistique qu'on peut lire de deux manières. En parlant d'un appareil, reproduire ce qui est enregistré. Reconnaître une information présentée à un organe d'entrée ou stockée dans une mémoire, afin de la transmettre vers une autre unité de l'ordinateur. Comprendre quelque chose, le discerner, le reconnaître à certains signes : J'ai lu dans ses yeux du mépris. Prévoir l'avenir en interprétant des signes qu'on croit significatifs. ● lire (citations) verbe transitif (latin legere) Anonyme Il meurt à juste titre dans le déshonneur celui qui n'aime pas les livres et n'a pas confiance en eux. A desanor muert a bon droit qui n'aime livre ne ne croit. Roman de Renart Louis Aragon Paris 1897-Paris 1982 Je n'ai jamais rien demandé à ce que je lis que le vertige. J'abats mon jeu Éditeurs français réunis Maurice Blanchot Quain, Saône-et-Loire, 1907 La lecture est un bonheur qui demande plus d'innocence et de liberté que de considération. Le Livre à venir Gallimard Nicolas Boileau, dit Boileau-Despréaux Paris 1636-Paris 1711 Un livre vous déplaît : qui vous force à le lire ? Satires Émile Faguet La Roche-sur-Yon 1847-Paris 1916 Académie française, 1900 L'art de lire, c'est l'art de penser avec un peu d'aide. L'Art de lire Hachette Paul Léautaud Paris 1872-Robinson 1956 Il n'y a encore que les gens qui écrivent qui sachent lire. Journal littéraire Mercure de France Clément Marot Cahors 1496-Turin 1544 Un homme ne peut bien écrire, S'il n'est quelque peu bon lisart. Épîtres, Du coq à l'âne lecteur François Mauriac Bordeaux 1885-Paris 1970 Académie française, 1933 Écrire, c'est se souvenir. Mais lire, c'est aussi se souvenir. Mémoires intérieurs Flammarion Confucius, en chinois Kongzi ou Kongfuzi [maître Kong] 551-479 avant J.-C. Entendre ou lire sans réfléchir est une occupation vaine ; réfléchir sans livre ni maître est dangereux. Entretiens, I, 2 (traduction S. Couvreur) Dante Alighieri Florence 1265-Ravenne 1321 Et, ce jour-là, ne lûmes plus avant. Quel giorno più non vi leggemmo avante. la Divine Comédie Commentaire « Expression d'une imprécision voulue » (A. Masseron, la Divine Comédie, I, p. 55), que Dante met dans la bouche de Francesca de Rimini, qui lui explique comment Paolo Sforza, son amant, et elle, alors qu'ils lisaient le passage du roman de Lancelot du lac où le héros s'éprend de Guenièvre, femme du roi Arthur, ont cédé à la tentation. William Hazlitt Maidstone, Kent, 1778-Londres 1830 Mieux vaut ne savoir ni lire ni écrire que d'être incapable de rien faire d'autre. It is better to be able neither to read nor write than to be able to do nothing else. On the Ignorance of the Learned ● lire (difficultés) verbe transitif (latin legere) Conjugaison Accord Lu, employé seul ou immédiatement avant le nom, reste invariable : lu les documents, les pièces ci-jointes. - De même dans la locution lu et approuvé. Construction Lire dans / lire sur : on dit lire dans un journal, dans un livre, dans une lettre, dans un catalogue, dans un recueil, mais lire sur une affiche, sur un écriteau, sur un mur, etc. → dans (dans / sur). Emploi Dans une formule finale de lettre, écrire en espérant avoir bientôt le plaisir de vous lire plutôt que à vous lire (formule critiquée). Remarque À vous lire, au sens de « à vous en croire, si l'on est d'accord avec ce que vous écrivez » est correct : à vous lire, on pourrait croire que le pays est à feu et à sang, mais il est en réalité très calme. ● lire (expressions) verbe transitif (latin legere) Lire des yeux, sans parler. Lisez, il fallait lire, introduit, dans les errata, la correction qu'il faut porter. ● lire (homonymes) verbe transitif (latin legere) lire nom féminin lyre nom féminin ● lire (synonymes) verbe transitif (latin legere) Reconnaître les signes graphiques d'une langue, former mentalement ou à...
Synonymes :
- déchiffrer
- épeler:
Prendre connaissance du contenu d'un texte par la lecture
Synonymes :
- dépouiller
- dévorer
- survoler
S'adonner à la lecture des livres
Synonymes :
- bouquiner (familier)
Énoncer à voix haute un texte écrit, pour le porter...
Synonymes :
- dire
Comprendre, pouvoir interpréter un ensemble de signes autres que ceux...
Synonymes :
- décoder
- décrypter
Comprendre quelque chose, le discerner, le reconnaître à certains signes
Synonymes :
- deviner
- pénétrer
● lire
nom féminin
(italien lira, du latin libra, livre)
Ancienne unité monétaire principale de l'Italie (ayant cours également à Saint-Marin et dans l'État de la Cité du Vatican) [Devenue le 1er janvier 1999 une subdivision de l'euro, la lire italienne cesse d'exister, au profit de la monnaie unique européenne, en 2002.]
● lire (homonymes)
nom féminin
(italien lira, du latin libra, livre)
lire
verbe
lirent
forme conjuguée du verbe lire
lyre
nom féminin
lire
n. f. Unité monétaire italienne (symb. LIT).
————————
lire
v. tr.
rI./r
d1./d Identifier par la vue (des caractères écrits ou imprimés, des lettres, l'assemblage qu'elles forment) en faisant le lien entre ce qui est écrit et la parole. Apprendre à lire et à écrire.
— écriture qu'on a du mal à lire. Syn. déchiffrer.
|| Par anal. MUS Lire une partition.
d2./d Prendre connaissance de (un texte) en parcourant des yeux ce qui est écrit, par la lecture. Lire un roman, une lettre. Lire le journal.
— Lire un auteur étranger dans le texte, dans la langue même de cet auteur.
|| Lire couramment l'anglais, pouvoir lire des textes dans cette langue.
d3./d énoncer à haute voix (un texte écrit). Lire des vers devant qqn. Lire un article de journal à qqn.
rII./r Fig.
d1./d Trouver la signification de (qqch) en fonction d'indications précises qu'il faut savoir interpréter, de signes qu'il faut savoir décoder. Lire une carte, un graphique, une statistique.
d2./d Interpréter, comprendre de telle ou telle manière. On peut lire ces vers à plusieurs niveaux.
— v. Pron. Son geste peut aussi se lire comme un appel désespéré.
d3./d Fig. Deviner, discerner, déceler (qqch) grâce à certains signes. Lire l'avenir dans les cauris.
— Cette peur qu'on pouvait lire sur son visage.
— v. Pron. La joie qui se lisait sur ses traits.
|| (Sans comp. dir.) Deviner les pensées, les motivations secrètes. Lire dans le coeur de qqn.
rIII/r INFORM Décoder (les informations enregistrées sur un support).
I.
⇒LIRE1, verbe trans.
I. A — 1. Établir la relation entre les séquences de signes graphiques (alphabétiques, idéographiques) d'un texte et les signes linguistiques propres à une langue naturelle (phonèmes, mots, marques grammaticales).
— Fréq. en emploi abs. Monsieur Grandet (...) était en 1789 un maître-tonnelier fort à son aise, sachant lire, écrire et compter (BALZAC, E. Grandet, 1834, p. 10) :
• 1. Le peuple est un éternel mineur, et il sera toujours (dans la hiérarchie des éléments sociaux) au dernier rang, puisqu'il est le nombre, la masse, l'illimité. Peu importe que beaucoup de paysans sachent lire et n'écoutent plus leur curé; mais il importe infiniment que beaucoup d'hommes, comme Renan ou Littré, puissent vivre et soient écoutés.
FLAUB., Corresp., 1871, p. 228.
• 2. Il y a aussi la question de la lecture. Nous lisons de deux manières : le mot nouveau ou inconnu est épelé lettre après lettre; mais le mot usuel et familier s'embrasse d'un seul coup d'œil, indépendamment des lettres qui le composent; l'image de ce mot acquiert pour nous une valeur idéographique.
F. DE SAUSSURE, Cours de ling. gén., Paris, Payot, 1965, p. 57.
— Lire + compl. désignant une langue. Lire l'anglais, le chinois, le grec.
— Lire + compl. désignant les signes graph. ou ling. Lire firme au lieu de ferme. La veuve Dominé n'a rien compris à la lettre de sa fille. Quand on lit de l'écriture, ce n'est pas comme quand on parle (AYMÉ, Jument, 1933, p. 99) :
• 3. ... il était tout naturel que l'employé du télégraphe eût lu les boucles d's ou d'y de la ligne supérieure comme un « ine » finissant le mot de Gilberte.
PROUST, Fugit., 1922, p. 656.
— En partic. Accéder à une langue écrite par un autre sens que la vue. Lire en braille.
SYNT. Apprendre à lire; savoir, ne pas savoir lire; lire tout bas, tout haut, à haute voix; lire des yeux; lire bien, mal, couramment, péniblement; lire en donnant, en mettant le ton.
2. Accéder à une information non linguistique par le biais de signes graphiques (lettres, chiffres, symboles). Lire l'heure, une température.
— Lire une partition, de la musique. Nous ne pouvons nous concevoir connaissant avec certitude la suite des événements futurs de notre vie, et la vivant, avant que de la vivre, comme on lirait la partition d'un ouvrage de musique avant que de l'entendre (VALÉRY, Variété IV, 1938, p. 193) :
• 4. ... moi aussi [dit Beethoven], j'aime la musique; mais, vous vous en êtes aperçus, je suis sourd au point de n'entendre aucun son. Permettez-moi de lire cette musique qui vous fait éprouver une si vive et si douce émotion.
KARR, Sous tilleuls, 1832, p. 281.
— Lire une carte, un graphique. C'est dommage que je ne t'aie pas enseigné à lire la carte d'état-major (RIVIÈRE, Corresp. [avec Alain-Fournier], 1907, p. 238). Nous avons donc combiné une représentation graphique très simple permettant de « lire » un lavoir (RATEL, Prépar. mécan. minerais, 1908, p. 13).
3. Rare. Reconnaître un graphisme, une forme. Sur le manteau de la cheminée, dans la salle à manger, on lit encore les armes émoussées des Guise (NIZAN, Conspir., 1938, p. 132) :
• 5. ... tous ses gestes, volte des hanches, flexion de la nuque, bref haussement d'un bras vers la chevelure, balancement orbiculaire de la taille assise, tracent des courbes si voisines du cercle que je lis le dessin, anneaux entrelacés, spirales parfaites des coquilles marines, qu'ont laissés, écrits dans l'air, ses mouvements doux.
COLETTE, Cl. ménage, Paris, Mercure, 1902, p. 99.
B. — 1. Prendre connaissance du contenu d'un texte écrit.
a) Lire qqc. (dans, sur, chez, etc.). Le surlendemain de la mort de Bernard, Laforgue, qui en avait lu la nouvelle dans le Temps, arriva (NIZAN, op. cit., p. 195). Tu m'embêtes. On lit ces histoires-là dans les manuels (BERNANOS, M. Ouine, 1943, p. 1380).
— Lire que. Ce matin, en ouvrant le Figaro, je lis que Paul Margueritte s'est noyé près de Fontainebleau (GONCOURT, Journal, 1888, p. 813).
— Lire, verbe introducteur du texte lu. Sur une porte vitrée, avec de la lumière orange venant de l'intérieur, on pouvait lire : Bar, entrée des fournisseurs (TRIOLET, Prem. accroc, 1945, p. 78).
— Qqc. se lit (dans, à). Mon oncle Tom est connu des savants, de tous ceux, par exemple, qui s'occupent de la glyptique grecque ou de la bulle Unigenitus; son nom se lit au catalogue des bibliothèques publiques (TOEPFFER, Nouv. genev., 1839, p. 189).
b) Lire + compl. désignant notamment le type d'écrit, d'œuvre, la partie d'une œuvre, le titre, l'auteur. Lire une lettre, un livre, un journal, un roman, le Capital, tout Flaubert, une notice, un poème, la préface, le dernier chapitre. [Clemenceau] Journaliste célèbre que personne ne lit. Écrivain détestable dont on vante le style (ROMAINS, Hommes bonne vol., 1932, p. 159) :
• 6. Voilà certes une édition modèle. Mais savez-vous l'effet le plus sûr de ce luxe intelligent d'explications et de commentaires? On lit l'introduction, on parcourt les notes, on effleure les notices (...). Et puis... on oublie de lire les Oraisons funèbres, car ce n'est presque plus la peine...
LEMAITRE, Contemp., 1885, p. 186.
• 7. Il a connu Annie à la bibliothèque de la faculté; ils se sont trouvés deux jours de suite assis l'un en face de l'autre. Il lisait un gros Durkheim, elle feuilletait distraitement les Dialogues de Platon, elle a posé sur lui son regard profond...
VAILLAND, Drôle de jeu, 1945, p. 102.
♦ Lire (une œuvre, un auteur) dans le texte. Lire dans la langue d'origine. M. Dubois dédia sa vie aux arts et aux lettres. Il apprit le grec pour lire Homère dans le texte (FRANCE, Vie fleur, 1922, p. 411).
♦ Lire à livre ouvert. V. livre1 I B 2 b.
♦ Lire + compl. désignant le support matériel de l'écrit. Ils lançaient les paniers sans lire les étiquettes. Des « Paris » tombaient dans les « Est via Hirson » (HAMP, Marée, 1908, p. 45).
♦ Lire en diagonale. Synon. feuilleter, parcourir, survoler.
— Qqc. se lit
♦ Se lire comme un roman. Algebra, analyse éblouissante de la puissance des grandeurs et de la vie des nombres, (...) ouvrage qui se lit comme un roman (CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p. 80).
♦ Se lire, se laisser lire. [P. oppos. à être illisible] Mériter d'être lu. Le jour je suis avec le Siècle de Louis XIV. On m'a dit que cet ouvrage de Voltaire pouvait se lire. C'est vrai, mais Voltaire s'y retrouve souvent, chaque fois d'abord qu'il est question de religion (E. DE GUÉRIN, Journal, 1834, p. 26).
c) Emploi abs. Synon. de s'adonner à la lecture, bouquiner (fam.). Lamiel était abonnée à deux cabinets littéraires et passait sa vie à lire (STENDHAL, Lamiel, 1842, p. 183). Un garçon qui ne fait que lire... Il a été reçu le troisième, cette année, à l'École des Chartes. Où ça le mènera-t-il? Je vous le demande (GONCOURT, Journal, 1864, p. 116). Oui, c'est exact; maintenant les hommes jouent et ne lisent plus; ce sont les femmes dites du monde qui achètent les livres et déterminent les succès ou les fours (HUYSMANS, Là-bas, t. 2, 1891, p. 108) :
• 8. Il désigna son roman posé en évidence sur un guéridon. — Tu l'as lu? — Je l'ai regardé. Elle hésita : « C'est bête, je ne sais pas lire. — Ça t'ennuie? — Non; mais je me retrouve tout de suite en train de rêver à autre chose. Je pars sur un mot (...) ».
BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 279.
2. Dire à haute voix le contenu d'un texte qu'on lit. Il a envoyé chercher un volume de Racine; il a d'abord commencé la comédie des Plaideurs; mais après une ou deux scènes il nous a lu Britannicus (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 432). Cet ami, ce vieil ami qui a formé ma jeunesse, qui me lisait Baudelaire quand j'avais quatorze ans (ARAGON, Beaux quart., 1936, p. 287).
— Synon. de proclamer, donner lecture :
• 9. Des portes ont claqué. Des gens couraient dans des escaliers dont je ne savais pas s'ils étaient proches ou éloignés. Puis j'ai entendu une voix sourde lire quelque chose dans la salle.
CAMUS, Étranger, 1942, p. 1199.
— [En incise, sur le modèle de dit-il ] :
• 10. — (...) Lisez-nous encore un peu de ce livre, messiou. Aurelle tourna quelques pages. « Les autres peuples, lut-il, accusent les Anglais d'incivilité (...) »
MAUROIS, Silences Bramble, 1918, p. 58.
3. Attribuer une signification par-delà le sens littéral. Synon. interpréter, comprendre. M. Rouvier ne devait pas être « indifférent » (lisez hostile) aux intrigues de l'étranger contre son ministre (MAURRAS, Kiel et Tanger, 1914, p. 223).
♦ Lire entre les lignes (au fig.). Deviner la réalité, la pensée non formulée par-delà le sens littéral. Serait-il tellement classique de ne pas désirer la femme qu'on aime? Les romanciers, même Stendhal, donnent peu de renseignements sur ce point capital; j'essaie pourtant de lire entre les lignes (VAILLAND, Drôle de jeu, 1945, p. 88) :
• 11. Ce que Nore lui disait l'intéressait toujours infiniment moins que ce qu'elle croyait découvrir par l'emploi de certaines expressions, par l'arrangement de certaines phrases, par la marche plus ou moins pressée, plus ou moins lente de l'écriture. Elle lisait entre les lignes des choses désolantes souvent, consolantes quelquefois, et, ça et là, poignantes par le bonheur qu'elles lui causaient.
GOBINEAU, Pléiades, 1874, p. 135.
— [En parlant d'une œuvre littér.] Interpréter, comprendre. Qu'il y ait des clefs profondes de la pensée et de l'action selon lesquelles lire tout le spectacle, cela ne regarde pas en général le spectateur, qui ne s'y intéresse pas. Mais encore faut-il qu'elles y soient; et cela nous regarde (ARTAUD, Théâtre et son double, 1938, p. 111) :
• 12. Lire cependant n'est pas un geste parasite, le complément réactif d'une écriture que nous parons de tous les prestiges de la création et de l'antériorité (...). Lire, en effet, est un travail de langage. Lire, c'est trouver des sens, et trouver des sens, c'est les nommer.
R. BARTHES, S/Z, Paris, Éd. du Seuil, 1970, p. 17.
— En partic., vieilli. Faire l'explication d'un texte (v. leçon) :
• 13. Lire un texte, c'était au temps d'Abélard l'étudier et le commenter. Le maître, après un cours d'introduction sur l'auteur qu'il allait lire, son ouvrage, les circonstances de sa composition, passait à l'exposition, c'est-à-dire au commentaire proprement dit.
R. PERNOUD, Héloïse et Abélard, Paris, Albin Michel, 1980 [1970], p. 19.
II. — Au fig.
A. — Deviner les événements à partir de signes. Lire l'avenir dans le marc de café; lire les lignes de la main, les cartes. Comme on cherche à lire l'avenir dans les boules du cristal le plus transparent (GRACQ, Syrtes, 1951, p. 39).
B. — Deviner les sentiments ou les pensées informulés ou cachés d'après l'expression des yeux, du visage p. ex. Pour cette fois, ni le président ni le duc n'osèrent se fâcher, quoique Julien crût lire dans leurs yeux qu'ils en avaient bonne envie (STENDHAL, Rouge et Noir, 1830, p. 377). Puis il ramène son regard sur moi; je lis sur son visage une interrogation muette (SARTRE, Nausée, 1938, p. 152) :
• 14. Gérard lisait dans les lueurs orageuses de ses yeux gris et les lignes rigides de ses lèvres pâles les signes précurseurs d'une grande colère.
THEURIET, Mariage Gérard, 1875, p. 180.
♦ Lire dans le cœur, dans les pensées. Mais au bout de quinze jours, elle avait lu clairement dans mon cœur; elle comprit qu'en la voyant sincère, je l'étais devenu à mon tour (MUSSET, Confess. enf. s., 1836, p. 286). Il me connaît, il lit dans mes pensées, il devine que moi aussi je suis à bout (MAURIAC, Mal Aimés, 1945, III, 4, p. 236).
♦ Lire qqn. Je te lis à livre ouvert, va. D'ailleurs, tu ne te donnes pas la peine de cacher ce que tu penses (VAILLAND, Drôle de jeu, 1945, p. 32).
♦ Lire dans le jeu de qqn. V. jeu I C 2.
Rem. Rare, au sens de « espionner ». Ensuite [dans un libelle contre Napoléon] c'était une combinaison d'espions et d'agents, à l'aide desquels l'Empereur lisait dans l'intérieur de toutes les familles en France, et perçait dans l'obscurité de tous les cabinets de l'Europe (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 263).
— Qqc. se lit dans, sur. Se deviner, se voir sur. Malgré ses joues et ses pommettes roses, il y avait autour de ses yeux, à son front, par endroits, une pâleur violente où se lisait tout son trouble (ALAIN-FOURNIER, Meaulnes, 1913, p. 262). La proposition et l'acceptation simultanées se lisent sur ces hautes dents luisantes de salive et toutefois menaçantes, se lisent dans ces yeux pleins d'étincelles et de larmes (JOUVE, Scène capit., 1935, p. 223).
C. — Deviner, comprendre à partir d'indices. Il est allé guetter le renard (...). Si on sait lire dans les bruits de l'air on apprend qu'il couche là, qu'il va de là à là (GIONO, Regain, 1930, p. 99). Je me serre contre ma fenêtre. J'essaie de lire sous moi. J'essaie de découvrir des feux, des signes (SAINT-EXUP., Terre hommes, 1939, p. 216) :
• 15. Elle a dû tomber une première fois; son panier a roulé dans des buissons où on l'a retrouvé. Oh! on a pu tout lire, disent-ils, toute son histoire, comme si elle l'avait écrite exprès pour nous.
RAMUZ, Gde peur mont., 1926, p. 160.
— [Le compl. d'obj. direct désigne ce qui est déchiffré] Pour comprendre et lire la ville de Londres, il faut connaître la littérature anglaise (L. DAUDET, Entre-deux-guerres, 1915, p. 291). À contempler de telles images, à lire les images du livre de Bachelin, on rumine de la primitivité (BACHELARD, Poét. espace, 1957, p. 47).
♦ Qqc. se lit. Se comprendre, s'interpréter :
• 16. La composition peut se lire comme une combinaison rythmique de lignes et de couleurs, où le rouge chaud de Nicodème balance le bleu froid de la Vierge, selon la même harmonie qui oppose les rousses frondaisons de l'automne à l'azur pâle du crépuscule. Mais elle peut exprimer aussi, avant tout, l'écrasante lourdeur du corps divin abandonné irrémédiablement par son âme...
HUYGHE, Dialog. avec visible, 1955, p. 99.
III. A. — ÉLECTRON. Parcourir un enregistrement et restituer les sons. Écoutez le son, tel que le lit une cellule de lecture, un enfant dira : « C'est une tierce, au piano » (SCHAEFFER, Rech. mus. concr., 1952, p. 53).
B. — INFORMAT. ,,Reconnaître et extraire des données inscrites sur un support d'information`` (LE GARFF 1975). Lire une carte, une bande magnétique, un fichier (LE GARFF 1975).
C. — TEXT. Lire un dessin. Percer dans un ordre déterminé les cartons nécessaires pour transposer le dessin sur le tissu. (Dict. XIXe et XXe s.).
REM. Lisotter, verbe trans. Lire en parcourant, sans une attention soutenue. Beaucoup lisotté sans but (philosophie, histoire, érudition, critique, etc.) (AMIEL, Journal, 1866, p. 39). En faisant un paquet de tous les journaux qui ont parlé de La Fille Élisa, je les lisotte en les pliant (GONCOURT, Journal, 1877, p. 1194).
Prononc. et Orth. : [], (il) lit [li]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. Ca 1050 « suivre des yeux les caractères d'une écriture et pouvoir les identifier » (Alexis, éd. Chr. Storey, 374); 2. a) ca 1050 « énoncer à haute voix » (ibid., 377); b) 1642 « expliquer un auteur (en parlant d'un professeur) » (LA MOTHE LE VAYER, De la vertu des payens, p. 124); 3. a) ca 1119 « prendre connaissance d'un livre pour s'instruire » (PHILIPPE DE THAON, Comput, 2579 ds T.-L.); b) ca 1165 « prendre connaissance du contenu (ici d'une inscription) par la lecture » (BENOÎT DE SAINTE-MAURE, Troie, 16811); 4. 1306 lire quelqu'un (JOINVILLE, Vie de Saint Louis, éd. N. Corbett, p. 223, § 668); 5. av. 1630 lire aux langues « avoir l'intelligence d'une langue étrangère » (A. D'AUBIGNÉ, Sa vie. A ses enfants ds Œuvres, éd. H. Weber, p. 385); 1694 lire le grec (Ac.); 6. 1764 « adopter telle ou telle leçon (dans une édition de textes) » (VOLTAIRE, Dictionnaire philos. ds LITTRÉ). B. Fig. 1. 1592 lire dans les yeux « discerner, reconnaître comme par un signe » (MONTAIGNE, Essais, I, 1, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, p. 9); 2. 1636 « déchiffrer, comprendre le sens de certains signes » (CORNEILLE, Cid, IV, 1, 1131). C. Technol. 1. 1723 text. lire un dessein (SAVARY); 2. 1765 mus. (Encyclop. t. 9). Du lat. legere « ramasser, recueillir, lire des yeux, lire à haute voix ». Fréq. abs. littér. Lire : 20 674. Lisant : 1 688. Lu : 8 385. Fréq. rel. littér. Lire : XIXe s. : a) 27 249, b) 34 604; XXe s. : a) 30 590, b) 27 725. Lisant : XIXe s. : a) 2 696, b) 3 016; XXe s. : a) 2 176, b) 1 952. Lu : XIXe s. : a) 12 717, b) 13 955; XXe s. : a) 11 245, b) 10 567. Bbg. BUSSE (W.). Klasse, Transitivät... München, 1974, 273 p. - HENSCHEL (B.). Qq. dat. nouv. du XVIIIe s. Fr. mod. 1969, t. 37, pp. 113-131 (s.v. lisotter).
II.
⇒LIRE2, subst. fém.
Unité monétaire de l'Italie. Une main frappe (...) sur le carreau, la main du contrôleur (...) et vous cherchez (...) votre portefeuille (...) avec votre passeport (...) quelques milliers de lires (BUTOR, Modif., 1957, p. 46).
Prononc. : []. Étymol. et Hist. 1592 (P. BROUZON, lettre de Gênes du 15 oct. in Lettres de négociants marseillais : les frères Hermite, éd. M. Baulant, 96 d'apr. R. ARVEILLER ds Mél. Wathelet-Willem (J.), p. 16). Empr. à l'ital. lira, unité de monnaie, attesté dep. le XIIIe s. (MALISPINI ds BATT.), de même orig. que le fr. livre, anc. unité monétaire (livre2). Fréq. abs. littér. : 30.
1. lire [liʀ] v. tr.
CONJUG. Je lis, il lit, nous lisons, ils lisent; je lisais; je lus; je lirai; je lirais; lis, lisons, lisez; que je lise, que nous lisions; que je lusse (inus.); lisant; lu, lue.
ÉTYM. V. 1050; du lat. legere.
❖
———
1 Suivre des yeux les caractères d'une écriture et pouvoir les identifier, connaître les sons auxquels ils correspondent. || Lire des mots, des phrases sans les comprendre (→ Copte, cit. 2). || Lire des lettres, des caractères, des numéros (→ Écrire, cit. 11). || Lire une plaque indicatrice (cit. 6). || Lire une écriture difficile, un manuscrit. ⇒ Débrouiller, déchiffrer (→ Besicles, cit. 3; griffonner, cit. 1 et 2). || Écriture qu'on ne peut lire (⇒ Illisible, indéchiffrable). || Lire l'imprimé (cit. 37). || Lire les caractères russes, chinois, arabes, hébreux (→ Consonne, cit. 5). || Les érudits qui ont étudié ce texte hésitent sur la façon de lire ce mot, cette phrase. ⇒ Leçon (B., 4.), variante.
1 M… disait à un jeune homme qui ne s'apercevait pas qu'il était aimé d'une femme : « Vous êtes encore bien jeune, vous ne savez lire que les gros caractères ».
Chamfort, Caractères et Anecdotes, Lire en gros.
2 (…) elle savait mal lire le petit caractère qui, disait-elle, lui tirait les yeux hors de la tête.
France, la Rôtisserie de la reine Pédauque, II, Œuvres, t. VIII, p. 8.
♦ Pron. || Inscriptions à demi effacées, qui se lisent à peine. || Mots qui se lisent indifféremment (cit. 3) de droite à gauche et de gauche à droite.
3 Sur les principales pierres, du reste, la marque des tâcherons francs du XIIIe siècle se lit encore (…)
Loti, Jérusalem, XIII.
♦ Lisez, invitation qui figure dans les errata pour indiquer au lecteur ce qu'il faut lire à la place de ce qui est fautif.
♦ Absolt. Être capable de lire. ⇒ Lecture (4.). || Apprendre à lire à un enfant, à un illettré. || Savoir lire et écrire (cit. 9), lire, écrire et compter (→ Facilité, cit. 10; instruction, cit. 7). || Lire couramment (cit.); commencer à lire, lire mal, péniblement (⇒ Ânonner, épeler). || Il ne sait pas lire. ⇒ Analphabète, illettré. — ☑ Par exagér. Ne pas savoir lire : être très ignorant.
4 On se fait une grande affaire de chercher les meilleures méthodes d'apprendre à lire; on invente des bureaux, des cartes; on fait de la chambre d'un enfant un atelier d'imprimerie.
Rousseau, Émile, II.
♦ Par ext. (en parlant d'un autre sens que la vue). || Lire le Braille.
2 (V. 1165). Prendre connaissance du sens, du contenu de (un texte ou un fragment de texte écrit) en lisant (au sens 1). || Lire un passage haut, à haute voix, d'une voix forte. || Lire en silence. || Lire un mot, une phrase dans un livre, dans le journal, sur une pancarte. || Il lut ce qui suit, les lignes suivantes. || Voici ce qu'on pouvait lire. || Lire une lettre. || Dans l'espoir de lire une lettre de vous, ou, ellipt, de vous lire. || J'ai lu quelque part, dans tel livre que… || « J'ai lu dans quelque endroit qu'un meunier et son fils… » (La Fontaine, Fables, III, 1). — Lire qqch. sur l'épaule (cit. 27), par-dessus l'épaule de qqn. || Signer sans lire (→ Hâte, cit. 10). — ☑ Loc. Lire entre les lignes.
5 (…) elle (l'Église) lisait à tous les poteaux et à toutes les places publiques les sentences épouvantables que l'on prononçait contre ses enfants (…)
Bossuet, 2e sermon pour la Pentecôte, I.
6 Lisez, lisez l'arrêt détestable, cruel.
Racine, Esther, I, 3.
♦ Spécialt (typogr.). || Lire de la copie, des épreuves pour les corriger (→ Imprimer, cit. 26; interligne, cit. 2). || Lire sur le plomb. ⇒ Lecture.
3 Spécialt. Lire (I.,2.) de façon relativement suivie (un texte), pour s'informer, s'instruire, se distraire. || Lire des livres, des ouvrages. || Lire une histoire (cit. 6, 33 et 43), un récit, des romans, des vers, de la philosophie. || Lire l'Évangile (cit. 6), ses heures (cit. 42), ses prières, son bréviaire. || Lire un journal; (au p. p.) journal très lu. || Dictionnaire qu'on lit par plaisir (→ Consulter, cit. 6). || Lire un livre avec avidité, passion (⇒ Avaler, dévorer), à la hâte, négligemment, (fam.) en diagonale (⇒ Feuilleter, parcourir). || Lire en prenant des notes, le crayon, la plume à la main (→ ci-dessous, cit. 13). || Lire des notes pour trouver un renseignement. ⇒ Compulser, consulter. || Lire un livre plusieurs fois, souvent (⇒ Relire). || Lire un livre avec fruit (cit. 40), intérêt (cit. 24). || Lire qqch. pour la gloire (cit. 32 et 33) de l'avoir lu. || Lire dix lignes, quelques pages de… (→ Code, cit. 1, Stendhal). || Il voulait tout lire. || Critique qui doit tout lire. — || « La chair (cit. 59) est triste, hélas ! et j'ai lu tous les livres » (Mallarmé). || Avoir, emporter quelque chose à lire en voyage. || « Mes vrais vers ne seront pas lus » (→ Demeurer, cit. 20, Sully Prudhomme). — Lire un auteur, les auteurs (→ Exemple, cit. 37). || Lire les grands philosophes. ⇒ Fréquenter. || Lire tout Racine. || Son père lui faisait lire Balzac, Flaubert. || Se faire lire : avoir des lecteurs, en parlant d'un auteur (→ Aspirer, cit. 9). || Mériter d'être lu (→ Appréhender, cit. 7; auteur, cit. 20). || Livre, auteur qui se laisse lire. ⇒ Lisible (→ Empêcher, cit. 27).
7 (…) je sens plus d'aise et grand heur (bonheur)
À lire quelque bon auteur
Moral, naturel ou divin,
Que vous à boire de bon vin (…)
Clément Marot, Colloques d'Érasme, I.
8 (…) elle (cette histoire) se laisse lire en perfection.
Mme de Sévigné, 810, 18 mai 1680.
9 N'ayant rien à lire, j'écris. C'est le même genre de plaisir, mais avec plus d'intensité.
Stendhal, Romans et Nouvelles, Le Juif, Aux curieux.
10 Je pensais n'être pas lu avant 1880; j'avais renvoyé à cette époque les jouissances de l'imprimé.
Stendhal, Correspondance, Lettre à Balzac, t. III, p. 257.
11 Qui n'a lu mille fois, qui ne relit sans cesse
Ces vers mystérieux où parle ta maîtresse,
Et qui n'a sangloté sur ces divins sanglots (…)
A. de Musset, Poésies nouvelles, « Lettre à Lamartine ».
12 Les gens que je lis habituellement, mes livres de chevet, ce sont Montaigne, Rabelais, Régnier (…)
Flaubert, Correspondance, 87, 7 juin 1844.
13 (…) il faudrait avoir tout lu la plume à la main, et je n'ai pas tout lu (…)
Littré, Dict., Préface, p. IV.
14 Nos pères disaient : « lire des doigts ». Cela voulait dire feuilleter, de telle sorte que, tout compte fait, les doigts aient plus de travail que les yeux (…) Il ne faut pas du tout lire des doigts, ni lire en diagonale, comme on dit aussi d'une manière très pittoresque. Il faut lire avec un esprit très attentif et très défiant de la première impression.
Émile Faguet, l'Art de lire, p. 2-3.
14.1 Nous lisons des yeux, sans doute beaucoup moins bien, moins attentivement, mais je crois aussi que lire en silence permet d'entendre la voix de l'auteur.
J. Green, Journal, 18 mars 1969, Ce qui reste de jour, p. 155.
♦ Spécialt. || Lire une langue : pouvoir lire des textes dans cette langue. || Elle lit le russe, l'allemand. || Il lit le français mais ne le parle pas bien. — Lire un auteur étranger dans le texte, dans la langue originale (→ Français, cit. 18).
15 La première fois que j'ai vu Schiller, c'était dans le salon du duc et de la duchesse de Weimar, en présence d'une société aussi éclairée qu'importante; il lisait très bien le français, mais il ne l'avait jamais parlé.
Mme de Staël, De l'Allemagne, II, VIII.
♦ Absolt. Passer du temps à la lecture. ⇒ 2. Bouquiner (fam.). || Aimer lire. ⇒ Lecteur, liseur (→ Avaler, cit. 11). || Se distraire, s'instruire, se former (cit. 39) en lisant. || Lire beaucoup (→ Instruire, cit. 25). || Lire vite, mal (→ Enfoncer, cit. 10). || Se fatiguer à lire. → Pâlir sur les livres. || User ses yeux à lire.
16 Aimer à lire, c'est faire un échange des heures d'ennui que l'on doit avoir en sa vie, contre des heures délicieuses.
Montesquieu, Cahiers, p. 45.
17 (…) on lit très peu; et, parmi ceux qui veulent quelquefois s'instruire, la plupart lisent très mal.
Voltaire, l'Homme aux 40 écus, X.
18 Je suis dans un âge où l'on ne lit plus, mais où l'on relit les anciens ouvrages.
19 Je lis comme je voudrais qu'on me lise; c'est-à-dire : très lentement. Pour moi, lire un livre, c'est m'absenter quinze jours durant avec l'auteur.
Gide, Journal, Fin février 1902.
20 Le mot lecture veut dire choix. Lire, c'est élire, c'est-à-dire choisir (…) Quand nous lisons un livre, une revue, un journal, nous choisissons la substance de notre âme.
G. Duhamel, Défense des lettres, I, III.
4 (V. 1050). Prononcer, énoncer à haute voix (un texte écrit), soit pour s'en pénétrer, soit pour en faire connaître le contenu à d'autres par la parole. ⇒ 1. Dire, prononcer. || Débit, élocution, diction de celui qui lit qqch. || On lui a demandé de lire son poème. || Lire une pièce de théâtre au comité, devant le comité de lecture. || Lire des vers. ⇒ Réciter. — Liturg. || Lire un texte aux offices. ⇒ Leçon (A.), lecture, légende. — Lire un arrêt, un jugement (→ Accusation, cit. 3; énoncé, cit. 2; instruction, cit. 15). — Absolt. Faire la lecture (→ Enfant, cit. 14; entrecouper, cit. 2).
21 Un jour la mère Plutarque lisait un roman dans un coin de la chambre. Elle lisait haut, trouvant qu'elle comprenait mieux ainsi. Lire haut, c'est s'affirmer à soi-même sa lecture. Il y a des gens qui lisent très haut et qui ont l'air de se donner leur parole d'honneur de ce qu'ils lisent.
Hugo, les Misérables, III, V, IV.
22 Elle lisait bien, en effet, très bien même, douée d'une espèce de don spécial d'accentuation juste et de prononciation intelligente.
Maupassant, Notre cœur, III, II.
23 (…) de sa voix rapide, qui ne trahissait aucune émotion, il lut d'abord la manchette.
Martin du Gard, les Thibault, t. V, p. 115.
♦ Lire qqch. à qqn (→ Faveur, cit. 26). || Elle lui lisait le journal. || Illettré (cit. 4) qui se fait lire une lettre. — Spécialt. || Professeur qui lit un texte, un auteur à ses élèves (⇒ Expliquer, interpréter).
5 (1723, lire un dessin; 1765, mus.). Par anal. Déchiffrer (un système signifiant, un code) de manière à en maîtriser le contenu. || Lire la musique. || Lire une partition à livre ouvert. || Lire un message chiffré. ⇒ Décoder; → Chiffre, cit. 2. || Lire un graphique (cit. 1). || Il ne sait pas lire une carte. || Cette image est difficile à lire (⇒ Lisible).
♦ Lire la position d'un index (cit. 5). || Lire les instruments de bord.
♦ Par ext. Découvrir, déchiffrer (qqch., une forme…).
23.1 Il paraît à première vue inexplicable que les Archanthropes et les Paléanthropes, qui étaient de remarquables techniciens et prévoyaient la forme de leurs bifaces ou de leurs pointes dans un bloc brut, aient été incapables de lire un poinçon ou une sagaie dans une masse osseuse.
A. Leroi-Gourhan, le Geste et la Parole, t. I, p. 199.
6 a Acoust. Reconnaître (avant la reproduction des sons) pour restituer. ⇒ Lecture (B.). || « Écoutez le son, tel que le lit une cellule de lecture » (P. Schaeffer, in T. L. F.).
b Inform. (le sujet désigne une machine). Reconnaître, extraire, transcrire en langue naturelle, en langage clair (des informations). || Lire un fichier magnétique.
c Techn. || Lire un dessin : percer les cartons nécessaires pour transposer le dessin sur tissu. ⇒ Lisage.
———
II Par métaphore et fig.
1 (1636, Corneille). Déchiffrer, comprendre (ce qui est caché) par un signe extérieur. || Celui qui sait lire dans l'histoire de l'humanité (cit. 10). || Lire dans les cieux (cit. 12), les astres (→ Astrologue, cit. 1). || Lire l'horoscope (cit. 3, 4 et 5), l'avenir de qqn dans les lignes de sa main, le marc de café, les astres. ☑ Savoir lire dans les fleurs : connaître le langage des fleurs (→ Interpréter, cit. 3). — Lire les lignes de la main.
24 (…) au livre du destin les mortels peuvent lire.
La Fontaine, Fables, II, 13.
25 Je ne sais comment j'en vins à dire que je pouvais deviner les secrets et faire des prédictions en lisant dans les cartes.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. III, IV, p. 62.
26 On l'a vu (Chiron) montrer à Jason comment, pour se guider en mer, il fallait lire sa route dans les astres.
Émile Henriot, Mythologie légère, p. 148.
2 (1592, Montaigne). Fig. Discerner, reconnaître comme par un signe. ⇒ Découvrir, discerner, pénétrer. || Lire qqch. dans un regard, dans les yeux, dans le cœur de quelqu'un (→ Équitable, cit. 3; inscrutable, cit. 1; lâcheté, cit. 3). || Lire sur le visage, sur les traits de qqn (→ Abandonner, cit. 14; 1. griffe, cit. 10). || Lire jusqu'au fond (cit. 26) de la pensée, de l'âme (cit. 45). — Lire dans le jeu (cit. 68) de qqn. — La colère se lit sur son visage. — Pron. (récipr.). → ci-dessous, cit. 31.
27 On lit dans ses regards sa fureur et sa rage.
Racine, Esther, III, 3.
28 (…) c'est toujours un mauvais moyen de lire dans le cœur des autres que d'affecter de cacher le sien.
Rousseau, les Confessions, II.
29 Il se rencontre parfois entre deux ennemis la même lucidité de raison, la même puissance de vue intellectuelle qu'entre deux amants qui lisent dans l'âme l'un de l'autre.
Balzac, Gobseck, Pl., t. II, p. 660.
30 Oh ! si tu pouvais lire dans mon cœur, tu verrais la place où je t'ai mise !
Flaubert, Correspondance, 113, 6 août 1846.
31 Il se retourna, et la vit près de lui, toute frémissante de tendresse et de peine. Leurs yeux se lurent mieux qu'ils n'avaient fait jusqu'à ce jour.
P.-J. Toulet, la Jeune Fille verte, IX.
32 Les traits du visage, bien qu'alourdis un peu, paraissaient beaux et réguliers; on y lisait de la noblesse naturelle, mais aussi cet air de tristesse courageuse que prennent les femmes du peuple usées dans les épreuves.
G. Duhamel, Salavin, VI, XXVIII.
♦ Compl. n. de personne. || Lire qqn, le comprendre d'après son comportement.
——————
se lire v. pron.
♦ Voir à l'article, ci-dessus.
♦ Spécialt. Pouvoir être lu, mériter d'être lu. || Ce manuel se lit facilement. || Ça se lit comme un roman.
♦ Fig. Se deviner, se laisser voir, déchiffrer. || « Une pâleur violente où se lisait tout son trouble » (Alain-Fournier, in T. L. F.). — Se lire comme… : s'interpréter comme…
——————
lu, lue p. p. adj.
♦ Voir à l'article, ci-dessus
❖
DÉR. 1. Lisage, lisant, liseur.
COMP. Relire.
HOM. 2. Lire, lyre. — Formes des v. lier, liser.
————————
2. lire [liʀ] n. f.
ÉTYM. 1592; ital. lira, de même orig. que le franç. livre. → 2. Livre, n. f.
❖
♦ Unité monétaire italienne (avant l'euro). || Un million de lires. || Un billet de mille lires.
❖
HOM. Lyre. — Formes du v. lire.
Encyclopédie Universelle. 2012.