1. trouble [ trubl ] adj.
• 1160; lat. pop. °turbulus, crois. de turbidus « agité » et turbulentus (→ turbulent)
1 ♦ Se dit d'un liquide qui n'est pas limpide, qui contient des particules en suspension (⇒ 1. boueux, vaseux). Eau trouble. « ce blanc laiteux à peine bleuâtre, un peu trouble, qu'ont les eaux de riz » (Huysmans). Vin trouble. — Pêcher en eau trouble.
♢ Dont la transparence est altérée ou insuffisante. « un gros verre ancien, un peu trouble » (Colette). — Par ext. Qui n'est pas net, qui ne se voit pas nettement. Image trouble. ⇒ flou. « Une lueur trouble et malheureuse dénaturait son regard » (Duhamel). — Par méton. Elle regardait « avec des yeux troubles, comme s'il y avait de la fumée qui l'entourait et la séparait du réel » (Le Clézio).
2 ♦ (avec infl. de troubler) Fig. Qui contient des éléments obscurs, équivoques, plus ou moins inavouables ou menaçants. ⇒ 1. louche , suspect. Désirs troubles. « Nos bonnes actions sont souvent plus troubles que nos péchés » (Aymé). « une période absolument trouble, équivoque » (Céline).
⊗ CONTR. Clair, transparent; 2. net. Distinct, évident, pur.
trouble 2. trouble [ trubl ] n. m.
• 1283 dr.; de troubler
A ♦ Concret
1 ♦ Littér. État de ce qui cesse d'être en ordre; agitation confuse qui en résulte. ⇒ bouleversement, confusion, désordre, remue-ménage, tumulte. « Il avait profité du trouble, du tumulte, de l'encombrement [...] pour s'élancer par la fenêtre » (Hugo). Jeter, porter, semer le trouble dans une famille.
♢ Cour., Au plur. Ensemble d'événements caractérisés par le désordre, l'agitation. Spécialt Opposition plus ou moins violente d'un groupe à l'intérieur d'une société. ⇒ désordre, émeute, insurrection, manifestation, révolte, soulèvement. Troubles sanglants. Troubles politiques, sociaux. Des troubles ont éclaté. — Fauteur de troubles. ⇒ agitateur, trublion. Réprimer les troubles.
2 ♦ Dr. Atteinte à l'exercice d'un droit sur une chose. Trouble de la possession. Trouble de fait (par usurpation, etc.). Trouble de voisinage. ⇒ nuisance.
B ♦ Abstrait
1 ♦ Littér. Perte de la lucidité; état anormal d'agitation. ⇒ confusion, désordre, effervescence, égarement, tumulte. « Tout était encore confus et se heurtait dans son cerveau; le trouble y était tel qu'il ne voyait distinctement la forme d'aucune idée » (Hugo).
2 ♦ (XVIe) Cour. État affectif pénible, fait d'angoisse et d'une activité mentale excessive, incontrôlée. ⇒ agitation, émotion, fièvre, inquiétude. « L'éveil ardent de son imagination [la jetait] dans un trouble mêlé de désirs et de craintes » (France). « Point de désespoir, point de cris; remettez-vous de votre trouble » (Diderot). « L'idée de la mort provoquait chez elle ce trouble qui est un des signes de la jeunesse du cœur » (Green). Causer un grand trouble (⇒ bouleverser, émouvoir, remuer, secouer, 1. toucher, troubler) .
♢ État, attitude d'une personne qui manifeste son trouble (rougeur, tremblements; altération de la voix). Le trouble de la honte. Cacher son trouble. Son trouble l'a trahi. — Spécialt État, attitude d'une personne violemment émue et privée de ses moyens. ⇒ confusion. Le trouble et les balbutiements d'un candidat timide.
3 ♦ Émotion tendre; désir amoureux. ⇒ émoi. « Le trouble de l'amour naissant est toujours doux » (Rousseau). Le trouble des sens.
C ♦ (XIXe) Sc. (souvent plur.) Modification pathologique des activités de l'organisme ou du comportement (physique ou mental) de l'être vivant. ⇒ dérèglement, désordre, désorganisation, perturbation. Troubles fonctionnels. ⇒ dysfonctionnement. Troubles de la vision, de la vue. — Troubles mentaux, psychiques. Troubles névrotiques. Troubles de la personnalité. Troubles de la parole.
⊗ CONTR. Apaisement, 1. calme, équilibre, ordre, paix, repos; équilibre, sérénité, tranquillité. Aplomb, assurance. 1. Calme, sang-froid.
truble [ trybl ] n. f.
♦ Filet de pêche en forme de poche, ajusté à un cerceau muni d'un manche. ⇒ 1. balance, caudrette. Truble à crevettes. ⇒ crevettier, épuisette. — On dit aussi TROUBLE .
● trouble adjectif (latin populaire turbulus, du latin classique turbidus, agité) Se dit d'un liquide qui n'est pas limpide par suite de la présence de petites particules en suspension : Eau trouble. Se dit d'une image qui n'est pas nette. Qui est mal défini, peu clair, peu net : Une affaire trouble. ● trouble (expressions) adjectif (latin populaire turbulus, du latin classique turbidus, agité) Œil, regard trouble, œil terne qui manque d'éclat ; regard vague, peu expressif. Vue trouble, vue brouillée, confuse. ● trouble (synonymes) adjectif (latin populaire turbulus, du latin classique turbidus, agité) Se dit d'un liquide qui n'est pas limpide par suite...
Contraires :
- clair
- limpide
- pur
Se dit d'une image qui n'est pas nette.
Synonymes :
- voilé
Contraires :
- net
Qui est mal défini, peu clair, peu net
Synonymes :
- louche
- obscur
● trouble
adverbe
Voir trouble, d'une manière indistincte.
● trouble
nom masculin
(de troubler)
État d'agitation, d'inquiétude, de confusion ou d'émotion dans lequel se trouve quelqu'un : Son trouble était visible, il était tout rouge.
Littéraire. Émotion de l'amour.
Perturbation dans l'accomplissement d'une fonction physique ou psychique, pouvant se manifester au niveau d'un appareil, d'un organe, d'un tissu : Troubles respiratoires. Troubles de la personnalité.
Altération des rapports entre les personnes ; état d'agitation, de désarroi : Cela jeta le trouble dans la famille.
Action d'inquiéter un possesseur dans la jouissance d'un bien, par un acte matériel (trouble de fait) ou par la revendication juridique d'un droit (trouble de droit).
● trouble (expressions)
adverbe
Voir trouble, d'une manière indistincte.
● trouble (expressions)
nom masculin
(de troubler)
Point de trouble, température d'une huile de pétrole, refroidie dans des conditions normalisées, à laquelle les cires, paraffines ou autres matières commencent à se solidifier ou à se séparer de la solution.
● trouble (synonymes)
nom masculin
(de troubler)
État d'agitation, d'inquiétude, de confusion ou d'émotion dans lequel se...
Synonymes :
- désarroi
Perturbation dans l'accomplissement d'une fonction physique ou psychique, pouvant se...
Synonymes :
- dérèglement
Altération des rapports entre les personnes ; état d'agitation, de désarroi
Synonymes :
- désaccord
- désordre
- discorde
- ébullition
- tension
- zizanie
● truble ou trouble
nom féminin
(latin trublium, écuelle, avec l'influence du latin trulla, truelle)
Petit filet, emmanché ou non, en forme de poche.
● truble ou trouble (synonymes)
nom féminin
(latin trublium, écuelle, avec l'influence du latin trulla, truelle)
Petit filet, emmanché ou non, en forme de poche.
Synonymes :
- bignon
n. m.
d1./d état de ce qui est troublé, contraire à la paix, à l'ordre; confusion, agitation désordonnée. Semer le trouble dans les esprits.
d2./d Mésintelligence, dissension. Porter le trouble dans un ménage.
d3./d état d'inquiétude, d'agitation de l'esprit, du coeur. Le trouble se lisait sur son visage.
|| Spécial. émotion suscitée par l'amour, le désir.
d4./d (Plur.) Désordre, anomalie dans le fonctionnement d'un organe, dans le comportement. Troubles respiratoires.
d5./d (Plur.) Agitation, dissensions civiles et politiques. Une période de troubles. Fauteur de troubles.
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adj.
d1./d Qui manque de limpidité, de transparence. Vin trouble. Verre trouble.
|| Loc. fig. Pêcher en eau trouble: V. eau.
d2./d Flou, que l'on ne distingue pas nettement. Image, film trouble.
|| Par méton. Avoir la vue trouble ou, adv., voir trouble: ne pas voir nettement.
d3./d Fig. équivoque, qui manque de clarté. Sentiments, motivations troubles.
|| Péjor. Louche, suspect. Conduite trouble.
I.
⇒TROUBLE1, adj.
A. — [En parlant d'un milieu physique]
1. [En parlant d'un liquide] Qui n'est pas limpide, transparent, qui contient en suspension des particules, des impuretés. Boisson, bouillon trouble; eau trouble des fossés. Extrait aqueux de quinquina. Il a une couleur chocolat claire et une consistance un peu molle (...) sa solution est trouble et rouge-brune, assez semblable à une décoction (KAPELER, CAVENTOU, Manuel pharm. et drog., t. 2, 1821, p. 605). [Le Mississipi] y reçoit ses principaux affluents, d'abord les eaux formidables du Missouri (...) dont les eaux sont si pures que dix-lieues après leur jonction on les distingue encore des eaux vaseuses, troubles, terreuses, jaunies du Mississipi (CENDRARS, Or, 1925, p. 39).
— En partic. [En parlant du vin, de la bière] Qui présente un état de non-limpidité provoqué par une erreur dans la fabrication (mauvaises conditions de température, d'aération, de fermentation, le plus souvent). En même temps que l'aloyau, on servit du bourgogne. Il était trouble. Bouvard, attribuant cet accident au rinçage de la bouteille, en fit goûter trois autres sans plus de succès (FLAUB., Bouvard, t. 1, 1880, p. 48).
— Loc. fig. En eau trouble. Dans une/des situation(s) à caractère douteux. Lille manquait de tout. On exploitait effrontément. À ces « réguliers » se mêlaient une lie (...) de spéculateurs (...) tous ceux, toutes celles qui s'enrichissent en eau trouble, et que leur hardiesse, leur habitude de vivre en marge des lois, rendaient particulièrement aptes aux « affaires » de ces temps perturbés (VAN DER MEERSCH, Invas. 14, 1935, p. 83).
♦ Nager en eau trouble. Pêcher en eau trouble. V. pêcher2.
2. [En parlant d'un corps transparent] Qui n'est plus transparent parce que sali. La cantinière dormait (...) devant sa petite table chargée de bouteilles vides et de verres troubles (A. DAUDET, Contes lundi, 1873, p. 174). Berthe, assise auprès d'Hortense [dans l'omnibus], regardait à travers la vitre trouble passer des rues presque oubliées (CHARDONNE, Épithal., 1929, p. 37).
3. [En parlant de l'œil] Dont la couleur n'est pas bien définie, qui manque de netteté. Le roi (...) n'avait pas l'air bien triste (...) de jolis yeux un peu troubles et dans le regard quelque chose d'irrésolu (A. DAUDET, Rois en exil, 1879, p. 93).
— P. méton.
♦ [En parlant du regard] Qui est vague, peu expressif et, au fig., qui manque de franchise, cache des intentions équivoques. Le blessé (...) ouvrit (...) les yeux, jeta devant lui des regards troubles, hagards (MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, Hautot, 1889, p. 259). Sa figure est presque jolie, sous des cheveux blonds coupés en frange, mais son trouble regard mauve, errant, sournois, lit la neurasthénie aiguë, presque la démence (COLETTE, Vagab., 1910, p. 255).
♦ [En parlant de la vue] Qui n'est pas net, qui ne permet pas de voir distinctement. Synon. brouillé. Ce matin, ma vue est tellement trouble, si brouillardeuse, que j'ai toutes les peines du monde à écrire ce mot (GONCOURT, Journal, 1889, p. 991).
Empl. adv. Voir trouble. Avoir la vue brouillée, ne pas voir distinctement. J'ai commencé par voir tout bleu, puis j'ai vu trouble; au bout de cinq minutes, je ne voyais plus du tout (FROMENTIN, Été Sahara, 1857, p. 194).
4. [En parlant d'un élément naturel, climatique] Qui a perdu sa clarté, sa luminosité; qui est gris et nuageux. Temps trouble (vieilli). 2 octobre. Le temps fuit. Le ciel trouble s'emplit déjà d'hiver (GIDE, Journal, 1905, p. 178). Il n'y avait pas de houle. Le ciel était bas, l'atmosphère trouble, nébuleuse, les nuées de plomb chargées d'éclairs de chaleur, l'eau d'étain (CENDRARS, Lotiss. ciel, 1949, p. 246).
5. [En parlant d'une source lumineuse] Qui manque d'éclat, de luminosité. La petite lampe du plafond versait une lueur trouble (CARCO, Équipe, 1919, p. 68).
6. [En parlant d'une couleur] Qui manque de netteté. Elles sont tantôt grises et tantôt mauves, tes prunelles. Une couleur trouble, pas franche (MARTIN DU G., Thib., Belle sais., 1923, p. 971).
B. — Au fig.
1. [En parlant d'une situation, d'une affaire] Qui comporte des éléments cachés, suspects. Synon. louche1. Je l'ai beaucoup intéressé [Gourmont], en lui racontant le mécanisme des affaires (...) la sorte d'affaires risquées, troubles, qu'il y aurait à faire avec certains dossiers Langlois (LÉAUTAUD, Journal littér., 1, 1906, p. 270). J'ai voulu l'aimer comme un père et j'en ai été amoureux. Nos bonnes actions sont souvent plus troubles que nos péchés (AYMÉ, Vogue, 1944, p. 86).
2. [En parlant d'une pers., de son caractère] Qui est difficile à cerner, à définir, et qui apparaît comme louche. De son côté, son beau-frère Coleridge, esprit désordonné, bizarre et trouble, s'abîmait dans le gouffre de la métaphysique allemande (BOURGET, Ét. angl., 1888, p. 163). Des individus troubles et patibulaires, prêts à toutes besognes, dont on ne sait jamais s'ils émargent à la police ou au crime (ARNOUX, Juif Errant, 1931, p. 26).
3. [En parlant d'un sentiment] Qui manque de pureté; qui est ambigu, qui contient des éléments plus ou moins avouables. Synon. équivoque. Joie, désir, pensée trouble. De ce jour, nos promenades par les bois et les rochers devinrent des promenades à trois. Je goûtai le plaisir un peu trouble de suivre chez Lucie le progrès de son désir pour Lando (ABELLIO, Pacifiques, 1946, p. 205).
Prononc. et Orth.:[]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. a) Déb. XIIe s. truble « se dit d'un liquide qui n'est pas limpide » (St Brendan, éd. E. G. R. Waters, 646); b) 1580 cristal trouble (B. PALISSY, Disc. admir., p. 363); 2. a) 1376 le tans est trouble « brumeux, nuageux » (Modus et Ratio, éd. G. Tilander, 70, 17); b) ca 1450-65 id. fig. (CHARLES D'ORLÉANS, Rondel de Jehan Caillau, éd. P. Champion, t. 2, p. 306); c) 1539 voir trouble « ne pas voir distinctement » (CALVIN, Institution chrétienne, éd. J. D. Benoît, L. II, chap. VIII, 4, p. 136); d) 1665 avoir la vue trouble « confuse, indistincte » (MOLIÈRE, Dom Juan, II, 1). B. 1. 1150-70 « troublé, confus, inquiet (de l'esprit) » (Jeu Adam, éd. W. Noomen, 842); 2. 1283 « qui n'est pas clair, que l'esprit ne peut appréhender avec netteté ou certitude » (PHILIPPE DE BEAUMANOIR, Coutumes Beauvaisis, éd. A. Salmon, 1675, p. 358, var. ms. E, G, H, J, K: (paroles) troubles); 3. 1579 lieu trouble (LARIVEY, Jaloux, éd. Viollet-le-Duc, II, 6). Mot issu apr. métathèse du -r du lat. pop. turbulus (cf. le lat. turbulare > fr. troubler, le roum. turbure et des formes dial. ital.), réfection du lat. turbidus « troublé, agité, bouleversé, désemparé », d'apr. turbulentus « agité, en désordre », « turbulent, remuant, facétieux ». Fréq. abs. littér.:924. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 1 375, b) 1 111; XXe s.: a) 1 413, b) 1 306.
II.
⇒TROUBLE2, subst. masc.
I. — [À propos d'un milieu physique]
A. — [À propos d'un liquide]
1. État de non-limpidité, de non-transparence d'un liquide, dû à la présence de particules ou d'impuretés en suspension. Dans des tubes de verre, on introduit 1 cm3 d'aniline et 0,1 puis 0,2, etc. cm3 d'essence (...). On laisse descendre la température et on note celle correspondant à l'apparition d'un trouble intense dans chaque tube (CHARTROU, Pétroles natur. et artif., 1931, p. 109).
— En partic. État de non-limpidité d'une boisson (vin, bière) provoqué par une erreur dans la fabrication (mauvaises conditions de température, d'aération, de fermentation, le plus souvent). Le trouble d'empois peut (...) se manifester dans la bière (...) à la suite de lavages des drêches à l'eau trop chaude qui gélatinisent l'amidon restant dans les bouts durs [d'orge] (BOULLANGER, Malt., brass., 1934, p. 553).
— HYDROL., au plur. Ensemble des matériaux fins (limons, argiles, sables) transportés en suspension dans les eaux (d'apr. Géomorphol. 1979). Notre Rhône (...) avançant son barrage alluvionnaire, enlisant les épaves glaciaires, ou marécageuses, bondissant ou déposant ses troubles (ARNOUX, Rhône, 1944, p. 19).
— PÉTROL. Point de trouble. ,,Température d'une huile de pétrole refroidie dans des conditions normalisées, à laquelle les cires, paraffines ou autres matières commencent à se solidifier ou à se séparer de la solution`` (GDEL).
2. État d'agitation d'une masse d'eau dont l'équilibre est perturbé par des causes physiques. Mais les mers au fond desquelles elle s'est déposée [la craie blanche] devaient être exemptes de trouble (LAPPARENT, Abr. géol., 1886, p. 310).
B. — [À propos d'un corps transparent] État de non-transparence provoqué par des salissures. Au café, sur la terrasse du casino (...). Contre le vitrage, à travers la crasse et le trouble des vitres, des femmes en noir et des bourgeois, qui font des ombres chinoises ridicules (GONCOURT, Journal, 1866, p. 272).
C. — Rare. État de l'atmosphère qui a perdu sa clarté, sa luminosité, et qui présente un aspect gris et nuageux. La cabane landaise est faite en lauriers verts Et en feuillages secs. On s'y met à couvert. C'est de là qu'on attire, émigrant vers l'Afrique, Les palombes qui fuient le trouble atmosphérique (JAMMES, Géorgiques, Chants 2, 1911,p. 46).
— MÉTÉOR. Trouble opalescent. ,,Voile bleuâtre qui estompe les objets éloignés quand la visibilité dépasse 20 km`` (GDEL).
II. — [À propos d'un milieu ou d'un état social]
A. — État d'agitation, altération de l'ordre, de l'équilibre qui sévit dans un groupe organisé. Synon. désordre, tumulte. Pays en état de trouble; le trouble s'accentue, règne; il en résulte un grand trouble; apporter, jeter, semer le trouble (dans une assemblée). Une partie du pavé de l'église enfonça avec un grand bruit; les religieuses de Sainte-Marthe crurent que le couvent allait s'abîmer. Le trouble fut extrême, tout le monde criait au tremblement de terre (STENDHAL, Abbesse Castro, 1839, p. 234). À présent, les Belges prennent à la guerre une part peu dispendieuse. (...) le trouble national n'atteint pas de grandes profondeurs (DE GAULLE, Mém. guerre, 1959, p. 120).
— En partic. Altération des rapports entre personnes d'une même famille. Jeter, mettre le trouble (dans une famille); être un élément, un sujet de trouble. Vous avez vu mon mari: il est sorti pour ne pas rester auprès de vous devant moi. Ah! ne dites rien. Je sais bien qu'il pense à vous, qu'il pense à vous plus qu'à moi. Que venez-vous faire ici? Apporter le trouble dans notre ménage? Allez-vous en! (DANIEL-ROPS, Mort, 1934, p. 137).
B. — Au plur. Ensemble des faits et des actes violents ou séditieux qui, dans une société, expriment une vive opposition sociale, politique, religieuse. Synon. agitation, désordre, émeute, manifestation, révolte. Troubles sociaux, politiques, religieux; troubles sanglants; réprimer des troubles; période, temps de troubles. La bourgeoisie et le peuple firent la Révolution française, et, après dix ans de troubles, établirent un régime démocratique et égalitaire (TAINE, Philos. art, t. 1, 1865, p. 94). La Résidence générale (...) a justifié par les troubles de ces jours derniers les mesures administratives ainsi prises à l'égard de M. Bourguiba (Le Monde, 19 janv. 1952, p. 1, col. 4-5). Fauteur de troubles.
III. — [À propos d'une pers.]
A. — PATHOL., souvent au plur. Dérèglement d'ordre physiologique ou psychique qui entraîne des perturbations dans le fonctionnement normal du corps humain. Troubles aphasiques, cardiaques, circulatoires, intestinaux, moteurs, nerveux, organiques, psychiques, pulmonaires, respiratoires, trophiques, urinaires, viscéraux, visuels; troubles de la mémoire, de la grossesse, de la personnalité, de la parole, de l'équilibre, de la vue, de la voix, du caractère, du comportement, du langage. Les troubles digestifs, surtout la constipation, provoquent souvent des recrudescences non douteuses (CODET, Psychiatrie, 1926, p. 128). Le diabète insipide peut d'ailleurs tenir à un trouble fonctionnel de l'appareil rénal lui-même (BARIÉTY, COURY, Hist. méd., 1963, p. 768).
B. — État d'égarement, de confusion, d'angoisse qui altère le fonctionnement normal des facultés mentales. J'ai peur (...) des spasmes de mon esprit qui s'affole (...). J'ai peur des murs, des meubles, des objets familiers (...). J'ai peur surtout du trouble horrible de ma pensée, de ma raison qui m'échappe brouillée, dispersée par une mystérieuse et invisible angoisse (MAUPASS., Contes et nouv., t. 2, Lui? 1883, p. 853). Quelles que soient les causes de l'impuissance mentale, certainement l'idée que l'on s'en fait devient aussitôt le principal de la maladie. Toute maladie est guettée par le malade. (...) rien n'est aussi terrible que le trouble de l'esprit, car il répond toujours à l'attente (ALAIN, Propos, 1921, p. 242).
C. — 1. État émotif qui altère, perturbe le calme intérieur d'une personne. Trouble confus, durable, extraordinaire, extrême, intense, inexprimable, moral, poignant, singulier; jeter qqn dans le trouble; porter, mettre le trouble dans le cœur, l'âme de qqn; éprouver, ressentir un grand trouble; apaiser, cacher, calmer, chasser, dissiper, dominer, surmonter son trouble. En approchant de la maison, un trouble bizarre me saisit. Je m'arrêtai. On n'entendait rien. Il n'y avait pas dans les feuilles un souffle d'air. « Qu'est-ce que j'ai donc? » pensai-je. Depuis dix ans je rentrais ainsi sans que jamais la moindre inquiétude m'eût effleuré (MAUPASS., Contes et nouv., Qui sait? 1890, p. 1189). Ce désir frivole le poursuivit et ne lui laissa plus de repos. Dans ses études, dans ses méditations, dans ses prières (...) il en était obsédé. Après quelques jours consumés dans un trouble affreux, il exposa ce cas extraordinaire au général de l'ordre (A. FRANCE, Dieux ont soif, 1912, p. 183).
— En partic. Émotion diffuse provoquée par un sentiment d'amour ou un désir charnel. Trouble du cœur, de l'amour, des sens; trouble charnel, physique, sensuel. La seule pensée de la revoir m'agitait d'un trouble exquis et profond; le contact de sa main dans ma main était pour moi un tel délice que je n'en avais point imaginé de semblable auparavant, son sourire me versait dans les yeux une allégresse folle (MAUPASS., Contes et nouv., Tombe, 1884, p. 966). Le trouble sexuel qui faisait pénétrer dans tous ses muscles la vue de l'admirable corps penché vers lui, peu à peu, lui interdisait de raisonner (DANIEL-ROPS, Mort, 1934, p. 218).
2. État émotif violent qui perturbe une personne et lui fait perdre son assurance, ses moyens. Synon. désarroi. Se remettre de son trouble; profiter du trouble de qqn. Pierre (...) était devenu très rouge. Il avait bien compris, tout de suite. Son étonnement cachait surtout une confusion, un trouble inexprimable, l'angoisse d'un animal traqué qui cherche une issue pour s'enfuir (VAN DER MEERSCH, Invas. 14, 1935, p. 261).
— P. méton. Réaction physique qui révèle cet état (rougeur, pâleur, regard affolé). Trouble de la parole, de la physionomie. Madeleine avait les yeux baissés sur sa broderie, qu'elle piquait un peu au hasard de son aiguille. Elle avait complètement changé de visage, d'allure (...). « Comprenez-moi bien, reprit-elle avec un léger trouble dans la voix. Il y a pour tout le monde (...) un moment difficile pendant lequel on doute de soi, quand ce n'est pas des autres (...) » (FROMENTIN, Dominique, 1863, p. 192).
D. — DR. CIVIL. Atteinte portée par un tiers à l'exercice d'un droit sur une chose (d'apr. CAP. 1936). Troubles de la possession, de la jouissance. Le trouble est dit de droit, lorsque le tiers se présente lui-même comme titulaire d'un droit sur la chose (ex.: réclamation d'un droit de servitude contre l'acquéreur); il est dit de fait dans les autres cas (ex.: usurpation de l'immeuble par un tiers) (CAP. 1936).
♦ Troubles (du voisinage). ,,Trouble de jouissance apporté par une industrie ou un particulier`` (BARR. 1974). Si les bruits, les odeurs, les lumières... sont anormaux et entraînent une gêne importante pour les voisins, ceux-ci peuvent les faire constater et demander des dommages et intérêts à l'auteur de ce trouble (BARR. 1974).
Prononc. et Orth.:[]. Att. ds Ac. dep. 1718. Étymol. et Hist. A. 1. 1262 « confusion, désordre » (JEAN LE MARCHAND, Miracles N.D. Chartres, éd. P. Kunstmann, p. 185); 1360-70 tourble du tampz « mauvais temps » (Baudoin de Sebourc, X, 566 ds T.-L.); 1468 plur. « soulèvements, désordres civils » (Lettres de Louis XI, III, 198, 199 ds BARTZSCH, p. 151); 2. 1283 dr. tourble dessaisine « atteinte à l'exercice d'un droit sur une chose » (PHILIPPE DE BEAUMANOIR, Coutumes Beauvaisis, éd. A. Salmon, chap. VI,206, p. 103); 3. 1832 « état d'un milieu dont la limpidité est altérée » (RAYMOND); 1845-46 subst. masc. plur. « ensemble de matériaux fins transportés en suspension dans les eaux et qui en altèrent la transparence » (BESCH.); 1959 point de trouble (DUVAL). B. 1. Fin XIIe s. torbes « inquiétude, agitation de l'esprit » (Trad. des serm. de S. Bern., éd. W. Foerster, 87, 5 ds GDF. Compl.); ca 1450-65 « altération des facultés intellectuelles, de la raison » (VILLON, Le Lais Villon, éd. J. Rychner et A. Henry, XXXVII, 293); 1567 « état d'agitation, d'égarement » (AMYOT, Nicias, 39 ds LITTRÉ); 2. 1678 « état, attitude de celui qui manifeste son émotion » (Mme DE LAFAYETTE, Princesse de Clèves, éd. Cazes, p. 23); 1761 « émotion tendre, désir amoureux » (ROUSSEAU, La Nouvelle Héloïse, t 2, p. 753). C. 1842 méd. « modification pathologique des activités de l'organisme » (BALZAC, A. Savarus, p. 36); 1877 trouble psychique (Dr DALLY, De l'état et du délire malicieux, in Annales médico-psychol., II, p. 356 ds QUEM. DDL t. 29); 1880 troubles nerveux, trouble trophique (CADET DE GASSICOURT, Mal. enf., p. 74 et 84); 1901 trouble mental (Dr NICOULAU, c.r., in Annales médico-psychol., II, p. 324 ds QUEM. DDL t. 29). Déverbal de troubler. Fréq. abs. littér.:3 974. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 5 865, b) 4 882; XXe s.: a) 6 078, b) 5 628.
III.
⇒TRUBLE, TROUBLE3, subst. fém.
A. — PÊCHE. Petit filet de pêche en forme de poche, monté sur un cerceau, muni parfois d'un manche, et qu'utilisent aussi les pisciculteurs pour retirer les poissons des viviers. Truble à crevettes; truble de pisciculteur; pêcher à la truble. À l'île de Ré, les femmes et les filles pêchent, entre les roches et dans les herbiers, de grosses chevrettes avec une espèce de truble qu'elles nomment treille ou trulot (BAUDR. Pêches 1827). On y voyait aussi, contre la porte de la grange, une grande trouble à pêcher (ERCKM.-CHATR., Ami Fritz, 1864, p. 45).
B. — Vieilli. Filet à papillons. C'était un de ces beaux phalènes qui, le soir, au dernier crépuscule, s'élancent de fleur en fleur et qu'enfant avec ma « trouble » à papillons je n'arrivais pas à saisir (BARRÈS, Cahiers, t. 7, 1908, p. 64).
REM. Troubleau, subst. masc. Petit truble. [L'outillage] de mon fils est plus considérable; c'est d'abord un troubleau, sorte de sac en forte toile, monté sur un cercle de fer et armé d'un manche très-résistant, car cet instrument fait un rude travail (SAND, Impress. et souv., 1873, p. 350).
Prononc. et Orth.:[], []. Ac. 1718: trouble; 1762, 1798: truble; dep. 1835: trouble ou truble (id. ds LITTRÉ (truble est ,,meilleur``)), Lar. Lang. fr., ROB. 1985. Selon LITTRÉ et ROB. 1985: ,,Ce mot est parfois employé à tort au masculin``. Étymol. et Hist. 1. 1160-74 plur. trubles « sorte de pelle » (WACE, Rou, éd. A. J. Holden, II, 3540), répandu dans les dial. norm. comme subst. masc. (FEW t. 13, 2, p. 342b); 2. « filet à poissons [sorte d'épuisette emmanchée à une perche] » a) 1260 plur. trubles (ETIENNE BOILEAU, Métiers, éd. G. B. Depping, p. 262); b) XIIIe-XIVe s. masc. sing. pescheir au truble fig. « ne rien faire d'utile » [cette pêche ne rapportant que peu, v. G. TILANDER, Lex. Renart, 1924, s.v. loche] (Renart, éd. E. Martin, XIV, 450, leçon ms. C, t. 3, p. 520); c) 1269-78 fém. sing. prendre a la trible (JEAN DE MEUN, Rose, éd. F. Lecoy, 13974); 1298, sept. pescier a la truvle (Chartes de Joinville, éd. N. de Wailly ds Bibl. Éc. Chartes, 6e série, t. 3, 1867, p. 597); 1704 trouble (Trév.). Truble, de genre masc. ou fém., est prob. issu du gr. de Marseille subst. neutre, et fém. « bol, écuelle, assiette ». Le lat. trublium « id. » (empr. au gr.) ne peut en effet expliquer le vocalisme du fr.; en revanche, le caractère du mot fr. (techn. du pressoir, de la pêche) est tout à fait compatible avec l'hyp. d'un empr. dir. au gr. Du point de vue phonét., le traitement du gr. « myrte » passé dans l'a. prov. murta (FEW t. 6, 2, p. 316b) postulant un , permet de déduire que le gr. [], long ou bref, passant dans le domaine gallo-rom., a connu la même évol. que le lat. . La forme a. fr. trible peut s'expliquer à partir de truble p. dissim. entre ü et la cons. labiale suiv. La forme trouble (cf. trubleau, troubleau), peut-être p. infl. de troubler; FEW t. 13, 2, p. 343a et b.
1. trouble [tʀubl] adj.
ÉTYM. XIIe, var. torble; du lat. turbulus, altér. du lat. class. turbidus « agité », et de turbulentus. → Turbulent.
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A Concret.
1 Se dit d'un liquide qui n'est pas limpide, qui contient des particules en suspension (⇒ Boueux, bourbeux, fangeux, vaseux). || Eau trouble (→ Fenêtre, cit. 6), d'un bleu trouble (→ Plancton, cit.). || Rendre trouble. ⇒ Troubler. || Vin trouble. ⇒ 1. Louche, louchir.
1 (…) ce blanc laiteux à peine bleuâtre, un peu trouble, qu'ont les eaux de riz.
Huysmans, Là-bas, VII.
♦ ☑ Loc. Pêcher (2. Pêcher, cit. 12 et 13) en eau trouble; pêcheur en eau trouble.
♦ Par analogie :
2 Il y a des rêveurs en eau trouble. Ils s'émerveillent de l'eau noire du fossé, de l'eau travaillée par les bulles, de l'eau qui montre des veines dans sa substance, qui soulève comme d'elle-même un remous de vase.
G. Bachelard, l'Eau et les Rêves, p. 190.
2 Dont la transparence est altérée ou insuffisante. || Verre un peu trouble (→ Couvert, cit. 15). || Des vitres troubles (→ Imaginer, cit. 7).
3 Qui n'est pas net; qui ne se voit pas nettement. || Lueur trouble (→ Dénaturer, cit. 5). || Images troubles vues à travers un verre dépoli. — Vieilli. || Le temps est trouble, nuageux, brumeux.
4 (1655, Molière). Par métonymie. || Avoir la vue trouble : voir des images troubles (par altération de la vision, pour une cause occasionnelle). || Regard trouble. — Par métaphore. || Voir trouble : avoir une vision indécise, imprécise des choses.
B Fig.
1 Vx. Qui n'est pas clair, que l'esprit ne peut appréhender avec certitude ou netteté. ⇒ Complexe, compliqué, confus, nébuleux, nuageux, obscur.
3 Ils ne veulent pas (les philosophes) faire profession expresse d'ignorance et d'imbécillité (faiblesse) de la raison humaine, pour ne faire peur aux enfants; mais ils nous la découvrent assez sous l'apparence d'une science trouble et inconstante.
Montaigne, Essais, II, XII.
♦ Mod. (par métaphore du sens propre). || Souvenirs (2. Souvenir, cit. 4) brumeux et troubles, vagues, incertains. || Une affaire trouble, qui contient des éléments cachés, suspects.
2 (Av. 1782, d'Alembert). Fig. (avec infl. du v. troubler). Qui contient des éléments obscurs, plus ou moins inavouables ou menaçants (→ Hésitant, cit. 5). || Conscience trouble. || Désirs troubles (→ Avilir, cit. 20). || Une trouble méfiance (cit. 4).
4 Nos bonnes actions sont souvent plus troubles que nos péchés.
5 (…) une période absolument trouble, équivoque, au cours de laquelle les événements se succédèrent dans un rythme qui n'était plus du tout celui de la vie ordinaire.
Céline, Voyage au bout de la nuit, p. 389.
♦ Poét. || « Malade et morfondu, l'esprit fiévreux et trouble » (→ Exaspérer, cit. 18, Baudelaire).
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HOM. 2. et 3. Trouble. — Formes du v. troubler.
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2. trouble [tʀubl] n. m.
ÉTYM. 1283, tourble, Beaumanoir, au sens 2; de troubler.
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♦ Action de troubler; son résultat.
1 Littér. État de ce qui cesse d'être en ordre, en équilibre; agitation confuse qui en résulte. ⇒ Agitation, bouleversement, confusion, désordre, remue-ménage, tumulte, et, (par métaphore), orage, ouragan, tempête, tourmente. || Des jours passés dans l'agitation et le trouble (→ Fortune, cit. 18). || Profiter du trouble, du tumulte, de l'encombrement (cit. 2). || Le trouble qui règne dans l'État (⇒ Anarchie), dans une famille (⇒ Désunion, mésintelligence…). || Jeter (cit. 28), porter, semer le trouble. || Être en proie au trouble et au désordre. — Vx. || En trouble. ⇒ Troublé. — Le trouble, l'agitation du monde (⇒ Bruit, tumulte).
♦ (Vx, sauf dans des phrases de sens négatif). État de ce qui est troublé (3.). || Bonheur sans trouble (⇒ Nuage).
♦ Cour. (au plur.). Ensemble d'événements caractérisés par le désordre, l'agitation. Spécialt. Opposition plus ou moins violente d'un groupe à l'intérieur d'une société. ⇒ Désordre (4.), émeute, insurrection, manifestation, mutinerie (cit. 2), révolte, révolution, soulèvement. || Troubles sanglants (→ 2. Fratricide, cit. 4). || Troubles intestins (→ Affliger, cit. 5). — Troubles politiques, sociaux, économiques (→ Crise, cit. 13). || Des troubles avaient éclaté dans le pays. — Fauteur (cit. 2) de troubles, semeur (cit. 3) de discordes… ⇒ Agitateur, brandon (de discorde), excitateur, trublion. || Susciter, réprimer des troubles.
1 Des vols, d'autres crimes ordinaires, des pillages de gens affamés, des meurtres d'accapareurs, des justices irrégulières sur les ennemis du peuple, la résistance à leurs complots, la résistance légale, la résistance à main armée (…) Tout cela sous le mot troubles (…) Voulait-on y appliquer une répression égale ? Si l'on chargeait l'autorité royale de réprimer les troubles, le plus grand pour elle, à coup sûr, c'était d'avoir pris la Bastille, elle aurait puni celui-là d'abord.
Michelet, Hist. de la Révolution franç., II, III.
2 (V. 1360, Froissart). Dr. Atteinte à l'exercice d'un droit sur une chose. || Trouble de la possession, de la jouissance. || Trouble de droit, provenant d'un tiers qui prétend être titulaire d'un droit sur la chose (réclamation d'un droit, etc.). || Trouble de fait (par usurpation, etc.). || L'année du trouble (→ Possessoire, cit. 2).
2 Le bailleur n'est pas tenu de garantir le preneur du trouble que des tiers apportent par voies de fait à sa jouissance (…)
Code civil, art. 1725.
2.1 Mme de la Lussardière a envoyé au gérant une lettre fulminante : « Ce n'est pas parce qu'un certain Blot (…) a gagné je ne sais quel concours, que la vie privée des habitants de cet immeuble doit en être bouleversée. » Elle va jusqu'à parler de troubles de jouissance (…)
Pierre Daninos, Un certain Monsieur Blot, p. 182.
3 (1876, Larousse). État d'un milieu dont la limpidité est altérée (→ 1. Trouble, 1.). || Le trouble d'un liquide, de l'huile.
2.2 Martin vit la scène à travers un écran de trouble, des silhouettes tordues et obscures s'agitant devant lui comme des gnomes.
J.-M. G. Le Clézio, la Fièvre, p. 169 (1965).
1 (1559, Amyot). Littér. Perte de la lucidité; état anormal d'agitation qui altère le fonctionnement normal des « facultés » mentales. || Trouble de l'esprit. ⇒ Aberration, aliénation, aveuglement, confusion, délire, déséquilibre, désordre, égarement, folie. || Le trouble horrible de ma pensée (→ Raison, cit. 28). — REM. Dans cet emploi, qui mêle les sens d' « agitation » et d' « aveuglement de l'esprit » (→ Troubler), trouble est vague et plus littéraire que ses synonymes.
3 Ce sont des gens (…) dont je me sers (…) pour pacifier avec leur harmonie les troubles de l'esprit.
Molière, l'Amour médecin, III, 7.
4 Il était dans cet état d'étonnement et de trouble inquiet où tombe l'âme qui vient d'obtenir ce qu'elle a longtemps désiré.
Stendhal, le Rouge et le Noir, I, XV.
5 Tout était encore confus et se heurtait dans son cerveau; le trouble y était tel qu'il ne voyait distinctement la forme d'aucune idée (…)
Hugo, les Misérables, I, VII, III.
2 (XVIe). Cour. État affectif pénible, fait d'angoisse et d'une activité mentale excessive, incontrôlée (⇒ Agitation, effervescence, émotion, excitation, fièvre, inquiétude). || La peur (cit. 2) est un trouble de l'âme. || Un trouble mêlé de désirs et de craintes (cit. 6). || Éprouver, ressentir un trouble (→ Innover, cit. 6; insensible, cit. 13). ⇒ Émoi, émotion. || Un trouble extrême (⇒ Affolement), mêlé d'angoisse (⇒ Désarroi, détresse, effroi), d'inquiétude. || Le trouble de la pitié. ⇒ Attendrissement, émotion. || Trouble moral, intellectuel. ⇒ Embarras, indécision, perplexité. || « Jamais un trouble égal n'a confondu mon âme » (→ Esprit, cit. 71). || « Un trouble s'éleva (cit. 49) dans mon âme éperdue ». || « Un trouble assez cruel m'agite et me dévore » (→ Déchirer, cit. 15). || Jeter un trouble, le trouble en qqn. ⇒ Bouleverser (cit. 8). — Apaiser, dissiper le trouble de qqn. || Remettez (cit. 22)-vous de votre trouble. || Dominer son trouble (→ Blanc, cit. 13). || Sans inquiétude et sans trouble (→ Amortir, cit. 5; jaillir, cit. 17).
6 Vous avez vu depuis les troubles de mon âme (…)
Corneille, Horace, I, 2.
7 L'idée de la mort provoquait chez elle ce trouble qui est un des signes de la jeunesse du cœur; ce n'était pas l'amour de la vie qui lui manquait, mais le don d'accepter sans murmure une vie qui différait de toutes les vies humaines et qui était la sienne.
J. Green, Léviathan, II, II.
♦ Le trouble : l'état, l'attitude de celui qui manifeste son émotion, son angoisse (rougeur, tremblements, altération de la voix, décomposition des traits, etc.). || Le trouble de la honte. || Écouter des reproches, des injures, sans trouble apparent. ⇒ Sourciller (sans). || Son trouble le trahit.
8 Le trouble des regards, grâce de la décence,
Accompagnait ces mots, forts comme l'innocence (…)
A. de Vigny, Livre mystique, « Éloa », III.
♦ État, attitude de celui qui est troublé, violemment ému et privé de ses moyens. ⇒ Ahurissement, effarement; confusion. || Le trouble et les balbutiements d'un candidat timide.
3 Émotion tendre; désir amoureux. || « Cet air de trouble et de désordre qui est la véritable éloquence (cit. 19) de l'amour ». || Quelque gêne (cit. 11) ou un peu de trouble. || Trouble des sens. || Provoquer un trouble chez qqn. ⇒ Exciter, troubler.
9 Le trouble de l'amour naissant est toujours doux.
Rousseau, Julie ou la Nouvelle Héloïse, Amours de Bomston.
10 À chaque femme son trouble, et la comparaison qu'elle en peut faire avec des troubles différents.
Colette, l'Étoile Vesper, p. 144.
C (XIXe). Méd. Souvent au plur. Modification pathologique des activités de l'organisme ou du comportement physique ou mental de l'être vivant. ⇒ Dérèglement, désordre, désorganisation, perturbation (→ Harmonie, cit. 31, Cl. Bernard). || Troubles physiologiques. || Troubles et lésions d'une maladie (→ Infectieux, cit.). || Troubles gastro-intestinaux (cit). || Troubles de la menstruation, de la grossesse (→ Envie, cit. 36)… || Souffrir d'un trouble. || Troubles de la vision, de la vue (éblouissements, etc.). — Troubles psychiques (→ Interner, cit. 2). || Troubles névrotiques (cit. 2). ⇒ Névrose. || Troubles de la personnalité (→ Encéphalite, cit.). || Symptômes d'un trouble. — Troubles causés par un toxique (⇒ Intoxication), par l'opium, la cocaïne; par l'alcool. || Trouble passager. || Trouble émotif, traumatique.
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CONTR. Accord, apaisement, bonace, calme, coordination, disposition, équilibre, ordre, paix (I.), repos; bonheur. — Acuité, clarté (d'esprit), équilibre. — Apaisement, ataraxie, béatitude, calme (moral), impassibilité, maîtrise (de soi), paix (III.), repos, sang-froid, sérénité, tranquillité. — Froideur, indifférence. — Guérison, santé.
HOM. 1. et 3. Trouble. — Formes du v. troubler.
Encyclopédie Universelle. 2012.