NU
Une comparaison entre les sculptures paléolithiques qui représentent le nu féminin et certaines peintures modernes comme le Nu bleu de Matisse, la Femme dans un fauteuil de Picasso ou des sculptures comme la Femme couchée de Henry Moore conduit à admettre que, quoique le but des images préhistoriques soit autre que celui des artistes modernes (la Vénus stéatopyge était un symbole de fertilité), on se trouve dans ces deux cas en face de représentations qui n’ont rien à voir avec le nu que les musées de la tradition humaniste ont rendu familier.
L’Occident vit encore, ou plutôt a vécu jusqu’à hier, sur l’héritage grec. Mais aujourd’hui, la Vénus de Milo est devenue la victime du kitsch , elle est employée comme marque de fabrique pour des cosmétiques, et peu de gens se rendent compte qu’à l’origine de ce qui a été longtemps un des fondements de l’art occidental, le nu, il y a une disposition psychologique propre aux Grecs.
L’idée grecque du nu et son évolution
Chez les Grecs, le culte de la nudité totale était une conséquence de leur sens de la perfection humaine, et possédait donc un aspect éthique, non seulement physique: leur profonde conscience de ce qui était implicite dans la beauté physique leur fit éviter la sensualité et l’esthétisme. Cette fusion du physique et du psychique leur permit de donner une forme humaine à des idées abstraites. Alors furent créées les statues de divinités qui ont obsédé l’imagination de l’Occident pendant des siècles.
Ces œuvres revêtirent ensuite de nouveaux contenus éthiques, tant chrétiens qu’héroïques, jusqu’au moment où, impuissantes à exprimer une idée, elles se réduisirent à une enveloppe de perfection formelle (trop souvent un masque vide) à la période néo-classique. Mais ce masque avait été à l’origine cette «cuirasse esthétique» d’un principe moral qu’est le corps divin de l’Apollon grec dérivé du premier beau nu dans l’art, l’éphèbe de Kritios (env. 480 av. J.-C., musée de l’Acropole à Athènes). Dans son David , Donatello n’a retenu de l’Antiquité que le culte de la beauté physique; quant à la pose d’Alexandre conquérant, on la retrouve dans le terrible Juge de la Sixtine.
Le nu féminin
Après des préludes grotesques qui accentuaient l’aspect de la fécondité, le nu féminin se place sur un plan idéal bien plus tard que le nu masculin, à partir du IVe siècle avant J.-C. Kenneth Clark a distingué deux types de Vénus, le végétal et le cristallin, qui correspondent à la Venus naturalis et à la Venus cœlestis ; mais la Vénus pudique (dans l’attitude de la Vénus Médicis) réapparaît dans la figure de La Tempérance de Giovanni Pisano (cathédrale de Pise), dans l’Ève chassée du Paradis terrestre de Masaccio (Florence, chapelle Brancacci), et son geste deviendra l’expression d’une aspiration supraterrestre pendant la Contre-Réforme. Par une divination géniale, Botticelli, dans La Naissance de Vénus (Offices, Florence), remonte au prototype grec, et fait renaître la grâce ionienne dans le cadre d’une tapisserie gothique; il place un visage de Madone sur un nu féminin et donne ainsi la plus haute expression de la Vénus céleste, tandis que la Vénus «naturelle» de la haute Renaissance naît à Venise. Dans la peinture européenne, la Vénus de Giorgione (Dresde) a une place semblable à celle de l’Aphrodite de Cnide dans la sculpture grecque; le bourgeon de la rose giorgionesque s’épanouit chez Titien; et Rubens, Renoir en illustreront toute la plénitude.
Les sources grecques de l’iconologie chrétienne
Hercule, dont le mythe a servi de trait d’union entre le monde antique et le Moyen Âge, se réincarne en Samson, et devient le symbole du bon gouvernement et de l’énergie. Les trois grands tableaux d’Antonio del Pollaiuolo, Les Travaux d’Hercule , dont les Offices possédaient avant 1943 des répliques en miniature, exercèrent une grande influence sur la représentation du nu en action. Quatre légendes grecques au contenu pathétique, le massacre des Niobides, la mort d’un héros – Hector ou Méléagre –, le supplice de Marsyas, le sort de Laocoon, inspirèrent l’iconologie chrétienne. Isaac sacrifié par son père est un Niobide, Donatello traduit l’image de la mort d’un héros ancien en une Pietà (bas-relief au Victoria and Albert Museum), Raphaël s’inspire d’un sarcophage pour son Ensevelissement du Christ (galerie Borghèse, Rome), Michel-Ange développe le Torse du Belvédère comme un thème musical dont il tire une infinité de variations, et représente le Christ ressuscité (dessin à Windsor, Royal Library) comme un danseur dionysiaque. La bacchante reparaît en Salomé. L’évolution de la Néréide est encore plus stupéfiante: elle devient Ève qui sort du flanc d’Adam (Lorenzo Ghiberti, portes du Baptistère de Florence), l’Âme qui monte au ciel, et même la luxure dans un dessin de Pisanello (Albertina, Vienne) et dans Le Triomphe de la Chasteté de Lorenzo Lotto (galerie Pallavicini, Rome).
Le nu réaliste
À côté de cette survivance des types grecs et de son évolution, il faut noter le développement d’une autre convention, qui dérive du christianisme et n’a pas comme origine le corps héroïque qui se montre orgueilleusement dans la palestre, mais le corps blotti dans la conscience du péché. Cette convention, qui aboutit au réalisme, quoique, selon Kenneth Clark, on ait tort de la confondre avec cette tendance, culmine dans les nus de Rembrandt qui sont pénétrés de pitié chrétienne: l’acceptation chrétienne d’un corps qui n’est pas beau est le privilège d’une âme chrétienne. La Bethsabée de Rembrandt (Louvre) trahit ses sentiments par son attitude et l’expression de son visage, tandis que le même sujet, traité par Rubens (Dresde), fournit seulement l’occasion d’exposer les appâts d’un corps féminin. Et dans une gravure de Diane (British Museum), Rubens a représenté le nu flasque d’une femme mûre, avec tous les menus sillons imprimés sur la chair par le costume féminin très compliqué de l’époque du peintre – jarretières, corset, rubans des manches. Dans les pays du Nord, la convention gothique, qui ne visait pas à une beauté pure, mais exploitait les aspects les moins gracieux du corps humain – voire les pieds larges et plats – pour en tirer une arabesque bizarre, favorisait le réalisme. Les nus féminins de Cranach ne sont pas des parangons de beauté, mais ils possèdent une âpre élégance qu’on peut retrouver dans le Nu bleu de Matisse.
Le mépris de l’imitation
Le Nu bleu de Matisse, Les Demoiselles d’Avignon de Picasso (Museum of Modern Art, New York) ne doivent pas être considérés comme une réaction contre l’académisme, déjà contesté au cours du XIXe siècle, mais plutôt contre l’idée que le peintre doive être une machine photographique pleine de sensibilité et de précision. Les Demoiselles d’Avignon dépassa la satire: c’est une invective chargée de haine, le peintre balafre le nu avec la même espièglerie cruelle qui poussait les dadas à mettre des moustaches à la Joconde. C’est peut-être à la suite de tels excès qu’aujourd’hui on recommence à apprécier les artistes académiques et photographiques du siècle passé tels Gérome ou Bouguereau.
On peut se demander si même l’art abstrait est parvenu à éliminer la représentation du nu. Kenneth Clark s’interroge justement: «N’est-ce pas parce que certaines formes quasi géométriques sont des images simplifiées des formes qui nous plaisent dans le corps féminin qu’elles nous sont agréables?... Cette union inattendue du sexe et de la géométrie prouve que l’idée du nu est liée très profondément à nos notions les plus élémentaires d’ordre et de dessin.»
L’homme, mesure du monde
On peut se demander si l’importance que revêt pour l’homme la représentation du nu doit être acceptée comme une donnée aussi naturelle que le ciel étoilé. Le fameux aphorisme de Kant sur les deux choses qui remplissaient son âme de merveille, le ciel étoilé au-dessus de sa tête et la loi morale dans son cœur, pourrait être appliqué aussi au corps humain. Car autant le microcosme qu’est le corps que le macrocosme qu’est l’Univers sont des conditions de notre existence, et, comme Kenneth Clark le note, «du moment que l’art concerne des images sensorielles, les proportions et le rythme du corps ne peuvent pas être ignorés. Notre effort continuel, qui défie l’attraction de la gravité, de nous tenir debout en équilibre, fait sentir son influence sur chacun de nos jugements, aussi sur notre notion relative à l’angle qui doit être appelé «droit». Le rythme de notre haleine et le battement de notre cœur font partie de l’expérience par laquelle nous mesurons une œuvre d’art. La relation de la tête au corps détermine le critère selon lequel nous jugeons de toutes les autres proportions dans la nature. La disposition des aires dans le torse est en relation avec nos expériences les plus profondes, de sorte que les formes abstraites, le carré et le cercle, nous semblent mâle et femelle; et l’ancienne tentative de la mathématique magique de carrer le cercle est comme le symbole de l’union physique. Les diagrammes à forme d’étoile de mer des théoriciens de la Renaissance peuvent se prêter au ridicule, mais le principe de Vitruve gouverne nos esprits, et ce n’est pas par hasard que le corps stylisé de «l’homme parfait» est devenu le suprême symbole de la croyance européenne.» Les artistes de la Renaissance se réclamaient de l’idée pythagoricienne que «tout est nombre»; guidés par Platon et les néoplatoniciens et confirmés par une longue série de théologiens à commencer par saint Augustin, ils étaient convaincus de la structure mathématique et harmonique de l’Univers et de la création. D’où la croyance que l’Homme, en tant qu’image de Dieu, personnifiait les harmonies de l’Univers, et la figure vitruvienne de l’homme inscrit dans un carré et un cercle devint le symbole de la sympathie mathématique entre le microcosme et le macrocosme. De là, l’aphorisme de Léonard: «L’uomo è misura del mondo », et l’application de ces principes à l’architecture des églises de la Renaissance. S’il est impossible de séparer le physique du moral (ce ne fut pas un païen qui écrivit: «La Parole est faite chair, et a pris demeure parmi nous, pleine de grâce et de vérité»), on ne peut s’étonner que Kenneth Clark ait réfuté l’opinion du philosophe écossais S. Alexander, selon qui «si le nu est traité de façon à réveiller chez le spectateur des idées et des désirs appropriés au sujet matériel, c’est du faux art et de la mauvaise morale» [cf. ÉROTISME (arts et littérature)].
Nu et pornographie
Moins compliqués que nous, les hommes de la Renaissance trouvaient tout naturel que le nu puisse éveiller des pensées luxurieuses [cf. ÉROTISME (arts et littérature)], mais ils ne voyaient pas en cela une raison pour nier la qualité artistique de l’objet. La légende est riche d’anecdotes tirées de l’amour de l’homme pour une statue: Pygmalion, La Vénus d’Ille de Mérimée, qui a élaboré un conte de Guillaume de Malmesbury; Henri Heine et Oscar Wilde se sont aussi inspirés de cette légende, et la contemplation morbide des statues est un thème traité même par les romanciers modernes (par exemple A Fairly Honourable Defeat d’Iris Murdoch, Londres, 1970). L’expédient qui consiste à couvrir avec des lambeaux d’étoffe ou des feuilles les parties sexuelles des nus est l’aveu implicite de l’ambivalence de la représentation du nu. Tout dépend de la disposition du spectateur: le moine de Lewis et le saint Antoine de Flaubert pouvaient sentir leurs sens éveillés par la contemplation du visage de la Vierge, et Kenneth Clark trouvait du sex-appeal à une composition géométrique suggestive de Brancusi. Mais si l’élément de l’appel au sexe est inévitable dans la représentation même abstraite du nu, ce qui tranche la question de la pornographie est la présence dans l’œuvre, au-delà de cette donnée naturelle, d’une valeur esthétique.
1. nu, nue [ ny ] adj. et n. m.
• 1080; lat. nudus
I ♦ Adj.
1 ♦ Qui n'est couvert d'aucun vêtement (cf. fam. À poil). Femme nue. « une femme nue est par elle-même émouvante sur les deux plans, esthétique et sensuel » (Caillois). Être complètement nu, tout nu (cf. Être dans le costume d'Adam, d'Ève, dans le plus simple appareil, dans l'état de nature). Être nu comme un ver, nu comme la main. Doctrine qui conseille de vivre nu. ⇒ nudisme. Se mettre nu : se déshabiller. Danseuse nue. Être nu sous sa chemise. — Nu jusqu'à la ceinture. Bronzer les seins nus. À demi-nu. Fam. Cul nu : sans culotte, les fesses à l'air. Pied, torse nu. Être nu-pieds (⇒ va-nu-pieds) , nu-tête, sans chapeau (cf. En cheveux). « Dehors, bras nus, nu-tête » (Hugo). Robe (à) dos nu. Les mains nues, sans gants. Loc. À main nue, sans protection. Boxe à mains nues.
♢ Dépourvu de cheveux, de poils. Crâne nu. ⇒ chauve. Visage nu. ⇒ glabre.
2 ♦ Littér. Mal vêtu, misérable. Vêtir ceux qui sont nus.
3 ♦ Dépourvu de son accompagnement, de son complément habituel. Épée nue, hors du fourreau. Titre nu : charge achetée ou vendue sans la clientèle qui y est jointe. — Loc. À l'œil nu : sans instrument d'optique.
4 ♦ (1607) Dépourvu d'ornement, de parure. Une plaine nue, sans végétation (⇒ pelé) . Un arbre nu, sans feuilles. Mur nu, sans ornement, lisse. Cellule pauvre et nue, sans meubles. ⇒ vide.
5 ♦ Zool. Qui n'est pas recouvert de poils, de plumes ou d'écailles. Mollusques nus, dépourvus de coquille. Souris nues : espèce mutante glabre utilisée en recherche immunologique.
6 ♦ Fig. Sans apprêt, sans déguisement, sans fard. ⇒ sobre. Le style de Napoléon est simple et nu. « Une morale nue apporte de l'ennui » (La Fontaine). La vérité toute nue. ⇒ 2. cru, pur.
7 ♦ Dr. ⇒ nue-propriété.
II ♦ Loc. adv. (1174) À NU. Vx Sans être vêtu. Se mettre à nu : se mettre nu.
♢ Mod. À découvert. Mettre à nu. ⇒ dénuder, dévoiler. « Mon cœur mis à nu », carnet intime de Baudelaire. Mettre à nu un fil électrique, une surface métallique. — Vieilli Monter un cheval à nu, sans selle (cf. À cru).
III ♦ N. m. (1669) Corps humain ou partie du corps humain dépouillé(e) de tout vêtement. — Genre qui consiste à dessiner, à peindre, à sculpter le corps humain nu; œuvre de ce genre. ⇒ académie, nudité. « Ce que fut l'amour aux conteurs et aux poètes, le Nu le fut aux artistes de la forme » (Valéry). — Album de nus photographiques. Photos de nus. Un nu de Rodin.
⊗ CONTR. 2. Couvert, déguisé , habillé, vêtu.
⊗ HOM. Nue.
nu 2. nu [ ny ] n. m. inv.
• mot gr.
♦ Treizième lettre de l'alphabet grec (ν), correspondant au n français.
● nu nom masculin Représentation du corps humain totalement ou largement dévêtu, dénudé : Un nu de Renoir. Spectacle de cabaret, de music-hall où les artistes sont nus : Faire du nu. ● nu nom masculin invariable Lettre de l'alphabet grec (Ν, ν) notant la sonante correspondant au n français. ● nu (citations) nom masculin Jean Dubuffet Le Havre 1901-Paris 1985 À nu ; toutes choses mises d'abord au pire. Prospectus et tous Écrits suivants Gallimard ● nu (expressions) nom masculin Vieux. À nu, sans vêtement : Se mettre à nu. Mettre quelque chose à nu, le dénuder : Mettre un fil électrique à nu ; le démasquer, le dévoiler : Mettre à nu l'hypocrisie. Nu de mur, parement de mur sans aucune saillie. ● nu (homonymes) nom masculin nu adjectif nu nom masculin invariable nue nom féminin nu adjectif nu nom masculin nue nom féminin ● nu (homonymes) nom masculin invariable nu adjectif nu nom masculin invariable nue nom féminin nu adjectif nu nom masculin nue nom féminin ● nu, nue adjectif (latin nudus) Qui est sans aucun vêtement : Se baigner tout nu. Aller les jambes nues. Comme épithète après tête, mains, pieds, indique que quelqu'un est sans chapeau, sans gants, sans chaussures. (Avant le nom d'une partie du corps et relié à lui par un trait d'union, nu reste invariable : Aller nu-tête, nu-pieds. Après le nom, et non relié par un trait d'union, nu varie comme un autre adjectif) Qui est dépourvu de poils, de cheveux : Avoir le crâne nu. Qui n'est pas enveloppé, revêtu d'un isolant : Un fil électrique nu. Se dit des organes végétaux dépourvus des enveloppes qui les entourent habituellement. Qui est presque sans meubles, qui est sans ornements : Les murs nus d'une cellule. Qui est dépourvu de végétation, dépouillé de feuilles : Une plaine nue. ● nu, nue (citations) adjectif (latin nudus) Henri Frédéric Amiel Genève 1821-Genève 1881 La femme nue est belle une fois sur vingt, et trois ans sur soixante et dix. C'est-à-dire qu'il y a quatre cent soixante-dix à parier contre un qu'en photographiant une femme sans voile on fait une indécence, sans arriver à un effet esthétique. Journal intime, 28 juillet 1866 Claude Joseph Dorat Paris 1734-Paris 1780 L'Amour est nu mais il n'est pas crotté. Contes et nouvelles Michel Leiris Paris 1901-Saint-Hilaire, Essonne, 1990 Vient un jour où il n'y a plus de magie à être nu. Fibrilles Gallimard Alfred de Musset Paris 1810-Paris 1857 Nu comme un plat d'argent, — nu comme un mur d'église, Nu comme le discours d'un académicien. Premières Poésies, Namouna ● nu, nue (difficultés) adjectif (latin nudus) Orthographe Nu reste invariable devant les noms jambes, pieds et tête employés sans article ; il se joint à eux par un trait d'union pour former les expressions toutes faites nu-jambes, nu-pieds, nu-tête : se promener nu-jambes, marcher nu-pieds, sortir nu-tête. En revanche, on écrit : se promener les jambes nues, marcher les pieds nus, sortir la tête nue. ● nu, nue (expressions) adjectif (latin nudus) À demi-nu, à moitié nu, presque sans vêtements, insuffisamment couvert. Épée nue, hors du fourreau. Grain nu, grain de céréale qui se sépare des glumelles lors du battage. (Lorsque les glumelles restent adhérentes, le grain est dit vêtu.) Graine nue, graine des gymnospermes qui n'est pas entièrement incluse dans un fruit clos. Nu comme un ver, entièrement nu. Style nu, dépouillé, sans apprêts. La vérité toute nue, pure et simple. ● nu, nue (homonymes) adjectif (latin nudus) nu nom masculin nu nom masculin invariable nue nom féminin ● nu, nue (synonymes) adjectif (latin nudus) Qui est sans aucun vêtement
Synonymes :
- à poil (populaire)
- dénudé
- dévêtu
- en costume d'Adam(ou d'Eve)
Contraires :
- couvert
- habillé
- vêtu
Qui est dépourvu de poils, de cheveux
Synonymes :
- chauve
- glabre
- imberbe
Contraires :
- barbu
- chevelu
- poilu
- velu
Qui n'est pas enveloppé, revêtu d'un isolant
Contraires :
- garni
- isolé
- protégé
Qui est presque sans meubles, qui est sans ornements
Synonymes :
- austère
- monacal
- simple
- sobre
Contraires :
- décoré
- historié
- orné
- ornementé
Qui est dépourvu de végétation, dépouillé de feuilles
Synonymes :
- aride
- défeuillé
- pelé
- stérile
Contraires :
- feuillu
- herbu
- touffu
nu, nue
adj. et n. m.
rI./r adj.
d1./d Qui n'est couvert d'aucun vêtement. être tout nu. Avoir la tête nue. être nu-tête, nu-jambes, nu-pieds: avoir la tête, les jambes, les pieds nus.
d2./d Sans enveloppe, sans revêtement, sans ornement. épée nue. Chambre nue, dépourvue de meubles, d'ornements. Terrain nu, sans végétation ni construction. Arbre nu, dépouillé de son feuillage.
|| (Madag.) (En parlant d'un produit alimentaire.) Qui est vendu sans emballage. Yaourt nu. (V. logé.)
— Prix nu: prix du produit vendu sans emballage.
|| à l'oeil nu: sans instrument d'optique.
d3./d Fig. Simple, sans fioritures. Un style nu. Voilà la vérité toute nue, sans en rien cacher.
rII./r n. m.
d1./d Corps ou partie du corps dénudé(e); sa représentation dans l'art. Le nu et le drapé. Nu artistique.
d2./d CONSTR Nu du mur: surface unie de parement par rapport à laquelle on mesure les retraits et les saillies.
rIII/r Loc. adv. à nu: à découvert. Enlever l'écorce pour mettre le bois à nu.
|| Fig. Montrer, mettre son coeur à nu: ne rien cacher de ses états d'âme, de ses sentiments.
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nu
n. m. Treizième lettre de l'alphabet grec (N, nu), correspondant à n.
I.
⇒NU1, subst. masc.
Treizième lettre de l'alphabet grec écrite , N, et correspondant au N, n français.
— PHYS. NUCL. Facteur nu. ,,Nombre moyen par fission des neutrons de fission primaire émis (...). Ce facteur dépend de l'énergie des neutrons absorbés`` (Nucl. 1975).
Prononc.:[ny]. Homon. nu2, nue. Étymol. et Hist. [1529 gni (G. TORY, Champfleury, f° 69 v°: En langue Grecque y a XXIIII Lettres, desquelles les noms suivent... Gni; f° 70 r°: Gni vault N); 1765 nu (Encyclop., s.v. N: le signe de la même articulation étoit nommé nu, , par les Grecs)]; 1824 (RAYMOND). Transc. du nom de la treizième lettre de l'alphabet gr. .
II.
⇒NU2, NUE, adj. et subst.
I. —Adjectif
A. —[Appliqué à une pers. ou à une partie du corps]
1. [Appliqué à une pers.] Qui n'est pas, qui est peu vêtu:
• 1. «L'éternel Dieu appela Adam, et lui dit: Où es-tu? Et il répondit: J'ai entendu ta voix dans le jardin, et j'ai craint, parce que j'étais nu, et je me suis caché. Et Dieu dit: Qui t'a montré que tu étais nu? N'as-tu pas mangé de l'arbre duquel je t'avais défendu de manger?» Ainsi Adam, par l'effet de la connaissance, ressent la honte, qui recèle ou entraîne à sa suite la crainte.
P. LEROUX, Humanité, 1840, p.538.
a) Qui est dépouillé de tous ses vêtements. Synon. déshabillé, dévêtu, dans le plus simple appareil (fam.), en costume d'Adam (fam.), à poil (très fam.). Être, se mettre (tout) nu, coucher (tout) nu. Quand l'homme est tout nu devant vous, vous ne voyez d'abord que des rondeurs, des demi-teintes, vous voulez vous accrocher à des muscles et vous dérapez sur de la graisse... (ABELLIO, Pacifiques, 1946, p.33). Rose et nu sans un poil, avec ses joues roses et son gros petit ventre caressé par la lumière blonde du matin, Charlot ressemblait au plus beau bébé de France (SARTRE, Mort ds âme, 1949, p.42):
• 2. Paulina était nue.
Être nue c'est être absolue enfin. Elle se sentait nue dans son ventre enveloppé d'ombre, dans ses deux mamelles visibles dont les pointes durcissent à l'air frais, dans sa chevelure déployée, dans l'intérieur de son esprit.
JOUVE, Paulina, 1925, p.126.
— Fam. Se déshabiller tout nu. Se dévêtir entièrement. Et l'on vit l'étrange ambassadeur se déshabiller tout nu, piquer une tête dans la flotte et nager sans hésitation vers le rivage (CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p.181).
— En comp., pop., vieilli. Couche-toute-nue, subst. fém. Femme de petite vertu. Une couche-toute-nue se montra dans l'encadrement de la porte (...) les pieds dans des babouches brodées (COURTELINE, Train 8 h 47, 1888, 2e part., 7, p.176).
— En partic., BEAUX-ARTS. Figure nue. Statue, peinture représentant une personne sans vêtement (infra II):
• 3. Pour les dévots des XVIe et XVIIe siècles, la représentation d'une figure nue aurait paru un sacrilège. Du temps de Murillo, il était si difficile de trouver dans les académies un modèle, qu'il était d'usage que tour à tour les élèves missent habit bas et posassent pour leurs camarades.
MÉRIMÉE, Mosaïque, 1833, p.518.
♦Amour nu. Représentation du dieu Amour sous les traits d'un enfant ailé généralement nu (infra 2 a). Les Amours nus, pressés en bataillon, Ont des rosiers broyés le vermillon Sur le beau sein de cette enchanteresse (BANVILLE, Odes funamb., 1859, p.283).
b) Qui est partiellement dévêtu. (À) demi(-)nu, à moitié nu, mi-nu, nu jusque... J'ai des souvenirs charmants d'après-midi passés à son école, sous la petite avenue de peupliers, nu en caleçon, avec l'odeur des filets et du goudron... (FLAUB., Corresp., 1860, p.374). Luttons, dit Desrais (...). Ils se mirent tous deux nus jusqu'à la ceinture (A. FRANCE, Vie fleur, 1922, p.425):
• 4. C'était en hiver, un mois de décembre très froid, elle grelottait à demi nue dans des guenilles, ses pauvres petits pieds tout rouges dans des sabots.
HUGO, Misér., t. 2, 1862, p.649.
c) Qui ne porte pas de sous-vêtements (construction habituelle: nu dans, nu sous). Les fellahs nus sous une simple blouse en cotonnade bleue (DU CAMP, Nil, 1854, p.41). J'ai vu ce grand vieillard qui, nu dans son paletot pourri, croisait les bras sur sa poitrine (CLAUDEL, Ville, 1893, II, p.350).
d) Qui est peu ou mal vêtu ou pas du tout vêtu. L'été, ils partaient selon la mode pour Deauville ou pour La Baule, étendaient leurs trois beaux corps nus sur la plage (GIRAUDOUX, Bella, 1926, p.134).
— Compar. usuelle. Nu comme. Nu comme la main (v. ce mot 1re section I A 2 a ex. de Giono); nu comme le jour de sa naissance (v. GUÉHENNO, Journal homme 40 ans, 1934, p.148); nu comme un cierge (v. ROSTAND, Cyrano, 1898, III, 2, p.144); nu comme un ver (v. BOYLESVE, Leçon d'amour, 1902, p.221); nu comme un petit Saint-Jean (v. ZOLA, OEuvre, 1886, p.167); nu(e) comme Ève; (femme) nue comme une jument (v. AUDIBERTI, Mal court, 1947, II, p.164). Nu comme un nègre, dont il a le sang et le tempérament de priape (GONCOURT, Journal, 1868, p.425):
• 5. Il était nu comme Ève à son premier péché.
Quoi! tout nu! dira-t-on; n'avait-il pas de honte? (...)
Hassan était donc nu, —mais nu comme la main, —
Nu comme un plat d'argent, —nu comme un mur d'église,
Nu comme le discours d'un académicien.
MUSSET, Namouna, 1832, pp.389-390.
2. [Appliqué à une partie du corps]
a) [L'adj. nu est postposé]
— Qui n'est recouvert d'aucun vêtement ou accessoire vestimentaire. Elle a les bras nus, c'est une chair ferme et fraîche, rouge, presque sanglante (FLAUB., 1re Éduc. sent., 1845, p.197). Il me plaît de regarder un sein nu, ou une épaule, et d'admirer la belle ligne d'une taille souple qui ploie en valsant (FARRÈRE, Homme qui assass., 1907, p.87).
SYNT. Cou nu, cul nu (fam.), torse, ventre nu; cuisses nues; épaule, gorge, jambe, poitrine nue; corps nu; membres nus; peau nue.
♦Tête nue. Sans couvre-chef. Je laisserai le vent baigner ma tête nue (RIMBAUD, Poés., 1871, p.39).
♦Cheveux nus. Dépourvus de tout lien. Un jour que son grand ruban s'était dénoué il avait vu ses cheveux nus étalés sur ses épaules (LARBAUD, F. Marquez, 1911, p.177).
♦Pied(s) nu(s). Sans chaussures. Si votre maître ne peut plus aller avec ses souliers, il n'a qu'à aller pieds nus (POURRAT, Gaspard, 1925, p.287). Sans chaussettes ou sans bas. Elle avait ses pieds nus dans des pantoufles de satin (DUMAS fils, Dame Camélias, 1848, p.121).
♦En comp. Cul-nu, subst. masc. Amour ailé représenté par un enfant nu (supra 1 a). Tous les enfants porte-flambeau Vous suivent en battant des ailes. Tous ces petits culs-nus d'Amours, (...) Ont soin d'embellir vos atours (BANVILLE, Odes funamb., 1859, p.64).
— Qui est dépourvu de cheveux ou de poils. Visage nu:
• 6. Il était chauve, et chauve à ce point que son crâne, hormis le bas des tempes, s'offrait, du front, à la nuque, aussi lisse, aussi glabre, aussi nu que sa bosse conique et ses genoux circonflexes...
CLADEL, Ompdrailles, 1879, p.222.
♦Compar. (Crâne, visage) nu comme un oeuf. De beaux visages clairs et débordants, nus comme des fesses (GIRAUDOUX, Judith, 1931, II, 1, p.119). Il n'avait pas de barbe, ni de favoris, ni de moustache; une figure nue comme un oeuf (MORAND, Flagell. Séville, 1951, p.373).
b) [L'adj. nu est antéposé; il reste gén. inv. et est séparé du nom qu'il qualifie par un trait d'union] Nu-cou, nu-jambes. Le vieux brame introduisit donc le docteur anglais, revêtu de sa toile de coton, nu-tête et nu-pieds (BERN. DE ST-P., Chaum. ind., 1791, p.83). —Ah! les bons souliers que vous m'avez donnés-là! —Ça vaut mieux que d'aller nu-pattes (HUGO, Quatre-vingt-treize, 1874, p.81).
♦Va-nu-pieds.
c) À l'oeil nu, loc. adv. Sans l'aide d'un instrument d'optique. Étoiles visibles à l'oeil nu ou dans une lunette (DANJON, Cosmogr., 1948, p.292).
3. Qui est matériellement ou moralement dépourvu de tout, privé des biens essentiels. Synon. dépouillé, désarmé, sans défense. Et lui, nu, les mains vides, qui n'avait rien, pas même une pierre au bord d'un champ (ZOLA, Fécondité, 1899, p.79).
— En compos. Bras-nus, subst. masc. Les meurt-de-faim, les va-nu-pieds, les bras-nus, les déshérités, les orphelins, les malheureux (HUGO, Misér., t. 2, 1862, p.192).
— Compar. La pauvre Vallée est vendue; c'est Mathieu qui en est devenu le possesseur. Me voilà nu comme Job (CHATEAUBR., Corresp., t. 2, 1818, p.18). Ils m'ont tout pris, ma pauvre Charlotte, ils m'ont laissé nu comme un ver, mes gredins d'héritiers! (ZOLA, Hérit. Rabourdin, 1874, II, 1, p.171).
— Littér. Nu de + subst. Privé de, dépourvu de. Nu d'amour et d'amitié, il s'enfoncera plus avant dans la vie intellectuelle (BARRÈS, Barbares, 1888, p.80).
B. —[Appliqué à un animal ou à une partie de son corps]
1. Qui est dépourvu de poils, de plumes ou d'écailles. Chien nu. Il y en a [des reptiles] qui sont revêtus d'écailles, et d'autres qui ont la peau nue (LAMARCK, Philos. zool., t. 1, 1809, p.153). Les individus de cette race [d'oiseaux] se trouvent élevés comme sur des échasses, ayant obtenu peu à peu de longues pattes nues, c'est-à-dire, dénuées de plumes jusqu'aux cuisses (LAMARCK, Philos. zool., t. 1, 1809p.250):
• 7. Il y avait l'odeur de l'herbe, il y avait l'extraordinaire odeur du ver de terre (...) la poignante odeur du ver nu, gluant, vivant enroulé dans les humus plus radieux que mille soleils.
GIONO, Eau vive, 1943, p.313.
♦OEil nu. Dépourvu de paupières. Les poissons qui vivent sous l'eau, où les rayons du soleil sont presque sans action, ont les yeus nus (BERN. DE ST-P., Harm. nat., 1814, p.151).
2. Mollusque nu. Sans coquille. Parmi ces mollusques céphalés, ceux qui sont nus (sans coquilles) ont, en outre, dans leur manteau une cuirasse plus ferme encore que le manteau lui-même (LAMARCK, op.cit., p.172).
3. Cheval nu. Cheval dépourvu de tout harnachement. Ce n'est pas la peine de faire faire une housse à mon cheval, il ira bien tout nu (COURIER, Lettres Fr. et Ital., 1805, p.695). Au loin, dans l'étendue, les chevaux nus galopaient, échevelés comme des vierges folles (MONTHERL., Bestiaires, 1926, p.569).
C. —[Appliqué à un inanimé concr. ou abstr.]
1. [Gén. appliqué à un élément extérieur ou intérieur d'un décor (bâtiment, pièce, paysage)] Dépouillé, dépourvu des éléments qui l'accompagnent généralement ou qui le caractérisent.
♦Dépourvu de mobilier ou d'ornement. Pièce nue. C'est une vaste salle nue, triste, sans tapis, sans nattes, refroidissante, décrépite, en ruine (DU CAMP., Nil, 1854, p.35). Pas un papier sur la table, pas un objet sur la commode, pas un vêtement aux murs: le bois nu, le marbre nu, le mur nu (ZOLA, Conquête Plassans, 1874, p.926).
♦Dépourvu de végétation. Champ, colline, terrain, terre, rocher nu(e). Les landes nues, les plateaux pelés (CHATEAUBR., Mém., t. 1, 1848, p.551):
• 8. Il comparait (...) le joli ciel du printemps et la vallée qu'il avait vue si joyeuse pendant son premier voyage (...) à ces montagnes dépouillées de leurs vertes parures (...). Une terre nue est un douloureux spectacle...
BALZAC, Méd. camp., 1833, p.271.
♦Arbre nu, branche nue. Arbre, branche privé(e) de ses feuilles. Synon. dépouillé. La branche nue est une fronde qui lance un oiseau (RENARD, Journal, 1910, p.892):
• 9. Quand les amandiers nus se couvriront des fleurs du givre, alors nous nous soulèverons un peu, sensibles au premier vent d'espoir, bientôt redressées dans ce second printemps.
CAMUS, État de siège, 1948, 2e part., p.265.
♦Ciel nu. Ciel sans nuages. C'est un grand ciel nu d'hiver avec tous ses astres et astérisques (CLAUDEL, Corona Benignitatis, 1915, p.374).
2. Emplois techn.
a) Épée (arme, glaive) nu(e). Séparé(e) de son fourreau. Il [Attila] croit voir dans le ciel Saint Pierre qui, l'épée nue, lui défend d'avancer (STAËL, Allemagne, t. 3, 1810, p.147).
b) BOT. Qui est dépourvu des organes ou des enveloppes qui l'accompagnent ordinairement. Bourgeon, cellule, fleur, ovule, semence nu(e). Le botaniste les divise surtout en Blés à grains nus, où les glumelles se séparent aisément du grain, et Blés à grains enveloppés (PLANTEFOL, Bot. et biol. végét., t.2, 1931, p.290).
♦Plantation à racines nues. Plantation d'un arbre, d'un arbuste dont les racines ne sont pas protégées par une motte de terre. Anton. plantation en motte(s). Si les arbustes, au lieu d'être à racines nues, sont en mottes, c'est-à-dire, garnis de terre autour des racines, leur réussite en sera plus sûre (Voy. Pérouse, t. 1, 1797, p.230).
c) CHIM. Feu nu, à feu nu. V. feu I B 1.
d) DR. Titre nu. Charge achetée sans la clientèle qui s'y rattache. Il avait dévoré le droit par désespoir, et venait d'acheter un titre nu. Avoué sans le sou, sans clientèle (BALZAC, Mais. Nucingen, 1838, p.618).
e) ÉLECTR. Fils nus. Fils électriques non protégés par leur gaine. Synon. dénudés. L'emploi des fils nus doit (...) être proscrit des puits et des galeries de mines (HATON DE LA GOUPILLIÈRE, Exploitation mines, 1905, p.628).
f) LING. Racine nue. Racine se présentant dans une phrase sans aucun élément de formation. En russe, la racine nue apparaît au nominatif singulier de la déclinaison masculine dure (vol-«boeuf»)(MOUNIN 1974).
3. Au fig.
a) [Appliqué à un style, un ouvrage] Dépouillé de tout ornement, de tout artifice. Synon. sobre; anton. chargé, fleuri. Tout est cru en ce livre, déshabillé, nu (GONCOURT, Journal, 1858, p.489).
b) [Appliqué à un inanimé abstr.] Sans déguisement, à l'état pur. Fait, amour nu; force, sensation nue. «Ce moi, c'est la conscience centrale, l'axe de toutes les branches retranchées, le support de toutes les mutilations. Je n'ai bientôt plus que cela, la pensée nue». La pensée nue, voilà ce qu'Amiel n'a jamais renié (DU BOS, Journal, 1921, p.32).
— Compar. L'amour se montre tel qu'il est, nu comme la main, nu comme un ver (BERNANOS, Joie, 1929, p.618).
— La vérité toute nue. [Allusion à l'allégorie représentant la Vérité sous les traits d'une femme nue sortant d'un puits]:
• 10. Il y a chez Joubert le maximum de suspicion à l'égard de la nudité sous toutes ses formes. Peu de pensées le peignent mieux que celle-ci: «Ayez un esprit où la vérité puisse entrer nue, pour en sortir parée.»
DU BOS, op.cit., 1924, p.189.
II. —Subst. masc.
1. [À propos de pers. ou d'une partie du corps] Il parut examiner ses bras nus, son cou nu, tout le nu qu'elle montrait, comme si des comparaisons s'établissaient dans son esprit (ZOLA, Assommoir, 1877, p.383).
2. [À propos de choses] L'église est d'un nu rare et d'une ineptie curieuse (FLAUB., Champs et grèves, 1848, p.189).
— Nu de/du mur. Partie d'un mur ne comportant aucune saillie. Anton. fruit2. On dit «le nu» d'un mur, qui est la surface véridique sur laquelle tu peux te fier. On dit «le fruit» d'un mur, quand il penche (CAVANNA, Les Ruskoffs, Paris, Belfond, 1979, p.200).
B. —BEAUX-ARTS
1. Genre spécialisé dans la représentation du corps humain dans sa nudité totale. Faire une étude de nu:
• 11. Les formes irréprochables des tableaux dits de nu, avec leur modèle en serpent, sur un canapé, ou debout avec une jambe un peu pliée, une peau sans granules, crémeuse, bombée sur le devant d'une gorge ronde et crêtée de rose, l'horripilaient.
HUYSMANS, Soeurs Vatard, 1879, p.162.
♦Académie de nu. Section d'une école de peinture spécialisée dans le nu. Crois-tu qu'il rapporterait le genre de dessins qu'il rapporte s'il se rendait au cours? Je suis certaine qu'il en rapporterait d'autres. Yvonne: Je lui avais interdit l'Académie de nu (COCTEAU, Parents, 1938,I, 2, p.197).
2. P. méton. OEuvre représentant un nu. Faire un nu; un nu d'Ingres. Mademoiselle Sara Keller, la propre fille du peintre illustre, aurait posé pour ce «nu glorieux» que tout le monde admire au Salon (GIDE, Geneviève, 1936, p.1376).
3. P. anal., PHOT. Nu artistique. Photographie d'art consacrée au nu. Des albums de Willette et de Léandre, des cartes postales de «nu artistique», des livres de Maizeroy et de Champsaur (MONTHERL., Célibataires, 1934, p.743).
III. —À nu, loc. adv. À découvert.
A. —Être, (se) mettre à nu
1. [Le suj. désigne une pers.] (Se) déshabiller, découvrir une partie du corps. Jules Lefort déchira le corsage de la robe de Léonide, mit à nu sa poitrine (GOZLAN, Notaire, 1836, p.158).
2. [Le suj. ou compl. désigne une partie de l'anat. hum.] Mettre à nu le derme, la peau, une artère, un nerf. Sur un muscle [d'une grenouille] mis à nu, tiré par un fil de soie, étaient piquées des aiguilles électriques (DUHAMEL, Terre promise, 1934, p.52).
3. [Le suj. ou compl. désigne un inanimé concr.] Être, mettre à découvert. Conduite à nu. Non souterraine. Au sortir du réservoir, la conduite était à nu sur une longueur d'un demi-mètre (DUHAMEL, Désert Bièvres, 1937, p.108). Fil (électrique) à nu. Fil dénudé, sans enveloppe isolante.
— Racines à nu. V. supra I C 2.
— ÉQUIT. Monter un cheval à nu. Monter sans selle. Synon. à cru. V. supra I B 3.
B. —Au fig.
1. Se mettre à nu, mettre son coeur à nu. Se montrer tel que l'on est. Je voudrais mettre mon coeur à nu, te dire toute l'ardeur de mes rêves, te dévoiler la bouillante ambition de mes sens irrités par la solitude (BALZAC, L. Lambert, 1832, p.180).
2. Avoir les nerfs à nu. Avoir les nerfs à vif. Ses nerfs étaient à nu: tout le blessait, au sang (ROLLAND, J.-Chr., Révolte, 1907, p.595).
Prononc. et Orth.: [ny]. Homon. nue. Ac. 1694, 1718: nud (d < nudus), nue ,,le d ne se prononce point et quelques-uns ne l'écrivent pas``; dep.1740: nu, nue. a) [Nu + nom] Selon la règle, trait d'union et invariabilité: marcher nu-pieds, nu-tête, nu-jambes. Mais ex. sans trait d'union, avec ou sans accord: Elle était nus pieds (DUPUIS, Orig. cultes, 1796, p.281). Nu bras, nu cou, dans son déshabillé inquiétant (PÉLADAN, Vice supr., 1884, p.94). V. rem. de LITTRÉ: ,,autrefois cet usage [trait d'union et invariabilité] n'était nullement observé``. Et suivant l'arrêté du 26 févr. 1901 concernant les mots composés avec nu, demi, feu: ,,on tolérera l'accord de ces adjectifs avec le substantif qu'ils précèdent: ex. nu ou nus pieds [sans trait d'union]`` (CATACH-GOLF. Orth. Lexicogr. Mots comp. 1981, p.55). Mais cet arrêté n'a jamais été appliqué, nu antéposé restant inv. Exception: nue(-)propriété, plur. nues(-)propriétés, nu(-)propriétaire, plur. nus(-)propriétaires (anc. usage jur.) toujours accord mais flottement quant au trait d'union. Prop. CATACH-GOLF., op. cit., p.63: ,,à chaque fois que le premier terme, pour une raison ou pour une autre, sera dans l'incapacité de recevoir la marque du nombre, la soudure sera non seulement possible, mais souvent nécessaire. Le second terme, sauf exception, devra être considéré, avec ou sans la présence du trait d'union, comme portant non ses propres marques, mais celles de l'ensemble du composé``; p.312 ,,nujambes, nupieds, nutête et pour subst. va-nu-pieds: un vanupied, plur. des vanupieds``. b) [Nom + nu] Pas de trait d'union et variabilité: marcher pieds nus, aller tête nue, jambes nues. Étymol. et Hist. A. Adj. 1. a) ) ca 1100 fig. (os) nut «(os) dépouillé de la chair» (Roland, éd. J. Bédier, 3607); ) début du XIIes. «qui n'est couvert d'aucun vêtement» (St Brendan, éd. I. Short et Br. Merrilees, 1222: homme nud); b) 1176-81 «mal vêtu» (CHRÉTIEN DE TROYES, Chevalier Lion, éd. M. Roques, 5294: Ne ja n'en serons mialz vestues; Toz jorz serons povres et nues); 2. a) ) ca 1100 espee nue (Roland, 3581); ) 1580 cheval nu «cheval sans selle, sans harnais» (MONTAIGNE, Essais, I, 42, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, p.259); ) 1838 dr. titre nu (BALZAC, loc. cit.); b) 1690 à oeil nud (FUR.); 1798 l'oeil nud (Ac.); 3. ca 1155 nu de «dépourvu de» (WACE, Brut, 6106 ds T.-L.: Cument fust terre defendue Ki de bons chevalers ert nue!); b) 1607 «sans arbre ni verdure (d'un terrain)» (HULSIUS, s.v. Vogelweide d'apr. FEW t.7, p.228); c) 1690 «peu ou mal meublé» (FUR.: maison nue); 4. a) 1547 vérité nue (MARGUERITE DE NAVARRE, Comédie du désert, 1358 ds OEuvres, éd. Schneegans, p.173); b) 1549 «dépouillé (style)» (DU BELLAY, Deffence et illustration de la langue françoyse, éd. H. Chamard, p.23, 12: langue pauvre et nue); 5. a) 1636 zool. (MONET, s.v. ouaille: oüaille nue par le vantre, sans laine); b)1763 bot. graine nue (ADANSON, Familles des plantes, 1ere partie, p.LIII). B. Loc. à nu 1. 1174-76 «sans vêtements» (GUERNES DE PONT-STE-MAXENCE, Vie de St Thomas, 5343 ds T.-L.); 2. 1660 cheval à nu (OUDIN). C. Subst. 1. 1535 [éd.] nud «partie du corps laissée nue» (J. BOUCHET, Triomphes de la noble et amoureuse dame, f° 84 v°); 2. 1676 peint. (FÉLIBIEN). Du lat. nudus «dévêtu, vêtu légèrement, découvert, sans ressources, dépourvu de, sans ornement (style), pur et simple». Fréq. abs. littér.: 8884 (nu-pieds: 102). Fréq. rel. littér.: XIXes.: a) 9124, b) 14789; XXes.: a) 16100, b) 12392. Bbg. GRUNDT (L.-O.). Ét. sur l'adj. invarié en fr. Bergen - Oslo - Tromsø, 1972, pp.88-90; p.182. —Sculpt. 1978, p.505, 699.
1. nu, nue [ny] adj. et n. m.
ÉTYM. 1080, Chanson de Roland; du lat. nudus.
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I Adj. (En général placé après le nom, sauf dans nue propriété).
1 Qui n'est couvert d'aucun vêtement. || L'Homme nu (titre d'un volume des Mythologiques de C. Levi-Strauss). || Femme nue (→ Chair, cit. 19). || Adam (cit. 1, Bible) et sa femme étaient alors tous les deux nus. || Nu du haut (cit. 74, Molière) jusqu'en bas. || Un homme vraiment nu (→ Mariage, cit. 28, Molière). || Complètement nu, tout nu (→ Bois, cit. 42; fouler, cit. 2). ☑ Loc. Être nu comme la main, comme un petit saint Jean-Baptiste (→ ci-dessous, cit. 10, Balzac), nu comme un ver, nu comme en sortant du ventre de sa mère : entièrement nu (→ Être en tenue d'Adam, dans le costume d'Adam, dans le plus simple appareil, in naturalibus, dans l'état de nature; fam. à poil). || Aller tout nu (→ Enfant, cit. 25). || Doctrine qui conseille de vivre nu. ⇒ Nudisme. || Les adamiens vivaient nus. || Mettre qqn nu. ⇒ Dénuder, dépouiller, déshabiller. — Nu jusqu'à la ceinture (cit. 5). || Demi-nu (→ Fuselé, cit. 3). || À demi nu (→ Grelotter, cit. 4). || À moitié nu.
1 Alors Job se leva, déchira son manteau et se rasa la tête; puis, se jetant par terre, il se prosterna, et dit : Je suis sorti nu du sein de ma mère, et nu je retournerai dans le sein de la terre.
Bible (Segond), Job, I, 20.
1.1 (…) que Thérèse se mette à l'instant aussi nue que le jour qu'elle est venue au monde, et qu'elle se prête ainsi tour à tour aux différentes positions qu'il nous plaira d'exiger, pendant que la Dubois apaisera nos ardeurs, fera brûler l'encens sur les autels dont cette créature nous refuse l'entrée.
Sade, Justine…, t. I, p. 40.
2 Hassan était donc nu, — mais nu comme la main (…)
A. de Musset, Namouna, I, II (→ Académicien, cit. 3).
3 Nous savons bien qu'on ne se dévoile que pour quelque effet. Un grand saint le savait qui se dévêtit sur la place. Tout ce qui est contre l'usage est contre nature, implique l'effort, la conscience de l'effort, l'intention, et donc l'artifice. Une femme qui se met nue, c'est comme si elle entrait en scène.
Valéry, Variété II, p. 105.
♦ La vérité, Vénus sont représentées nues (sortant d'un puits, de l'onde).
REM. Tout nu, très courant, joue le rôle d'adjectif composé et souvent d'atténuatif.
♦ (En parlant d'une partie du corps). || Bras (cit. 1) nus (→ Amphore, cit. 2; buste, cit. 1). || Pied nu (→ Empire, cit. 17). || Sein, torse nu. || Épaule (cit. 9), jambe nue (→ Gracilité, cit. 3).
REM. Nu reste invariable s'il est suivi d'un nom sans article et relié par un trait d'union : nu-jambes, nu-pieds, nu-tête (→ Hommage, cit. 3; huron, cit. 1). || Un va-nu-pieds. ⇒ Va-nu-pieds. Il s'accorde quand il est placé après le nom. || Pieds nus, tête nue (→ Figure, cit. 10).
♦ ☑ Les mains nues : sans gants (cit. 2). || Lutter, boxer à main nue (→ aussi ci-dessous, 2.). Par anal. Dépourvu de cheveux, de poils. || Crâne nu (→ Barbe, cit. 11). || Visage nu. ⇒ Glabre.
4 (Il) s'achemina en habit de laine, nu-pieds par la boue et les cailloux.
Michelet, Hist. de France, IV, V.
5 Les communes, qui sont le peuple, mandées à la barre des lords, s'y présentent humblement, tête nue, devant les pairs couverts.
Hugo, l'Homme qui rit, I, III.
6 J'arrive, et je vous trouve en veste, comme un page,
Dehors, bras nus, nu-tête,
Hugo, la Légende des siècles, « Bivar », X.
7 Je croyais que les prophètes allaient nu-pieds.
M. Barrès, la Colline inspirée, IX.
♦ ☑ Loc. fam. Aller le cul nu, tout nu. → Le derrière au vent.
♦ Par exagér. Peu vêtu. || Femmes nues vêtues seulement d'un maillot (cit. 4) rose et d'une jupe de gaze. ☑ Loc. fam. Nu en chemise : ne portant qu'une chemise.
8 J'ai des souvenirs charmants d'après-midi (…) sous la petite avenue de peupliers, nu en caleçon, avec l'odeur des filets et du goudron (…) la vue des voiles (…) je ne sais quoi qui m'attendrit.
♦ Littér. || Nu ou tout nu. Qui est mal vêtu, en haillons. || Vêtir ceux qui sont nus. || Aller tout nu. || Soldats manquant (cit. 3) de tout, nus, sans souliers.
9 J'ai été nu, et vous m'avez revêtu; j'ai été malade, et vous m'avez visité; j'ai été en prison, et vous êtes venu me voir.
Bible (Sacy), Évangile selon saint Matthieu, XXV, 36.
♦ Par métaphore. Qui est sans fortune, sans argent, dénué de tout. || « Des commis (cit. 2)… qui jadis sont venus, nus, de leurs provinces ». — Par ext. Qui est sans protection, isolé, désarmé. || L'homme, abandonné nu et faible aux forces de la nature (→ Culturel, cit. 1).
10 S'ils gagnent cinquante mille francs et qu'ils en mangent soixante, en vingt ans on voit la fin de sa fortune, on se trouve nus comme de petits saint Jean (…)
Balzac, César Birotteau, Pl., t. V, p. 337.
2 Qui est dépourvu de son accompagnement, de son complément habituel. || Épée (cit. 8) nue. || Sabre nu (→ Heiduque, cit. 1), hors du fourreau. — Titre nu : charge achetée ou vendue sans la clientèle qui y est jointe.
11 Le poignard nu de Mayral réfléchissait toujours les rayons de la lune, qui, à ce moment, tombaient d'aplomb sur le lit.
Stendhal, Romans et nouvelles, « Le philtre ».
♦ Spécialt. Qui n'est pas aidé, armé d'un instrument, qui agit directement. ☑ À l'œil nu. ⇒ Œil.
3 (1607). Qui est dépourvu d'ornement, de parure. — Spécialt. Dépourvu de végétation. ⇒ Pelé. || Grève (→ Aigre, cit. 7), plaine (→ Âme, cit. 82), roche (→ Aveuglant, cit. 2), terre nue (→ 1. Limon, cit. 2). || Pays nu (⇒ Désert). || Aussi (cit. 31) loin que la vue allait, tout était nu. — Dépourvu de feuilles. || Les arbres sont nus en hiver (→ Bourgeon, cit. 2). — Dépourvu d'ornement, de saillie, d'accident; lisse (→ Long, cit. 10). || Le roc était par places brut et nu (→ Caverne, cit. 2). || Mur nu (→ Crucifix, cit. 3; 1. frise, cit. 1). || Bâtiments (→ Marquise, cit. 2), meubles (cit. 3) nus. — Qui est dépourvu, peu garni de meubles. || Pièce nue, sans meubles. || Ça fait un peu nu, sans l'armoire. || Une cellule de chartreux, pauvre et nue. ⇒ Austère.
12 Rien n'est si triste que l'aspect d'une campagne nue et pelée, qui n'étale aux yeux que des pierres, du limon et des sables.
Rousseau, Rêveries…, VIIe promenade.
13 Les terres végétales, que le gramen retenait sur les pentes, coulent en bas avec les eaux. Le rocher reste nu; gercé, exfolié par le chaud, par le froid, miné par la fonte des neiges, il est emporté par les avalanches.
Michelet, Hist. de France, III.
14 Que je m'ennuie entre ces murs tout nus
Et peints de couleurs pâles
Apollinaire, Alcools, p. 153.
♦ (Qualifiant l'expression, le style, etc.). Sans apprêt, sans déguisement, sans fard (→ Jeu, cit. 37). || Le style de Napoléon est simple et nu (→ Marquer, cit. 46). || L'expression nue de mes opinions (→ Enrichissement, cit. 2). || Le mot le plus nu mis en bonne (cit. 23) place. || « Une morale nue apporte de l'ennui » (→ Fable, cit. 12, La Fontaine). || C'est la vérité (toute) nue. ⇒ Pure.
4 Se dit des parties du corps d'un animal qui ne sont pas recouvertes de poils, de plumes ou d'écailles (→ Freux, cit. 1; marabout, cit. 6). — Mollusques nus, dépourvus de coquille.
♦ Bot. Dépourvu des appendices qui l'accompagnent normalement dans les autres végétaux. || Réceptacle nu. || Amande, graine, fleur nue.
5 (1765). Dr. civ. || Nue propriété (Littré, Planiol, etc.) ou nue-propriété (Académie, Capitant, Dalloz, etc.) : « Expression doctrinale moderne (inconnue du Code civil), par laquelle on désigne communément l'ensemble de ceux des attributs du droit de propriété qui appartiennent au propriétaire d'un bien sur lequel une autre personne jouit d'un droit d'usufruit, d'usage ou d'habitation, pendant le temps que persiste ce démembrement de la propriété » (Capitant). ⇒ Usufruit (→ Inaliénable, cit. 3). || Des nues-propriétés (Académie). — Nu propriétaire ou nu-propriétaire. || Une nue propriétaire ou une nue-propriétaire. || Des nus propriétaires ou des nus-propriétaires.
REM. Avec ou sans trait d'union, nu s'accorde avec le substantif. L'usage n'a pas suivi certains grammairiens qui voudraient faire nu invariable avec le trait d'union.
15 Mon père, par mon conseil, ne donnera que la nue propriété de cet héritage à ses petits-enfants, se dit-elle en traversant le pont, j'en aurai l'usufruit; je ne veux pas que ma fille et un gendre me chassent de chez eux : ils seront chez moi.
Balzac, le Député d'Arcis, Pl., t. VII, p. 695.
15.1 Vous avez revendu La Belle Angerie meublée, précisa le notaire. Le nu-propriétaire est désormais chez lui.
Hervé Bazin, Cri de la chouette, p. 287.
———
II ☑ Loc. adv. À nu. a (1174). Vieilli. Sans être vêtu. || Combattre à nu (→ Jeu, cit. 27). — Se mettre à nu (→ Ceindre, cit. 2) : se mettre nu.
16 Il n'y a qu'un moment, la jeune Taïtienne s'abandonnait aux transports, aux embrassements du jeune Taïtien; attendait avec impatience que sa mère (autorisée par l'âge nubile) relevât son voile, et mit sa gorge à nu.
Diderot, Suppl. au voyage de Bougainville, II.
⇒ Dénuder, dévoiler. || Mettre à nu les plaies de la société (→ Dénier, cit. 6), son âme, son cœur. || Mon cœur mis à nu, titre d'un carnet intime de Baudelaire. || Mettre à nu un fil électrique, une surface métallique. — Montrer son cœur à nu. || Laisser voir qqch. à nu (→ Authentique, cit. 16). || Se montrer à nu (→ Fasciner, cit. 7).
17 Mon ami, car vous serez toujours mon ami, gardez-vous de recommencer de pareilles confidences qui mettent à nu votre désenchantement, qui découragent l'amour et forcent une femme à douter d'elle-même.
Balzac, le Lys dans la vallée, Pl., t. VIII, p. 1030.
———
III (1669, Molière, la Gloire du Val-de-Grâce, d'abord t. d'arts). Nom masculin.
1 Corps humain ou partie du corps humain dépouillée de tout vêtement (→ Écorché, cit. 11). || Carnation d'un nu.
♦ Genre qui consiste à dessiner, à peindre, à sculpter le corps humain nu. — Dessin, peinture, sculpture qui représente le corps humain nu. ⇒ Académie, nudité. || Ce peintre excelle dans le nu. || Le nu peut être chaste (Académie). || De beaux nus. || Les nus de la Grèce (→ Gothique, cit. 14). || Le nu antique (→ Luxure, cit. 4). — « Partie des figures que les draperies recouvrent, mais sans empêcher de voir les formes » (Académie). || « … les belles draperies… Dont l'ornement aux yeux doit conserver le nu » (→ Caresser, cit. 12, Molière; harmonieux, cit. 10).
17.1 J'adoucis les expressions, vous le comprenez, Madame, j'affaiblirai de même les tableaux; hélas ! l'obscénité de leur teinte est telle que votre pudeur souffrirait de leur nu pour le moins autant que ma timidité.
Sade, Justine…, t. I, p. 40.
18 Ce que fut l'amour aux conteurs et aux poètes, le Nu le fut aux artistes de la forme; et, comme aux premiers, l'amour offrait une diversité infinie de manières d'exercer leurs talents, depuis la représentation la plus libre des êtres et des actes jusqu'à l'analyse la plus abstraite des sentiments et des pensées; ainsi, depuis le corps idéal jusqu'aux nudités les plus réelles, les peintres, dans le Nu, trouvèrent le prétexte par excellence.
Valéry, Degas, Danse, Dessin, p. 77.
2 Image d'une personne nue. || Album de nus photographiques. || Un nu d'un petit maître italien. || Nus pornographiques.
3 Le nu : la nudité. || « Le nu est chaste lorsqu'il est beau ».
B (1676). || Nu (d'un mur) : parement uni, sans creux ni saillie, d'un mur. || Les plâtriers dressent à la règle le plâtre frais des nus.
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COMP. et DÉR. (Du même rad.) Dénuder (et dér.). — Dénuer (et dér.). — Nudisme, nudiste, nudité, nûment ou nuement. — Nu-pied, va-nu-pieds.
HOM. 2. Nu, nue; formes du v. 1. nuer.
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2. nu [ny] n. m.
ÉTYM. Mot grec.
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♦ Treizième lettre de l'alphabet grec (ν), correspondant au n français.
➪ tableau L'alphabet grec.
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HOM. 1. Nu, nue; formes du v. 1. nuer.
Encyclopédie Universelle. 2012.