effacer [ efase ] v. tr. <conjug. : 3> I ♦ V. tr.
1 ♦ Faire disparaître sans laisser de trace (ce qui était marqué). ⇒ enlever; couvrir, gratter. Effacer un trait à la gomme. ⇒ gommer. Liquide pour effacer. ⇒ correcteur, effaceur. Effacer un croquis mal fait. Effacez ce qui est écrit au tableau. Par ext. Un chiffon pour effacer le tableau. ⇒ essuyer. Le voleur a effacé ses empreintes, toute trace de son passage. Absolt « Ajoutez quelquefois, et souvent effacez » (Boileau). — Inform. Éliminer (des informations enregistrées dans une mémoire).
♢ Par ext. Rendre moins net, moins visible. Une inscription que le temps a effacée. ⇒ oblitérer.
2 ♦ Fig. Faire disparaître, faire oublier. ⇒ abolir. « on ne peut tout à fait effacer de sa mémoire la chaleur d'une émotion, la douceur d'un geste, le son d'une voix tendre » (Ben Jelloun). Chercher à effacer ses erreurs. « Le crime était puni, mais effacé par la contrition » (Huysmans). ⇒ absoudre. « Effaçant tout, même la honte » (Baudelaire). — Loc. fam. On efface tout et on recommence : on reprend tout depuis le début sans tenir compte de ce qui a été fait auparavant.
♢ Vieilli ⇒ éclipser. Une tunique « dont la blancheur effaçait celle de la neige » (Fénelon).
3 ♦ (1670 escr.) Tenir de côté ou en retrait, de manière à présenter le moins de surface ou de saillie. Alignez-vous, effacez l'épaule droite.
II ♦ S'EFFACER v. pron.
1 ♦ (Pass.) Disparaître plus ou moins. ⇒ s'estomper, se faner, s'obscurcir, pâlir. « Une fresque du Titien qui s'efface » (Chateaubriand). « Les choses s'effaçaient, blêmes, diminuées » (Hugo). — Fig. « Les mêmes souvenirs renaissent, tandis que d'autres s'effacent » (Rousseau).
2 ♦ (Réfl.) Se tenir de façon à paraître le moins possible, à présenter le moins de surface ou de saillie. S'effacer pour laisser passer. « Il arrive toujours le premier à la porte du restaurant, s'efface, laisse passer sa femme » (Camus). — Fig. S'effacer devant qqn, lui laisser la première place, le laisser agir. « Il faut que le virtuose s'efface devant le compositeur » (Berlioz). ⇒ disparaître. « Discret, et cherchant plus à s'effacer qu'à épater » (A. Gide).
⊗ CONTR. Accentuer, renforcer, 1. ressortir (faire ressortir).
● effacer verbe transitif (de face) Faire disparaître quelque chose en frottant, en grattant, en essuyant, en diluant, etc., ou avec un instrument, un produit, un système spécial : Effacer un mot au tableau. Effacer un enregistrement sur une bande. Faire disparaître ce qui est inscrit sur une surface, ce qui est enregistré sur un support magnétique : Effacer une ardoise. Cette mauvaise manœuvre a effacé la bande. Faire disparaître quelque chose en le rendant peu apparent, en l'aplatissant, etc. : Y a-t-il un moyen pour effacer les rides du visage ? Faire en sorte que ses épaules, son ventre soient moins saillants, moins proéminents, moins marqués. Supprimer quelque chose, le faire disparaître ; rayer, abolir : Effacer un souvenir de sa mémoire. Faire oublier quelque chose ou le (faire) pardonner : Effacer une erreur de jeunesse. On efface tout et on recommence. Littéraire. Éclipser quelqu'un, quelque chose, le surpasser : Elle était si jolie qu'elle effaçait toutes les autres. Dépasser un adversaire, en dribblant, en feintant : L'avant efface deux adversaires puis marque. ● effacer (difficultés) verbe transitif (de face) Conjugaison Le c devient ç devant o et a : j'efface, nous effaçons ; il effaça. Emploi 1. Effacer :faire disparaître en frottant, en grattant, en lavant, etc. : effacer une tache, un graffiti sur un mur. - Par extension, faire disparaître toute trace de (un support) : effacer un tableau noir, une bande magnétique. Ce sens étendu, considéré naguère comme familier, est aujourd'hui admis. 2. S'effacer devant, s'effacer derrière. S'effacer devant qqn, qqch = laisser passer devant soi, laisser la première place à (devant a ici le sens de « en présence de »). Il s'est effacé devant une dame pour la laisser passer ; nos petits soucis s'effacent devant tant de misère. S'effacer derrièreqqn, qqch = laisser passer devant soi, laisser la première place à (derrière a ici son sens habituel). L'auteur s'efface derrière ses personnages. Remarque Les deux prépositions de sens opposés conduisent au même effet de sens. ● effacer (synonymes) verbe transitif (de face) Faire disparaître quelque chose en frottant, en grattant, en essuyant, en...
Synonymes :
- barrer
- gommer
- gratter
- rayer
Faire disparaître quelque chose en le rendant peu apparent, en l'aplatissant...
Synonymes :
- gommer
Contraires :
- faire ressortir
Faire en sorte que ses épaules, son ventre soient moins...
Synonymes :
- éclipser
- estomper
Supprimer quelque chose, le faire disparaître ; rayer, abolir
Synonymes :
- abolir
- chasser
- rayer
Contraires :
- raviver
Faire oublier quelque chose ou le (faire) pardonner
Synonymes :
- absoudre
effacer
v.
rI./r v. tr.
d1./d Enlever, faire disparaître toute trace de (ce qui est écrit, marqué). Effacer une inscription sur un mur.
— Par ext. écolier qui efface son ardoise.
— Effacer une bande magnétique, faire disparaître ce qui y est enregistré.
|| Supprimer (ce qui est écrit) en rayant, en raturant.
d2./d Fig. Faire oublier. Le temps efface bien des souvenirs.
|| éclipser, surpasser au point de faire oublier tous les autres. Il a effacé tous ses contemporains.
d3./d Effacer le corps, le tenir de côté, en retrait. Effacer la jambe.
rII./r v. Pron.
d1./d S'enlever, disparaître (en parlant d'une marque). Une tache d'encre s'efface difficilement.
— Fig. Des souvenirs qui s'effacent.
d2./d Se mettre de côté. Il s'effaça pour la laisser passer.
|| Fig. S'effacer devant qqn, lui céder le pas.
⇒EFFACER, verbe trans.
I.— Emploi trans.
A.— Faire disparaître.
1. a) Faire disparaître totalement (ce qui est tracé ou marqué sur une surface). Effacer une phrase, un chiffre (sur un tableau). À une époque où le parchemin devint rare, on effaça des dessins pour écrire à leur place (LENOIR, Archit. monast., 1852, p. 31). Il suffirait que j'eusse effacé un mot de ce qui s'y trouve écrit (BERNANOS, M. Ouine, 1943, p. 1556) :
• 1. ... la vie n'est plus qu'une ardoise où j'efface tout ce qui s'y inscrit, au jour le jour, de l'histoire des hommes.
MAURIAC, Mémoires intérieurs, 1959, p. 39.
SYNT. Effacer une tache; effacer le prix (d'un cadeau); effacer avec un chiffon; effacer entièrement, complètement, avec soin; gomme à effacer.
— P. anal. Effacer un pli (de vêtement). Ils n'avaient qu'un seul jour pour effacer leurs rides (SARTRE, Nausée, 1938, p. 66). Dans le monde hors de la maison, la neige efface les pas, brouille les chemins, étouffe les bruits (BACHELARD, Poét. espace, 1957, p. 53).
— Spéc. Rendre peu ou moins visible. Effacer les vestiges (de qqc.), les traces (de qqn, qqc.); effacer ses pas; effacer une empreinte, un indice, une inscription, une signature. Un cadran solaire dont le soleil et la pluie avaient effacé les chiffres (FRANCE, Livre ami, 1885, p. 39).
— P. ext. Annuler (un signe) sans le faire disparaître (en barrant, biffant, raturant, etc.). Effacer un nom d'une liste; (p. ell.) effacer qqn d'une liste. Synon. radier.
— P. métaph. Effacer (qqn ou qqc.) de sa mémoire. La nature qui efface de notre mémoire tant de souvenirs inutiles ou nuisibles (GREEN, Journal, 1936, p. 62).
b) P. ext. Éliminer, faire disparaître (quelque chose). Eustache s'avisa de lui appliquer un soufflet à lui effacer la figure (NERVAL, Nouv. et fantais., 1855, p. 225). Une petite odeur à quoi s'ajoutaient, sans l'effacer, des traces de parfum (ROMAINS, Hommes bonne vol., 1939, p. 119) :
• 2. Paisible, Yvonne efface son fard, le remplace par une touche de rose, un nuage de poudre...
COLETTE, Paysages et portraits, 1954, p. 134.
c) Argot
— Faire disparaître en absorbant : boire ou manger (quelque chose). Effacer un morceau de fromage (DELVAU 1867, p. 150). Effacer un plat, une bouteille (cf. L. RIGAUD, Dict. du jargon parisien, 1878, p. 127; FRANCE 1907; ESN. 1866).
— Recevoir (une balle, un mauvais coup, etc.) (d'apr. LE BRETON Argot 1975). Synon. encaisser. Ils ont effacé quelques bastos entre le faux-filet et la bavette (A. SIMONIN, Le Pt Simonin ill., 1957, p. 48).
2. Au fig.
a) Faire disparaître, supprimer (une chose abstraite). Effacer une (bonne, mauvaise) impression; effacer des inégalités, des différences; effacer les conséquences (d'une action, d'un événement). Le temps effacera la douleur (G. BATAILLE, Exp. int., 1943, p. 89). Il faut effacer toute distinction entre ouvriers et intellectuels (CAMUS, Homme rév., 1951, p. 183).
— [Compl. abstr. ou concr.] Effacer de la terre. Éliminer radicalement. Elle [une danseuse] semble d'abord, de ses pas pleins d'esprit, effacer de la terre toute fatigue, et toute sottise (VALÉRY, Eupalinos, 1923, p. 25). Effacer (un pays) de la surface du globe. L'anéantir.
b) Faire oublier. Effacer le souvenir (de qqc., qqn); effacer le passé. Ce que je fais, (...) effacerait un crime, et je n'ai commis qu'une faiblesse (A. DUMAS père, Chev. Maison-Rouge, 1847, IV, 3, p. 136). Notre œil de Parisien regarde mal une ville dont l'habitude nous efface les charmes (COCTEAU, Foyer artistes, 1957, p. 111).
c) Pardonner. Effacer une faute, un péché, un affront, des torts; effacer par la contrition, par la pénitence, par des larmes. « Agneau de Dieu qui effacez les péchés du monde, ... » (BILLY, Introïbo, 1939, p. 6).
B.— Empêcher de paraître
1. [Le compl. désigne une chose]
a) Affaiblir ou supprimer ce qui se manifeste normalement. Laurent regardait le ciel splendide où la lune effaçait la clarté des étoiles (SAND, Elle et lui, 1859, p. 104). Chez la femme, la graisse efface plus ou moins les saillies osseuses (RICHER, Nouv. anat. artist., t. 2, 1920, p. 71) :
• 3. ... de longs peupliers effeuillés, tellement blancs que la lumière les effaçait et mettait à leur place des faisceaux de scintillements.
GIONO, Le Hussard sur le toit, 1951, p. 291.
— Spéc. Rendre moins apparent (une partie du corps) par un mouvement de retrait (en particulier en escrime). Effacer le corps, une épaule. Les assistants (...) cambraient les reins, effaçaient le ventre (ARNOUX, Roi, 1956, p. 278).
b) [Abstr.] Mettre en retrait, éclipser. Effacer sa personnalité. On sait qu'il [Vinci] peignit dans un tableau de son professeur une tête d'ange si belle, d'un goût si rare et si neuf, qu'elle effaçait tout le reste de l'œuvre (GAUTIER, Guide Louvre, 1872, p. 200) :
• 4. La conclusion de tout ceci est qu'il faut effacer son opinion aussi bien que celle des autres devant les décisions de l'expérience.
BERNARD, Introd. à l'étude de la méd. expérimentale, 1865, p. 63.
2. [Le compl. désigne une pers.]
a) Surpasser, éclipser, empêcher de briller. Aujourd'hui, leur grand contemporain [Rubens] semble les effacer sous sa gloire (TAINE, Philos. art, t. 1, 1865, p. 4) :
• 5. Un autre jour, vous me dites que vous avez une autre route que la mienne (...) que je m'y prendrais mal, que j'effaroucherais l'abonné (...) que je vous effacerais.
SAND, Corresp., t. 2, 1812-76, p. 308.
b) Arg. Tuer. Il y avait sur moi un mauvais sort (...) pour que toujours ceux que j'aimais bien se fassent effacer (SIMONIN, Touchez pas au grisbi, 1953, p. 221).
II.— Emploi pronom.
A.— À sens passif. [Le suj. désigne un nom de chose]
1. [Le suj. désigne une chose tracée ou marquée sur une surface (cf. supra I A 1)] Disparaître progressivement. S'altérer et s'effacer. Je n'ai certes pas composé mon portrait, mais je l'ai dessiné trop vite, et les traits s'effacent (GREEN, Journal, 1940-43, p. 158) :
• 6. ... un antique écrin de velours blanc, où le nom du bijoutier s'effaçait en lettres dorées vieilles de 30 ans.
A. DAUDET, Fromont jeune et Risler aîné, 1874, p. 17.
♦ P. anal. Elle [Sœurette] vit sortir doucement une femme, un ombre légère de femme, qui s'effaça presque aussitôt dans le brouillard rose du matin (ZOLA, Travail, t. 1, 1901, p. 314). Un vallon (...) où un ancien chemin (...) s'effaçait peu à peu (LARBAUD, Enfantines, 1918, p. 168).
— P. ext. Être enlevé, supprimé. Le phare, reculant, pâlit, blêmit, puis s'effaça. Cette extinction fut morne (HUGO, Homme qui rit, t. 1, 1869, p. 111).
— P. métaph. S'effacer du souvenir. Peu à peu le souvenir de mon cousin s'effaçait de ma mémoire (GREEN, Autre sommeil, 1931, p. 56).
2. Au fig. (cf. supra I A 2).
a) Disparaître, être supprimé. Des divisions qui s'effacent. Soudain, il [l'homme] découvre que le sol n'est pas sûr, que des villes peuvent disparaître, que des civilisations s'effacent (CHARDONNE, Attach., 1943, p. 114) :
• 7. Entre eux deux, il [le beau-père] sentait s'effacer un chemin de compréhension [avec le gendre], s'évanouir un lien dont la ténuité annonçait la rupture définitive.
AYMÉ, Travelingue, 1941, p. 8.
b) S'oublier, disparaître de la mémoire. Déjà le souvenir de la vivante s'efface et la mémoire ne gardera, je le sais, que l'image de la morte (BERNANOS, Journal curé camp., 1936, p. 1168). Rien ne s'efface plus vite qu'un visage illustre s'il ne rafraîchit pas (...) la mémoire et les regards de ses adorateurs (ARNOUX, Roi, 1956, p. 320) :
• 8. Mes souvenirs de Stamboul, (...) sont morts à présent. Avec frayeur, je les ai vus s'effacer peu à peu et disparaître; ...
LOTI, Journal intime, t. 1, 1878-81, p. 138.
B.— Pronom. réfl. [Le suj. désigne une partie du corps] Faire en sorte de paraître le moins possible.
1. Domaine concr.
a) Offrir le moins de prise possible. S'effacer sous les coups; s'effacer contre un mur. Les épaules s'effaçaient; le buste était tendu comme si Michaud se trouvait encore sous les armes (BALZAC, Paysans, 1844, p. 96). Dans les grands salons du rez-de-chaussée où des panneaux s'effaçaient tout le long de la boiserie blanche, il ne restait plus un meuble (A. DAUDET, R. Helmont, 1874, p. 108).
b) Occuper le moins d'espace possible, se mettre de côté, à l'écart. Lorsque Manette était entrée dans la maison, Anatole s'était effacé devant elle (GONCOURT, Man. Salomon, 1867, p. 336).
— [Avec un compl. de lieu] Il se leva lestement, et s'effaça derrière le pilier (BALZAC, Maître Cornélius, 1831, p. 205). Il s'effaça dans un coin (THARAUD, Dingley, 1906, p. 17).
— Absol. S'effacer pour laisser passer, entrer (qqn); s'effacer poliment, discrètement. Elle [Luce] ouvre une autre porte, s'efface, la referme sur nous (COLETTE, Cl. Paris, 1901, p. 163) :
• 9. Il [un monsieur] arrive toujours le premier à la porte du restaurant, s'efface, laisse passer sa femme, (...) et entre alors...
CAMUS, La Peste, 1947, p. 1237.
— Arg. Mourir. Il s'est effacé en trois jours d'une mauvaise angine (RIV.-CAR. 1969).
2. Domaine abstr.
a) S'effacer devant qqc. Se faire oublier au profit de. Les bâtisseurs qui avaient eu la modestie de s'effacer devant leurs cathédrales (SARTRE, Mots, 1964, p. 48).
— S'effacer devant qqn. Lui laisser la première place, reconnaître sa supériorité. Il faut (...) que le virtuose s'efface devant le compositeur (BERLIOZ, À travers chants, 1862, p. 65). Il m'avait dit tout de suite en arrivant qu'il était prêt à s'effacer devant quelqu'un ayant connu Philippe (LÉAUTAUD, Journal littér., 2, 1907-09, p. 215).
b) Absol. Éviter de se faire remarquer. S'effacer par modestie. Elle s'efforçait de disparaître, très modeste, s'effaçant, s'éteignant, toujours en noir et sans un bijou (ZOLA, Lourdes, 1894, p. 56). C'est une personne taciturne et courtoise qui s'efface toujours quand il le faut (GREEN, Malfaiteur, 1955, p. 8) :
• 10. Le romancier, pensais-je, doit s'effacer, disparaître derrière ses personnages, leur abandonner la place, ...
MARTIN DU GARD, Souvenirs autobiographiques, 1955, p. LX.
Rem. On rencontre ds la docum. le subst. fém. effaçade. Action d'effacer. Synon. effacement. Les intimes de son entourage [du duc de Bordeaux] demandent la liste des personnes engagées et effacent toujours cinq ou six noms... Cette effaçade (...) fait juger fort sévèrement ce pauvre jeune homme (STENDHAL, Corresp., t. 3, 1800-42, p. 242).
Prononc. et Orth. :[efase]. WARN. 1968 note qu'on entend parfois []. Cette prononc. est donnée ds BARBEAU-RODHE 1930 et LITTRÉ. Elle s'explique par l'influence graph. des lettres redoublées sur le timbre de la voyelle précédente. Le verbe est admis ds Ac. 1694-1932. Il prend une cédille devant a et o : j'effaçai(s), nous effaçons. Étymol. et Hist. 1re moitié XIIe s. seit esfaced li nuns de lui « faire disparaître » (Psautier d'Oxford, éd. F. Michel, CVII, 12); ca 1223 [de son escrit] m'esface (GAUTIER DE COINCY, éd. F. Kœnig, II Prière 37, 37); 1re moitié XIIIe s. Et son chief blont qui le fin or efface (THIBAUT DE CHAMPAGNE, Chansons, éd. A. Wallensköld, XXXVIII, 43); 1640 la pompe la plus vaine s'efface au seul aspect de la grandeur romaine (CORNEILLE, Sertorius, II, 2, v. 502); 1721 escrime (Trév.). Dér. de face; préf. é-; dés. -er. Fréq. abs. littér. : 3 314. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 5 088, b) 3 969; XXe s. : a) 4 530, b) 4 900.
DÉR. 1. Effaçable, adj. Qui peut être effacé. Tache effaçable. Anton. ineffaçable, indélébile. Cette écriture est effaçable avec de l'eau-forte (Ac. 1932). Au fig. Impression (difficilement) effaçable. Ma vipère de lettre aux bien effaçables crachats (LAFORGUE, Complaintes, 1885, p. 119). — []. Pour [] ouvert à l'initiale, cf. effacer. Ds Ac. 1718-1932. — 1re attest. 1549 effassable (LE MAIRE, Illustr., I, 31, p. 102 ds GDF. Compl.); du rad. de effacer, suff. -able. — Fréq. abs. littér. : 2. 2. Effaçage, subst. masc. [Correspond à effacer I A 1 a] Action d'effacer, de faire disparaître ce qui est tracé ou marqué. Synon. effacement. Spéc., technol. Travail consistant à effacer. On ne saurait trop recommander à l'ouvrier chargé de l'effaçage des pierres [lithographiques] d'apporter à son travail tout le soin désirable (CHELET, Lithogr., 1933, p. 18). — []. Pour [] ouvert à l'initiale, cf. effacer. — 1re attest. 1866 (Ordonn. de police ds LITTRÉ); du rad. de effacer, suff. -age. 3. Effaceur, euse, adj. Qui efface. La main effaceuse du temps (PÉLADAN, Vice supr., 1884, p. 188). Emploi subst. Personne qui efface. Un effaceur, une effaceuse. — []. Pour [] ouvert à l'initiale, cf. effacer. — 1re attest. XIVe s. [ms.] qui les péchés ies effaicer e (Canticum Mariae, 18 ds Psautier d'Oxford, éd. F. Michel, p. 360); du rad. de effacer, suff. -eur2. — Fréq. abs. littér. : 1. 4. Effaçure, subst. fém. [Correspond à effacer I A 1 a] a) Action d'effacer. Une vraie peine, disparue sous l'effaçure du temps (A. DAUDET, Pte paroisse, 1895, p. 112). b) Ce qui résulte de l'effaçage. Persuadé que (...) mon nom se lirait au milieu de toutes ces effaçures (CHATEAUBR., Mém., t. 3, 1848, p. 10). — []. Pour [] ouvert à l'initiale, cf. effacer. Ds Ac. 1694-1932. — 1re attest. 1238 sans nule effaceure (Acte Hôtel-Dieu de Soissons, v°, Drachy ds GDF.); du rad. de effacer, suff. -ure. — Fréq. abs. littér. : 3.
effacer [efase] v. tr. [CONJUG. placer.]
ÉTYM. Av. 1150; de é, face, et -er.
❖
1 a Faire disparaître sans laisser de trace (ce qui était marqué, écrit). ⇒ aussi Biffer. || Effacer un mot, une ligne (⇒ Enlever, supprimer) en frottant avec une gomme (⇒ Gommer). || Effacer une tache d'encre avec un grattoir (⇒ Gratter), un produit chimique. || Effacer légèrement un trait. ⇒ Estomper. || Laver, essuyer, brosser pour effacer. Effacez ce qui est écrit au tableau. — Par ext. Supprimer (une trace). || Effacer les rides par des massages. || La neige qui tombe efface les empreintes des pas. || L'assassin avait effacé soigneusement toute trace de sang. || Le voleur a effacé ses empreintes, toute trace de son passage. || Effacer un pli sur un vêtement.
1 Et d'autres réflexions survinrent, tandis qu'il effaçait avec sa manche une rebroussure dans la soie de son chapeau.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. V, VI, p. 44.
b Par métonymie. Faire disparaître ce qui était marqué, tracé sur (une surface). || Un chiffon pour effacer le tableau.
c Faire disparaître (ce qui était écrit) en raturant, en corrigeant. ⇒ Annuler, barrer, biffer, canceller (vx), caviarder, censurer, couper, détruire, radier, raturer, rayer, sabrer, supprimer (→ Critique, cit. 9). || Effacer un nom sur une liste, un article d'un compte, un paragraphe dans un exposé, une clause de contrat… Absolt. || Il efface sans cesse. ⇒ Enlever.
2 Ajoutez quelquefois, et souvent effacez.
Boileau, l'Art poétique, I.
♦ Par métaphore. || Conquérant qui cherche à effacer un pays, un royaume de la carte.
d Par ext. Littér. (Sujet n. de chose). Rendre moins net, moins visible. || Le soleil efface les couleurs. ⇒ Affaiblir, éteindre, faner, passer (faire), ternir. || L'usure avait effacé l'empreinte des médailles. Ellipt. || L'usure avait effacé la médaille. || Le temps efface les vestiges du passé. || Une inscription que le temps a effacée. ⇒ Détruire, oblitérer.
3 (…) quelle étrange pâleur
De son teint tout à coup efface la couleur ?
Racine, Esther, II, 7.
4 Je me souviendrai toute ma vie d'avoir vu (…) cet air superbe et menaçant, que la mort même n'avait pu effacer.
Fénelon, Télémaque, II.
5 Quand le râteau de la peste ou le soc de la guerre, quand le génie des déserts a passé sur un coin du globe en y effaçant tout, qui a eu raison du sauvage de Nubie ou du patricien de Thèbes ?
Balzac, Séraphîta, Pl., t. X, p. 542.
2 Fig. (Abstrait). Faire disparaître, faire oublier. || Effacer le souvenir d'un événement. || Effacer un souvenir de sa mémoire. || Effacer le passé. ⇒ Oublier (faire); → Faire tomber dans l'oubli, faire table rase. || Le temps efface les chagrins, les humiliations. || L'absence efface-t-elle l'amour ? (→ Attiédir, cit. 7). || Effacer un affront, une offense. || L'excuse n'efface pas la faute. ⇒ Couvrir, racheter, réparer (→ Apostat, cit. 2). || Dieu efface les péchés. ⇒ Absoudre, pardonner; → Passer l'éponge sur. || Familiarité, politesse qui efface les distances. ⇒ Abolir (→ Critique, cit. 9). || Politique qui s'efforce d'effacer les distinctions entre les classes. ⇒ Confondre.
6 Je t'ai fait une offense, et j'ai dû m'y porter
Pour effacer ma honte et pour te mériter (…)
Corneille, le Cid, III, 4.
7 Que l'embrassement d'un ami peut effacer de torts ! Quel ressentiment peut après cela rester dans le cœur ?
Rousseau, les Confessions, IX.
8 J'écoute : —
Tout fuit,
Tout passe;
L'espace
Efface
Le bruit.
Hugo, les Orientales, « Les djinns ».
9 Efface ce séjour, ô Dieu ! de ma paupière,
Ou rends-le moi semblable à celui d'autrefois.
Lamartine, Cours familier de littérature, « La vigne et la maison », II.
10 La nuit voluptueuse monte,
Apaisant tout, même la faim,
Effaçant tout, même la honte.
Baudelaire, les Fleurs du mal, « La mort », CXXIV.
11 Les haines effaçaient dans le cœur tout sentiment d'humanité.
Fustel de Coulanges, la Cité antique, p. 402.
12 (…) effaçant son passé pour repartir à zéro.
Camus, la Peste, p. 301.
♦ Effacer de la terre, de la surface du globe. || On veut effacer la variole de la surface du globe.
12.1 Je venais de penser qu'au cas où Riton se ferait effacer, elles seraient tout entières pour mézigue, les cinquante briques de notre planque.
A. Simonin, Touchez pas au grisbi, p. 143.
3 Fig. Empêcher (qqch., qqn) de paraître, de se manifester, par sa propre existence, par ses propres manifestations.
13 (…) une tunique d'une laine fine dont la blancheur effaçait celle de la neige (…)
Fénelon, Télémaque, I.
b Abstrait :
14 Tout ce qui vous efface blesse votre orgueil.
15 Un jeune homme qui en éclipse un autre par sa parure, a quelquefois la douleur de voir cet autre l'effacer par son esprit.
16 Parmi ces peintres, il en est un (Rubens) qui semble effacer tous les autres; en effet, dans l'histoire de l'art aucun nom n'est plus grand, et il n'y en a que trois ou quatre aussi grands.
Taine, Philosophie de l'art, t. II, p. 50.
4 (1670, Molière). Escrime. Tenir de côté ou en retrait (une partie du corps, un membre), de manière à présenter le moins de surface ou de saillie. || Effacer le corps, une épaule, le ventre. — Alignez-vous, effacez l'épaule droite (ci-dessous v. pron., 2.).
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s'effacer v. pron.
1 (Sujet n. de chose; passif). Être effacé; disparaître plus ou moins. — (D'une trace). || Crayon qui s'efface facilement. ⇒ Partir. || L'inscription s'est effacée. || Effigie d'une médaille qui s'efface. ⇒ Estomper (s'). — (Choses visibles). || Les couleurs s'effacent. || Lumière, jour qui s'efface. ⇒ Obscurcir (s').
17 Une fresque du Dominiquin ou du Titien, qui s'efface; un palais de Michel-Ange ou de Palladio, qui s'écroule mettent en deuil le génie de tous les siècles.
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. VI, p. 132.
18 La pâle nuit levait son front dans les nuées;
Les choses s'effaçaient, blêmes, diminuées,
Sans forme et sans couleur (…)
Hugo, les Contemplations, III, « Magnitudo parvi », I.
19 Heureux les hommes dont le cœur, comme une glace où glissent et s'effacent les reflets, oublie tout ce qu'il a contenu (…)
Maupassant, la Morte.
20 Sur sa figure ronde où rien d'autre ne bouge, un petit pli, entre les sourcils, se forme et disparaît, reparaît et s'efface, seul indice du débat intérieur.
Martin du Gard, les Thibault, t. III, p. 168.
♦ Fig. (Abstrait). || Souvenir qui s'efface difficilement. ⇒ Disparaître, obscurcir (s'); → Décliner, cit. 9; demeurer, cit. 23. || Les haines s'effacent peu à peu. ⇒ Assoupir (s'). || Le charme s'efface. ⇒ Cesser, évanouir (s').
21 Le ciel de l'Attique a produit en moi un enchantement qui ne s'efface point; mon imagination est encore parfumée des myrtes du temple de la Vénus aux jardins et de l'iris du Céphise.
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. II, p. 387.
22 Durant cet intervalle, le peu que je savais s'est presque entièrement effacé de ma mémoire, et bien plus rapidement qu'il ne s'y était gravé.
Rousseau, les Rêveries…, 7e promenade.
23 Triste à peine tant s'effacent
Ces apparences d'automne.
Verlaine, Romances sans paroles, « Bruxelles ».
24 Les jours heureux qui furent ne s'effacent pas d'un coup; leur rayonnement persiste longtemps encore après qu'ils ne sont plus.
R. Rolland, Vie de Beethoven, p. 16.
25 Je croyais que tout s'oubliait, que tout s'effaçait; quelque chose résiste donc au temps ? Quoi, l'amour, la gloire, la fidélité ? Non, non ! mais quelques simples douleurs, mais les souvenirs qui ne pardonnent pas.
Edmond Jaloux, Fumées dans la campagne, XXVII, p. 228.
26 (…) l'Empire d'Occident, inoubliable et brillant modèle, qui, malgré ses vices et ses convulsions, avait laissé un regret qui ne s'effaçait pas.
J. Bainville, Hist. de France, III, p. 34.
♦ Les intérêts privés doivent s'effacer devant l'intérêt général (cet exemple peut être senti et compris au sens 3).
2 (Réfl.). Sujet n. de personne. Se tenir de façon à paraître le moins possible, à présenter le moins de surface ou de saillie. ⇒ Dérober (se), retirer (se). || S'effacer pour éviter un coup. || Ils s'effacèrent pour le laisser entrer. ⇒ Écarter (s').
27 Il se couchait, puis se redressait, s'effaçait dans un coin de porte, puis bondissait, disparaissait, reparaissait, se sauvait, revenait, ripostait à la mitraille par des pieds de nez (…)
Hugo, les Misérables, V, I, XV.
28 Il arrive toujours le premier à la porte du restaurant, s'efface, laisse passer sa femme (…) et entre alors (…)
Camus, la Peste, p. 39.
3 Fig. || S'effacer devant qqn, lui laisser la première place, le laisser agir. ⇒ Incliner (s'); → Absorption, cit. 2. — Il s'effaçait pour faire briller (cit. 22) son ami. || S'effacer par humilité, par politesse, par timidité : ne pas vouloir se faire remarquer. → Se faire tout petit.
29 Sympathique d'ailleurs, discret, et cherchant plus à s'effacer qu'à épater, ni même qu'à paraître ou qu'à plaire.
Gide, Journal, 7 févr. 1902.
30 On connaît mal l'homme que fut Moïse, cette personnalité puissante, mais qui s'efface devant son œuvre.
Daniel-Rops, le Peuple de la Bible, II, II, p. 109.
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effacé, ée p. p. adj.
1 Qui a disparu par effacement. || Écriture effacée. || Dessin effacé.
♦ Par métonymie. || Tableau effacé, dont l'inscription qu'il portait a été effacée. || Une médaille effacée par l'usure, dont l'empreinte a disparu. ⇒ Fruste.
♦ Par ext. Rendu moins net, moins visible. ⇒ Flou. || Sentier effacé (→ Appuyer, cit. 43).
♦ Qui a peu d'éclat, qui a passé. || Couleur, teinte effacée. ⇒ Éteint, pâli, passé.
♦ Éliminé. || Pays effacé de la carte, de la terre.
2 (XVIIe). Qui paraît en retrait, qui n'est pas saillant. || Épaules effacées. || Menton effacé. || Corps effacé. || Poitrine effacée (→ Atténuer, cit. 3). || Ventre effacé.
31 Quand vous portez la botte, Monsieur, il faut que l'épée parte la première, et que le corps soit bien effacé.
Molière, le Bourgeois gentilhomme, II, 2.
3 (XIXe). Fig. Qui ne se fait pas voir, reste dans l'ombre. ⇒ Falot, humble, ignoré, insignifiant, modeste, terne. || Caractère effacé. || C'est un individu effacé. || Attitude effacée. || Mener une vie effacée (→ Cheville, cit. 3). || Jouer un rôle effacé.
32 (…) une vieille fille, toute petite, et si menue, si effacée, que l'on remarque seulement ses doigts noueux sur le fond noir de sa jupe.
J. Chardonne, les Destinées sentimentales, I, IV, p. 163.
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CONTR. Écrire; ajouter, remplir. — Accentuer, aviver, exalter, raviver, renforcer, ressortir (faire). — Demeurer, résister, rester. — Montrer (se). — Renaître, reparaître, revenir. — (Du p. p.) Brillant, distingué, dominateur, vif, vivant.
DÉR. Effaçable, effaçage, effacement, effaceur, effaçure.
Encyclopédie Universelle. 2012.