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taire

taire [ tɛr ] v. tr. <conjug. : 54; sauf il tait sans accent circonflexe, et p. p. fém. tue>
• 980; réfect. de taisir 1145; du lat. tacere
I ♦ SE TAIRE v. pron.
1Rester sans parler, s'abstenir de parler. « Il est bon de parler et meilleur de se taire » (La Fontaine). Spécialt Ne pas exprimer qqch. « Quand on manque de preuves, on se tait » (Musset). Loc. fam. Il a manqué, perdu une belle occasion de se taire : il a parlé mal à propos. Tu aurais mieux fait de te taire. Ne pas exprimer sa douleur, son chagrin. Souffrir et se taire : ne pas se plaindre. — Celer (un secret, etc.). Savoir se taire : être discret.
Se taire sur qqch., à propos de qqch. « Celui qui ne sait pas se taire sur un secret » (Fénelon). Je préfère me taire là-dessus.
Fig. Être silencieux. « L'affreuse immensité se tait lugubrement » (Hugo).
2Cesser de parler (ou de crier, de pleurer). Brusquement, elle se tut. Il a fini par se taire. Elles se sont tues à notre approche. Tais-toi ! Taisez-vous ! chut, silence. Allez-vous vous taire ? (Avec ellipse de se) FAIRE TAIRE : empêcher de parler, de crier, de pleurer; forcer à se taire (cf. Couper le sifflet, clouer le bec). Faites-les taire. Par ext. Faire taire les récriminations, les faire cesser. Fig. Faire taire l'opposition. museler.
Trans. (XIIIe) Fam. Taire sa gueule : se taire (cf. Fermer sa gueule, la ferme). « La tairas-tu ? dit-il. La tairas-tu ta grande gueule ? » (Sartre).
Fig. Ne plus se faire entendre. s'éteindre. « Les bruits de la rue se sont tus » (Barrès). « L'inflexion des voix chères qui se sont tues » (Verlaine).
II V. tr. (XVIe) Moins cour. Ne pas dire; s'abstenir ou refuser d'exprimer. 1. cacher, celer (cf. Passer sous silence). Taire ses raisons. « Taire la vérité, n'est-ce pas déjà mentir ? » (Péguy). « quelqu'un dont je tairai le nom » (Molière).
Littér. Ne pas laisser paraître. Taire son chagrin, sa douleur.
⊗ CONTR. 1. Dire, 1. parler. Bavarder. — Confesser, publier. ⊗ HOM. Ter, terre; tairez :terrez (terrer); tus :tue (tuer).

taire verbe transitif (ancien français taisir, du latin populaire tacire, du latin classique tacere) Ne pas dire quelque chose, le passer sous silence : Je tairai le nom de cette personne. Littéraire. Ne pas laisser apparaître un sentiment, le cacher : Taire son chagrin.taire (citations) verbe transitif (ancien français taisir, du latin populaire tacire, du latin classique tacere) Maurice Maeterlinck Gand 1862-Nice 1949 S'il est incertain que la vérité que vous allez dire soit comprise, taisez-la. Le Double Jardin Fasquelle Henri Michaux Namur 1899-Paris 1984 On crie pour taire ce qui crie. Tranches de savoir Cercle des Arts Gotthold Ephraim Lessing Kamenz, Saxe, 1729-Brunswick 1781 Le sage ne peut pas dire ce qu'il vaut mieux taire. Der Weise kann nicht sagen, was er besser verschweigt. Dialogues maçonniquestaire (difficultés) verbe transitif (ancien français taisir, du latin populaire tacire, du latin classique tacere) Conjugaison Il tait (sans accent circonflexe, à la différence de il plaît) Accord 1. Le participe passé s'accorde avec le complément d'objet placé avant le verbe : les raisons qu'il a tues. 2. À la forme pronominale réciproque, le participe passé s'accorde avec le complément d'objet s'il est placé avant le verbe : les secrets qu'elles s'étaient tus (mais : elles s'étaient tu bien des secrets). 3. À la forme pronominale sans complément d'objet, le participe passé s'accorde avec le sujet : les rumeurs de la ville se sont tues. ● taire (homonymes) verbe transitif (ancien français taisir, du latin populaire tacire, du latin classique tacere) ter adverbe terre nom féminin terre forme conjuguée du verbe terrer terrent verbe terres verbetaire (synonymes) verbe transitif (ancien français taisir, du latin populaire tacire, du latin classique tacere) Ne pas dire quelque chose, le passer sous silence
Synonymes :
- cacher
- celer (littéraire)
- dissimuler
Contraires :
- débiter
- dire
- proférer
- raconter
Littéraire. Ne pas laisser apparaître un sentiment, le cacher
Contraires :
- afficher
- étaler
- exhiber

taire
v.
rI./r v. tr.
d1./d Ne pas dire. Taire un secret.
d2./d Fig. Ne pas manifester, ne pas exprimer. Taire sa douleur.
rII./r v. Pron.
d1./d Garder le silence, s'abstenir de parler. Taisez-vous, votre bavardage me fatigue.
Ne pas révéler, passer sous silence. Se taire sur un point.
d2./d (Sujet n. de chose.) Cesser de se faire entendre. Les canons se sont tus.
d3./d (Avec ellipse du pronom.) Faire taire: imposer le silence à; fig. empêcher de s'exprimer, de se manifester. Une indemnisation a fait taire le mécontentement.

⇒TAIRE, verbe
I. — Empl. pronom.
A. — Qqn/qqc. se tait
1. Qqn se tait
a) ) S'arrêter de parler; p. anal., s'arrêter de pleurer, de crier. Se taire aussitôt, brusquement, soudainement; refuser de se taire. Tout à coup l'enfant se tut de lui-même (...). Son silence était plus alarmant encore que sa colère (MARTIN DU G., Thib., Cah. gr., 1922, p. 667). Elles causaient de porte à porte, mais elles se taisaient à mon approche (VERCEL, Cap. Conan, 1934, p. 251).
À l'impér. Taisez-vous, je vous défends de discuter (DORGELÈS, Croix de bois, 1919, p. 47). HIST. [Dans une circulaire ministérielle du 28 oct. 1915 destinée à mettre en garde la population contre les agents de renseignements de l'ennemi et repris sous forme de slogan] Taisez-vous, méfiez-vous, les oreilles ennemies vous écoutent. V. méfier (se) ex. de Beauvoir.
P. anal. [Le suj. désigne un animal, en partic. un oiseau] Cesser de faire entendre son cri. Fauvettes et pinsons se taisent un moment (COPPÉE, Bonne souffr., 1898, p. 50). C'était l'heure (...) où les chouettes se taisaient (DRUON, Loi mâles, 1957, p. 35).
) Garder le silence, rester sans parler. Se taire longuement. Mais qu'a donc notre député? se dit-il. D'où vient qu'il se tait obstinément? (REYBAUD, J. Paturot, 1842, p. 353). Il se taisait toujours; il a vu qu'il n'allait pas pouvoir se taire plus longtemps (RAMUZ, Gde peur mont., 1926, p. 31).
Fam. Perdre/manquer/rater une (belle/bonne) occasion de se taire. V. occasion I A 2 a ex. de Camus.
En partic. Ne pas parler de façon indiscrète, être discret. Je ne m'occupe jamais de la politique intérieure des pays que je visite. Et quoique j'en pense, je sais me taire (SALACROU, Terre ronde, 1938, II, 3, p. 203).
Se taire de (vieilli)/sur qqc., qqn. Ne pas révéler quelque chose, garder le silence sur quelqu'un; rester discret sur quelque chose, sur quelqu'un. Le pécheur (...) Doit et peut (...) Bien faire obscurément son devoir et se taire. Se taire pour le monde (...) Se taire sur autrui (VERLAINE, Œuvres compl., t. 1, Sagesse, 1881, p. 234). On n'a pas le mérite de sa naissance, on a celui de ses actions. Mais il faut savoir se taire sur elles pour que le mérite soit entier (CAMUS, Actuelles I, 1948, p. 200).
Ne pouvoir, ne savoir se taire sur/d'une chose. Ne pouvoir éviter, s'empêcher de parler d'une chose. Il ne peut se taire sur le service, du service que vous lui avez rendu. Je ne puis m'en taire (Ac. 1935).
b) ) S'abstenir d'exprimer une opinion, de traiter une question oralement ou par écrit; ne pas prendre position. La faillite des intellectuels n'a pas été moindre. A. France, c'est le silence. Bourget se tait après quelques mois de réflexion. Ils n'ont pas cherché à dégager les directives (BARRÈS, Cahiers, t. 11, 1918, p. 365):
... se taire ce n'est pas être muet, c'est refuser de parler, donc parler encore. Si donc un écrivain a choisi de se taire sur un aspect quelconque du monde, ou selon une locution qui dit bien ce qu'elle veut dire, de le passer sous silence, on est en droit de lui poser une troisième question: pourquoi as-tu parlé de ceci plutôt que de cela (...)?
SARTRE, Litt., 1948, p. 32.
Proverbe. Qui se tait, consent. Synon. rare et vieilli de qui ne dit mot, consent (v. consentir II B 3). (Dict. XIXe s.).
) Ne pas exprimer son mécontentement, son chagrin; s'abstenir de se plaindre. Hélas! habitants de la terre, Il faut savoir souffrir, mendier et nous taire (BARBIER, Iambes, 1840, p. 153).
2. Qqc. se tait
a) ) [Le suj. désigne un son, un bruit, p. méton., ce qui produit ce son, ce bruit] Cesser de se faire entendre. Le canon, le grelot se tait. Les vents se taisent, tout est calme (SENANCOUR, Obermann, t. 2, 1840, p. 133). La voix de Vanessa se tut, et il se fit un silence (GRACQ, Syrtes, 1951, p. 113).
En partic. [Le suj. désigne un instrument de mus.] S'arrêter de jouer. Le piano se tut (MARTIN DU G., Thib., Épil., 1940, p. 850). Jusqu'à ce que le soleil se couche et que la lune se lève, et que les guitares se taisent (CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p. 96).
) [Le suj. désigne un lieu] Devenir silencieux. Autour d'eux, la forêt se taisait, et dans ce silence un rouge-gorge modulait sa petite chanson caressante et voilée (THEURIET, Mariage Gérard, 1875, p. 151). L'immense plaine se taisait, comme si la respiration du monde eût été suspendue (PSICHARI, Voy. centur., 1914, p. 145).
b) Au fig., vieilli. [Le suj. désigne une chose abstr.] Cesser d'avoir de l'influence, s'effacer. Les lois se taisent dans les troubles; c'est alors que les décrets parlent (JOUBERT, Pensées, t. 1, 1824, p. 361). Le cœur se taisait devant les affaires (ZOLA, Nana, 1880, p. 1467).
B. — [Avec ell. du pron. pers.] Faire taire qqn/qqc.
1. Faire taire qqn
a) Interrompre quelqu'un; imposer silence à une personne qui pleure ou qui crie. Faire taire brutalement; faire taire d'une gifle. Des personnes placées au balcon et aux galeries firent taire le négociant par des chuts répétés (BALZAC, Illus. perdues, 1839, p. 513). Il désigna la porte par où les jérémiades prenaient cette scansion de la douleur qui est la même à Sérianne ou au Kamtchatka: « Fais d'abord taire ta femme, s'il te plaît » (ARAGON, Beau quart., 1936, p. 298).
b) Empêcher quelqu'un de s'exprimer, le réduire au silence. Synon. museler. Faire taire des adversaires, ses détracteurs, ses ennemis. Elle m'embrassa sur le cou et me souffla à l'oreille: « Écris, mon fils, tu auras du talent, et tu feras taire les envieux. » (A. FRANCE, Vie fleur, 1922, p. 545). J'aurais trouvé un prétexte plausible, de quoi faire taire les mauvaises langues (BERNANOS, Crime, 1935, p. 807).
2. Vieilli ou littér. Faire taire qqc.
a) Empêcher quelque chose d'être entendu; couvrir un bruit, un son. Une prodigieuse rumeur (...) se fit entendre dans le lointain et couvrit les mille susurrements de la foule: ainsi le rugissement d'un lion fait taire les miaulements d'une troupe de chacals (GAUTIER, Rom. momie, 1858, p. 215).
P. anal. Mais une douleur profonde faisait taire toutes les autres douleurs (BALZAC, E. Grandet, 1834, p. 205).
b) Faire cesser un bruit. Faire taire les pleurs. Pour finir, cria Volpatte, qui fit taire tous les bourdonnements, avec son autorité de voyageur revenant de là-bas (BARBUSSE, Feu, 1916, p. 132). Faire cesser (une rumeur, un propos). Faire taire les calomnies, les quolibets. Cela fit taire les médisances (, Aphrodite, 1896, p. 14).
c) ) Empêcher quelque chose de faire du bruit. Apaise le vent, fais taire la lame (GAUTIER, Poés., 1872, p. 293). Il fallait faire taire le grelot?Il le voulut! Pour y parvenir il décida de réaliser à travers le dédale inextricable des branches une marche lente et souple durant laquelle sa tête et son cou devraient conserver la plus stricte immobilité (PERGAUD, De Goupil, 1910, p. 54).
En partic.
♦ Cesser de jouer d'un instrument de musique. Elle ferait taire son piano pour faire quelques pas dehors (CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p. 115).
♦ Mettre une arme hors d'état de fonctionner. Faire taire le canon. [L'artillerie française] ne peut sans doute pas faire taire l'artillerie des Boches (ROMAINS, Hommes bonne vol., 1938, p. 39).
) Au fig. [Le compl. désigne une chose abstr.] Empêcher quelque chose de se manifester. Synon. étouffer (v. ce mot I B 3 a), juguler (v. ce mot B 2), museler (v. ce mot B 2). Faire taire la liberté de presse, les lois; faire taire la raison, le bon sens; faire taire sa conscience, sa douleur, sa mélancolie, son ressentiment, ses remords, ses scrupules. La bourgeoisie fit ce qu'elle a toujours fait depuis, elle manqua de principes et fit taire ses croyances ou ses sympathies en présence de ses intérêts (SAND, Hist. vie, t. 2, 1855, p. 2). Si on fait le silence en soi, si on fait taire tous les désirs, toutes les opinions (S. WEIL, Pesanteur, 1943, p. 54).
II. — Empl. trans.
A. — Qqn tait qqc.
1. Synon. de cacher (v. ce mot I B 2), celer (littér.), dissimuler (v. ce mot A 1 b).
a) Ne pas révéler, garder secret quelque chose. Taire son nom; taire une aventure. Ce n'est pas à vous que je tairai des faiblesses, tôt ou tard il faudra que vous les sachiez toutes (FROMENTIN, Dominique, 1863, p. 31). Le chef d'entreprise le plus décidé à faire de sa maison une « maison de verre » ne peut pas ne pas taire certains faits et certains chiffres (SALLERON, Comment informer, 1965, p. 40).
b) P. anal. Ne pas laisser paraître (un sentiment). Taire sa colère, son émotion, son inquiétude, sa joie. Lorsqu'Odoard apprend par la maîtresse du prince que l'honneur de sa fille est menacé, il veut taire à cette femme, qu'il n'estime pas, l'indignation et la douleur qu'elle excite dans son âme (STAËL, Allemagne, t. 3, 1810, p. 221).
2. Littér. ou vieilli
a) Interrompre les propos que l'on tient. Pourquoi ne voulez-vous pas qu'il se racornisse un peu, cet homme? Taisez donc vos menteries (BALZAC, E. Grandet, 1834, p. 207). Peu à peu, le voile se desserre, s'enfle, vole et retombe, me révélant aux yeux de ceux qui sont là, qui ont tu, pour me regarder, leur enragé bavardage (COLETTE, Vagab., 1910, p. 58).
b) Arrêter de jouer d'un instrument de musique. Les pâtres, dans les champs, turent leurs chalumeaux (PONCHON, Muse cabaret, 1920, p. 229).
3. Pop. Taire sa gueule (vulg.), sa langue, son bec (vieilli). Se taire. Synon. fermer son bec (pop., fam.), fermer sa (grande) bouche (fam.), fermer/boucler sa gueule (vulg.), la boucler (pop., v. boucler1 B 3). Eh bien, alors... tais ton bec, méchant gratte-papier (LABICHE, M. qui prend la mouche, 1852, I, 3, p. 139). S'il veut bien m'écouter, il taira sa langue, il reprendra sa truelle, sans s'occuper ni des juifs, ni des curés (ZOLA, Vérité, 1902, p. 67). V. bouchon II A 2 b ex. de France.
B. — Littér. [Le suj. désigne un élément naturel; le compl. désigne le bruit qu'il produit] Qqc. tait qqc. Cesser de faire entendre quelque chose. L'ombre venait, les fleurs s'ouvraient, rêvait mon Âme! Et le vent endormi taisait son hurlement (VALÉRY, Lettres à qq.-uns, 1945, p. 10).
Prononc. et Orth.:[], (il) tait []. Homon. terre et formes de (se) terrer. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Fin Xe s. réfl. « ne pas parler, garder le silence » (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 215: Judeu l'acusent [Jesu], el se tais); déb. XIIe s. intrans. (BENEDEIT, St Brendan, éd. E. G. R. Waters, 700); ca 1165 id. taire [: afaire] (BENOÎT DE STE-MAURE, Troie, 21322 ds T.-L.); XIIe s. id. teisir [: suffrir] (EVERART DE KIRKHAM, Distiques de Caton, strophe 134 d, éd. E. Stengel, p. 135); 2. a) ca 1100 « cesser de parler » intrans.; réfl. (Roland, éd. J. Bédier, 1026: Tais, Oliver; 259: Ambdui vos en taisez!); ca 1225 trans. taire sa boche (Hist. Guillaume Le Maréchal, 13 ds T.-L.); 1744 taire sa gueule (VADÉ, Œuvres, Sur la prise de Menin, IV ds QUEM DDL t. 19); b) 1225-30 réfl. « (en parlant d'oiseaux) cesser de pépier » (GUILLAUME DE LORRIS, Rose, éd. F. Lecoy, 67); 1387-89 intrans. fere crier et tayre [le limier] (GASTON PHÉBUS, Chasse, éd. G. Tilander, 44, 32, p. 191); 3. 1re moit. XIIe s. trans. « ne pas dire, ne pas exprimer; passer sous silence; cacher » (Psautier d'Oxford, 108, 1 ds T.-L.: la meie löenge ne tasiras [ne silueris]); ca 1165 (BENOÎT DE STE-MAURE, Troie, 19, ibid.: scïence que est teüe Est tost oblïee e perdüe); ca 1175 taire [: faire] (ID., Chron. ducs de Normandie, éd. C. Fahlin, 10402); 1240-80 spéc. « cacher, ne pas laisser paraître (un sentiment, un état d'âme) » (BAUDOUIN DE CONDÉ, Dits et contes, 316, 1385 ds T.-L.: Mais encore vous ai tëu Celui [torment de l'amour]); cf. 1683, 1er sept. (BOSSUET, Oraison funèbre M.-Th. d'Autriche ds Œuvres, éd. B. Velat et Y. Champailler, p. 123: [les âmes vertueuses] non seulement elles savent taire, mais encore sacrifier leurs peines secrètes); 4. fig. le suj. désigne un inanimé; réfl. a) 1174-87 « cesser de s'exprimer » (CHRÉTIEN DE TROYES, Perceval, éd. F. Lecoy, 6006: De mon seignor Gauvain se test Li contes ici a estal); b) ca 1230 « cesser de se manifester, s'effacer » (Chevalier aux deux épées, 5426 ds T.-L.: toutes les biautés ki soient Envers la siue se taisoient); c) fin XIIIe s. « (en parlant des éléments déchaînés) cesser de se manifester, se calmer » (Psautier [Bibl. Mazarine 258], fol. 133 ds LITTRÉ: si se turent li flot); 1667 « (en parlant d'un sentiment) ne pas se manifester » (RACINE, Andromaque, III, 3: la douleur qui se tait). L'a. fr. taisir, régulièrement issu du lat. tacere (intrans. « garder le silence, se taire »; trans. « ne pas dire, ne pas parler de »), a, dep. le XIIe s. (supra), été concurrencé par la forme taire (d'apr. les inf. du type fais: faire [< facere] qui peu à peu l'évinça, FOUCHÉ Morphol., § 119, 3°; POPE, § 884 et 886). La forme a. fr. taisier réfl. « garder le silence » (ca 1210 HERBERT DE DAMMARTIN, Fouque de Candie, 2921 ds T.-L.), p. chang. de conjug., prob. sous l'infl. des représentants du lat. vulg. quietare « calmer, apaiser » (d'où l'a. fr. coisier au sens de « se taire » fin XIIe s. réfl. Sermons de St Bernard, 6, 19, ibid.). Fréq. abs. littér.:9 233. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 8 331, b) 11 677; XXe s.: a) 17 831, b) 15 170. Bbg. BOLBJERG (A.). Six verbes fr.: la catégorie -aire. R. rom. 1979, t 14, n° 1, pp. 114-116. — LANLY (A.). Morphol. hist. des verbes fr. Paris, 1977, pp. 270-272. — LIENHARD (D.R.). Die Bezeichnungen für den Begriff « schweigen » in Frankreich... Diss., Zürich, 1943, pp. 57-61. — MORIN (Y.-Ch.). Maintien du e final dans l'évol. hist.des mots du type faire et maire en fr. Cah. J. Ling. 1979, t. 24, pp. 95-117. — QUEM. DDL t. 19.

taire [tɛʀ] v. pron. et tr.
CONJUG. plaire, sauf il tait, sans accent circonflexe, et p. p. fém. tue.
ÉTYM. 980; réfection de taisir, attesté 1145; lat. pop. tacire, class. tacere.
———
I V. pron. || Se taire.
1 a (Sujet n. de personne). Rester sans parler, s'abstenir de parler. Silence (→ Éloquence, cit. 8; gros, cit. 10; paysan, cit. 7; 1. penser, cit. 35; savant, cit. 9). || Agir (cit. 8) et se taire. || « Il est bon (cit. 104) de parler et meilleur de se taire ».Spécialt. Ne pas exprimer qqch. (cf. Ne pas sonner (vx), ne pas souffler mot). || Quand on manque de preuves, on se tait (→ Doute, cit. 24).Ne pas exprimer sa douleur, son chagrin.Souffrir et se taire : ne pas se plaindre. — ☑ Loc. fam. Il a manqué, perdu une belle occasion de se taire : il a parlé mal à propos, il s'est fait du tort en parlant.
1 Si tant de belles se sont tues,
Que ne vous taisez-vous aussi ?
Mme de Sévigné, 1283, 25 juin 1690 (Parodie de La Fontaine, Fables, X, 12).
2 Il n'est jamais plus difficile de bien parler que quand on a honte de se taire.
La Rochefoucauld, Maximes posthumes, 556.
3 Dans quelque pays que ce puisse être, il n'est pas possible qu'on juge un homme sur ce qu'il n'a pas dit, et qu'on le méprise pour s'être tu.
Rousseau, Julie ou la Nouvelle Héloïse, V, III.
4 Il s'était beaucoup forcé pour se taire; ce sont les mots qu'ils n'ont pas dits qui font si lourds les morts dans leurs cercueils.
Montherlant, la Relève du matin, p. 51.
Spécialt. Ne pas divulguer un secret, des choses compromettantes…; être discret (cf. Tenir sa langue). || Il sait, il ne sait pas se taire.
Se taire sur qqch., à propos de qqch. Omettre; silence (passer sous). → 1. Dire, cit. 98; ignorer, cit. 8; menotte, cit. 1. || Se taire sur un secret (→ Impatience, cit. 1). || Je préfère me taire là-dessus.Vx. || Se taire de… (→ Ennui, cit. 2).
5 Se taire sur quelqu'un, il semble que c'est l'éloigner. En s'informant, on craint d'appeler. On met du silence de son côté comme on fermerait une porte.
Hugo, l'Homme qui rit, II, III, VIII.
6 La plus belle fille ne donne que ce qu'elle a, et l'ami le plus dévoué se tait sur ce qu'il ignore.
A. de Musset, Carmosine III, 3 (1865).
b Poét. (Sujet n. de chose). || « La douleur qui se tait n'en est que plus funeste » (→ Attendre, cit. 65).Fig. Être silencieux. || Tout se tait (→ Funeste, cit. 20; midi, cit. 1; muet, cit. 16). || « L'affreuse immensité se tait lugubrement » (cit. 2).
7 (…) la vanité même se tait, n'ayant que la honte à dire. Jusqu'au mouvement philosophique, ce pays est silencieux, comme le palais désert de Louis XIV.
Michelet, Hist. de la Révolution franç., Introd., II, 2.
2 (XIIIe). Cesser de parler, de crier ou de pleurer. || Brusquement, elle se tut. || Il a fini par se taire; cf. fam. Fermer sa (boîte, sa gueule); boucler (la boucler). || Se taire au milieu de la discussion (cf. Rentrer dans sa coquille).(Avec ellipse de se). || Faire taire : empêcher de parler, de crier, de pleurer; forcer à se taire (cf. Clouer le bec, mettre un bouchon, rabattre le caquet, fermer la bouche à…, imposer silence, réduire au silence…; et → garce, cit. 3; ruer, cit. 1). || Faites-le taire.
8 (…) en faisant taire l'enfant aujourd'hui on l'excite à pleurer demain davantage.
Rousseau, Émile, I.
(À l'impératif). || Tais-toi ! (→ Énerver, cit. 7; insolvable, cit. 2). || Taisez-vous ! (→ Disculper, cit. 4; fourrer, cit. 27). Chut, paix (cit. 30), silence (cf. fam. Ta boîte !, ta gueule !…; boucle-la !; la ferme !).Allez-vous vous taire ? (→ Irriter, cit. 26). || Fais-moi le plaisir (cit. 39) de te taire.
9 Veux-tu te taire, animal ? Est-ce qu'il y a du bon sens à gueuler ainsi ? Les voisins vont venir, tu nous rends tous malades.
Zola, la Terre, III, II.
Spécialt (pour atténuer ou démentir ce qui vient d'être affirmé) :
10 Je cours guibolles à mon cou !… Je me croyais sauvé !… Tais-toi !… J'entre chez Berlemont…
Céline, Guignol's band, p. 63.
Trans. (Déb. XIIIe, taire sa boche, sa bouche). Fam. (Sujet n. de chose). Ne plus se faire entendre. Éteindre (s'). || Les voix se taisaient (→ Interrompre, cit. 11). || Les bruits (cit. 12) de la rue se sont tus. Calmer (se). || L'orchestre s'était tu. Arrêter (→ Dépeupler, cit. 9). || Jet d'eau « qui ne se tait ni nuit ni jour » (→ Entretenir, cit. 15).
11 Son regard est pareil au regard des statues,
Et, pour sa voix, lointaine, et calme, et grave, elle a
L'inflexion des voix chères qui se sont tues.
Verlaine, Poèmes saturniens, « Melancholia », VI (1866).
(1674). || Faire taire les récriminations, les disputes. Cesser.
3 Par métaphore, fig. (Sujet n. de chose). Ne pas ou ne plus s'exprimer, cesser de se faire sentir. || « Il faut que les sens et les passions se taisent… » (Malebranche). || Cette vertu devant laquelle se taisait la médisance (→ Honorer, cit. 13). || « Elle (ma faim) ne se taira que satisfaite » (→ Nourriture, cit. 11).Faire taire le droit (→ 2. Lieu, cit. 43). || Faire taire les passions ( Calmer), ses scrupules ( Disparaître [faire], supprimer). || Faire taire l'opposition. Museler.
12 J'ai trop souvent permis à ma raison d'arrêter l'élan de mon cœur (…) alors que mon cœur se taisait, j'ai trop souvent parlé quand même.
Gide, les Nouvelles Nourritures, III, III.
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II V. tr.
A
1 (V. 1160). Moins cour. que se taire. || Taire (qqch.) : ne pas dire; s'abstenir ou refuser d'exprimer, de révéler (qqch.). Cacher, celer, dissimuler; secret (garder); → Essuyer, cit. 16; impénétrable, cit. 18. || Taire ses raisons (→ Déterminant, cit. 1). || « Taire la vérité, n'est-ce pas déjà mentir ? » (Péguy). Déguiser, mentir. || Dire ce qu'il faut taire ( Bavard). || Quelqu'un dont je tairai le nom.
2 (1683). Ne pas laisser paraître. || Taire son chagrin, sa douleur. Dévorer, enfouir. || Taire son orgueil (→ Arborer, cit. 9).
13 (…) mentir c'est cacher une vérité que l'on doit manifester. Il suit bien de cette définition que taire une vérité qu'on n'est pas obligé de dire n'est pas mentir (…)
Rousseau, Rêveries…, IVe promenade.
14 Esclaves d'une loi fatale,
Sachons taire les maux soufferts.
Hugo, Odes et Ballades, V, XXI.
15 Le mal est sans espoir, aussi j'ai dû le taire,
Et celle qui l'a fait n'en a jamais rien su.
A.-F. Arvers (→ Mystère, cit. 11).
Littér. Interrompre (ses paroles, ses cris, etc.). || « Tais ces chants et cesse ces danses » (→ 2. Farce, cit. 13).
B Loc. pop. (1744). Taire sa gueule : se taire, la fermer.Taire son bec, sa langue (même sens).
16 Taisez donc vos gueules.
Henri Monnier, Scènes populaires, t. I (1835).
17 Eh bien, alors (…) tais ton bec, méchant gratte-papier.
E. Labiche, Un monsieur qui prend la mouche, 1.
18 Le barbu (…) cria tout d'un coup : — À bas la guerre ! Maurice fit un pas en arrière (…) — La tairas-tu ? dit-il. La tairas-tu ta grande gueule ?
Sartre, le Sursis, p. 163.
19 Plan flash sur l'inspecteur qui, dans le couloir, crie aux journalistes.
Dietrich. Vous n'allez pas taire vos gueules, là-dedans (…)
H.-G. Clouzot et J. Ferry, Quai des Orfèvres, 1947, in l'Avant-Scène, no 29, p. 48.
CONTR. Dire, parler. — Bavarder, chuchoter, confesser, crier, écrire, publier.
HOM. Ter, terre.

Encyclopédie Universelle. 2012.