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gueule

gueule [ gɶl ] n. f.
goule XIe; gola 980; lat. gula « gosier, bouche »
IBouche (de certains animaux, surtout carnassiers). La gueule d'un chien, d'un brochet, d'un reptile. « les crocodiles et les requins qui passent entre deux eaux la gueule ouverte » (Céline). Loc. Se jeter, se précipiter dans la gueule du loup, dans un danger certain, et de façon imprudente. II(goule XIe) Fam. Visage, bouche (des personnes).
1La bouche considérée comme servant à parler ou crier. clapet. Ferme ta gueule ! tais-toi. Ellipt Ta gueule ! Pousser un coup de gueule : crier ou chanter très fort ( gueulante) . Un fort en gueule, une grande gueule : un homme bavard et grossier ( braillard, 2. gueulard) ; qui est plus fort en paroles qu'en actes. « Aussi marioles qu'ils se croient, ils parlent trop; c'est des grandes gueules » (Carco). Se fendre la gueule. Tu peux crever la gueule ouverte, mourir sans secours. La gueule ouverte (évoque la mort).
2La bouche considérée comme servant à manger. Ce piment emporte, arrache la gueule. Avoir la gueule de bois. Puer de la gueule : avoir mauvaise haleine. — Une fine gueule. gastronome, gourmet. « les plaisirs de la table, les vieilles recettes, les chefs disparus, le beurre blanc de la mère Clémence et autres propos de gueule » (Perec). S'en mettre plein la gueule : s'empiffrer ( gueuleton) . Se bourrer la gueule : s'enivrer.
3(1673) Figure, visage. Il a une bonne gueule, une sale gueule. « Est-ce que j'ai une gueule à être cajolé ! » (Cossery). tête. Loc. Délit de sale gueule, assimilant la couleur de la peau à une infraction qui justifie un contrôle d'identité (cf. Délit de faciès). « peurs ou haine selon que l'on s'appelle Paul ou Ahmed. Le délit de sale gueule est ici loi naturelle » (Izzo). Gueule de raie, d'empeigne. Sa gueule ne me revient pas. Arriver la gueule enfarinée. Faire une gueule d'enterrement. Faire la gueule (à qqn); tirer la (une) gueule (à qqn). bouder (cf. Faire la tête). Se casser la gueule. 1. tomber. Casser la gueule à qqn. battre. Soldat qui va se faire casser la gueule. tuer; casse-gueule. Je vais lui mettre mon poing sur la gueule. (Se) foutre sur la gueule : (se) battre. — Ramener sa gueule. Se foutre de, se payer la gueule de qqn, se moquer de lui. En prendre plein la gueule : recevoir les pires affronts, les critiques les plus violentes.
Une belle gueule. Une jolie petite gueule. Gueule d'amour, surnom de séducteurs irrésistibles.
Arg. milit. Une gueule cassée : un mutilé de guerre blessé au visage.
(1894) Arg. Nord Gueule noire. 2. mineur.
Avoir la gueule de l'emploi.
4(déb. XXe) Aspect, forme (d'un objet). Ce chapeau a une drôle de gueule. Absolt Ce décor a de la gueule, il fait grand effet. ⇒ allure.
IIIPar anal. de forme
1Bot. Fleur, corolle en gueule, divisée en deux lèvres qui demeurent plus ou moins ouvertes. Cour. Gueule-de-loup (voir ce mot).
2(1360) Ouverture par laquelle entre ou sort qqch. La gueule d'un pot ( égueulé) , d'un haut fourneau ( 1. gueulard) . Spécialt La gueule d'un canon.

gueule nom féminin (latin gula) Bouche de certains animaux (loup, crocodile, reptile, etc.) quand elle peut s'ouvrir largement. Populaire. Visage, figure, en particulier, son aspect ou son expression : Avoir une sale gueule. Faire une gueule d'enterrement. Populaire. Bouche : Ferme ta gueule. Populaire. Nourriture, bouffe : Être porté sur la gueule. Ouverture béante de certains objets : La gueule d'un four. Populaire. Forme, aspect de quelque chose : Cette ville a une drôle de gueule.gueule (citations) nom féminin (latin gula) Jacques Perret Trappes 1901-Paris 1992 Il faut se méfier des grandes gueules, bien sûr, et, par conséquent, se méfier aussi bien du préjugé contre les grandes gueules. Bande à part Gallimardgueule (difficultés) nom féminin (latin gula) Emploi 1. À propos d'animaux. Bouche est employé en général pour les animaux de selle, de trait, de bât et de pâture (cheval, âne, mulet, bœuf, chameau, éléphant, mouton…) et pour la plupart des animaux aquatiques (poissons, grenouille…). On dit gueule pour les animaux carnassiers (chien, chat, fauves, grands reptiles, poissons prédateurs, etc.). En zoologie, on emploie bouche dans les deux cas. 2. À propos de l'homme. Bouche est l'emploi correct et général. Gueule est très familier, voire vulgaire, quand il désigne la bouche de l'homme en tant qu'elle lui sert à parler ou à manger. Ainsi dans des expressions telles que : ouvrir, fermer sa gueule, une sauce qui emporte la gueule, avoir la gueule de bois. En revanche, les expressions fine gueule (gourmet) et amuse-gueule (menue friandise servie avec l'apéritif) sont admises dans le registre familier (mais en général les restaurants, surtout les plus prestigieux, annoncent des amuse-bouche plutôt que des amuse-gueule dans leurs menus). Gueule = visage, est familier : une jolie petite gueule, casser la gueule à qqn ; il a ce qu'on appelle une gueule (un visage typé, aux traits vigoureusement dessinés). En revanche, il est neutre et correct dans la locution gueule cassée, ancien combattant mutilé de la face, d'emploi traditionnel depuis la Première Guerre mondiale. ● gueule (expressions) nom féminin (latin gula) Familier. Avoir de la gueule, avoir beaucoup d'allure, produire une forte impression. Chasser de gueule, chasser en aboyant, en parlant des chiens. Populaire. Coup de gueule, cri exprimant la colère ; vive réprimande. Populaire. Crever la gueule ouverte, mourir sans secours. Populaire. Donner de la gueule, parler, crier très fort, intervenir avec éclat. Populaire. En prendre plein la gueule, recevoir les pires affronts, les critiques les plus violentes, les pires avanies. Populaire. Faire la gueule, bouder, avoir l'air mécontent, morose. Familier. Fine gueule, gourmet. Familier. Fort en gueule, grande gueule, qui parle fort, crie, se vante avec une audace qui n'est souvent qu'apparente. Familier. Gueule d'amour, séducteur. Familier. Gueule de bois, langue pâteuse et sensation de lourdeur dans la tête le lendemain d'un excès de boisson. Gueules cassées, nom donné depuis la Première Guerre mondiale aux grands blessés de la face. Familier. Gueule noire, mineur des houillères. Familier. Gueule de vache, personne brutale et autoritaire. Populaire. Se fendre la gueule, s'amuser, rire. Populaire. (Se) foutre sur la gueule, se battre, frapper quelqu'un. Populaire. S'en mettre plein la gueule, s'empiffrer ; se battre sans ménagement. Populaire. Se payer la gueule de quelqu'un, se foutre de la gueule de quelqu'un, se moquer de lui. Populaire. Ta gueule !, vos gueules !, tais-toi, taisez-vous. ● gueule (homonymes) nom féminin (latin gula) gueule forme conjuguée du verbe gueuler gueulent forme conjuguée du verbe gueuler gueules forme conjuguée du verbe gueuler gueules nom masculin

gueule
n. f.
d1./d Bouche des animaux carnivores, des poissons. Gueule d'un chien, d'un crocodile, d'un requin.
|| Loc. fig. Se jeter dans la gueule du loup: se mettre dans une situation dangereuse, par imprudence.
d2./d Fam. Bouche, et, par ext., visage humain. Une belle gueule. Une sale, une vilaine gueule.
|| Loc. Faire la gueule: bouder. Casser la gueule à qqn, le battre. Se casser la gueule: tomber. Fermer la (sa) gueule: se taire. Ta gueule!: silence! Grande gueule, fort en gueule: personne qui a l'habitude de parler très fort, de crier, ou qui parle avec assurance mais sans agir efficacement. Fine gueule: gourmet. Avoir la gueule de bois, la gorge sèche et la bouche pâteuse après s'être enivré. Avoir de la gueule (en parlant des choses): avoir de l'allure.
d3./d Ouverture. Canon chargé jusqu'à la gueule.
d4./d (Afr. subsah.) Gueule tapée: nom cour. du varan de terre.

⇒GUEULE, subst. fém.
A. — [Concernant certains animaux] Bouche des animaux carnassiers, des reptiles, des poissons, des batraciens. Le crapaud blanc accroupi ne ferma pas sa gueule humide (SCHWOB, Monelle, 1894, p. 89). C'était là qu'il retournait à chaque voyage, une noisette ou une faîne dans sa petite gueule mi-fermée où saillaient les lames jumelles de ses grandes incisives (PERGAUD, De Goupil, 1910, p. 127) :
1. Lorsqu'un loup ravissant rôde autour d'une bergerie, son œil s'enflamme à l'aspect du troupeau nombreux nourri dans un gras pâturage; la vue de la brebis excite sa faim, et sa langue, sortant de sa gueule béante, semble déjà teinte du sang dont il brûle de s'abreuver...
CHATEAUBR., Martyrs, t. 2, 1810, p. 169.
P. anal. On me conseilla de m'adresser à M. Laffitte et M. Laffitte m'avança dix mille francs que je jetai dans la gueule des créanciers les plus affamés (CHATEAUBR., Mém., t. 4, 1848, p. 103).
VÉN. Chien qui chasse de gueule. Chien qui aboie en suivant les traces (cf. BAUDR. Chasses 1834).
Loc. proverbiale. Se jeter, se précipiter, se fourrer dans la gueule du loup. Aller au-devant d'un danger certain. La maintenance de cette direction me surprenait. Elle nous menait en pleine gueule du loup, à Gênes (CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p. 215).
Par allégorie. [Concernant des représentations fabuleuses] Gueule de dragon, de démon; gueule de l'enfer :
2. Ce bas-ventre en délire porte, absorbe et émet toute la puissance lumineuse de la composition. Jamais le désir effréné ne fut si brutalement peint, avec un sens plus intense de la force d'espèce ignoble qui presse une chair de s'offrir comme s'offre une gueule de monstre.
VALÉRY, Variété V, 1944, p. 190.
B. — [Concernant l'homme] Pop. et fam.
1. Bouche.
a) [En tant qu'orifice initial du tube digestif] S'en mettre plein la gueule; plaisirs de la gueule.
Les choses de la gueule. La nourriture et la boisson. V. gueulard ex. 2.
Expressions
Être porté sur la gueule. Chercher les plaisirs de la table.
Être une fine gueule. Être gourmet. Adrien Hébrard, une des plus fines gueules que j'ai connues, Paul Gaulot (...) et moi menions le chœur de la renaissance stomacale (L. DAUDET, Salons et journaux, 1917, p. 185).
Emporter la gueule. [En parlant de mets épicés, d'alcool] Enflammer le palais. Et après ce fromage blanc (...) le tord-boyaux tout pur de la demoiselle. Le heurt est violent, et comme l'on dit dans la langue du lieu : Ça emporte la gueule (VEUILLOT, Odeurs de Paris, 1866, p. 151).
Avoir la gueule de bois. Avoir la bouche sèche et pâteuse à la suite d'un excès de boisson. Son cœur battait, il avait la gueule de bois, comme s'il s'était saoulé la veille (SARTRE, Morts ds âme, 1949, p. 9). Au fig. L'infinité de Dieu, de sa colère et de son indifférence, lui donnait la gueule de bois (AYMÉ, Vouivre, 1943, p. 157).
Proverbe. La gueule fait périr plus de gens que le glaive. Les excès de table sont plus meurtriers que la guerre.
b) [En tant qu'elle contribue à l'émission de la voix articulée]
Vulg. Fermer, boucler sa gueule. Se taire. Vas-tu la fermer ta gueule, tout de même (AYMÉ, Rue sans nom, 1930, p. 68). P. ell. Ta gueule! Tais-toi. Ta gueule, fais pas le gentilhomme. Dis-moi plutôt pourquoi tu étais chez Chauvieux cet après-midi (AYMÉ, Travelingue, 1941, p. 242).
Donner de la gueule, (pousser) un coup de gueule. Crier, gronder, chanter fort. C'était le coup de gueule de trois heures moins le quart [à la Bourse], la bataille des derniers cours, l'enragement à savoir qui s'en irait les mains pleines (ZOLA, Argent, 1891, p. 45).
Fort en gueule, grande gueule. Bavard et grossier. La grande qualité d'un ministre, la seule, Grâce à l'ordre nouveau, c'est d'être fort en gueule (POMMIER, Colères, 1844, p. 118).
Crever la gueule ouverte. Mourir sans aucune assistance, privé de secours :
3. Moi j'en ai vu qui avaient de la barbaque, les premiers jours, ils te la bouffaient sous le nez, ils t'auraient laissé crever la gueule ouverte.
SARTRE, Mort ds âme, 1949, p. 259.
c) [En tant qu'elle exprime un sentiment d'hilarité] Se fendre la gueule. V. fendre A 2 b.
2. Visage, figure.
a) [En tant que réalité physique] Il est mort comme un mec vivant dans la charge (...) une balle dans la gueule (CARCO, Innoc., 1916, p. 155). J'aurais dû me douter. Il a une sale gueule (AYMÉ, Tête autres, 1952, p. 162) :
4. — Est-ce que c'est plus important d'avoir une jolie gueule, ou d'être bien faite? — Ça dépend. — De quoi? — De l'ensemble, et aussi des goûts.
BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 54.
Gueule d'empeigne. Gueule de raie.
Coller, mettre la/sa main sur la gueule de qqn. V. coller ex. 8. Sur le coin de la gueule. V. gnon ex. de Queneau.
Casser la gueule à qqn. Le frapper violemment au visage :
5. Alors, avec cette facilité des foules à changer de passion, les soldats acclamèrent le caporal, qui répétait son serment de casser la gueule au premier de son escouade qui parlerait de ne pas se battre.
ZOLA, Débâcle, 1892, p. 49.
Se casser la gueule. Faire une chute. Mais figurez-vous qu'un matin on l'a trouvé étendu, tout de son long, au bas du mur, dans la rue. Il s'était cassé la gueule en repartant (QUENEAU, Pierrot, 1942, p. 42). Au fig. Subir un échec. J'ai tourné « L'écume des jours » d'après Boris Vian; le film s'est cassé la gueule (L'Express, 9 mars 1970 ds GILB. 1971).
Aller se faire casser la gueule. Aller au-devant de la mort, au-devant de sa perte; aller à la guerre. C'est vexant tout de même d'être là, à se faire casser la gueule pour les autres, quand les autres sont quelque part, à fumer tranquillement leur pipe (ZOLA, Débâcle, 1892p. 359).
Gueule cassée. Visage blessé. Il s'est battu avec nous dans les Flandres, et a reçu là-bas une terrible blessure au visage, qui lui vaut parmi les Bédouins le surnom de l'Homme à la gueule cassée (THARAUD, Alerte en Syrie! 1937, p. 125).
P. méton., arg.
Gueule cassée (arg. milit.). Blessé de la face. [À la Loterie nationale] Tirage des « Gueules cassées ».
Gueule noire (arg. des mines). Mineur :
6. Celui qui les a fréquentées quelque peu tire respectueusement son chapeau devant les attachantes et glorieuses « gueules noires ». C'est avec le souci perpétuel de la sécurité que doivent travailler les artisans de la mine.
E. SCHNEIDER, Charbon, 1945, p. 228.
b) [En tant qu'elle exprime un sentiment, une émotion, un état d'âme, un comportement] Faire une sale gueule, une drôle de gueule; avoir une bonne gueule. En faire une gueule! :
7. Il s'aperçoit pour la première fois que ses camarades le regardent d'une façon anormale. Il constate : — Vous en faites des gueules! Il essaie de sourire, mais il ne rencontre que des visages fermés, figés, et son sourire tombe.
SARTRE, Jeux sont faits, 1947, p. 153.
Faire la gueule (à qqn). Bouder. Dis donc, Marie-bon-bec, ne fais pas ta gueule, cria Coupeau. Tu sais, à Chaillot les rabat-joie! (ZOLA, Assommoir, 1877, p. 704).
Arriver, avoir, venir la gueule enfarinée. Arriver, paraître, venir sans méfiance ou avec une feinte naïveté :
8. — Tu l'avais ta gueule enfarinée, hein, grand saligaud? qu'on l'asticotait nous Robinson, histoire de le faire grimper et de le mettre en boîte. Tu croyais que t'allais te l'envoyer hein? le gueuleton pépère avec les vieux?
CÉLINE, Voyage, 1932, p. 137.
Se payer la gueule de qqn. Se moquer de. Il a cru qu'on se payait sa gueule (COCTEAU, Machine infern., 1934, I, p. 38).
3. [En parlant d'une pers. ou d'une chose] Aspect, apparence. De jour, le château a une gueule invraisemblable (GIONO, Gds chemins, 1951, p. 216).
Avoir de la gueule. Avoir quelque chose qui retient l'attention; être bien fait; avoir du chic. Quant aux Invalides, indiscutablement, « ç'a de la gueule » (H. BAZIN, Vipère, 1948, p. 219).
Avoir une sale gueule. Offrir une triste apparence. Il ne fait pas froid du tout, mais le pays a vraiment une sale gueule (GIONO, Gds chemins, 1951p. 196).
Avoir la gueule de l'emploi. Convenir pour l'emploi, le rôle, la fonction proposé(e). Enlève donc tes lunettes, dit Tortose à Pierrot, enlève donc tes lunettes, si tu veux avoir la gueule de l'emploi (QUENEAU, Pierrot, 1942, p. 7).
C. — [Dans le règne végét.] Fleur en gueule. ,,Se dit d'une corolle gamopétale divisée en deux lèvres, la supérieure ordinairement bifide, l'inférieure le plus souvent trilobée et présentant une bosselure saillante en dedans au palais qui ferme l'entrée de la gorge de la corolle`` (LITTRÉ-ROBIN 1858).
D. — [Concernant certains objets] Ouverture béante. Gueule d'un four, d'une cruche, d'une gouttière, d'un canon. Chargés jusqu'à la gueule (...) les fours dévoraient des pelletées de charbon (A. DAUDET, Jack, t. 2, 1876, p. 116) :
9. Et, depuis de longues minutes, il battait les pentes, lorsqu'il aperçut devant lui l'ouverture ronde, la gueule noire du tunnel. Un train montant s'y engouffrait, hurlant et sifflant, laissant, disparu, bu par la terre, une longue secousse dont le sol tremblait.
ZOLA, Bête hum., 1890, p. 43.
Charger un canon jusqu'à la gueule. Bourrer l'âme du canon de poudre et de mitraille. Une fois réduits à quatre pouces de longueur, on charge ces petits canons jusqu'à la gueule (STENDHAL, Chartreuse, 1839, p. 158).
REM. 1. Gueugueule, subst. fém. [Souvent précédé de l'adj. petite et s'appliquant aussi bien à une pers. qu'à un jeune ou petit animal] Petite gueule. Le petit chien est mort. Quel dommage! (...) Sa gueugueule Et son nénez, roses tous deux semblaient la seule Chose vivante en lui (VERLAINE, Dédic., Paris, éd. de Cluny, 1940 [1890], p. 178). Ah! Ah! grognassa Sylvestre Piboulet, on lui sert son petit déjeuner au lit, à Mistenflûte. Ces dames se dérangent pour sa petite gueugueule, ces dames le chouchoutent (ARNOUX, Zulma, 1960, p. 285). 2. Gueulette, subst. fém. [Dimin. plus affectif que gueugueule] Enfin la porte s'ouvre et une charmante gueulette de boniche apparaît dans le cadre, un sourire plein la bouche (T'SERSTEVENS, Itinér. esp., 1963, p. 260). 3. Gulaire, adj., zool. Qui fait partie ou est autour de la gueule. Un fort repli gulaire transverse (E. PERRIER, Zool., t. 4, 1928-32, p. 3094). Emploi subst. Plaque cornée autour de la gueule de certains animaux. La face ventrale [chez les tortues] est aussi protégée par des plaques cornées; ce sont une paire de gutturales ou gulaires (E. PERRIER, Zool., t. 4, 1928-32p. 2978).
Prononc. et Orth. : [gœl]. Att. ds Ac. 1694-1932, Homon. gueules. Étymol. et Hist. [Fin Xe s. gola « gosier, gorge » (Passion, éd. d'Arco S. Avalle, 102)] 1. a) ca 1135 os de la gole « os de la gorge, os du cou, au sens de vertèbres cervicales (v. J. Frappier ds Mélanges J. Boutière, pp. 238-239) » (Couronnement Louis, éd. E. Langlois, 132); b) 1174-77 « bouche (en tant qu'organe servant à crier) » (Renart, éd. E. Martin, II, 384 : Harou! s'escrie a plaine goule); c) 1176-81 d'un animal (CHR. DE TROYES, Chevalier Lion, éd. M. Roques, 3363); d) fin XVIe-début XVIIe s. p. ext. « visage (ici fig.) » (BÉROALDE DE VERVILLE, Moyen de parvenir ds JAUB. : la goule enfarinée); 2. XIIIe s. « gloutonnerie, gourmandise » (Isopet de Lyon, 450 ds T.-L.); 3. 1176 gueule « ouverture béante » (CHR. DE TROYES, Cligès, éd. A. Micha, 1942). Du lat. gula « gosier, gorge », « palais, bouche », p. ext. « gourmandise ». Fréq. abs. littér. : 1 578. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 1 046, b) 2 183; XXe s. : a) 2 926, b) 2 888. Bbg. « Bottleneck » : goulot ou goulet d'étranglement? Actual. terminol. 1972, t. 5, n° 8, p. 3 - CHAUTARD (É.). La Vie étrange de l'arg. Paris, 1931, p. 310, 650. - QUEM. DDL t. 2, 6, 7, 15; t. 9 (s.v. gueulette).

gueule [gœl] n. f.
ÉTYM. V. 1175; gola, 980; gole, v. 1135; goule, v. 1175, le Roman de Renart; du lat. gula « gosier, bouche des animaux ».
———
I Bouche, ouverture orale (de certains animaux, surtout carnassiers, reptiles, poissons). || Le lion ouvre une gueule énorme (→ Enflammer, cit. 23). || La gueule d'un chien, d'un loup, d'un renard, d'un furet.La gueule d'un poisson carnassier, d'un brochet, d'une perche, d'un requin. || Plaques situées près de la gueule d'un poisson. Gulaire.La gueule d'un reptile (→ Aspic, cit. 2; fasciner, cit. 4), d'un boa, d'un crocodile. || Gueule ouverte, béante (→ Curée, cit. 3; empailler, cit. 1). || Happer qqch. d'un coup de gueule. — ☑ Loc. (Vén.). Chien qui chasse de gueule, qui aboie en suivant les traces du gibier.
1 J'ai donc vu ce sanglier (…)
Ses deux yeux flamboyants ne lançaient que menace,
Et sa gueule faisait une laide grimace (…)
Molière, la Princesse d'Élide, I, 2.
2 Les chiens, ayant éventé notre présence, aboyaient à pleine gueule de sorte que toute la ferme fut bientôt en rumeur.
Th. Gautier, Voyage en Espagne, p. 227.
3 Combien de gens ont des gueules de bulldog, des têtes de bouc, de lapin, de renard, de cheval, de bœuf !
Maupassant, les Sœurs Rondoli, II.
4 (…) les crocodiles et les requins qui passent entre deux eaux la gueule ouverte autour des bateaux d'ordures et de viandes pourries qu'on va leur déverser au large, à la Havane.
Céline, Voyage au bout de la nuit, p. 29.
Loc. prov. (1612). Se jeter, se précipiter, précipiter qqn dans la gueule du loup, ou (vx), venir se mettre dans la gueule du lion, dans un danger certain, et de façon imprudente. — ☑ Il fait noir comme dans la gueule d'un loup.
5 Il fait noir comme dans la gueule d'un loup, dit en ce moment Pille-miche.
Balzac, les Chouans, Pl., t. VII, p. 1055.
Poét. || La gueule de l'enfer, d'un monstre infernal ou mythologique, du démon (→ Arracher, cit. 28; broyer, cit. 1; éclipse, cit. 1).
6 L'enfer semble une gueule effroyable qui mord.
Hugo, l'Année terrible, Octobre, III.
———
II (XIe, goule « visage », fin XVIe). Fam. Visage, bouche (des personnes).Avoir la gueule fendue comme une grenouille, comme une tirelire : avoir une grande bouche.
Spécialt.
1 La bouche considérée comme servant à parler ou crier.Vas-tu fermer, boucler ta gueule ! Boîte (→ La boucler, la fermer). || Ferme ta gueule ! || Tais ta gueule ! Ellipt.Ta gueule ! || Ta gueule, bébé : tais-toi !Crever (cit. 26) la gueule ouverte, en appelant au secours.Donner, pousser un coup de gueule : crier, gronder ou chanter très fort.Il est fort, elle est forte en gueule. || Un fort en gueule : bavard et grossier ( Braillard, cit. 1; 2. gueulard, 1.). — ☑ Fam. Se fendre la gueule : rire. Pêche. — ☑ (Vx). Mots de gueule : paroles brutales et grossières.
7 Vous êtes, mamie, une fille suivante
Un peu trop forte en gueule, et fort impertinente (…)
Molière, Tartuffe, I, 1.
8 Est-ce qu'il faut toujours l'entendre crier ?
Quelle gueule !…
Racine, les Plaideurs, I, 2.
9 On ne peut guère fermer la gueule à ces roquets-là (la canaille littéraire), parce qu'ils jappent pour gagner un écu.
Voltaire, Lettre à Mme Denis, 1082, 22 mai 1752.
10 (…) il n'y avait pas un homme (Hanriot) qui s'entendit de si loin; c'était (il faut dire le mot) une gueule terrible, à faire taire toute une place.
Michelet, Hist. de la Révolution franç., X, XI.
11 (…) les coups de gueule de Derouet, — ces coups de gueule dont la renommée amenait chaque soir sur Montmartre de longues bandes vadrouilleuses affluant là des quatre extrémités de Paris (…)
Courteline, Messieurs les ronds-de-cuir, VI, III.
11.1 Le maréchal (Chen-yi) rit. L'expression « se fendre la gueule » lui convient à merveille.
Malraux, Antimémoires, Folio, p. 504.
12 Il n'est pas grossier, brutal, fort en gueule, comme cet animal de Groult qui amuse toute la salle.
G. Duhamel, Récits des temps de guerre, I, La grâce.
Loc. Avoir une grande gueule.
12.1 Si le général de Gaulle nous montre « comment faire autrement », si les Français et le peuple algérien se réconcilient sous son égide, dans une Algérie autonome où les deux drapeaux flotteront et ne seront plus jamais séparés, eh bien, je me consolerai de voir la République devenir autoritaire, j'accepterai que Marianne ait tout à coup cette grande gueule, ce grand style, cette puissance d'orgueil, d'indifférence et de mépris, dont on peut s'offenser… mais quoi !
F. Mauriac, le Nouveau Bloc-notes 1958-1960, p. 57.
Par métonymie (→ ci-dessus cit. 8 et 10). — ☑ Loc. Grande gueule : personne qui parle beaucoup et fort (spécialt, qui est plus forte en paroles qu'en actes). Va-de-la-gueule. || Ce type est une grande gueule, mais il n'est pas bien dangereux.
12.2 Laissez faire, lui avait conseillé Bernard. Nous saurons tout de même bien ce qu'ils ont dans leur sac. Aussi marioles qu'ils se croient, ils parlent trop : c'est des grandes gueules.
Francis Carco, les Belles Manières, p. 50.
2 (XIIIe). a La bouche considérée comme servant à manger ou à engloutir ( Gueuleton; → Aboyer, cit. 3; artillerie, cit. 6; bouillie, cit. 1).S'en mettre plein la gueule.Avoir la gueule pavée, blindée. Gosier.Se rincer la gueule ( Boire).Se bourrer la gueule : se saouler.Emporter la gueule, se dit à propos de mets épicés.Vulg. Puer de la gueule, avoir mauvaise haleine.
13 Son peu de fortune et sa passion pour le Bric-à-Brac lui commandaient un régime diététique tellement en horreur avec sa gueule fine, que le célibataire avait tout d'abord tranché la question en allant dîner tous les jours en ville.
Balzac, le Cousin Pons, Pl., t. VI, p. 533.
14 On n'a jamais peint les exigences de la Gueule, elles échappent à la critique littéraire par la nécessité de vivre; mais on ne se figure pas le nombre des gens que la Table a ruinés.
Balzac, le Cousin Pons, Pl., t. VI, p. 534.
(1902). Loc. cour. Gueule de bois : sensation de bouche empâtée, sèche, après un excès de boisson (abrév. fam. : G. D. B. [ʒedebe]). || Une fameuse gueule de bois.
15 (…) il avait la gueule de bois, comme s'il s'était saoulé la veille.
Sartre, la Mort dans l'âme, p. 9.
Loc. fig. Vx. Gueule béante : appétit, ambition.
16 (Le président) de Mesmes, bien éveillé, bien averti, avait tourné vers cette première charge de la robe une gueule béante.
Saint-Simon, Mémoires, IV, XXI.
b (XIIIe). || La gueule. Gloutonnerie ou gourmandise. || Tout pour la gueule. Bouffe. || Être porté sur la gueule. 3. Gueulard. — ☑ Prov. (vx). La gueule fait périr plus de gens que le glaive.
Par métonymie.Fine gueule : gourmet, gastronome.
3 (1673). Figure, visage. Face, tête. || Il a une bonne gueule, une gueule sympathique. || Il, elle a une belle gueule. || Une jolie petite gueule.(1903). || Une sale gueule. — ☑ Loc. Une gueule de raie.Une gueule d'empeigne.Une gueule de voyou. || Une gueule de vache. || Cette gueule-là ne me revient pas (→ Antipathique).Il est venu, la gueule enfarinée (cit. 3).
17 Montgobert m'a fait rire du respect qu'elle a eu pour M. de Grignan; elle avait mis qu'il vint à ce bal la gueule enfarinée; tout d'un coup elle s'est reprise, elle a effacé la gueule, et a mis la bouche.
Mme de Sévigné, Lettres, 631.
(1898). Faire une gueule (et qualificatif) : faire une tête… || Faire une gueule d'enterrement.Faire une drôle de gueule.Faire une gueule de six pieds de long. || T'en fais, une gueule ! — ☑ Faire la gueule, sa gueule : bouder. || Arrête de faire la gueule ! || Mais, ma parole, tu nous fais la gueule !
(En compl., exprimant des mauvais traitements). || Je vais te foutre mon poing sur la gueule. || Recevoir un coup, une balle dans la gueule.(Surtout avec le v. casser).Casser la gueule à qqn, le battre, lui donner une correction (→ Flirter, cit. 3).Bourrer la gueule à qqn.Se casser la gueule : tomber et se faire mal (→ Tatouille, cit.). Fig. Subir un échec. || Leur commerce marche mal, ils vont se casser la gueule.Un soldat qui va se faire casser (cit. 9) la gueule. Tuer. — ☑ Argot milit. Gueule cassée : mutilé de guerre blessé au visage.
18 (…) la croix est pour ceux qui peuvent encore se faire casser la gueule. — Désabusez-vous, mon brave : il y a aussi des croix pour les invalides.
Balzac, Souvenirs d'un paria, I, in Œ. diverses, t. I, p. 223.
19 (…) quelle modeste jeune fille, habitée d'amour, ne flétrit in petto sa rivale en la traitant de gueule de pou et de vache malade ?
Colette, l'Étoile Vesper, p. 15.
20 Tu parleras, cochon, ou je te casse la gueule !
M. Genevoix, Raboliot, I, II.
Cracher à la gueule de qqn, l'insulter. — ☑ Se payer (cit. 46) la gueule de qqn, se foutre de la gueule de qqn, se moquer de lui.
Loc. Gueule noire : mineur de charbon (dans le Nord de la France).
Gueule d'amour, surnom de séducteur irrésistible.(En appellatif). || Ma petite gueule !
21 Il écoutait, distrait, l'hommage qu'on lui rendait. — Ma petite gueule ! mon jésus ! (…) soupirait Fernande.
Francis Carco, Jésus-la-Caille, II, III.
Loc. Allure (personnes). Ce type a, n'a pas la gueule de l'emploi, le physique, l'allure qui convient. — ☑ Avoir une gueule à (et inf.), une tête, une apparence à… Air.
21.1 Moi, si je pouvais t'oublier, je t'oublierais tout de suite…, je te le garantis !… (Se répétant à elle-même.) Un bon souvenir…, des souvenirs… (Brusquement à François.) Est-ce que j'ai une gueule à faire l'amour avec des souvenirs ?
J. Prévert, Le jour se lève (scénario), in l'Avant-Scène, no 53, p. 33.
4 (Déb. XXe). Aspect, forme (d'un objet). || Ce chapeau a une drôle de gueule (→ Air). || L'affaire prend une sale gueule, mauvaise tournure.
22 Ne vous étonnez donc pas que mon casino, bien que d'une formule âprement moderne, ait aussi cette douce gueule de lieu saint de l'Islam.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. V, XXVII, p. 287.
23 Il n'y a qu'à voir la gueule d'un billet de dix francs à côté de deux pièces de cent sous pour comprendre l'argent.
Giraudoux, la Folle de Chaillot, II, p. 153.
Ça a de la gueule; ce paysage, ce tableau a de la gueule, a grand air, fait grand effet.
———
III Par anal. Sans connotation familière.
1 (Se dit de choses dont la forme rappelle la gueule d'un animal). Bot. || Fleur, corolle en gueule, divisée en deux lèvres qui demeurent plus ou moins ouvertes ( Zygomorphe). || Gueule-de-loup (→ ci-dessous à l'ordre alphabétique).
2 (1360). Ouverture par laquelle entre ou sort quelque chose. || La gueule d'un four, d'un haut fourneau ( 1. Gueulard), d'un tunnel. || La gueule d'une cruche, d'une gouttière, d'une fontaine, d'un tonneau.La gueule d'un canon, d'une bombarde (cit. 1), d'un tromblon (→ Braquer, cit. 2). || Charger un canon jusqu'à la gueule, se disait autrefois lorsqu'on bourrait l'âme du canon de poudre et de mitraille pour rendre son tir plus meurtrier.
24 Enfin l'Othello, qui se trouvait alors à dix portées de fusil, montra distinctement les gueules menaçantes de douze canons prêts à faire feu.
Balzac, la Femme de trente ans, Pl., t. II, p. 816.
25 Au bas, des arcades à piliers trapus ouvrent leurs gueules sombres, au fond desquelles scintillent vaguement les montres de quelque boutique d'orfèvrerie.
Th. Gautier, Voyage en Russie, IV, p. 50.
DÉR. 1. Gueulard, 3. gueulard, gueuler, gueules, gueuleton, gueulette, gueulin.
COMP. Bégueule, dégueuler, 1. égueuler, 2. égueuler (s'), engueuler. Amuse-gueule, brûle-gueule, casse-gueule, va-de-la-gueule. Gueulebée, gueule-de-four, gueule-de-loup, gueule-de-raie.
HOM. Gueules.

Encyclopédie Universelle. 2012.