rendre [ rɑ̃dr ] v. tr. <conjug. : 41> I ♦ A ♦ Donner en retour (ce qu'on a reçu ou pris, ou l'équivalent).
1 ♦ Donner en retour (ce qui est dû). Rendre l'argent qu'on a emprunté (⇒ rembourser) , un objet qui a été confié ou remis en dépôt. « Je rends au public ce qu'il m'a prêté » (La Bruyère). Commerçant qui rend la monnaie à un client. — Absolt Ils empruntent mais n'aiment pas rendre. — (Abstrait) S'acquitter de (une dette morale, une obligation, un devoir). Rendre à qqn ce qu'on lui doit. Loc. Rendre à César ce qui est à César : attribuer à qqn ce qui lui appartient, lui donner ce qui lui revient.
♢ Donner (sans idée de restitution). Rendre hommage. Rendre grâce, grâces à... : remercier. Rendre des services, rendre service à qqn, lui apporter une aide. Rendre des comptes, rendre compte. Fig. Se rendre compte. Rendre raison de qqch. Rendre justice. Rendre la justice. Rendre un jugement, un arrêt. ⇒ prononcer.
♢ Sport Devoir (à un adversaire) à cause de sa supériorité. Rendre des points à un adversaire. Cheval qui rend du poids, de la distance à ses concurrents (⇒ handicap) .
2 ♦ Donner en retour (ce qui a été pris ou reçu). ⇒ restituer, rétrocéder. Rendre ce qu'on a pris, volé. Rends-moi mon stylo. — Fig. Rendre la liberté à qqn. Rendre à qqn sa parole, le délier d'un engagement.
♢ Rapporter au vendeur (ce qu'on a acheté). « Vous nous rendez l'article, s'il cesse de vous plaire » (Zola). Cet article soldé ne peut être ni rendu ni échangé.
3 ♦ (Abstrait) Faire recouvrer. « La belle saison ne me rendit pas mes forces » (Rousseau). Rendre le sommeil. « La liberté restaurée lui rendit [à la France] la parole » (Chateaubriand).
♢ Ramener (qqn à ce qu'il a perdu). « L'heure bénie qui allait les rendre au repos » (Michelet). Condamnés rendus à la liberté. — « Rendre le presbytère à sa primitive destination » (Balzac).
4 ♦ Donner (une chose semblable en échange de ce qu'on a reçu). Recevoir un coup et le rendre. ⇒ retourner. Rendre la pareille. « Si Dieu nous a faits à son image, nous le lui avons bien rendu » (Voltaire). Dieu vous le rendra au centuple (remerciement pour une aumône, un don). Rendre à qqn son salut. Rendre un baiser. Rendre une politesse à qqn. Rendre une invitation. — Fig. Rendre à qqn la monnaie de sa pièce. — Rendre visite à qqn.
5 ♦ Rapporter. Vx La ferme rend cent mille francs par an (⇒ rente) . — Mod. Intrans. « Les terres rendent peu » (Romains). « La pêche n'avait jamais autant rendu » (Lamartine) (⇒ rendement) . — Fam. Ça n'a pas rendu : ça n'a pas marché, ça n'a rien donné.
B ♦
1 ♦ Laisser échapper (ce qu'on ne peut garder, retenir). Rendre le sang par la bouche. « J'ai rendu tout ce que j'avais dans l'estomac » (Sartre). ⇒ rejeter. Absolt Avoir envie de rendre. ⇒ vomir. Loc. fam. Rendre tripes et boyaux : vomir avec effort tout le contenu de l'estomac. « La mer bougeait et j'ai commencé à rendre tripes et boyaux » (Beauvoir). — Les légumes ont rendu beaucoup d'eau.
♢ Loc. fig. Rendre gorge. Rendre l'âme, l'esprit, le dernier soupir : mourir.
♢ (XVe) Faire entendre, émettre (un son). « une harpe éolienne, qui rend quelques beaux sons, mais qui n'exécute aucun air » (Joubert).
2 ♦ Céder, livrer. Le commandant a dû rendre la place. Loc. Rendre les armes : se rendre (cf. infra II).
3 ♦ Manège Rendre la bride (ou la main) à un cheval.
C ♦ V. d'état, suivi d'un attribut (du lat. reddere « remettre dans l'état antérieur », puis par ext. « faire passer d'un état à un autre ») Faire devenir. « Ni l'or, ni la grandeur ne nous rendent heureux » ( La Fontaine). « Te mesurer à moi ! qui t'a rendu si vain ? » (P. Corneille). « Rien ne nous rend si grands qu'une grande douleur » (Musset). Il les a rendus fous. — La sentence a été rendue publique.
D ♦ Présenter après interprétation.
1 ♦ (XVIe) Présenter en traduisant. « Ne croyez pas que j'aie rendu ici l'anglais mot pour mot » (Voltaire). « C'est ce sens-là qu'il s'agit de rendre, et c'est en cela surtout que consiste la tâche du traducteur » (Larbaud) .
2 ♦ (1681) Présenter en exprimant par le langage. « Mots humains trop faibles pour rendre des sensations divines » (Balzac).
3 ♦ Exprimer par un moyen plastique ou graphique. ⇒ représenter, reproduire. « Rendre avec vérité les veines, les méplats » (Diderot). « Aussi habiles à rendre la beauté sur la toile que dans le marbre » (Gautier). Détails bien rendus.
II ♦ SE RENDRE v. pron.
1 ♦ (XIIe) Se soumettre, céder. « Il avait bien fallu qu'elle se rendît à l'évidence » (Martin du Gard). Se rendre aux prières, aux raisons, à l'avis de qqn. ⇒ se ranger. Se rendre aux ordres de. ⇒ obéir.
♢ Se soumettre à une force supérieure en abandonnant le combat et en livrant ses armes à l'ennemi (⇒ reddition). « La garde meurt et ne se rend pas », attribué à Cambronne. Mourir plutôt que de se rendre. ⇒ capituler. Se rendre sans condition. — Le forcené s'est rendu. ⇒ se livrer .
2 ♦ (1415) Se transporter, aller. Se rendre d'un endroit à un autre. Se rendre à l'étranger. Se rendre à son travail en métro. ⇒ rendu.
3 ♦ (Suivi d'un attribut) Se faire (tel), devenir par son propre fait. « L'honnête homme cherche à se rendre utile, l'intrigant à se rendre nécessaire » ( Hugo). Vous allez vous rendre malade. Elle s'est rendue insupportable.
⊗ CONTR. Emprunter, prêter; confisquer, garder; absorber, digérer. — Résister.
● rendre verbe transitif (latin populaire rendere, du latin classique reddere) Restituer à quelqu'un ce qui lui appartient ou ce qui lui revient de droit : Rendre à son propriétaire un livre prêté. Les ravisseurs ont rendu leur otage. Renvoyer, rapporter à quelqu'un ce qu'on a reçu de lui et qu'on ne veut ou ne peut garder : Rendre à un commerçant un article défectueux. Donner quelque chose en retour, en échange de ce qu'on a reçu : Rendre la monnaie sur cent francs. Redonner une qualité, une faculté à quelqu'un qui en a été privé : Rendre la vue à un aveugle. Rendre la liberté à un prisonnier. Suivi d'un nom, entre avec le sens de « donner » dans des locutions verbales : Rendre grâce à Dieu. Rendre visite à un ami. Rendre les honneurs à un chef d'État. Donner en retour : Rendre un baiser. Rendre une invitation. Faire revenir quelqu'un à un état antérieur, ramener quelque chose à sa destination première : Rendre une église désaffectée au culte. Familier. Expulser par la bouche ce qui est contenu dans l'estomac : Il a rendu son déjeuner. En parlant d'une denrée, laisser échapper le liquide qu'elle renferme : Des légumes qui rendent beaucoup d'eau à la cuisson. Produire, émettre tel ou tel son : Gong qui rend un son grave. Faire passer quelqu'un, quelque chose à un nouvel état, les faire devenir tels : On l'a rendu responsable de cette gestion. Exprimer par le langage ou représenter par le moyen de l'art ce qu'on pense, ce qu'on ressent : Rendre les nuances de la pensée de l'auteur qu'on traduit. Prononcer, formuler un avis, un jugement, oralement ou par écrit : Rendre une sentence. ● rendre (expressions) verbe transitif (latin populaire rendere, du latin classique reddere) Bien le rendre à quelqu'un, avoir en retour le même sentiment à son égard : Il me déteste, mais je le lui rends bien ; avoir un défaut équivalent à celui de quelqu'un d'autre : Sa sœur est idiote, mais il le lui rend bien. Littéraire. Rendre l'âme, le dernier soupir, mourir. Rendre la main ou la bride, diminuer la tension des rênes, ce qui donne au cheval plus de liberté d'encolure. Rendre du poids, de la distance, en parlant d'un concurrent, porter plus de poids, partir de plus loin qu'un autre. ● rendre (homonymes) verbe transitif (latin populaire rendere, du latin classique reddere) ● rendre (synonymes) verbe transitif (latin populaire rendere, du latin classique reddere) Restituer à quelqu'un ce qui lui appartient ou ce qui...
Contraires :
- donner
- offrir
- prêter
Renvoyer, rapporter à quelqu'un ce qu'on a reçu de lui...
Contraires :
- garder
Redonner une qualité, une faculté à quelqu'un qui en a...
Synonymes :
- redonner
Contraires :
- dépouiller de
- priver
- retirer
Donner en retour
Synonymes :
Produire, émettre tel ou tel son
Synonymes :
- émettre
Exprimer par le langage ou représenter par le moyen de...
Synonymes :
- exprimer
- traduire
Prononcer, formuler un avis, un jugement, oralement ou par écrit
Synonymes :
- énoncer
- formuler
● rendre
verbe intransitif
En parlant d'une terre, d'une culture, d'une activité, produire, rapporter plus ou moins : Cette année, les vignes ont bien rendu.
● rendre (homonymes)
verbe intransitif
● rendre (synonymes)
verbe intransitif
En parlant d'une terre, d'une culture, d'une activité, produire, rapporter...
Synonymes :
- donner
- porter
rendre
v.
aA./a v. tr.
rI./r
d1./d Remettre, restituer à son possesseur. Rendre ce qu'on a emprunté.
— Rendre la monnaie.
d2./d Remettre à la disposition de qqn (ce qu'il a offert, cédé). Rendre un présent. Rendre un article qui ne convient pas.
— Loc. fig. Rendre sa parole à qqn, le dégager d'une promesse.
d3./d Redonner à qqn (ce qu'il avait perdu). Rendre l'espoir à qqn.
d4./d Donner en contrepartie. Rendre une invitation.
d5./d S'acquitter de (certains devoirs). Rendre les honneurs funèbres. Rendre justice à qqn, reconnaître son droit, sa valeur.
d6./d Rendre les armes: capituler.
d7./d Rejeter. Rendre tout ce qu'on a mangé.
|| Fig. Rendre l'âme, le dernier soupir: mourir.
d8./d Produire, donner. Instrument qui rend un son harmonieux.
|| Absol. Avoir un certain rendement. Ce champ rend bien.
rII./r Faire devenir. Le chagrin l'a rendu fou.
rIII/r
d1./d Exprimer, représenter par le moyen du langage, de l'art. Chercher les mots exacts pour rendre sa pensée.
d2./d Traduire. Expression idiomatique impossible à rendre en français.
aB./a v. Pron.
d1./d Aller, se diriger vers. Se rendre à son travail.
d2./d Céder. Se rendre à la raison, à l'évidence.
d3./d S'avouer vaincu. La garnison assiégée s'est rendue.
d4./d Devenir de son propre fait. Se rendre odieux, ridicule.
⇒RENDRE, verbe
I. — Rendre qqn/qqc. à
A. — Rendre qqn1/qqc. à qqn2. (Re)donner ce qui est dû ou attendu.
1. [Qqc. désigne l'obj. d'une restitution]
a) [Qqc. désigne un inanimé concr.] Restituer (à son propriétaire), remettre (à son destinataire). Rendre un livre prêté. Les Espagnols (...) ont toujours eu au fond l'intention de rendre la Louisiane (BAUDRY DES LOZ., Voy. Louisiane, 1802, p. 203). — Que lui voulez-vous, à ce garçon-là? — Je veux lui rendre un livre qu'il m'a prêté (BERTRAND, Gaspard, 1841, p. 60):
• 1. Les bijoux qu'il contenait avaient été volés, puis rendus, mais par qui? « Qu'en penses-tu? » me dit ma mère. Je regardai les bijoux: plusieurs agrafes ornées les unes de pierre, les autres de petites aquarelles: « Je pense que voilà une injure du voleur! Il nous rend nos bijoux parce qu'ils ne valent rien. J'en aurais fait tout autant. (...) »
JACOB, Cornet dés, 1923, p. 96.
♦ Vieilli. Rendre une lettre, un paquet. Porter une lettre, un paquet. Le frère de Jenny qui part à l'instant pour Mayence vous rendra cette lettre (SÉNAC DE MEILHAN, Émigré, 1797, p. 1568).
♦ P. anal. Rendre qqn à qqn. — Vous rendre Alfred, Monsieur Paturot! Mais vous n'y songez pas. Impossible, monsieur, impossible. Jamais, monsieur, jamais. — Mais, monsieur, c'est mon fils (REYBAUD, J. Paturot, 1842, p. 420). Au bout de huit jours, on avait rendu le gamin à son père, parce qu'il avait déjà enseigné des expressions ordurières à M. Joanny (LARBAUD, F. Marquez, 1911, p. 202).
♦ En partic. Rendre la monnaie. Rendre une marchandise, un article. Le rapporter (au vendeur) afin de l'échanger. Mme Guibal expliquait à Mme Marty sa tactique. Quand une robe lui plaisait dans un magasin, elle se la faisait envoyer, en prenait le patron, puis la rendait (ZOLA, Bonh. dames, 1883, p. 639). Rendre un cadeau. Le redonner à celui qui l'a offert. Je murmurai: « J'ai voulu vous rendre votre bague. — J'ai vu, dit-il d'une voix grave. J'ai pensé: je gâche tout (...) » (BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 322). Rendre le livret (aux ouvriers) (au XIXe s.). Les congédier. La compagnie, irritée de l'entêtement des grévistes, parlait de rendre leurs livrets aux mineurs compromis (ZOLA, Germinal, 1885, p. 1362).
♦ Rendre un travail, un ouvrage. Le remettre à la personne qui l'a commandé. Vers 1819, j'ai enseigné l'anglais en vingt-six jours à M. Antonio Clerichetti à Milan (...). Le trentième, il rendit à un libraire sa traduction des interrogatoires de la princesse de Galles (STENDHAL, H. Brulard, t. 2, 1836, p. 102).
♦ JEUX. Rendre des points (à un adversaire). Donner des points d'avance à un adversaire plus faible pour égaliser les chances. M. le préfet Worms-Clavelin était d'une jolie force au billard; mais M. le président Peloux lui rendait des points (A. FRANCE, Orme, 1897, p. 208).
♦ HIPP. Rendre du poids, de la distance. Supporter un handicap (de poids, de distance) permettant à un adversaire plus faible de partir à égalité de chances. Trotteur rendant 25 mètres. Tel cheval peut rendre deux kilos à tel autre dans une épreuve courue assez lentement, mais la prochaine fois, si le train est très sévère, les deux kilos lui pèseront bien plus sur les reins et il ne pourra pas renouveler sa victoire (ZITRONE, Courses, 1962, p. 271).
— Expr. fig.
♦ [P. allus. aux paroles du Christ] Rendre à César ce qui appartient à César. Rétrocéder à quelqu'un. Suivait un paragraphe destiné à rendre à César ce qui était à César (SCHAEFFER, Rech. mus. concr., 1952, p. 71).
♦ Rendre sa parole, sa promesse à qqn. Délier quelqu'un de sa parole, de sa promesse. Dites-lui que je lui rends ses promesses, que moi-même je la prie de se donner au ciel (COTTIN, Mathilde, t. 2, 1805, p. 304). Le Général, s'emportant: — Le polisson! Il me rend sa parole et il m'écrit qu'il part avec sa maîtresse!... (FEYDEAU, Dame Maxim's, 1914, II, 13, p. 55).
b) P. ext.
) [Qqc. désigne un témoignage de respect, de reconnaissance] S'acquitter d'un devoir moral. Rendre hommage, honneur; rendre les derniers hommages (v. hommage), les derniers honneurs (v. honneur), les honneurs militaires, les derniers devoirs (v. devoir2); rendre grâce(s) (v. grâce).
♦ Rendre un culte. Honorer d'un culte. Insensés et criminels sont aussi ceux qui tiennent pour des dieux, des idoles insensibles, façonnées de main d'homme, ou rendent un culte aux animaux (Théol. cath. t. 4, 1 1920, p. 1015). Au fig. Leurs rapines, tournées en science et en stratégie financières, leur avaient asservi ce temps, qui rend un culte au veau d'or (BOURGES, Crépusc. dieux, 1884, p. 336).
) [Qqc. désigne un discours] Faire savoir, prononcer (généralement au nom d'une loi, d'un pouvoir). Rendre une sentence, un témoignage, un verdict. Quelle est donc cette justice qui rend des arrêts comme celui-ci (PROUDHON, Propriété, 1840, p. 181). Laplaigne demande à la Convention, qui rendit immédiatement un décret dans ce sens, l'abolition et l'interdiction de toute substitution (JAURÈS, Ét. soc., 1901, p. 223).
♦ Rendre des oracles. Prononcer des oracles. Dieu chérit de Sion les sacrés tabernacles Plus que les tentes d'Israël; Il y fait sa demeure, il y rend ses oracles (LAMART., Médit., 1820, p. 208). Dans la lutte des générations, enfants et vieillards font souvent cause commune: les uns rendent les oracles, les autres les déchiffrent (SARTRE, Mots, 1964, p. 20).
♦ Empl. pronom. à sens passif. La justice se rend, au nom de l'Empereur, par les officiers qu'il institue (Sénatus-consulte organique, 1804 ds Rec. textes hist., p. 132).
2. [Qqc. désigne un inanimé abstr., obj. d'une perte] Redonner, faire recouvrer. Rendre la santé, la vie à qqn. Elle est déshonorée. Il n'y a qu'un mariage pour lui rendre sa réputation (PAGNOL, Fanny, 1932, I, 2e tabl., 1, p. 64):
• 2. Folly est jeune et piquante, et je sens que je me fais quelque peu vieille depuis notre dernière rencontre. Si vous trouvez votre bonheur à épouser Folly, je suis tout prête à vous rendre votre liberté au prix des plus chères espérances de ma vie.
NODIER, Fée Miettes, 1831, p. 143.
3. [Qqc. désigne une manifestation phys. ou affective] Donner en retour. Dieu de bonté, m'écriai-je, elle m'aime! Elle m'avait rendu mon baiser (MUSSET, Confess. enf. s., 1836, p. 208). Il avait voulu rendre le mal pour le mal. Or, son mal devenait un bien. Il allait rendre le bien pour le bien au plus vite (COCTEAU, Enfants, 1929, p. 142).
— Loc verb.
♦ Rendre (un) service. [Le suj. désigne une pers.] Offrir une aide bénévole. Je veux bien vous rendre service, mais je ne veux pas me ruiner (LAMENNAIS, Paroles croyant, 1834, p. 117). Dire que personne ne veut nous rendre service et accepter que ce soit sans retour: retour d'ordre matériel ou d'ordre sentimental (MONTHERL, Malatesta, 1946, IV, 4, p. 515). [Le suj. désigne un inanimé] Apporter une aide. Les admirables services qu'ont rendus l'éther et le chloroforme (BAUDEL., Paradis artif., 1860, p. 384). S'il est un service que les arts du temps rendent à l'homme ou à la femme, c'est de lui faciliter sa propre découverte (Arts et litt., 1935, p. 88-01).
♦ Rendre (une) visite. Aller voir. Une vieille tradition accorde un enfant à la première femme qui rend visite à une accouchée (MENON, LECOTTÉ, Vill. Fr., 1, 1954, p. 77).
— Expr. fig.
♦ Rendre (à qqn) la monnaie de sa pièce.
♦ Rendre la pareille, rendre bien qqc. à qqn. Traiter quelqu'un comme il a fait lui-même de vous. Un libre penseur respecte la religion de sa femme; mais les femmes ne se croient pas tenues de nous rendre la pareille (MÉNARD, Rêv. païen, 1876, p. 183). Les officiers se méfiaient de leurs troupes indisciplinées qui le leur rendaient bien (LEFEBVRE, Révol. fr., 1963, p. 250).
B. — Rendre qqc.1 à qqc.2 Redonner (ce qui a été perdu, altéré).
— [Qqc.1 et qqc.2 désignent des inanimés concr.] Quand les centaines de générations qui nous suivent auront rendu à la terre cette poignée de poussière qu'elles lui empruntent tour à tour (LAMART., Voy. Orient, t. 2, 1835, p. 35). La nécessité de longues jachères pour rendre au sol ses éléments nutritifs (VIDAL DE LA BL., Tabl. géogr. Fr., 1908, p. 310).
— [Qqc.1 désigne un inanimé concr., qqc.2 un inanimé abstr.] Quand les travaux contraignirent à cloisonner (...) on rendit cette table à la consultation normale (CAIN, Transform. B.N., 1959, p. 55).
— [Qqc.1 désigne un inanimé abstr., qqc.2 un inanimé concr.] Le frottement avec un chiffon de laine suffit pour lui rendre son éclat [au meuble] (NOSBAN, Manuel menuisier, t. 2, 1857, p. 186).
C. — Rendre qqn à qqc. [Qqc. désigne un état antérieur] Faire passer. Qui que vous soyez (...), je vous rends à cette nudité lumineuse que ne ternissent ni les fumées de l'opulence, ni les poisons de l'envieuse pauvreté (PROUDHON, Syst. contrad. écon., t. 1, 1846, p. 33). La mise en non-activité ne rend pas l'officier à la vie civile (LUBRANO-LAVADERA, Législ. et admin. milit., 1954, p. 74).
II. — Rendre qqc.
A. — [Qqc. désigne ce qui ne peut pas être gardé]
1. [Le suj. désigne un animé, ou une partie du corps d'une pers.] Évacuer par les voies naturelles, en partic., vomir. Si je dépassais le moins du monde mon tirant d'eau, disait-il, mon estomac rendait aussitôt le superflu (FAIN, Mém., 1814-25 ds Rec. textes hist., p. 128). Un superbe cheval entier, qui, rendant du sang par la bouche et par les naseaux, étouffait au bord du précipice (CLADEL, Ompdrailles, 1879, p. 155).
— Empl. factitif. On met le pouce sur l'extrêmité G, et on rend l'air peu à peu en soulevant le pouce (LAVOISIER, Chim., t. 1, 1789, p. 46).
♦ EQUIT. Rendre la main.
— P. anal. Rendre l'âme, le dernier soupir, l'esprit. Mourir. La maladie ne dura que onze jours. Alexandre rendit l'esprit le 13 décembre 1825 (CHATEAUBR., Mém., t. 3, 1848, p. 158). J'ai dit « oui » et, là-dessus, le pauvre Sam Watkin a rendu le dernier soupir (DUHAMEL, Suzanne, 1941, p. 114).
— Au fig. Faire rendre gorge.
2. [Le suj. désigne une autorité milit., une armée] Laisser à l'ennemi, livrer ce que l'on ne peut pas garder. Les patriotes comprenaient bien que, si nous avions rendu la place, ce n'était pas de notre faute (ERCKM.-CHATR., Hist. paysan, t. 2, 1870, p. 152).
♦ Rendre les armes. V. arme. Rendre son épée.
3. [Le suj. désigne un inanimé concr.]
a) [En constr. dir. ou indir.] Laisser s'échapper. Rendre de l'eau. Madame Blondel jura que le gigot rendait le sang (HAMP, Champagne, 1909, p. 183):
• 3. ... les matelots pêchaient avec leurs lignes des damiers et des pétrels. On en voyait des rangées, écorchés comme des lapins, qui pendaient tout rouges dans les haubans de misaine, attendant leur tour pour être mangés. Au bout de deux ou trois jours, quand ils avaient rendu toute l'huile de leur corps, on les faisait cuire.
LOTI, Mon frère Yves, 1883, p. 79.
b) Rendre un son. Émettre, produire un son. Ne soyez pas sévère pour celui qui ne fait encore qu'essayer sa lyre: elle rend un son si étrange! (LAUTRÉAM., Chants Maldoror, 1869, p. 160). Une patte de derrière, mieux musclée, frappe le sol qui rend un son assourdi (PERGAUD, De Goupil, 1910, p. 125).
c) Empl. intrans. [Dans un cont. sportif] Renvoyer (une balle, une boule). C'est une partie [de billard] vraiment intéressante. Les billes courent, se frôlent, croisent leurs couleurs. Les bandes rendent bien, le tapis s'échauffe (A. DAUDET, Contes lundi, 1873, p. 15).
B. — [Qqc. désigne l'objet d'une opération intellectuelle, artistique, un concept, un affect]
1. Exprimer fidèlement, clairement. Rendre mot pour mot. Rendre imparfaitement une idée imparfaite, c'est interposer deux écrans opaques entre la vérité et le lecteur ou l'élève (AMIEL, Journal, 1866, p. 225). J'y découvris un passage assez curieux dont je vais vous rendre le sens très exactement (A. FRANCE, P. Nozière, 1899, p. 156).
2. a) Traduire par un mode d'expression artistique. Synon. représenter, reproduire. Le ciel et les lointains sont admirablement rendus (R. des Deux Mondes, t. 2, 1839, p. 102). La musique (...) ne peut rendre que des sentiments et des passions (T. GAUTIER ds La Presse, 9 déc. 1844):
• 4. Le but le plus élevé qu'un chef d'orchestre doive se proposer est donc le suivant: traduire dans une forme sensible, de la façon la plus adéquate, la plus fidèle, la plus parfaite, le contenu, l'essence de l'œuvre qu'il doit rendre.
Arts et litt., 1936, p. 60-12.
b) Traduire, exprimer dans une autre langue. C'est très difficile et plus que je ne croyais, non à comprendre, mais à rendre: ce vieux style allemand à la française résiste tant qu'il peut (NERVAL, Corresp., 1851, p. 172). Cette exégèse indique le sens que lui accorde Commodien. Un troisième passage rend par mysterium le sens de sacrement (Théol. cath. t. 14, 1 1939, p. 492).
— Empl. pronom. à sens passif. L'amour filial du fils d'Opheltes a électrisé celui du fils d'Énée: (...) Remarquez que l'amour filial, celui de la patrie, et même l'amour paternel, se rendent par le mot de pitié (BERN. DE ST-P., Harm. nat., 1814, p. 312).
C. — [Qqc. désigne un gain, un produit attendu] Produire, rapporter. Calculer combien de boisseaux de froment ont rendu les épis (GAUTIER, Rom. momie, 1858, p. 268). [Cette agriculture] couvrait une bonne partie des besoins alimentaires des Allemands qui, loin de la sacrifier, essayaient de lui faire rendre le maximum (LESOURD, GÉRARD, Hist. écon., 1966, p. 407).
— Empl. abs. Un homme qui ne pouvait s'attacher longtemps à une entreprise, même si cela rendait (CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p. 111). Comment peut-on perdre du temps à faire de l'histoire — alors que tant de tâches fécondes, et qui « rendent », requièrent aujourd'hui toutes les énergies (L. FEBVRE, Vers une autre hist., [1949] ds Combats, 1953, p. 421).
III. — Rendre qqn/qqc. + attribut du compl. Faire devenir.
A. — [Le compl. désigne un animé, gén. une pers.] Le malheur extrême rend l'homme barbare en concentrant tout son intérêt sur lui-même (SÉNAC DE MEILHAN, Émigré, 1797, p. 1609). Le fouet d'un ignorantin vous rend un enfant plus docile et plus aimable (JANIN, Âne mort, 1829, p. 41). Dieu accorde à Anne d'autres enfants pour remplacer Samuel, et Dieu rendit Anne mère de trois fils et de deux filles (Théol. cath. t. 4, 1 1920, p. 970).
— Rendre colère. Mettre en colère. Je ne sais quoi m'empêchait de pouvoir prendre aucune note et me rendait colère (GONCOURT, Journal, 1894, p. 616).
— Fam. Rendre tout(e) chose (v. ce mot I B). Un chant d'orgue, ça m'emplit la poitrine, puis l'estomac... ça me rend toute chose... comme en amour (MIRBEAU, Journal femme ch., 1900, p. 62).
B. — [Le compl. désigne un inanimé] La civilisation rend les esprits routiniers (FOURIER, Nouv. monde industr., 1830, p. 30). Cette agglomération de sons dans la région grave ne rend pas la basse trop compacte (Arts et litt., 1935, p. 38-8).
— Empl. pronom. réciproque. Un homme et une femme, dans une île déserte, contribueraient à se rendre la vie heureuse (BERN. DE ST-P., Harm. nat., 1814, p. 333).
SYNT. Rendre qqn amoureux, attentif, fou, furieux, heureux, irritable, jaloux, malade, malheureux, meilleur, odieux, pensif, responsable, sensible, triste; rendre père; rendre qqc. difficile, durable, facile, familier, habitable, impossible, impropre, intéressant, intelligible, inutile, invisible, manifeste, possible, utile; rendre une œuvre accessible, une position difficile, la lecture agréable, la société meilleure, la terre fertile.
IV. — Se rendre
A. — Se rendre + compl. prép. désignant un lieu
1. [Le suj. désigne une pers.] Se déplacer, aller. Se rendre à l'église, au bureau, à la gare. Je sortis pour me rendre à mon atelier (GOBINEAU, Pléiades, 1874, p. 68). Il doit se rendre sur les lieux du sinistre et en noter les péripéties (COSTON, A.B.C. journ., 1952, p. 112).
— [P. méton. du n. désignant le lieu] Ma tante, dit-il, ma femme n'a pu se rendre à votre invitation (KARR, Sous tilleuls, 1832, p. 199). V. empressement ex. de Courteline.
2. [Le suj. désigne un inanimé] Aboutir, aller. L'eau de ruissellement et l'eau de pénétration se rendent à la mer, mais elles prennent des chemins différents (BOULE, Conf. géol., 1907, p. 12). Un tube de plomb par où les vapeurs et les gaz mal odorants qui se dégagent sous la cloche, se rendent à la cheminée (QUÉRET, Industr. gaz, 1923, p. 271).
B. — Se rendre à qqc. Se laisser convaincre par quelque chose, se soumettre à quelque chose. Monsieur, cela suffit; je vais me rendre aux ordres de sa majesté (REYBAUD, J. Paturot, 1842, p. 378). Elle se rendait à sa supplication, (...) elle renonçait à faire le Matterhorn (PEYRÉ, Matterhorn, 1939, p. 249).
♦ Se rendre à l'évidence.
C. — Se rendre (à qqn). Se soumettre parce que l'on est vaincu. Synon. capituler, tomber. Le siége de Sens dura peu. La ville se rendit deux jours après que le roi d'Angleterre et le duc de Bourgogne se furent présentés (BARANTE, Hist. ducs de Bourg., t. 4, 1821-24, p. 309):
• 5. J'ai vu des jeunesses plus insolentes que la vôtre, et elles ont fini par se rendre... Elles se sont rendues corps et âme. — Est-il possible? fit-elle, en regardant le psychiatre avec une surprise indicible. Peut-on se rendre? (...). — Comprenez-moi, dit-elle. À qui se rend-on? À qui rendrait-on son âme? Je crois qu'on se refuse ou qu'on se donne, mais se rendre?
BERNANOS, Joie, 1929, p. 664.
— En partic. (sans compl. prép.). Se livrer. [Le complice au meurtrier:] Pour éviter qu'on te poursuive, je vas me rendre [aux agents] (MÉTÉNIER, Lutte pour amour, 1891, p. 151).
D. — Se rendre + attribut du suj. Devenir de son fait, par sa faute; faire qu'on se montre. Se rendre insupportable, malade, utile. Les hommes deviennent petits en se rassemblant: ce sont les diables de Milton, obligés de se rendre pygmées (CHAMFORT, Max. et pens., 1794, p. 23). Il faut être familier avec certaines règles de droit pour pouvoir raisonner sur ces questions: un profane s'exposerait à se rendre ridicule en en parlant (SOREL, Réflex. violence, 1908, p. 213). Peu de mortels furent d'abord assez heureux pour se rendre possesseurs d'un véhicule à roues (P. ROUSSEAU, Hist. transp., 1961, p. 20).
Prononc. et Orth.:[], (il) rend []. Att. ds Ac. dep. 1694. Conjug. ind. prés.: je rends, tu rends, il rend, nous rendons, vous rendez, ils rendent; imp.: je rendais; passé simple: je rendis; fut.: je rendrai; impér.: rends, rendons, rendez; subj. prés.: que je rende, que nous rendions; subj. imp.: que je rendisse; part. prés.: rendant; part. passé: rendu, -ue. Étymol. et Hist. A. « Donner en retour (une chose reçue ou prise, son équivalent, ou ce qui est dû) » 1. a) 2e moit. Xe s. « donner à nouveau » (St Léger, éd. J. Linskill, 26: Et cum il l'aut doit de ciel'art, Rende.l qui lui lo commandat); b) fin Xe s. (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 11: La sua morz vida nos rend); c) ca 1050 (Alexis, éd. Chr. Storey, 100: Se lui'n remaint [de l'aumosne], sil rent as poverins); 2. a) fin Xe s. « donner quelque chose de semblable » (Passion, 161: Jesús li bons ben red per mal); b) ca 1100 rendre colps, rendre cest asalt (Roland, éd. J. Bédier, 1397, 2142); c) ca 1140 (Voyage de Charlemagne, éd. G. Favatti, 166: Karlemaignes l'en rent saluz et amistez); d) ca 1590 rendre la pareille (MONTAIGNE, Essais, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, p. 533); e) 1690 part. passé subst. (FUR.: Ce n'est pas un presté, c'est un rendu); 3. a) fin Xe s. « donner en retour ce qui est dû » (Passion, 472: [Jesus] qui venra toz judicar A toz rendra e ben e mal); b) fin Xe s. (ibid., 513: Te posche retdrae graciae); c) ca 1100 rendre malvais servis « servir mal » (Roland, 1406); 1585 (N. DU FAIL, Contes d'Eutrapel, éd. J. Assézat, t. 1, p. 307: rendre quelque autre service signalé); d) ca 1100 (Roland, 3784: Ben set parler e dreite raisun rendre); e) ca 1120 (St Brendan, éd. I. Short et B. Merrilees, 1028: Cil en rendent Deu la glorie); f) ca 1130 (Lois de Guillaume, éd. J. E. Matzke, § 1: rendist ceo qu'il aveit pris); g) 1150 (WACE, St Nicolas, éd. E. Ronsjö, 1360: E grant loënge a Deu rendirent); h) 1155 rendre cunte de (ID., Brut, éd. I. Arnold, 6626); i) ca 1170 (MARIE DE FRANCE, Lais, éd. J. Rychner, Lanval, 543: Puis ad tuz ses baruns mandez, Que li jugemenz seit renduz); ca 1288 rendre sentence (J. DE JOURNI, Dîme de penitence, 251 ds T.-L.); j) ca 1170 (CHRÉTIEN DE TROYES, Erec, éd. M. Roques, 2036: lor droit rendent a chascun manbre); k) 1176-81 rendre la promesse « exécuter » (ID., Chevalier Charrette, éd. M. Roques, 1154); l) ca 1240 rendre sa perte (à qqn) « dédommager » (Mort Aymeri, 2634 ds T.-L.); 4. a) 2e moit. Xe s. « produire, rapporter » (St Léger, 215: Rendet ciel fruit esperitiel); b) 1174-80 (CHRÉTIEN DE TROYES, Perceval, éd. F. Lecoy, 4: Qui petit seme petit quialt, Et qui auques recoillir vialt, An tel leu sa semance espande Que fruit a cent dobles li rande); 5. a) ca 1200 rendre (un message) « répéter, rapporter » (Aiol, éd. Foerster, 5267); 1269-78 rendre par queur « répéter de mémoire (une leçon) » (JEAN DE MEUN, Rose, éd. F. Lecoy, 4336); b) mil. XVIe s. « rapporter (un fait) » (MARGUERITE DE NAVARRE, Nouv., XXI ds LITTRÉ). B. « Laisser échapper, redonner ce qu'on ne peut garder, céder, livrer » 1. a) ca 1100 (Roland, 2849: Li reis se drece, si ad rendet ses armes); b) ca 1160 se rendre « capituler » (Eneas, éd. J. J. Salverda de Grave, 5459); c) déb. XIIIe s. renduz « fatigué » (JEAN RENART, Galeran, éd. L. Foulet, 5800); d) ca 1240 fig. (Deux Coll. angl. norm. mir. Vierge, 14, 41, p. 68 ds T.-L.: Dame (Ste Marie), sëez moy socurs, Jeo me renc en ta duçurs); e) 1580 (MONTAIGNE, Essais, p. 551: Il faut que nostre belle sagesse se rende en cet endroit et quitte les armes); f) 1588 (ID., ibid., p. 853: se rendre aux efforts de l'amour; p. 328: Tantost c'est le corps qui se rend le premier à la vieillesse); 2. a) 1130-40 (WACE, Vie Sainte Marguerite, éd. E. A. Francis, ms. A, 708: iluec chaï Les la virge l'ame rendi); b) 1306 (JOINVILLE, Vie St Louis, éd. N. L. Corbett, p. 239: le saint Roy [...] rendi a Nostre Createur son esperit); 3. a) ca 1165 « vomir » (BENOÎT DE SAINTE-MAURE, Troie, éd. L. Constans, 29291); b) ca 1210 (HERBERT DE DAMMARTIN, Folque de Candie, éd. Schultz-Gora, 11480: Guichart [...] parmi le nes rent sanc, qui li cuevre le vis); 4. a) ca 1170 « émettre » (CHRÉTIEN DE TROYES, Erec, 433: Si oel si grant clarté randoient Que deus estoiles ressanbloient); b) ca 1220 (GAUTIER DE COINCI, Mir., éd. V. F. Koenig, II Mir 21, 149: quel son que rende la vïele); c) 1694 (Ac.: cette orange rend bien du jus). C. Empl. comme verbe d'état, avec compl. d'obj. et attribut du compl. 1. a) ca 1100 (Roland, 2198: La meie mort me rend si anguissus); b) ca 1180 (MARIE DE FRANCE, Fables, éd. K. Warnke, 68, 42: de vostre mal vus rendra sain); 2. 1174-78 spéc. se rendre a moine « entrer en religion » (ÉTIENNE DE FOUGÈRES, Manières, éd. R. A. Lodge, 260) également trans., surtout att. aux XIIIe-XIVe s., v. T.-L. — XVIe s., v. HUG. D. « Remettre à destination » a) 1176-81 « mener » (CHRÉTIEN DE TROYES, Chevalier Charrette, 855: point li uns ancontre l'autre Tant con cheval lor poerent randre); b) ca 1200 pronom. (Chanson de Guillaume, éd. Duncan Mac Millan, 291: Jo me rendrai al dolerus peril); c) 1283 en parlant de marchandises (PHILIPPE DE BEAUMANOIR, Coutumes de Beauvaisis, éd. A. Salmon, t. 1, p. 384: .X. muis de blé rendus a Clermont). E. Domaine intellectuel ou esthét. « présenter (après interprétation) » 1. a) 1549 (DU BELLAY, Deffense et Illustration, éd. H. Chamard, p. 160: je veux aussi que tu t'eforces de rendre, au plus pres du naturel que tu pouras, la phrase et maniere de parler Latine); b) 1579 rendu mot pour mot (en traduction) (H. ESTIENNE, Precellence, éd. E. Huguet, p. 41); 2. a) 1733 (DUBOS, Réflexions crit., t. 1, p. 81: Ce que Cornelie dit à César [...] ne peut être rendu par un peintre; t. 3, p. 232: Roscius rendoit donc par un jeu muet le sens de la phrase que Ciceron venoit de composer); b) 1740 (Ac. Add.: Une glace qui rend nettement les objets); c) 1745 (BOSSE, Manière de graver, p. 129: On dirigera la gravûre de façon que le blanc du papier, comme on l'a dit, rende le luisans du tableau); d) 1754 (BONNET, Essai psychol., p. 146: des couleurs mal rendues). Du lat. pop. rendere, altér., sous l'infl. de prendere « prendre » (v. ce mot), du class. reddere « donner en retour; s'acquitter de; restituer; traduire; répéter; émettre; transmettre; ramener à un état antérieur, amener d'un état à un autre; faire sortir » (comp. de re-, red- marquant un retour en arrière, un retour à un état antérieur et dare « donner »). Fréq. abs. littér.:39 612. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 69 791, b) 53 314; XXe s.: a) 44 577, b) 53 535.
DÉR. Rendeur, -euse, subst. Personne qui rend (quelque chose). Je ne sais pas comment il se fait que Daudet, d'un commerce si séducteur, et si rendeur de services, récolte des inimitiés comme pas un (GONCOURT, Journal, 1894, p. 646). — [], fém. [-ø:z]. — 1res attest. a) ca 1220 « celui qui rend (ce qu'il a pris) » (GAUTIER DE COINCI, Mir., éd. V. F. Koenig, II Dout 34, 734), b) av. 1544 « celui qui rend ce qu'on lui a prêté » (MAROT, Épigrammes, CLXXVI, éd. C. A. Mayer, p. 235); de rendre, suff. -eur2; l'a. et m. fr. ont empl. rendeor au sens de « garant, celui qui répond de » (du XIIIe s. à 1415, v. GDF. et FEW t. 10, p. 172).
BBG. — BREAL (M.). Notes d'étymol. B. Soc. Ling. 1910-11, t. 16, p. 66. — MOIGNET (G.). Incidence et attribut du compl. d'objet. Trav. Ling. Litt. Strasbourg. 1975, t. 13, n ° 1, p. 261. — QUERIDO (A.). Les Séries verbales du type être, devenir, rendre. In: Congrès Internat. de Ling. et Philol. Rom. 13. 1971. Québec, 1976, t. 1, pp. 1107-1124.
rendre [ʀɑ̃dʀ] v. tr. [CONJUG. fendre.]
ÉTYM. V. 980, au sens I, 3; d'un lat. pop. rendere, tiré, par anal. avec prendre, du lat. class. reddere, de red- (re-), et dare « donner ».
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I Donner en retour (une chose qu'on a reçue ou prise; son équivalent ou ce qui est dû en retour). — REM. Dans des expressions figurées comme rendre hommage, rendre témoignage, rendre perd sa valeur et ne signifie plus que « donner, apporter ».
1 (Fin Xe). Donner en retour (ce qui est dû). || Rendre à qqn de l'argent, l'argent que l'on a emprunté (⇒ Rembourser; → Dette, cit. 1; faillir, cit. 10). || Rendre à qqn un objet confié, remis en dépôt (cit. 7). Par métaphore. || « Je rends au public ce qu'il m'a prêté » (→ Matière, cit. 14, La Bruyère). || L'esprit emprunte à la matière les perceptions… et les lui rend… (→ Nourriture, cit. 9). — Absolt. || On leur prête, pour qu'ils rendent (→ Exact, cit. 9).
1 Tous les dimanches il va à la messe avec sa mère, il lui emprunte deux sous pour payer sa chaise à l'église et je suis sûr qu'il ne les lui rend jamais.
Stendhal, Romans et nouvelles, « Le rose et le vert », IV.
♦ Au p. p. Fig. || Un prêté rendu. — N. m. || Un rendu. ☑ Loc. prov. Un prêté pour un rendu.
2 Je ne sais ce que j'ai, dit-il à Coutu, je n'ai jamais tant bâillé. Mon révérend père, répondit frère Coutu, ce n'est qu'un rendu. Comment ! Que voulez-vous dire avec votre rendu ? dit Frère Bertier. C'est, dit frère Coutu, que je bâille aussi (…)
Voltaire, Facéties, Maladie du jésuite Bertier.
♦ (Abstrait). S'acquitter de (dettes morales, obligations, devoirs). || Rendre à qqn ce qu'on lui doit (→ 2. Quant, cit. 2), un devoir (cit. 27). || Rendre à qqn ses devoirs (cit. 26), ses respects (→ Marchander, cit. 11). ☑ Rendre hommage (cit. 20), un, des hommages (cit. 22 et 26). || Rendre des soins à… (→ Apercevoir, cit. 21). ☑ Rendre honneur (cit. 63), des, les honneurs (cit. 101 et 103). || L'adoration (cit. 2), le culte (cit. 6) qu'on rend à… ☑ Rendre grâce (cit. 56), grâces (cit. 54 et 55) à qqn. || Rendre gloire (cit. 51) à qqn. || Rendre quelques bons offices (cit. 14), des services, rendre service à (qqn qui le demande). || Rendre des comptes à qqn. ☑ Rendre compte (cit. 25). Fig. Rendre compte, se rendre compte. — Au p. p. || Compte rendu. — ☑ Rendre raison. || Rendre raison (cit. 63) de… : expliquer. ☑ Rendre justice à qqn. || Rendre une justice (cit. 31). || Rendre la justice (cit. 24). || Rendre un jugement (cit. 1), un arrêt (cit. 9; → Cassation, cit. 2), un verdict (→ Arbitrer, cit. 3). || Rendre une ordonnance (→ Célérité, cit. 1), un décret (→ Mesure, cit. 18). ⇒ Prononcer. || Rendre témoignage. || Rendre des oracles. || Rendre réponse. ☑
3 (…) ils lui présentèrent un denier. Et Jésus leur dit : De qui est cette image et cette inscription ? Ils lui dirent : De César. Jésus leur répondit : Rendez donc à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est de Dieu.
Bible (Sacy), Évangile selon saint Matthieu, XXII, 19-21.
4 (Je sais qu'Abner) rend à la fois
Ce qu'il doit à son Dieu, ce qu'il doit à ses rois.
Racine, Athalie, II, 4.
5 (…) les hommes ne s'attachent point à nous en raison des services que nous leur rendons, mais en raison de ceux qu'ils nous rendent !
E. Labiche, le Voyage de M. Perrichon, IV, 8.
6 Répondant à une question spécieuse, il a dit : « Rendez à César (…) » On a tant rendu à César qu'il n'y en a plus que pour lui. Mais les pauvres savent que tout ce qu'ils cèdent en ce bas monde leur sera « rendu plus tard au centuple ». On n'imagine pas meilleur placement !
Gide, Journal, 9 janv. 1933.
7 Sans doute Hitler saurait-il prolonger de plusieurs mois encore la résistance d'un grand peuple et d'une grande armée. Mais l'arrêt du destin était, désormais, rendu (…)
Ch. de Gaulle, Mémoires de guerre, t. III, p. 150.
♦ Spécialt (jeux, sports). Concéder (à un adversaire inférieur) un avantage de poids, de distance, etc., égalisant les chances. ☑ Rendre des points à un adversaire. || Rendre une pièce, aux échecs. || Cheval qui rend du poids, de la distance à ses concurrents. ⇒ Handicap.
8 — Viens jeter le poids, je te lance un défi (…) — Entendu ! je te rends un mètre cinquante. Et tu vas voir ça !
Montherlant, les Olympiques, p. 77.
8.1 — Il te rend bien six kilos. L'autre alors se hâte de répondre :
— Pas tout à fait. Et puis, en ce moment, je ne suis pas très en forme.
Jean Prevost, Plaisir des sports, p. 82.
2 Donner en retour (ce qui a été pris ou reçu). ⇒ Restituer, rétrocéder. || Rendre à qqn ce qu'on lui a volé (→ Fouiller, cit. 16; piper, cit. 4). || Rendre un territoire envahi (→ Dépendance, cit. 4). || Pourquoi l'État prend des impôts (cit. 1) et comment il les rend. || Rendre un prisonnier, un otage, un esclave (→ Libre, cit. 2; père, cit. 19). || Rendre un cadeau. ⇒ Renvoyer. — Fig. || « Parlez : nous rendrez-vous ces extases (cit. 5) sublimes, Que vous nous ravissez ? » (Lamartine). || Rendre la liberté à qqn (→ Arrestation, cit. 1). || Ôter et rendre sa confiance à qqn. ☑ Rendre à qqn sa parole, le délier d'un engagement, d'une promesse.
9 Me rendra-t-il, Pylade, un bien qu'il m'a ravi ?
Racine, Andromaque, I, 1.
10 (…) le temps a rendu à l'église (Notre-Dame) plus peut-être qu'il ne lui a ôté, car c'est le temps qui a répandu sur la façade cette sombre couleur des siècles qui fait de la vieillesse des monuments l'âge de leur beauté.
Hugo, Notre-Dame de Paris, III, I.
♦ (XXe). Comm. Rapporter au vendeur (un article acheté en magasin) pour remboursement ou échange. || Un article acheté en solde ne peut être rendu, ni échangé. — Au p. p. || Articles rendus. N. m. || Un rendu : un article rendu.
11 (…) il venait d'imaginer les rendus, un chef-d'œuvre de séduction jésuitique. Prenez toujours, Madame, vous nous rendrez l'article, s'il cesse de vous plaire. Et la femme, qui résistait, trouvait là une dernière excuse, la possibilité de revenir sur une folie : elle prenait, la conscience en règle.
Zola, Au Bonheur des dames, IX, t. II, p. 34.
3 (Abstrait). Donner (à celui qui a perdu). ⇒ Recouvrer (faire), redonner. || L'art de rendre la vue aux vieillards (→ Inventer, cit. 2). || La belle saison ne me rendit pas mes forces (cit. 10; → aussi Fatigue, cit. 7). || Rendre la vie à qqn, le ressusciter, le guérir. (→ Galvanisme, cit. 1). || Rendre le sommeil à qqn. (→ Insomnie, cit. 2). || La liberté restaurée rendit à la France la parole (→ Mutisme, cit. 2). || Rendre à la langue la netteté première (→ Pathos, cit. 2). || Rendre du relief à une image usée (→ Poilu, cit. 1). || « Si vous voulez que j'aime encore, Rendez-moi l'âge (cit. 24) des amours » (Voltaire).
12 L'humanité avait perdu ses titres. M. de Montesquieu les a retrouvés et les lui a rendus.
13 — Monsieur, vous êtes un insolent, et vous me rendrez raison.
— Vous auriez bon besoin, monsieur, que je vous rendisse la raison.
Stendhal, Lucien Leuwen, II, LII.
14 La présence de la jeune fille lui rendait son entrain des meilleurs jours.
Martin du Gard, les Thibault, t. VII, p. 85.
♦ (Compl. n. de personne). || Le père que Dieu leur avait rendu (→ Messe, cit. 5). || La police a retrouvé l'enfant et l'a rendu à ses parents. Par métaphore. || Être rendu à soi-même, se retrouver (→ Méduser, cit.). || L'être qui m'avait rendu à moi-même (→ Plus, cit. 50).
15 Qui l'eût dit (…)
(…) Qu'après plus de six mois que je t'avais perdu,
À la cour de Pyrrhus tu me serais rendu ?
Racine, Andromaque, I, 1.
♦ (Le compl. dir. désigne une personne, le compl. ind. une chose avec laquelle la personne avait perdu contact). ⇒ Ramener (→ Étreindre, cit. 7, Rimbaud). || L'heure bénie qui allait les rendre au repos (→ Lassitude, cit. 7). — Au p. p. || Condamnés rendus à la liberté (→ Désœuvrer, cit. 1). || Cette lettre me rendit à la pureté (cit. 7) de mon tourment (→ aussi 2. Idéal, cit. 5). — Rendre un bâtiment à sa primitive destination (→ Maison, cit. 12).
16 (…) quel est celui d'entre nous qui, condamné par la Faculté à la chère des Pères du désert, n'a pas souri à l'aile de poulet proprement coupée, qui lui annonçait qu'enfin il allait être rendu à la vie sociale ?
A. Brillat-Savarin, Physiologie du goût, t. I, p. 97.
4 Donner (une chose semblable en échange de ce qu'on a reçu). || Rendre (à qqn) le mal pour le mal (→ 3. Mal, cit. 1), meurtre pour (cit. 1) meurtre, projectile pour (cit. 2) projectile… || Rendre amour pour (cit. 3) amour… ☑ Rendre la monnaie (cit. 12) à qqn. || Vol au rendez-moi. ⇒ Rendez-moi. ☑ Fig. Rendre à qqn la monnaie de sa pièce. ☑ Rendre la pareille à qqn. — La joie (cit. 23) que chacun donne lui est rendue. || Dieu vous le rendra, vous le rendra avec usure (vx), au centuple… || Rendre à qqn le salut (→ Inconvénient, cit. 3), son salut (→ Gaiement, cit. 1). || Rendre un baiser (→ Ébauche, cit. 10; passif, cit. 6). || Persuadé que je ne lui rends pas sa tendresse (→ Image, cit. 26). ☑ Rendre une politesse à qqn. || Rendre à qqn sa visite, lui faire une visite en échange de celle qu'il nous a faite. Par ext. || Rendre visite à qqn, rendre une visite à qqn. — Rendre un coup à qqn. (Sans compl. en à). || Recevoir un coup (cit. 4, 45) et le rendre. — ☑ Loc., vx. Rendre le combat, un combat : résister, combattre.
17 Ce cœur si généreux rend si peu le combat,
Et du premier revers la fortune l'abat !
Corneille, Cinna, IV, 5.
18 Jacques, après avoir ajouté à ses démonstrations de gratitude, force révérences, que son bienfaiteur ne lui rendait pas, et force souhaits qu'on recevait froidement, remonte sur son cheval (…)
Diderot, Jacques le fataliste, Pl., p. 563.
19 Ce fut ainsi que Pippo trouva moyen de se débarrasser de la Bianchina, et de lui rendre avec usure le mauvais tour qu'elle lui avait joué.
A. de Musset, Nouvelles, « Fils du Titien », III.
20 Mieux valait se battre (…)
Rendre coup pour coup et deux coups pour un (…)
Guillevic, Terraqué, in Œ. choisies, p. 130.
♦ ☑ Il me le rend bien, il me l'a bien rendu. ⇒ Pareille (rendre la), retour (payer de). || « Si Dieu nous a faits à son image (cit. 31), nous le lui avons bien rendu » (Voltaire). || L'homme idéalise (cit. 5) la femme, mais elle ne le lui rend pas.
21 Un homme fort épris d'une coquine, qui le lui rendait (…)
Paul Léautaud, Propos d'un jour, p. 105.
22 Les fonctionnaires présents accusaient sans ambages les militaires de se vautrer dans la concussion et l'abus d'autorité, mais les militaires le leur rendaient bien.
Céline, Voyage au bout de la nuit, p. 137.
5 (V. 1175). Vieilli. Produire (un revenu) ⇒ Rapporter. || Mettre les terres en état de rendre tout ce qu'on en peut attendre (cit. 78). Vx. || « Sa ferme lui rend dix mille francs par an » (Littré). ⇒ Revenu. — Mod. Donner, produire. || Rendre peu, rendre beaucoup. || La pêche (2. Pêche, cit. 2) n'avait jamais autant rendu. || Jamais chef n'a su faire rendre autant à ses hommes (→ Exploiter, cit. 11). ⇒ Rendement.
♦ Intrans. || « Ce commerce ne rend pas » (Académie). Fam. || Ça n'a pas rendu : ça n'a pas marché, ça n'a rien donné.
23 Mais les terres rendent peu (…) Le ménage devait soutenir son rang avec moins de trente mille francs de revenus (…)
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. III, XIII, p. 177.
6 V. intr. Répondre à l'effort, à la pression exercée. || Cordage qui rend, qui s'allonge quand on le tend (avec l'idée d'un résultat produit, comme au sens 5.). || Les bandes de ce billard rendent mal, renvoient mal les billes, amortissent leur mouvement. || Une raquette qui rend bien. || Il appuya sur l'accélérateur, la voiture rendait admirablement.
———
II Remettre à destination.
1 (Fin XIIe). Compl. n. de chose. Vx (sauf dans quelques locutions). ⇒ Remettre. || Expressément (cit. 1) chargé de vous rendre ceci. || Une lettre que vous m'avez rendue hier décachetée (→ Déplaire, cit. 12, Beaumarchais). ☑ Mar. Rendre le quart.
24 Une fille d'honneur doit toujours se défendre
De lire les billets qu'un homme lui fait rendre.
Molière, l'École des maris, II, 3.
2 (Compl. n. de personne). Vx (sauf au passif et p. p.). Transporter, faire parvenir qqn à sa destination. || En prenant le rapide, nous serons rendus à Bordeaux en cinq heures. || Me voici rendu, arrivé à destination.
25 Je vous rends dans trois mois au pied du Capitole.
Racine, Mithridate, III, 1.
26 Monseigneur veut-il quelque chose : il n'a qu'à tinter du sien (de son côté); crac, en trois sauts, me voilà rendu.
Beaumarchais, le Mariage de Figaro, I, 1.
27 Par l'autobus on est plus vite rendu que par le métro.
Céline, Voyage au bout de la nuit, p. 251.
♦ Absolt (vx). Mener, conduire. || Une grande lice (1. Lice, cit. 1) qui venait du château des Tournelles et qui allait rendre aux écuries royales.
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III (Le compl. désigne ce qu'on ne peut garder, retenir).
1 (Fin XIe). Laisser échapper. || Rendre le sang par la bouche (cit. 9) et par les oreilles. || Rendre la fumée par le nez. ⇒ Rejeter. || J'ai rendu tout ce que j'avais dans l'estomac (→ Glaire, cit. 3). || Rendre tripes et boyaux. — Absolt (par euphémisme). || Avoir envie de rendre. ⇒ Vomir.
28 (…) il demande du pain, se jette dessus, fait des efforts pour en mâcher une bouchée, qu'il ne saurait avaler, et qu'il rend dans sa serviette (…)
Diderot, Jacques le fataliste, Pl., p. 666.
♦ ☑ Loc. fig. Rendre gorge (cit. 29, au fig.). ☑ Rendre l'âme (cit. 34), rendre l'esprit (cit. 8 et 9), le dernier soupir, le dernier cri (→ Hoquet, cit. 10) : mourir.
29 (…) comme s'il avait vraiment rendu sa vie dans ce dernier hoquet.
R. Dorgelès, les Croix de bois, XV.
♦ (Sujet n. de chose). || Le rôti a rendu tout son jus (→ par métaphore Lardoire, cit.). || Ces tomates ont rendu beaucoup d'eau à la cuisson. || Les noisettes rendront toute leur huile (cit. 7).
30 Devant un feu vif et brillant tournait une broche admirablement garnie de cailles (…) Ce gibier de choix rendait ses dernières gouttes sur une immense rôtie dont la facture annonçait la main d'un chasseur (…)
A. Brillat-Savarin, Physiologie du goût, t. II, p. 227.
2 (XVe). Faire entendre. || Rendre un son. ⇒ Émettre (→ Éolien, cit. 1; fond, cit. 4; lyre, cit. 8). || Rendre des sonorités (→ 1. Flûte, cit. 4), une incessante vibration de cristal (→ Bruissement, cit. 2), un perpétuel murmure (cit. 10). || Rendre les accents de la joie… (→ Corde, cit. 17).
♦ Vx. || Rendre une odeur, un parfum. ⇒ Exhaler.
3 (1080). Céder, livrer. || Rends-moi les armes (cit. 14). — ☑ Loc. Rendre les armes (cit. 34 et 35). ⇒ Poser. — Acculé, il rendit son épée à un hussard (→ Prisonnier, cit. 3). — Le commandant a dû rendre la place.
31 Quels que soient les partis celui qui ne rend pas une place française est le droit héritier de tous ceux qui n'ont pas rendu des places françaises. Rochereau dans Belfort (et Masséna dans Gênes) sont les droits héritiers de celle qui fit lever le siège d'Orléans.
Ch. Péguy, la République…, p. 317.
4 (Manège). ⇒ Lâcher. ☑ Rendre la bride, les rênes (dans le même sens, rendre la main à un cheval). Absolt. || Rendez ! : ordre de rendre la bride.
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IV (1080; du lat. reddere « remettre dans l'état antérieur », puis, par ext., « faire passer d'un état à un autre »). Verbe d'état avec un compl. d'objet et un attribut du compl. Faire devenir, être cause qu'une personne ou qu'une chose devient…; mettre dans (un état). || « Ni l'or, ni la grandeur ne nous rendent heureux » (→ Divinité, cit. 6, La Fontaine). || « Te mesurer (cit. 23) à moi ! qui t'a rendu si vain… ? » (Corneille). || « Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage ? » (cit. 1, La Fontaine). || « Rien ne nous rend si grands qu'une grande douleur » (cit. 14, Musset). || La colère (cit. 11) me rend malade. || Il me rend fou (→ Coucou, cit. 1; et aussi poursuivre, cit. 6). || Rendre une femme heureuse (→ Hanter, cit. 14). || Rendre qqn amoureux… (→ Posséder, cit. 24). || Rendre qqn ridicule (→ Attaquer, cit. 25), apte (cit. 5) à… — (Avec ellipse du compl. : l'homme, nous…). || Tout cela rend si fier ! (cit. 10). || Rien ne rend si aimable (cit. 6) que de se croire aimé. || L'injustice (cit. 9) rend injuste. — Spécialt. || Rendre qqn coupable (vx; cf. Molière, le Misanthrope, II, 1), responsable de qqch.
32 Non, non, mon intérêt ne me rend pas injuste (…)
Racine, Britannicus, I, 1.
33 Nous n'avons pas droit de rendre misérables ceux que nous ne pouvons rendre bons.
Vauvenargues, Réflexions et maximes, XXVII.
♦ Rendre une chose possible, supportable (→ Abîme, cit. 20; absorbant, cit. 1). || L'accoutumance (cit. 1) ainsi nous rend tout familier. || Il rendait sensible, évidente l'aggravation (cit.) du mal. || Rendre plus grand (agrandir), meilleur (→ 2. Bonifier, cit.), etc. || « Le vrai philosophe (cit. 3) sait rendre la terre plus fertile » (Voltaire). — (Au p. p.). || Sentence rendue publique (→ Contumace, cit.).
34 La plupart des hommes emploient la meilleure partie de leur vie à rendre l'autre misérable.
La Bruyère, les Caractères, XI, 102.
35 Je veux bien que l'insuffisance d'instruction et de culture leur rende certaines opérations mentales plus difficiles ou plus hasardeuses (…)
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. XVIII, XIII, p. 185.
♦ (Avec un adj. possessif). || « Tâchant de rendre mien (cit. 9) cet air d'antiquité » (La Fontaine). — (Avec un subst. comme attribut du compl.). || L'amour-propre (cit. 1) les rendrait les tyrans des autres. || Les grandes choses qui rendront notre siècle l'admiration des siècles à venir (→ Merveille, cit. 2). || « De combien de remords n'ont-ils rendu la proie ! » (cit. 8, Racine).
♦ (Avec un p. p. pour attribut de compl.). Vx. || Rendre mort (Chanson de Roland, v. 2733). — REM. Ce tour est condamné par les grammairiens dès le XVIIe siècle.
36 On comprend que, faute d'une « voix » passive authentique, le français ait recours (…) à la combinaison du verbe être avec un participe de caractère nettement passif; et l'on comprend aussi qu'il ait traité ce participe en véritable attribut, disant : je suis aimé, exactement comme il dit : je suis bon. Mais à s'exprimer de la sorte notre langue (…) ne distingue pas entre l'attribut ordinaire (ou simple qualificatif) et celui qui énonce un état résultant d'une action antérieure (ou attribut passif). Note. C'est cet attribut que marquait si nettement autrefois un tour tel que rendre terminé (apaisé, averti, etc.)
G. et R. Le Bidois, Syntaxe du franç. moderne, §705.
37 Madame, on me trahit, et la main qui me tue
Rend sous mes déplaisirs ma constance abattue.
Corneille, Cinna, IV, 3.
38 Pour rendre aux yeux de tous ce mystère éclairci.
Molière, l'École des femmes, V, 9.
39 Elle rend pour jamais vos desseins avortés.
Racine, la Thébaïde, I, 5 (texte de l'éd. originale de 1664, supprimé dans l'éd. définitive).
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V (Dans le domaine intellectuel et esthétique). Livrer, présenter après interprétation.
1 (1538; seule acception signalée par Furetière, Richelet et Académie 1694). Présenter en traduisant. || Ne croyez pas que j'ai rendu ici mot (cit. 37) pour mot. || Des morceaux de Spencer que j'avais tâché de rendre avec exactitude (cit. 10). → aussi Délicatesse, cit. 8. — Pron. (passif). || Ces mots se rendent en français par… (→ Mouvement, cit. 29).
40 (…) j'alléguerai seulement un Pétrarque, duquel j'ose bien dire, que si Homère et Virgile renaissants avaient entrepris de le traduire, ils ne le pourraient rendre avecques la même grâce et naïveté qu'il est en son vulgaire Toscan.
Du Bellay, Défense et Illustration de la langue franç. (1549), I, V.
41 En dehors de son sens matériel et littéral, tout morceau de littérature a, comme tout morceau de musique, un sens moins apparent, et qui seul crée en nous l'impression esthétique voulue par le poète. Eh bien, c'est ce sens-là qu'il s'agit de rendre, et c'est en cela surtout que consiste la tâche du traducteur.
Valery Larbaud, Sous l'invocation de saint Jérôme, II, II.
2 (1681). Présenter en exprimant. || Rendre une image en la captant (cit. 3, Valéry) dans une phrase, sur une toile ou sur une portée. || Une fantaisie (cit. 34) que rien ne peut rendre.
42 Je reconnus (…) que (…) par l'union intime de ces deux arts (musique et poésie), on exprimerait avec la clarté la plus satisfaisante ce que ne pouvait exprimer chacun d'eux isolément; que, par contraire, toute tentative de rendre avec les moyens de l'un d'eux ce qui ne saurait être rendu que par les deux ensemble, devait fatalement conduire à l'obscurité (…)
Richard Wagner, Lettre à Berlioz, citée par Baudelaire, l'Art romantique, XXI, II.
43 Tandis que le caractère du visage, l'expression du regard, même le ton de la voix, j'ai tout ça on ne peut mieux présent à l'esprit. Mais comment rendre ça ? Il faudrait être, à la fois, dessinateur, écrivain, et même acteur.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. I, XIX, p. 215.
a Par le langage, la littérature. || « Entre toutes les différentes expressions (cit. 9) qui peuvent rendre une seule de nos pensées… » (La Bruyère). || Mot créé pour rendre une idée nouvelle (→ Doublet, cit. 1). || Mots trop faibles pour rendre des sensations divines (→ Exprimer, cit. 6). || J'appelle imagination (cit. 6) le don de rendre ses pensées par des images. — (Au p. p.). || La nature fidèlement rendue (→ Objectivité, cit. 4). — Absolt. || « Bien écrire (cit. 50) c'est à la fois bien penser, bien sentir et bien rendre » (Buffon).
44 Ce n'est point un personnage qu'il soit facile de rendre ni d'exprimer par de belles paroles ou par de riches figures (…)
La Bruyère, Disc. de réception à l'Acad., 15 juin 1693.
45 Ne vous ai-je pas dit, en vous peignant cette femme, que le langage terrestre serait impuissant à rendre ses traits et son génie !
Balzac, le Lys dans la vallée, Pl., t. VIII, p. 864.
46 Elle disait, en effet, qu'on ne joue bien qu'en jouant avec son cœur; elle professait que, pour exprimer fortement une passion, il faut l'éprouver, et qu'il est nécessaire de sentir les impressions qu'on doit rendre.
France, Histoire comique, II.
b Par un moyen plastique ou graphique. ⇒ Représenter, reproduire (→ Dessin, cit. 1). || Rendre avec vérité les veines, les méplats (cit. 1, Diderot). → aussi Fossette, cit. 1. || Saisir et rendre ce qu'il y a dans un visage… (→ Apparence, cit. 4). || Rendre fidèlement le modelé du modèle (→ Naturaliste, cit. 6). || Rendre la nature (→ Création, cit. 12). || Couleurs employées pour rendre la lumière (cit. 19). || Aussi habiles (cit. 20) à rendre la beauté sur la toile que dans le marbre.
47 Jamais la magie de la peinture n'a été poussée plus loin. Le saint en extase est à genoux au milieu de la cellule, dont tous les pauvres détails sont rendus avec cette réalité vigoureuse qui caractérise l'école espagnole.
Th. Gautier, Voyage en Espagne, p. 253.
♦ Au p. p. || Détails bien, mal rendus. — N. m. (XVIIIe). || Le rendu : l'exécution en tant que restituant fidèlement l'impression donnée par la réalité. || Le rendu des étoffes dans un tableau, un dessin; du relief dans une gravure (→ Hachure, cit. 2). — Techn. || Un rendu : réalisation graphique d'un projet de construction, de décoration, de publicité. || Un rendu d'architecture.
48 La lumière est alors le moindre de ses soucis (de l'art moderne) Ce qu'on appelait « le faire », dans le langage d'atelier d'alors, y prend la place du « rendu ». On a dit que Manet ne savait pas peindre un centimètre de peau (…) on oubliait seulement qu'avant de vouloir (…) peindre de la chair, il voulait peindre des tableaux.
Malraux, les Voix du silence, p. 114.
48.1 Ce qui est très singulier dans l'art paléolithique, c'est que, sauf pour les styles I et II, les figures atteignent un rendu optique qui n'est connu que tard dans les grandes civilisations agricoles de la Méditerranée et de l'Asie, alors que l'organisation collective des figures reste à un niveau étonnamment élémentaire
A. Leroi-Gourhan, le Geste et la Parole, t. II, p. 245.
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se rendre v. pron.
1 XIIe. a Se rendre à… Se soumettre, céder à. || « Toute autre (cit. 70) se serait rendue à leurs discours » (Racine). ☑ Elle s'était rendue à l'évidence (cit. 7). || Se rendre aux prières de qqn. ⇒ Accéder, condescendre. || Se rendre aux ordres de… ⇒ Obéir. || Se rendre aux raisons, à l'avis de qqn. ⇒ Déférer (→ Empirer, cit. 5). Vx. || Se rendre sur une chose : céder sur un point. Absolt. || Je me rends.
49 (…) voilà une raison tout à fait convaincante; il se faut rendre à cela.
Molière, l'Avare, I, 5.
50 J'ai promis à Burrhus, il a fallu me rendre.
Racine, Britannicus, IV, 4.
♦ Vx. || Rendu : qui s'est laissé convaincre, qui ne résiste plus. ⇒ Acquiescer.
♦ Spécialt. || Se rendre à l'ennemi, au vainqueur.
b Absolt. Se soumettre à une force supérieure en abandonnant le combat et en rendant ses armes. ⇒ Capitulation, chamade, drapeau, pavillon, reddition, soumission (cf. Crier grâce, merci; s'avouer vaincu). ☑ Loc. Se rendre avec armes et bagages (infra cit. 2). || « La garde (1. Garde, cit. 72) meurt et ne se rend pas ». || « Braves Français, rendez-vous ! Cambronne répondit : Merde » (cit. 4). || Mourir plutôt que de se rendre. || Forcés par la disette (cit. 2) des vivres à se rendre. || Se rendre sans combattre en rase campagne. ⇒ Capituler (→ Héros, cit. 17). || La place s'est rendue. ⇒ Tomber. || Se rendre à discrétion (→ Heureux, cit. 8), sans conditions. — En parlant d'un coupable. ⇒ Dénoncer (se), livrer (se).
51 Cinq-Mars sourit avec tristesse et sans amertume, parce qu'il n'appartenait déjà plus à la terre. Ensuite, regardant Richelieu avec mépris : — Je me rends, parce que je veux mourir, dit-il; mais je ne suis pas vaincu.
A. de Vigny, Cinq-Mars, XXIV.
52 En temps de guerre celui qui ne se rend pas est mon homme, quel qu'il soit, d'où qu'il vienne, et quel que soit son parti. Il ne se rend point. C'est tout ce qu'on lui demande. Et celui qui se rend est mon ennemi, quel qu'il soit, d'où qu'il vienne et quel que soit son parti.
Ch. Péguy, la République…, p. 316.
♦ Vx ou littér. S'abandonner (en amour). ⇒ Donner (se). || « La plupart des femmes (cit. 61) se rendent plutôt par faiblesse que par passion » (La Rochefoucauld). || Disposées à se rendre (→ Agacerie, cit. 2).
53 Enfin, après une longue résistance, après des sanglots, des cris, des larmes, affaiblie du combat, éperdue, languissante, il fallut se rendre.
Voltaire, l'Ingénu, XVII.
54 Le sein charmant qui joue avec le feu,
Le sang qui brille aux lèvres qui se rendent,
Les derniers dons, les doigts qui les défendent (…)
Valéry, Poésies, « Charmes », Cimetière marin.
♦ Vx. Céder à la fatigue, n'en pouvoir plus.
♦ Mod. (Passif et p. p.). || Être rendu : être extrêmement fatigué. || « L'attelage (cit. 3) suait, soufflait, était rendu » (La Fontaine).
55 Les arbres de la route, toujours élagués, à la mode du pays, ne donnaient presque aucune ombre, et souvent, rendu de chaleur et de fatigue, je m'étendais par terre n'en pouvant plus.
Rousseau, les Confessions, VIII.
56 — Arrêtons-nous un moment, propose le maquignon (…) Ne vous gênez pas : c'est la fatigue, vous êtes rendu. Je connais ça : d'une manière ou d'une autre, il faut que ça crève.
Bernanos, Sous le soleil de Satan, I, III.
56.1 La ville est calme. Des policiers se sont rendus à la fatigue et dorment sur le plat des balustrades.
M. Duras, Dix heures et demie du soir en été, p. 135.
2 (1415). Se transporter, aller. ⇒ Aller, venir; porter (ses pas). || Se rendre en un lieu (→ Cependant, cit. 3; 1. présent, cit. 13). || Se rendre dans un pays, une région. || Se rendre à… (et n. de ville) (→ Buveur, cit. 2)… || Je m'étais rendu ici (→ Attendre, cit. 21). || Se rendre à l'étranger. ⇒ Passer. || Se rendre au spectacle (→ 1. Dîner, cit. 3), à la prière (→ Dignitaire, cit.)… || Se rendre sur place. — Les bateaux se rendent de Strasbourg à Bâle (→ Canal, cit. 5). — (En parlant de cours d'eau). ⇒ Jeter (se). || Des ruisseaux vont se rendre à l'étang (→ Indolemment, cit. 2).
57 (…) c'est de bien faire attention que quand vous êtes avec moi c'est que vous avez en réalité fait le même voyage. C'est que vous êtes rendu au même point. C'est que vous êtes en réalité rendu au point d'aboutissement du même voyage. Vous avez effectué le même déplacement.
Ch. Péguy, Victor-Marie, comte Hugo, p. 37.
3 (V. 1175). Suivi d'un attribut. Se faire tel, devenir par son propre fait. || Se rendre maître (cit. 54 et 56) de… || « L'honnête homme cherche à se rendre utile, l'intrigant à se rendre nécessaire » (cit. 11, Hugo). || Se rendre agréable (cit. 3), insupportable… ⇒ Montrer (se). || Se rendre célèbre (→ Anévrisme, cit. 2; canular, cit.). || Vous allez vous rendre malade (→ Lampée, cit. 2). — Vx (avec un subst. pour attribut). || Se rendre l'avocat (1. Avocat, cit. 14) de ma flamme.
58 (…) avec une ostentation de générosité qui n'en impose à personne, vous faites remarquer à la cour que vous ne voulez pas vous rendre mon accusateur (…)
Beaumarchais, Mémoires… dans l'affaire Goëzman, p. 129.
4 Techn. Perdre son élasticité. || Ce ressort se rend (syn. : est rendu).
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rendu, ue p. p. adj. et n. m.
♦ Voir ci-dessus (cit. 2 et supra; II., 2. et V., 2., b; cit. 48 et 48.1).
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DÉR. Rendement, rendez-moi, rendez-vous.
Encyclopédie Universelle. 2012.