1. moyen, moyenne [ mwajɛ̃, mwajɛn ] adj. ♦ Qui tient le milieu. I ♦
1 ♦ Qui se trouve entre deux choses.
♢ (Dans l'espace, entre deux parties extrêmes ou deux choses de même nature). ⇒ médian; intermédiaire. Oreille moyenne. Le cours moyen d'un fleuve. Le Moyen-Orient.
♢ (Dans le temps) Le Moyen Âge (voir ce mot). Crédit à moyen terme, d'une durée comprise entre deux et sept ans. Ling. Le moyen français : la langue française entre l'ancien français et le français moderne (approximativement les XIV e et XV e s.). — Cours moyen, situé entre le cours élémentaire et la sixième. Cours moyen première (CM 1), deuxième année (CM2).
♢ (Dans l'ordre d'un énoncé) Math. Termes moyens, et n. m. pl. les moyens : les deux éléments centraux d'un ensemble de quatre éléments.
♢ MOYEN TERME (dans un syllogisme) :celui des trois termes par l'intermédiaire duquel le majeur et le mineur sont mis en rapport. ⇒ 1. médium. — Cour. Médiateur. Fig. Parti intermédiaire entre deux solutions extrêmes, deux prétentions opposées. ⇒ milieu. « Si vous ne faites pas fortune, vous serez persécuté : il n'y a pas de moyen terme pour vous » (Stendhal).
2 ♦ Qui, par ses dimensions ou sa nature, tient le milieu entre deux extrêmes. Être de taille moyenne. Moyenne altitude. — Cin. Moyen métrage. — Boxe Poids moyen. Cour. Prix moyen. ⇒ modéré. Petites et moyennes entreprises (P. M. E.). Solution moyenne. ⇒ intermédiaire. Cadre moyen. Classes moyennes : petite et moyenne bourgeoisies. « La classe moyenne, bourgeoise [...] Classe vraiment moyenne en tout sens, moyenne de fortune, d'esprit, de talent » (Michelet).
3 ♦ Qui est du type le plus courant. ⇒ 1. courant, ordinaire. Le Français moyen : personne représentative du commun des Français (cf. Monsieur Tout le monde). Le lecteur, le spectateur moyen. ⇒ lambda.
4 ♦ Qui n'est ni bon ni mauvais. Qualité moyenne. ⇒ correct. Intelligence moyenne. Élève moyen en mathématiques. Résultats moyens. ⇒ honnête, honorable, médiocre, passable.
II ♦ (XVIIIe) Que l'on établit, calcule en faisant une moyenne. Température moyenne annuelle d'un lieu. La durée moyenne de la vie (cf. Espérance de vie). Cours moyens de la Bourse. Temps solaire vrai et temps moyen.
⊗ CONTR. Extrême. Excessif, limite. Énorme, immense, minuscule. Exceptionnel, génial.
moyen 2. moyen [ mwajɛ̃ ] n. m.
• 1361; de 1. moyen « intermédiaire »
1 ♦ Ce qui sert pour arriver à une fin. ⇒ procédé, voie. Votre père « peut faire fortune là-bas; je lui en fournirai les moyens » (Montherlant). PROV. Qui veut la fin veut les moyens. La fin justifie les moyens. — Gramm. Complément de moyen, introduit par avec, de, par (ex. Être tué par une bombe). — Le moyen, les moyens de faire qqch. Par quel moyen ? ⇒ comment. Se donner les moyens de réussir. Trouver un moyen. ⇒ formule, méthode, 3. plan, recette; fam. biais, combine, filon, 2. joint, système, 1. truc. Il a trouvé le moyen d'entrer sans payer. Trouver moyen de : parvenir à (souvent iron.). Il « trouvait moyen d'être tout ensemble ultra-royaliste et ultra-voltairien » (Hugo). Pop. Tâcher moyen. — S'il en avait le moyen, les moyens, s'il le pouvait. Prendre, employer, utiliser un moyen. Avoir, laisser le choix des moyens. Il y a plusieurs, mille moyens de... ⇒ façon, manière. Il a utilisé tous les moyens (cf. Remuer ciel et terre). Tous les moyens (lui) sont bons : il est peu difficile, peu scrupuleux sur le choix des moyens. Par tous les moyens : à toute force, à tout prix. Il n'y a pas d'autre moyen. — Moyen efficace. Un bon moyen, le meilleur moyen. Iron. C'est le meilleur moyen d'échouer. « Vous avez refusé un moyen de me voir ? Un moyen simple, commode et sûr ? » (Laclos). Moyen provisoire, insuffisant. ⇒ demi-mesure, 2. expédient. Moyen de fortune. Les moyens du bord. Employer les grands moyens, ceux dont l'effet doit être décisif par la force, l'importance des éléments mis en jeu (cf. Fam. Mettre le paquet, faire très fort). Moyen détourné. ⇒ artifice, astuce, biais, 1. calcul, 1. manœuvre, ruse, subterfuge.
♢ IL Y A MOYEN, IL N'Y A PAS MOYEN DE : il est possible, il est impossible de. Il n'y a pas moyen de le faire céder, qu'il soit à l'heure. Ellipt Pas moyen, plus moyen de le voir en ce moment ! ⇒ impossible. Pas moyen ! rien à faire ! ⇒ 2. mèche. « Dimanche, avec mes parents, pas moyen de rire » (Aymé).
♢ Moyen d'action. ⇒ levier, 1. ressort. Moyens de pression. Moyens de défense. Moyen de contrôle. Moyens de production. Moyen de paiement. Moyens d'expression (d'une personne; fig. d'un art).— Moyens de transport, de communication. Vous y allez par quel moyen ?
♢ Dr. Raison de droit ou de fait invoquée devant une juridiction à l'appui d'une prétention ou pour faire rejeter la prétention de la partie adverse. Les moyens d'une cause. Moyens de défense. Moyens d'opposition, de faux (1.; III).— Fin., au plur. Procédés par lesquels le Trésor public se procure les ressources nécessaires à l'équilibre du budget. Voies et moyens.
♢ PAR LE MOYEN DE : par l'intermédiaire de, grâce à. ⇒ canal, entremise, instrument, intermédiaire, truchement. — AU MOYEN DE : à l'aide de (le moyen exprimé étant généralt concret). ⇒ avec, grâce (à), moyennant, 1. par. Appliquez au moyen d'une brosse. « André se dirigeait au moyen d'alignements pris par lui » (Loti).
2 ♦ Spécialt (1580) LES MOYENS : pouvoirs naturels et permanents d'une personne, dans l'ordre physique, intellectuel ou moral. ⇒ capacité, faculté , force. Moyens physiques d'un sportif. Avoir des moyens, de grands moyens, peu de moyens. ⇒ 1. don, facilité. « Un garçon qui avait de l'ambition et des moyens; il s'appliquait, il comprenait, il retenait » (Alain). Être en possession de tous ses moyens, en pleine possession de ses moyens : être en bonne forme physique ou morale. Loc. Perdre (tous) ses moyens : être troublé, décontenancé. — Par ses propres moyens : sans aide étrangère, en agissant seul. Il est rentré chez lui par ses propres moyens, sans être accompagné, ou sans utiliser les transports publics.
3 ♦ (fin XVe) Plur. Ressources pécuniaires. Ses parents n'avaient pas les moyens de lui faire faire des études. C'est trop cher, c'est au-dessus de mes moyens, je n'en ai pas les moyens. Chacun donne selon ses moyens. — Fam. (l'emploi qu'on en fait n'étant pas précisé) Avoir de petits, de gros moyens. Des gens qui ont les moyens, qui n'ont pas les moyens : des gens riches, pauvres.
⊗ CONTR. 1. Fin, impossibilité, impuissance.
● moyen adverbe Familier. Moyennement, ni bien ni mal. ● moyen nom masculin Ce qui est moyen, intermédiaire, également éloigné des extrêmes : Prendre du gros, du moyen et du fin. Élève qui par ses résultats est dans la moyenne, par opposition aux faibles et aux forts. Élève de la classe intermédiaire (environ 4 ans) à l'école maternelle, par opposition aux petits et aux grands. ● moyen nom masculin (de moyen) Manière d'agir, procédé qui permet de parvenir à une fin : Quel moyen emploierez-vous pour le convaincre ? Ce qui permet de faire quelque chose : L'avion, le train sont des moyens de transport. Moyen de pression. Argument présenté par une partie à un procès. (Les moyens du demandeur ou du défenseur sont le fondement de la cause.) ● moyen (expressions) nom masculin Moyens d'une proportion, deuxième et troisième termes de la proportion. (Dans toute proportion, le produit des moyens est égal au produit des extrêmes.) ● moyen (difficultés) nom masculin (de moyen) Emploi 1. Avoir les moyens. Au sens de « richesses, ressources pécuniaires » et « capacités intellectuelles ou physiques », le mot s'emploie au pluriel : vivre selon ses moyens, au-dessus de ses moyens ; perdre tous ses moyens (= se troubler). 2. Trouver moyen de s'emploie au sens de « parvenir, réussir à » et souvent ironiquement : il a trouvé moyen de se fâcher avec tous ses amis. Recommandation Éviter le solécisme tâcher moyen, fréquent dans la langue populaire. ● moyen (expressions) nom masculin (de moyen) Au moyen de, par le moyen de quelque chose, en faisant usage de quelque chose : Monter au moyen d'une échelle ; par l'entremise, le canal de : Diffuser un communiqué par le moyen des ondes. Complément de moyen, complément circonstanciel indiquant au moyen ou à l'aide de quoi une action est accomplie (par exemple Il se chauffe au bois). Il y a (il n'y a pas, plus) moyen de + infinitif, il est possible, impossible. Les grands moyens, des mesures très énergiques. Moyens de production, objets employés en complément du travail de l'homme dans le processus de production. Par tous les moyens, à tout prix. Moyen de pur droit, règle estimée applicable à des faits établis. Trouver moyen de + infinitif, parvenir à, réussir à (souvent ironique). ● moyen (synonymes) nom masculin (de moyen) Manière d'agir, procédé qui permet de parvenir à une fin
Synonymes :
- combine (familier)
- façon
- manière
- procédé
- truc (familier)
- voie
● moyen, moyenne
adjectif
(latin medianus, qui est au milieu)
Qui se situe entre deux extrêmes : Homme de taille moyenne. Une dose moyenne. Hôtel de catégorie moyenne.
Qui n'est ni bon ni mauvais : Viande de qualité moyenne. Élève moyen. Résultats moyens.
Qui se situe dans la zone intermédiaire d'une hiérarchie sociale : Cadre moyen.
Qui est obtenu en calculant exactement ou approximativement une moyenne : La température moyenne. Un prix moyen.
Se dit du type de personne le plus répandu, qui représente la moyenne générale : Le spectateur moyen.
Astronomie
Se dit d'un mouvement ou d'une durée définis par des relations complexes, dans lesquelles on ne considère que les termes qui croissent comme un polynôme du temps sans s'occuper des termes périodiques.
Linguistique
Dans l'évolution d'une langue, se dit d'un stade intermédiaire entre un état dit ancien et un état dit moderne (par exemple le moyen français est l'état de la langue française entre le XIVe et le XVIe s.).
Phonétique
Se dit d'une voyelle dont le timbre est intermédiaire entre celui d'une voyelle ouverte et celui d'une voyelle fermée.
● moyen, moyenne (expressions)
adjectif
(latin medianus, qui est au milieu)
Âge moyen, âge intermédiaire entre la jeunesse et la vieillesse.
Moyen terme, parti qu'on prend pour éviter deux inconvénients extrêmes, pour concilier des prétentions opposées.
Temps (solaire) moyen, échelle de temps définie par le mouvement d'un astre fictif appelé Soleil moyen, qui décrirait d'un mouvement uniforme l'équateur céleste, en partant du point vernal en même temps que le Soleil pour l'y retrouver au bout d'une année sidérale.
Échéance moyenne, échéance que l'on calcule lorsqu'on remplace par un billet unique des billets multiples, payables à des échéances diverses.
Cours moyen (C.M.), nom donné à la quatrième (C.M.1) et à la cinquième (C.M.2) années de l'école élémentaire, appelées aussi « huitième » et « septième ».
Voix moyenne ou moyen (nom masculin), voix de la conjugaison indo-européenne que l'on retrouve en sanskrit et en grec, et qui exprime un retour direct ou indirect de l'action sur le sujet (pronominal réfléchi ou réciproque du français), ou qui correspond à certains verbes intransitifs.
Moyen terme, dans un raisonnement déductif, élément qui met en relation la première affirmation avec la seconde et valide ainsi la conclusion. (Le moyen terme est l'un des éléments constitutifs du syllogisme.)
Valeur moyenne d'une fonction f sur un domaine d'intégration, quotient de l'intégrale de f sur le domaine par la mesure de ce domaine. (Le domaine peut être un intervalle [a, b] de R, une partie quarrable ou cubable.)
Classes moyennes, ensemble des couches sociales qui appartiennent au secteur tertiaire, et qui sont constituées par des employés, des artisans, des petits commerçants, des cadres d'entreprises, etc.
Français moyen, français censé représenter la catégorie la plus proche de la moyenne dans un sondage, dans une enquête, et la plus nombreuse à être dans ce cas.
Poids moyen, catégorie de poids dans certains sports (boxe, haltérophilie, etc.) ; sportif appartenant à cette catégorie.
● moyen, moyenne (synonymes)
adjectif
(latin medianus, qui est au milieu)
Qui se situe entre deux extrêmes
Synonymes :
- courant
- médian
- modéré
Qui n'est ni bon ni mauvais
Synonymes :
- correct
- honnête
- normal
- passable
- potable (familier)
Se dit du type de personne le plus répandu, qui...
Synonymes :
- lambda
moyen, enne
d1./d Qui est au milieu (dans l'espace, dans le temps, dans une série). Le cerveau moyen. Momie égyptienne datant du Moyen Empire.
|| LING Moyen français: langue parlée et écrite en France du XIVe au XVIe s. (intermédiaire entre l'ancien français et le français moderne).
|| MATH Termes moyens ou, n. m. pl., les moyens: dans deux fractions égales, le dénominateur de la première et le numérateur de la seconde.
|| LOG Moyen terme, celui qui, dans un syllogisme, est commun à la majeure et à la mineure.
— Fig. Solution intermédiaire entre des extrêmes. Ce moyen terme satisfera chacune des parties.
d2./d Qui est également éloigné des deux extrêmes (par la quantité ou par la qualité). Corpulence moyenne. âge moyen. Intelligence moyenne.
— Les classes moyennes, intermédiaires entre le prolétariat et la haute bourgeoisie.
— Cours moyen, entre le cours élémentaire et la classe de sixième.
|| SPORT Poids moyen: catégorie de poids variant de 72 à 75 kg suivant les disciplines.
d3./d Commun, ordinaire; qui appartient au genre le plus répandu. Français moyen.
d4./d Calculé en faisant la moyenne de plusieurs valeurs. Consommation moyenne d'électricité par personne et par an.
————————
moyen
n. m.
rI./r
d1./d Ce que l'on fait ou ce que l'on utilise pour parvenir à une fin. C'est le seul moyen.
— Moyens de communication, de transport. Moyens de production. La fin justifie les moyens: tous les moyens sont bons pour obtenir le résultat désiré.
— Fam. Employer les grands moyens: recourir à des mesures particulièrement énergiques ou spectaculaires.
|| Il y a, il n'y a pas moyen de: il est possible, il est impossible de.
|| DR Chacune des raisons sur lesquelles on se fonde pour tirer une conclusion. Moyens de nullité.
d2./d (Plur.) Capacités naturelles (physiques ou intellectuelles). écolier qui a peu de moyens.
d3./d (Plur.) Ressources pécuniaires. Ne pas avoir les moyens de s'offrir qqch.
rII./r Loc. Prép. Au moyen de: en se servant de, à l'aide de.
|| Par le moyen de: grâce à.
I.
⇒MOYEN1, -ENNE, adj. et subst.
I.— Adjectif
A.— [Qualifie un subst. désignant la partie d'un tout] Qui se situe entre deux parties extrêmes d'un tout.
1. [Dans l'espace]
a) [Axe vertical] Qui occupe une position intermédiaire entre le haut (la partie supérieure) et le bas (la partie inférieure). Les couches moyennes de l'atmosphère. L'os tibia, à-peu-près triangulaire dans le haut et dans sa partie moyenne, redevient rond vers le bas (CUVIER, Anat. comp., t. 1, 1805, p. 374) :
• 1. Toutes les beautés physiques, toutes les forces et tout le développement de la femme affluant et comme coulées vers les parties moyennes et inférieures du corps : le bassin, le cul, les cuisses; les beautés de l'homme remontées vers les parties nobles, vers les pectoraux, vers les épaules amples, le front large.
GONCOURT, Journal, 1855, p. 220.
♦ [Le subst. désigne un tout considéré dans l'une de ses parties] L'atmosphère moyenne. Ce sont les paysans de la moyenne montagne qui mettent leurs vaches en commun et partagent les produits (HUGO, Misér., t. 1, 1862, p. 102).
— Qui occupe une position intermédiaire entre l'amont et l'aval (verticalité + déplacement). Le cours moyen de la Loire ou la Loire moyenne.
b) [Axe perspectif] Qui occupe une situation intermédiaire entre l'avant (partie antérieure) et l'arrière (partie postérieure).
♦ PHONÉT. Voyelle moyenne. ,,Voyelle produite avec le dos de la langue s'articulant vers le milieu de la voûte palatine à la limite du palais dur et du palais mou, par opposition aux voyelles antérieures et postérieures`` (Ling. 1972).
c) Qui occupe une position intermédiaire entre ce qui est proche et ce qui est lointain (éloignement par rapport au locuteur). Le Moyen-Orient, p. oppos. à Proche-Orient et à Extrême-Orient. V. orient, rem. finale.
d) Qui occupe une position intermédiaire entre ce qui est interne et ce qui est externe. Diviser l'appareil auditif en oreille interne, oreille moyenne et oreille externe (COLETTE, Cl. école, 1900, p. 175).
e) Qui fait transition. Salut, Abîme bleu! je t'appelle Frontière, région moyenne entre le lieu et ce qui n'est point lieu (CLAUDEL, Repos 7e jour, 1901, III, p. 856).
2. Qui se situe chronologiquement entre une période (historique, géologique) ancienne et une période moderne. Les hommes de la période du Paléolithique moyen ou Moustérien (HADDON, Races hum., trad. par A. van Gennep, 1930, p. 102).
— LING. [Caractérise un état de langue] Je suis resté trois jours sans sortir, constamment occupé à lire un ouvrage de M. Grimm sur (...) l'ancien, le moyen et le nouvel allemand (J.-J. AMPÈRE, Corresp., 1827, p. 430).
♦ Moyen-français. Langue vernaculaire utilisée sur l'ensemble du territoire français du début du XIVe s. à la fin du XVIe s., caractérisée par de profonds bouleversements grammaticaux (notamment la chute de la déclinaison à deux cas et la fixation concomitante de l'ordre des mots), par la latinisation du vocabulaire et la multiplication des subordonnants (d'apr. R. MARTIN, M. WILMET, Synt. du m.-fr., Bordeaux, Sobodi, 1980, pp. 7-8).
3. Qui sert d'intermédiaire, de médiateur.
a) LOG. Moyen terme ou, plus rare, terme moyen. Dans un syllogisme, celui des trois termes par l'intermédiaire duquel sont mis en rapport les deux autres (appelés majeur et mineur) (d'apr. LAL. 1968) :
• 2. Scolastique de pierre. Cette architecture, que Victor Hugo semble croire capricieuse, doit être souverainement conséquente, à une époque où la logique dominait. Triplicité syllogistique : le moyen terme, ou médiateur.
MICHELET, Journal, 1831, p. 81.
— Au fig. Élément commun permettant de communiquer. Un des maux dont nous souffrons ici [à Genève], c'est le manque de termes moyens, de culture commune entre les gens influents (AMIEL, Journal, 1866, p. 243).
b) MATH. Termes moyens ou subst. moyens. Termes compris entre les termes extrêmes. Dans la proportion A/B=C/D (...), les termes A et D sont les extrêmes, B et C les moyens, A et B les antécédents, C et D les conséquents (Lar. encyclop., s.v. proportion).
4. [En parlant d'un groupe social] Qui est intermédiaire entre les groupes d'en haut et ceux d'en bas. Parcourir le monde dans ses sphères basses, moyennes, élevées (BALZAC, Théor. démarche, 1833, p. 638). Les régions moyennes et hautes de la société (TOCQUEVILLE, Anc. Rég. et Révol., 1856, p. 153).
— Moyenne bourgeoisie (p. oppos. à haute/grande bourgeoisie et à petite bourgeoisie). Les habitudes de sport de la haute et moyenne bourgeoisie (JAURÈS, Ét. soc., 1901, p. 116). Une fraction non négligeable de la grande et moyenne bourgeoisie (...) [a] pris le parti de l'occupant devenu bourreau (MAURIAC, Bâillon dén., 1945, p. 401).
♦ Vx. Classe intermédiaire entre la noblesse et le peuple. Synon. bourgeoisie. La classe moyenne est arrivée au pouvoir, il faut qu'elle s'y use, comme l'aristocratie s'y est usée. Mais patience, le frottement des temps modernes est rapide et terrible; il a fallu 800 ans pour épuiser l'aristocratie, un demi-siècle viendra peut-être à bout de la classe moyenne (M. DE GUÉRIN, Corresp., 1834, p. 165) :
• 3. En 1814, mais surtout en 1820, la noblesse française avait à dominer l'époque la plus instruite, la bourgeoisie la plus aristocratique, le pays le plus femelle du monde. Le faubourg Saint-Germain pouvait bien facilement conduire et amuser une classe moyenne, ivre de distinctions, amoureuse d'art et de science.
BALZAC, Langeais, 1834, p. 223.
♦ Couches sociales non salariées (paysans, artisans, commerçants, patrons, propriétaires, rentiers, membres des professions libérales, intellectuels), intermédiaires entre le prolétariat et la bourgeoisie. Synon. petite bourgeoisie (v. petit). Petit commerçant? Employé? Classe moyenne, en tout cas (SARTRE, Mort ds âme, 1949, p. 202). Ce que nous dénommons la classe moyenne ou la petite bourgeoisie, les notables l'appelaient dédaigneusement « le peuple » (LEFEBVRE, Révol. fr., 1963, p. 55).
♦ Nouvelles classes moyennes. Classes sociales liées aux développements récents du capitalisme (employés, fonctionnaires, ingénieurs, techniciens, cadres, intellectuels). Synon. (secteur) tertiaire :
• 4. ... nous pouvons tenter une première délimitation des « nouvelles classes moyennes » en les situant par rapport aux classes moyennes traditionnelles qui sont constituées par la bourgeoisie des affaires et du négoce, les fonctionnaires, les enseignants, les militaires de carrière. Des groupes nouveaux se sont en effet assez récemment développés, à côté des précédents. Ce sont ceux que l'on appelle les « cadres ».
Univ. écon. et soc., 1960, p. 5-12.
— HIST. Moyenne justice. Justice seigneuriale dont les compétences se situaient entre celles de la basse justice et celles de la haute justice (v. justice). Les nobles cependant étaient encore [au XVIIIe s.] une classe privilégiée : ils conservaient la haute et la moyenne justice, avaient des droits féodaux (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 2, 1823, p. 61).
5. Qui tient le milieu entre deux extrêmes. Les athées tiennent donc l'opinion moyenne entre les théistes qui admettent effet et cause, et les pyrrhoniens qui nient l'un et l'autre, ou plutôt qui doutent s'ils nient (BONALD, Essai analyt., 1800, p. 43). Les prêtres (...) de Marseille et de Lérins jugèrent que décidément, la doctrine de saint Augustin étant excessive, il y avait quelque biais possible, et une voie moyenne à suivre, une part de mérite à introduire dans la sanctification des justes (SAINTE-BEUVE, Port-Royal, t. 2, 1842, p. 119). Martignac reprenait la politique de la ligne moyenne, du juste milieu, qui avait été celle du duc de Richelieu, de Decazes et de Serre (BAINVILLE, Hist. Fr., t. 2, 1924, p. 160). Je craignais un peu son goût des solutions moyennes et qu'il manquât, le moment venu, de résolution, de fermeté, d'audace (BERNANOS, Joie, 1929, p. 581).
— Moyen terme. Juste milieu, compromis. Si tout s'altère par trop d'effort, ou trop de durée; si tout bien n'est jamais qu'un terme moyen entre la négation et l'abus, cette perfectibilité sera suivie de dégénération (SENANCOUR, Rêveries, 1799, p. 219) :
• 5. Durtal se mit à rire. — Il y aurait peut-être un moyen terme : ne jamais faire acte de chair avec celle que l'on aime et, pour avoir la paix, fréquenter, quand on ne peut faire autrement, celles que l'on n'aime pas.
HUYSMANS, Là-bas, t. 2, 1891, p. 57.
6. Rare. Synon. de mixte.
— GRAMM. Voix moyenne. La voix moyenne est une voix qui oscille de l'actif au passif et peut selon qu'on accorde la prédominance à l'un ou à l'autre des deux termes, signifier respectivement soit l'actif soit le passif. Cette nature de la voie moyenne est apparente dans les langues classiques où, sous la sémiologie du moyen apparaît et l'actif et le passif (G. GUILLAUME, Psycho-systématique du lang., Principes, méthodes et applications, leçons 1948-49, Paris, Klincksieck, 1971, p. 176).
B.— Qui se situe dans une zone centrale par rapport à deux valeurs extrêmes opposées : grand/petit, fortaible, large/étroit, long/court, etc.
1. [En parlant d'une propriété mesurable, quantifiable] Un crédit à moyen terme; un port de moyenne importance; une participation très moyenne. Esther possédait cette moyenne taille qui permet de faire d'une femme une sorte de joujou, de la prendre, quitter, reprendre et porter sans fatigue (BALZAC, Splend. et mis., 1844, p. 51). Une artillerie à moyenne portée (JOFFRE, Mém., t. 1, 1931, p. 68). L'émission soviétique de 20 heures s'achevait. Le père commanda : — Yvonne, la Suisse, sur les ondes moyennes (VAILLAND, Drôle de jeu, 1945, p. 141). La moto, dont Rébecca laisse le moteur tourner à moyen régime (P. DE MANDIARGUE, La Motocyclette, Paris, Gallimard, 1980 [1963], p. 112).
— [Le subst. désigne non la propriété, mais la chose elle-même] Petites et moyennes entreprises (P.M.E.); villes moyennes. Une brise moyenne (= une brise d'intensité moyenne). Les sourcils bien garnis, la bouche moyenne, la voix forte (Voy. La Pérouse, t. 4, 1797, p. 74). La grande fenêtre, celle du milieu, était surmontée d'un dais et restait vide. À la moyenne fenêtre de droite, (...) l'Empereur apparaissait, seul, en grand costume (HUGO, Rhin, 1842, p. 257). Une loupe moyenne, qui grossit seulement douze ou quinze fois (MICHELET, Insecte, 1857, p. 114).
2. Au fig., souvent avec une nuance péj. [En parlant d'une chose pour laquelle on peut établir une échelle qualitative, un jugement de valeur] Qui tient le milieu entre ce qui est bon et ce qui est mauvais. Synon. honnête, médiocre, passable, ordinaire. Travail moyen; résultats moyens. [Le général Boulanger] a une très moyenne intelligence, mais une volonté enragée, avec le talent — un talent tout particulier — de parler à la corde sensible des gens auxquels il s'adresse (GONCOURT, Journal, 1889, p. 1015). Il fit des études d'abord très brillantes, puis moyennes (BOURGET, Disciple, 1889, p. 18) :
• 6. ... Mais de même qu'il y a plus d'œuvres moyennes que de détestables, ou d'excellentes, ainsi la plupart des gens sont-ils d'un vice ou d'une vertu mitigés.
PÉLADAN, Vice supr., 1884, p. 186.
♦ P. iron. Vertu moyenne, moyenne vertu. J'allai demander l'hospitalité à une personne de vertu moyenne que j'avais connue au commencement de l'hiver (CONSTANT, « Cahier rouge », 1830, p. 53). Subst. Des moyennes-vertus, des filles d'opéra (BOURGES, Crépusc. dieux, 1884, p. 290).
— [En parlant de pers.] Un élève moyen. Un homme moyen peut se marier. Un homme un peu exceptionnel, qui se marie, gare! Le mariage des grands hommes, c'est leur part inavouable (MONTHERL., Démon bien, 1937, p. 1234). N'ai été qu'un homme moyen. Sans vraie culture. Ma culture était professionnelle, limitée à mon métier. Les grands, les vrais grands, ne sont pas limités à leur spécialisation (MARTIN DU G., Thib., Épil., 1940, p. 989).
C.— 1. Qui est le résultat d'une moyenne (arithmétique, statistique). Il aura soin de multiplier les observations de chaque genre, afin que le résultat moyen entre différentes opérations, puisse procurer une détermination plus précise (Voy. La Pérouse, t. 1, 1797, p. 43). La durée moyenne de la vie était seulement de quarante-neuf ans en 1900. Elle a augmenté de plus de onze ans depuis cette époque (CARREL, L'Homme, 1935, p. 134). L'on raisonne en termes de régions, de territoires et de valeurs moyennes calculées pour un ensemble territorial (PERROUX, Écon. XXe s., 1964, p. 204).
♦ Vie moyenne (pour durée moyenne de la vie). Les progrès de la bactériologie, de la chirurgie, de l'hygiène, l'amélioration des conditions sociales, etc., ont eu pour effet de réduire considérablement la mortalité humaine, surtout dans les premiers âges, d'où un allongement de la « vie moyenne » de l'individu (J. ROSTAND, La Vie et ses probl., 1939, p. 130).
— Qui correspond à la somme de la valeur la plus grande et de la valeur la plus petite, divisée par deux.
♦ Cours moyen. En bourse, cours résultant de la somme de la cote la plus haute et de la cote la plus basse d'une valeur, divisée par deux.
♦ Note moyenne. Note égale à la somme de la note la plus haute et de la note la plus basse (attribuées à un ensemble d'agents soumis à notation), divisée par deux. Note égale à la moitié de la note maxima attribuable à un devoir.
— ASTRON. ,,Se dit d'un élément astronomique dont on a éliminé tout ou partie des variations périodiques`` (Astron. (CILF) 1980). L'équateur moyen est déterminé à partir de l'équateur vrai par suppression des termes à courte période. V. nutation.
♦ Moyen mouvement. ,,Vitesse angulaire d'un astre dans un mouvement orbital elliptique, dépouillée de ses composantes périodiques`` (Astron. (CILF) 1980).
— Point moyen. ,,Terme de tir. Point par lequel passerait la résultante de forces égales et parallèles, qu'on suppose appliquée au centre des trous de toutes les balles`` (LITTRÉ Suppl. 1877).
2. Au fig. Qui correspond au type le plus courant, le plus répandu. Synon. ordinaire. [La science] ne suppose pas seulement chez ceux qui la cultivent ces facultés moyennes que possèdent tous les hommes, mais des dispositions spéciales (DURKHEIM, Division trav., 1893, p. 15). Le contraste assez facile des mœurs moyennes avec les mœurs particulières, et des admises avec les possibles (VALÉRY, Variété V, 1944, p. 82).
— [En parlant de pers.] Auditeur, lecteur moyen. Bien que personne ne supporte plus mal que lui [Huysmans] la platitude de l'humanité moyenne, c'est cette platitude qu'il s'obstine à peindre (LEMAITRE, Contemp., 1885, p. 316).
♦ Français moyen. V. français I A. La banalité française s'organise autour des autres, et non pas même de chacun de ces autres pris isolément, mais de leurs relations entre eux : les liens de parenté à établir, volupté, gourmandise presque, du Français moyen (DU BOS, Journal, 1922, p. 159). Ma femme, reprit M. Dandillot, ma femme a la religion du Français moyen : elle ne pratique pas, ne prend pas les sacrements, et va à la messe du dimanche (MONTHERL., Pitié femmes, 1936, p. 1182).
II.— Substantif
A.— Subst. masc. et fém.
1. Élève appartenant à un cours ou une classe réunissant les élèves d'âge intermédiaire entre celui des petits et celui des grands. Une grande fillette entra (...) dans le parloir, longue dans sa robe noire, ceinte du cordon rouge des « moyennes » (A. FRANCE, Mannequin, 1897, p. 265). Un « moyen » pleurait sur son banc; un camarade bien plus petit s'était dérangé et lui essuyait les yeux (FRAPIÉ, Maternelle, 1904, p. 18).
2. Rare. Personne qui est typique de la moyenne de la population. Je suis sorti dans la rue. Voici mes passants, mes chers passants. Les anonymes, les moyens, avec leurs particularités qui restent secrètes (TRIOLET, L'Inspecteur des ruines, Paris, Laffont, 1965 [1948], p. 263).
B.— Subst. masc.
1. Moyens proportionnels ou absol. moyens. V. supra I A 3.
REM. Moyenneté, subst. fém., hapax. Durée moyenne. Je saurai, dit Salomon, le commencement et la consommation et la moyenneté des temps (CLAUDEL, Poète regarde Croix, 1938, p. 157).
Prononc. et Orth. :[], fém. [-]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1re moitié XIIe s. « qui est situé au milieu » meiens clergiez (Psautier Oxford, 67, 14 ds T.-L.), cf. 1re moitié XIIe s. mëens termes [medios terminos] (Psautier Cambridge, loc. cit., ibid.); en partic. a) 1732 log. moyen terme (RICH. [medius terminus, Trév. 1704]); b) 1827 qualifie l'état de langue intermédiaire entre la période primitive et la période moderne de la langue moyen allemand (J.-J. AMPÈRE, loc. cit.); 2. a) ca 1260 « qui tient le milieu entre deux extrêmes » moien aage (PH. DE NOVARE, Quatre Ages, 1 ds T.-L., s.v. eage); b) ca 1260 « qui tient le milieu de l'échelle sociale » moiennes gens (Menestrel Reims, 442 ds T.-L.); 1815 classe moyenne (MAINE DE BIRAN, Journal, p. 56); c) 1530 gramm. verbes moyens « verbes neutres » (PALSGR., 1113); attest. isolée 1655 id. « verbes qui participent de l'actif et du passif, soit pour le sens, soit pour la forme » ([ARNAUT, LANCELOT et NICOLE] Nlle méthode pour apprendre facilement la langue grecque, p. 88 : Des verbes moyens circonflexes); 3. 1273 « qui tient le milieu, ordinaire » (A. IBN EZRA, Commencement de la sagesse, éd. R. Levy et Fr. Cantera, 6b : 3 gres sont moiens ne clers ne oscurs); 1495 habillemens moyen « de qualité ordinaire » (Coutume du Comté de Ponthieu, titre, II, XLVIII ds Nouv. Coutumier gén., éd. Bourdot de Richebourg, I, 88); d'où 1837 péj. « médiocre » moyennes intelligences (BALZAC, C. Birotteau, p. 124); 4. 1377 math. nombres moiens selon une proporcion (ORESME, Ciel, éd. A. D. Menut, 194a, p. 700); attest. isolée, à nouv. ds FUR. 1690. Du lat. d'époque impériale « du milieu », lui-même dér. de medius « qui est au milieu, central, intermédiaire ».
DÉR. Moyennement, adv. a) Dans une proportion qui se situe entre les extrêmes. Moyennement grand. Mettre le moteur en route et, sans accélérer, le laisser tourner deux à trois minutes, le temps de chauffer moyennement le bloc (CHAPELAIN, Techn. automob., 1956, p. 330). b) Médiocrement. L'archevêque Guillaume de Tyr nous a laissé un portrait défavorable de ce prélat enfoncé dans le siècle, fastueux et rude, plus semblable à un chevalier qu'à un clerc. (...) moyennement lettré, il avait (...) l'art de parler avec grâce et esprit, le geste généreux, et plaisait aux chevaliers comme à la foule (GROUSSET, Croisades, 1939, p. 146). — []. Att. ds Ac. dep. 1694. — 1res attest. ca 1200 « de façon moyenne » moienement religïouse (Dialogue Gregoire, 86, 1 ds T.-L.); 1456-67 moyennement (Cent nouvelles nouvelles, éd. F. P. Sweetser, III, 157, p. 43); de moyen, -enne, suff. -ment2.
II.
⇒MOYEN2, subst. masc.
A.— Ce qui permet de réaliser le but que l'on vise.
1. En gén. César essaya de me retenir par toutes sortes de moyens : il me nomma préfet du prétoire des Gaules, dignité suprême dont l'autorité s'étend sur l'Espagne et sur les îles des Bretons (CHATEAUBR., Martyrs, t. 2, 1810, p. 108). La vieille fille employa mille moyens perfides pour empêcher l'avoué de se marier (CHAMPFL., Bourgeois Molinch., 1855, p. 27). Une voisine lui indiqua un moyen : c'était de donner à boire à son mari, tous les soirs, un verre d'eau avec une pincée de cendres. Le fermier s'y prêta, mais le moyen ne réussit pas (MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, Hist. fille de ferme, 1881, p. 40) :
• 1. « ... tu ne manges pas assez. » « Comment veux-tu?... » « Il y a un moyen bien simple, dit Brunet, on va te donner chacun un bout de nos portions. »
SARTRE, Mort ds âme, 1949, p. 250.
— Très fréq. [Suivi d'un compl. en de précisant le but]
♦ Moyen de + inf. [Le sieur de la Pérouse] ne négligera aucun moyen de se procurer des informations, sur les forces que la couronne de Portugal y entretient, sur le commerce qu'y font les Anglais et les autres nations (Voy. La Pérouse, t. 1, 1797, p. 30). Il faut absolument trouver un moyen de mettre de l'ordre dans ma vie (CONSTANT, Journaux, 1804, p. 164). Qu'il trouve le moyen de retarder son client pendant quelques minutes et tu sauteras dans un taxi (SIMENON, Vac. Maigret, 1948, p. 142).
♦ Moyen de + subst. désignant un procès. Quant à présent, dépourvus des moyens de persuasion, ils ne savent comment résister au torrent révolutionnaire qui les presse et les déborde (FOURIER, Nouv. monde industr., 1830, p. 77). Essayant de conserver le pouvoir à l'aide des mesures de police, des moyens de violence, des voies de corruption (CHATEAUBR., Mém., t. 4, 1848, p. 314). Le lier par un marché, un donnant-donnant, un moyen de pression (MONTHERL., Songe, 1922, p. 71). Il n'a, dans l'état naturel des choses, aucun moyen d'action sur ces organes (VALÉRY, Variété V, 1944, p. 72). User de l'écriture comme d'un moyen de séduction (TRIOLET, Prem. accroc, 1945, p. 349).
— Moyen + que introduisant une complétive (rare). Ce sera le moyen que la matière n'ait pas mémoire de vous (SAINT-MARTIN, Homme désir, 1790, p. 330). Je la déteste; et pas un moyen qu'elle éprouve une portion du mal qu'elle m'a fait (CONSTANT, Journaux, 1814, p. 412). Je cherchais le moyen qu'elle ne fût pas morte pour nous deux, même si on devait la trouver morte et l'emporter comme morte (JOUVE, Scène capit., 1935, p. 254).
— [Le moyen, les moyens, p. oppos. à la fin, au but] L'abbesse fait l'éloge de la douleur, mais indique très fortement que celle-ci n'est qu'un moyen, non une fin, elle ne fait pas le mérite quoiqu'elle en soit souvent l'occasion (BARRÈS, Cahiers, t. 6, 1908, p. 16). La morale kantienne dit : ne traitez jamais les autres comme moyen mais comme fin (SARTRE, Existent., 1946, p. 42) :
• 2. Le réalisme a obéi à la même évolution. N'est-il pas, lui aussi, un moyen devenu une fin, puisqu'il n'était au début qu'un procédé employé au service de la magie et non pas un artifice cultivé pour lui-même?
HUYGHE, Dialog. avec visible, 1955, p. 164.
♦ (Employer, utiliser) tous les moyens. Agir sans écarter les moyens illégaux, malhonnêtes, violents.
Tous les moyens sont bons. Il avait triplé les capitaux de sa protectrice, avec d'autant plus de facilité, que tous les moyens avaient paru bons à la comtesse afin de rendre promptement sa fortune énorme (BALZAC, Chabert, 1832, p. 86).
La fin justifie les moyens; qui veut la fin veut les moyens. V. fin B 1.
— Expr. fig. (Recourir aux, employer les) grands moyens. Mettre en œuvre des moyens énergiques, que l'on n'utilise qu'en dernier ressort. Synon. pop. mettre le paquet. Restent cinq florins à payer dans les trois mois, ou je serai forcé de recourir aux grands moyens (ERCKM.-CHATR., Ami Fritz, 1864, p. 119). Le soir, Laurent en revenant à la boutique, décida qu'il demanderait quelques milliers de francs à sa femme et qu'il emploierait les grands moyens pour les obtenir (ZOLA, Th. Raquin, 1867, p. 220) :
• 3. Le désordre devint tel que la contre-maître dut user des grands moyens; — elle régla le compte des plus enragées et les congédia, séance tenante.
HUYSMANS, Sœurs Vatard, 1879, p. 291.
— GRAMM. Complément de moyen. Complément introduit par des prépositions : à (il se chauffe au gaz), avec (écrire avec un stylo), de (montrer du doigt), par (entrer par ruse) ou des locutions prépositives : à l'aide de, à force de, grâce à, au moyen de, moyennant.
SYNT. Bon, excellent, mauvais, puissant moyen; le seul, l'unique, l'ultime moyen; moyen détourné, désespéré, efficace, énergique, extrême, moderne, pratique, puissant, rapide, simple, sûr; avoir, chercher, donner, imaginer, indiquer, mettre en œuvre, utiliser un, le, les moyen(s) (de); ne reculer devant aucun moyen.
2. Fréq. au plur. [Désigne des appareillages, des équipements, des procédés, des techniques, et parfois les hommes qui les mettent en œuvre] Il fera usage, à cet effet [le maintien de l'hygiène à bord], de tous les moyens connus, tels que les ventilateurs, les fumigations, les parfums, pour renouveler et purifier l'air de la cale et de l'entrepont (Voy. La Pérouse, t. 1, 1797, p. 56). Pour vaincre, il ne néglige pas les moyens humains; il augmente l'armée, raffermit la discipline, fait creuser une galerie souterraine pour pénétrer dans la citadelle (FUSTEL DE COUL., Cité antique, 1864, p. 274). — Réparer [la forteresse], c'est beaucoup dire. C'est une grosse affaire, et nous n'avons guère de moyens (GRACQ, Syrtes, 1951, p. 129).
— Expr. lexicalisées
♦ Moyen(s) de chauffage. Ma sensibilité au froid est devenue telle que, faute de ce moyen de chauffage, je n'aurais pu, sans doute, franchir l'hiver (GIDE, Journal, 1944, p. 258).
♦ Moyens coercitifs (dr. internat. publ.). ,,Mesures de contraintes employées par un État dont les droits ont été méconnus contre un État qui les a violés`` (BARR. 1974).
♦ Moyen(s) de communication. Facultés et techniques qui permettent aux êtres vivants de communiquer. [Les animaux] privés presqu'absolument de moyens commodes de communication intellectuelle avec leurs semblables (DESTUTT DE TR., Idéol. 1, 1801, p. 315). Moyens de communication de masse. Techniques permettant la diffusion à grande échelle d'informations, d'opinions, de messages (équivalent français de mass media). Équipements qui permettent les déplacements dans l'espace. V. communication III.
♦ Moyens de défense.
♦ Moyen(s) d'expression. Langages, techniques artistiques ou équipements qui permettent de s'exprimer. Je ne puis et ne veux considérer le dessin et la couleur que comme des moyens d'expression (GIDE, Journal, 1905, p. 157). C'est le chant flamenco, le plus pur moyen d'expression de la poésie andalouse (T'SERSTEVENS, Itinér. esp., 1933, p. 123). Le cinéaste qui dispose de moyens d'expression bien mieux adaptés (SARRAUTE, Ère soupçon, 1956, p. 89).
♦ Moyen(s) d'information. Techniques et équipements qui permettent la collecte et la diffusion d'informations. L'entrée en jeu de moyens d'information collective, comme la radio, le cinéma et maintenant la télévision (CHAZELLE, Diplom., 1962, p. 33).
♦ Moyens de production. ,,Ensemble des objets matériels de tous ordres, impliqués, directement ou indirectement, dans le procès de production`` (BOUV.-IBARR. 1975).
♦ Moyens de transport. À Paris, (...) vingt moyens de transport s'offrent à vous dans le même moment (JOUY, Hermite, t. 4, 1813, p. 5). On manquait de moyens de transports : tous les chevaux de trait avaient péri de misère (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 346).
— Expr. fig. (Faire avec, employer) les moyens du bord. Se débrouiller avec les seules ressources qu'offre une situation donnée. — À la broche, annonce Conan. Une baïonnette par le bec et le croupion, de la braise de bois, et voilà ce qu'on obtient avec les moyens du bord! (VERCEL, Cap. Conan, 1934, p. 28).
3. Ressources financières. (Ne pas) avoir les moyens d'acheter qqc. Un mari attribue quelquefois au défaut d'économie de sa femme l'insuffisance de ses moyens (SÉNAC DE MEILHAN, Émigré, 1797, p. 1569). Si, à l'heure qu'il est, je n'ai pas encore soupé, c'est que mes moyens ne me le permettent pas (KARR, Sous tilleuls, 1832, p. 95). Une vieille rentière de tout petits moyens (ROMAINS, Hommes bonne vol., 1932, p. 36).
♦ Moyens d'existence. Il voulait connaître les raisons du retour de Lucien à Paris, ses projets, ses moyens d'existence (BALZAC, Splend. et mis., 1847, p. 15).
♦ Vivre au-dessus de ses moyens. Je vivais au-dessus de mon âge comme on vit au-dessus de ses moyens : avec zèle, avec fatigue, coûteusement (SARTRE, Mots, 1964, p. 55).
— Rare, au sing. Des gens qui n'ont rien à perdre! (...) Ces gens dont vous parlez sont apparemment des hommes qui vivent, qui subsistent, au sein de la société, sans aucun moyen de vivre et de subsister (ROBESP., Discours, Marc d'argent, t. 7, 1791, p. 164). Ma chère, quand on n'a pas le moyen de se payer des bijoux véritables, on ne se montre parée que de sa beauté et de sa grâce (MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, Bijoux, 1883, p. 406).
— ADMIN. Voies et moyens.
4. Facultés naturelles (physiques, morales ou intellectuelles) d'une personne. Je ne me suis jamais dissimulé combien un pareil dessein étoit au-dessus de mes moyens, et peut-être du génie d'un homme (SENANCOUR, Rêveries, 1799, p. 6). J'y serai [au rendez-vous], frais, limpide, alerte, jouissant de tous mes moyens (GAUTIER, Fracasse, 1863, p. 307). C'était un de ces hommes politiques à plusieurs faces, sans conviction, sans grands moyens (MAUPASS., Bel-Ami, 1885, p. 234) :
• 4. Quand l'une [des générations] entre en pleine possession de ses moyens, a son compte exact de dents et de griffes, la mort escamote l'autre...
BERNANOS, Mauv. rêve, 1948, p. 940.
♦ Perdre ses moyens, ôter ses moyens à qqn. Se troubler au point de ne plus pouvoir réagir, troubler quelqu'un. Décidément, disait-il, ma pauvre tête se fatigue. Vous gagnez toujours vers la fin de la partie, parce qu'alors j'ai perdu mes moyens (BALZAC, Lys, 1836, p. 76). La colère d'une si belle affaire manquée lui enlevait ses moyens (CHAMPFL., Souffr. profess. Delteil, 1853, p. 122).
— Arg. de théâtre. Élan, force dramatique. Il n'a pas assez de moyens pour jouer la tragédie, et il était si bien dans les petits-maîtres (PICARD, Vieux comédien, 1803, p. 7 ds LITTRÉ).
♦ Au fig. J'avais choisi ce dernier rôle, sans enthousiasme, mais le premier n'était pas dans mes moyens (VERCEL, Cap. Conan, 1934, p. 92).
5. DR. Raisons de droit ou défaut invoqués devant un tribunal à l'appui d'une prétention. Moyens de cassation, de nullité, d'opposition.
♦ Moyens de défense. Je m'attendais à cette réponse, dit le juge, et c'est même là, je le vois, un de vos moyens de défense (PONSON DU TERR., Rocambole, t. 1, 1859, p. 277).
B.— Loc. verb.
1. Trouver (le) moyen de. Réussir à. Elle trouvait le moyen de servir et de contenter à-la-fois trente personnes différentes; de volonté, de goût et d'humeur (JOUY, Hermite, t. 3, 1813, p. 87). Et si maigre qu'elle fût, quand il la tâtait dans leur lit, Honoré trouvait toujours moyen d'en avoir plein les bras (AYMÉ, Jument, 1933, p. 65). Hé bien, saperlotte, après une scène pareille je me demande bien comment tu trouves le moyen d'être heureuse, toi! (ANOUILH, Sauv., 1938, II, p. 220).
— Par antiphrase. Réussir à faire ce qu'il ne fallait pas faire. Il a trouvé le moyen de se faire refuser avec treize idées! C'est formidable, n'est-ce pas, monsieur? (MALÈGUE, Augustin, t. 1, 1933, p. 144).
2. Tâcher moyen de ..., que ... (pop.). Faire en sorte que.
— Tâcher moyen de + inf. Et, comme on dit au régiment, tâchez moyen de ne pas vous pocharder! (FEYDEAU, Dame Maxim's, 1914, II, 6, p. 40). Eh! les poteaux, j'tez-en un coup, tâchez moyen de m'décrotter ça en cinq sec (BARBUSSE, Feu, 1916, p. 43). Le moment est venu! Rends tes comptes! Tâche moyen un petit peu de nous expliquer cette espèce de monde que tu as fait! (CLAUDEL, Visages radieux, 1947, p. 815).
— Tâcher moyen que + subj. Probable qu'ils ont leur petit canon d'infanterie : faudra tâcher moyen qu'ils puissent pas le mettre en place (SARTRE, Mort ds âme, 1949, p. 183).
3. a) Avoir le moyen de. Avoir la possibilité de. Ne pouvant rien savoir de positif à cet égard, et n'ayant aucun moyen de raisonner sur ce sujet, j'aime mieux penser que la nature entière n'est qu'un effet (LAMARCK, Philos. zool., t. 1, 1809, p. 361).
— [Elliptiquement dans des tours interro-exclam.] Le moyen de + inf. Quelle possibilité de ..., comment ... Nous recevons trois couronnes qui me navrent : des diadèmes renflés au milieu comme ceux des mariées de campagne; le moyen d'être jolie avec ça! (COLETTE, Cl. école, 1900, p. 268). Une scène haute, tragique, merveilleusement noble. Mais le moyen d'avoir une scène noble avec cette femme grasse, en caraco débraillé! (DANIEL-ROPS, Mort, 1934, p. 97).
b) Il y a, il n'y a pas moyen de ..., que ... (tour impers.). Il est, il n'est pas possible de ..., que ...
— Il y a, il n'y a pas moyen de + inf. Mais, allons! Il y a peut-être encore moyen de s'en tirer (CLAUDEL, Poète regarde Croix, 1938, p. 41). L'homme est comme tous les animaux; quand il n'y a pas moyen de faire autrement, il se soumet (ROMAINS, Hommes bonne vol., 1938, p. 228).
♦ [Avec ell. du présentatif, dans le tour négatif] Le chemin mène droit au presbytère, pas moyen de se tromper (BERNANOS, Crime, 1935, p. 777) :
• 5. Elle lui tendit la main. qu'il garda dans la sienne. — Alors, pas moyen de se voir un peu plus longuement, un de ces jours?
QUENEAU, Pierrot, 1942, p. 91.
— Il y a, il n'y a pas moyen que + subj. Il n'y a pas moyen qu'il nous renvoie ses comptes, ce fumier-là! Pas moyen! J'ai beau lui envoyer des rappels et des rappels! (CÉLINE, Voyage, 1932, p. 163). Encore y avait-il moyen que nous fussions les uns et les autres assez raisonnables pour ne pas nous empoisonner mutuellement l'existence (AMBRIÈRE, Gdes vac., 1946, p. 268).
— Il n'y a pas moyen. Ça n'est pas possible. Il n'y a pas moyen, il en faut finir (CONSTANT, Journaux, 1804, p. 118). On eût bien voulu faire admettre cette accusation; mais il n'y a pas eu moyen (COURIER, Pamphlets pol., Procès, 1821, p. 94).
— S'il y a moyen. Si c'est possible. Mais, monsieur le curé, je voudrais élever encore une couple de garçons, s'il y a moyen (GUÈVREMONT, Survenant, 1945, p. 283).
C.— Loc. prép.
1. Au moyen de. [Introduit un compl. instrumental] Les animaux les plus imparfaits, tels que les infusoires, et surtout les monades, ne se nourrissent qu'au moyen d'absorptions (LAMARCK, Philos. zool., t. 2, 1809, p. 308). Il espérait, au moyen de tortillements gradués, calmer le malaise [de son postérieur] (RENARD, Poil Carotte, 1894, p. 15).
2. Par le moyen de. Par l'intermédiaire de. L'âme pense par le moyen du cerveau, et parle par le moyen de la voix, comme elle regarde par les yeux, écoute par les oreilles, agit par les mains (BONALD, Législ. primit., t. 1, 1802, p. 271). L'être vivant se reproduit par le moyen d'une simple cellule, c'est-à-dire par une parcelle de matière vivante (J. ROSTAND, La Vie et ses probl., 1939, p. 170).
— Vx. Par l'entremise de. Il se présenta pour elle, par mon moyen, une occasion très avantageuse (RESTIF DE LA BRET., M. Nicolas, 1796, p. 76). Ah! Il sera dans peu quelque chose. J'espère par son moyen arranger tout (COURIER, Pamphlets pol., Lettres partic., 1820, p. 64).
Prononc. :[]. Étymol. et Hist. A. 1. 1370 « ce qui sert pour parvenir à une fin » (ORESME, Ethiques, éd. A. D. Menut, p. 191, note 4 : trouver les moiens prouchains de venir a telle fin); av. 1473 trouver moyen de + inf. « parvenir à, réussir à » (JUVENAL DES URSINS, Hist. de Charles VI [année 1388] ds Nlle Collection de Mém. relatifs à l'hist. de France, éd. Michaud et Poujoulat, Paris, 1836, t. 2, p. 374); 2. 1370 « procédé, objet... qui permet d'accomplir quelque chose » moiens delibérés (ORESME, loc. cit.); en partic. a) 1794 un moyen de substance (CONDORCET, Esq. tabl. hist., p. 194); b) 1801 un moyen de communication ici fig. (DESTUTT DE TR., Idéol. 1, p. 404); 1813 moyens de transport (JOUY, loc. cit.); c) 1832 moyens de production (SAY, Écon. pol., p. 326); 3. 1381-89 « raison alléguée » (E. DESCHAMPS, Le Miroir de mariage, 8424 ds Œuvres complètes, éd. G. Raynaud, IX, 273); 4. ca 1485 « pouvoir, possibilité de faire quelque chose » il y a moyen de + inf. « il est possible de » (Myst. Vieux Testament, éd. J. de Rothschild, 35135). B. Subst. masc. plur. 1. ca 1500 « ressources pécuniaires, richesses » (COMMYNES, Mémoires, éd. J. Calmette, III, 119); 2. 1580 « capacités, aptitudes naturelles physiques ou intellectuelles » nos forces et nos moyens (MONTAIGNE, Essais, éd. Villey-Saulnier, I, VII, p. 30); 1587 de ses propres moyens (LANOUE, 401 ds LITTRÉ); 1836 perdre ses moyens (BALZAC, loc. cit.). C. Loc. prép. 1. 1495 au moyen de « à l'aide de, avec » (Coutumes du Comté de Ponthieu, titre, II, XLV ds Nouv. Coutumier gén., éd. Bourdot de Richebourg, t. 1, p. 88); 2. a) ca 1500 par le moyen de qqn « par l'entremise de » (COMMYNES, op. cit., II, 15); b) 1508 par le moyen de qqc. « par l'intermédiaire de » (Coutumes du Duché d'Anjou, VIe part., CCIII ds Nouv. Coutumier gén., éd. citée, t. 4, p. 548). Emploi subst. de moyen1.
STAT. — Moyen1 et 2. Fréq. abs. littér. :19 905. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 38 033, b) 22 553; XXe s. : a) 22 066, b) 26 844.
BBG. — BRÜCH (J.). Etymologisches. Z. rom. Philol. 1925, t. 45, pp. 79-80.
1. moyen, enne [mwajɛ̃, ɛn] adj. et n.
ÉTYM. Déb. XIVe; moien, v. 1175; meien, v. 1120; du bas lat. medianus « qui est au milieu », dér. de medius. → Mi-. REM. Placé avant un nom commençant par une voyelle ou une h muette, moyen se prononce [mwajɛn]. Ex. : moyen âge [mwajɛnɑʒ].
❖
♦ Qui tient le milieu.
———
1 Qui se trouve entre deux choses. — (Dans l'espace, entre deux parties extrêmes ou deux choses de même nature). — REM. Placé après le nom, sauf dans Moyen-Orient, calque de l'anglais Middle East. ⇒ Médian; intermédiaire. || Partie moyenne du cerveau (→ Hémisphère, cit. 7). || Partie moyenne et extrémités des muscles (→ Attache, cit. 8). || Oreille moyenne (→ Conduit, cit. 2). || Tunique moyenne de l'aorte (→ Artériosclérose, cit. 1). || Le cours moyen d'un fleuve, la partie également éloignée de sa source et de son embouchure. || Régions moyennes de l'atmosphère. || Moyen-Orient.
♦ Dans la chronologie. (Placé avant ou après le nom, selon les syntagmes). || Le moyen âge (⇒ Moyen âge). || Le Moyen Empire, entre le Haut et le Bas Empire. || Le quaternaire moyen (→ Homme, cit. 9). — (Fin XIXe). Ling. || Moyen français, la langue française, entre l'ancien français et le français moderne (approximativement, les XIVe et XVe siècles). — REM. On emploie le plus souvent ancien français pour l'ancien et le moyen français. || Moyen allemand, moyen francique…
♦ Cours moyen, situé entre le cours élémentaire et la classe de sixième.
♦ N. m. || Les moyens, les enfants qui appartiennent selon leur âge au groupe ou à la section intermédiaire entre le groupe (ou la section) des petits et le groupe (ou la section) des grands, à l'école, dans une colonie de vacances, etc.
♦ Dans l'ordre d'un énoncé. (Math.). || Termes moyens. N. m. pl. || Les moyens, les deux éléments centraux d'un ensemble de quatre éléments. || Dans la proportion a/b = c/d, b et c sont les moyens, a et d les extrêmes.
♦ Moyen terme. a (1732). Log. (Dans un syllogisme). Celui des trois termes par l'intermédiaire duquel le majeur et le mineur sont mis en rapport. ⇒ Médium. || Le moyen terme est commun aux deux prémisses et ne figure pas dans la conclusion.
b Cour. Médiateur (cit. 5). — Fig. Parti intermédiaire entre deux solutions extrêmes, deux prétentions opposées. ⇒ Mezzo termine (vx), milieu (II.).
1 Avec ce je ne sais quoi d'indéfinissable, du moins pour moi, qu'il y a dans votre caractère, si vous ne faites pas fortune, vous serez persécuté; il n'y a pas de moyen terme pour vous.
Stendhal, le Rouge et le Noir, II, I.
2 (V. 1160). Après le nom; plus rarement avant. Qui, par ses dimensions ou sa nature, tient le milieu entre deux extrêmes. || Être de taille moyenne. || Stature moyenne (→ Cuir, cit. 3). || Branche de moyenne grosseur (→ Ligneux, cit.). || Longueur moyenne. || Grandeurs moyennes à l'échelle (cit. 23) humaine. || Moyenne altitude. || Niveau moyen des eaux (→ Littoral, cit.). || Du fil de fer moyen, ou, n. m., du moyen. — Moyen métrage (film de moyen métrage). — T. de boxe. || Poids moyen. — Prix moyen. ⇒ Modéré. || Âge moyen. || Homme d'âge moyen; (vx) « de moyen âge » (cit. 37, La Fontaine). || Moyenne culture (cit. 3). || Petites et moyennes entreprises (P. M. E.). — Moyenne bourgeoisie. — Solution moyenne. || Chercher des voies moyennes, se maintenir (cit. 22) dans la voie moyenne (→ Équilibrer, cit. 7). ⇒ Mitoyen (vieilli). || Trouver la ligne (cit. 16) moyenne (entre deux attitudes).
2 D'une taille moyenne, un peu grasse, affligée de myopie, elle n'était ni laide ni jolie (…)
Balzac, les Petits Bourgeois, Pl., t. VII, p. 93.
2.1 Depuis quinze ans, il (M. Töpffer sur son passeport) a le visage ovale, le nez moyen, la bouche moyenne et le menton moyen aussi. En moyenne, c'est toujours la même chose, et frappant de ressemblance.
R. Töpffer, Voyages en zigzag, p. 150.
3 Les arbres de moyenne futaie, les buissons aux branchages légers, ressemblent aux nôtres (…)
Loti, l'Inde (sans les Anglais), V, VII.
♦ La classe moyenne, les classes moyennes de la société, qui tiennent le milieu de l'échelle sociale. || La classe moyenne de l'Ancien Régime (→ Famille, cit. 10). — REM. De nos jours, classe moyenne se dit surtout de la petite et moyenne bourgeoisie. || Apathie (cit. 7) des classes moyennes.
4 La classe moyenne, bourgeoise, dont la partie la plus inquiète s'agitait aux Jacobins, avait son avènement. Classe vraiment moyenne en tout sens, moyenne de fortune, d'esprit, de talent.
Michelet, Hist. de la Révolution franç., IV, X.
5 Cette classe qu'on a heureusement baptisée « moyenne » enseigne à ses fils qu'il ne faut rien de trop et que le mieux est l'ennemi du bien.
Sartre, Situations II, p. 232.
6 Notre classe moyenne commet un peu la même erreur (que ceux qui se surestiment). Parce qu'elle fournit la plupart des agents de surveillance ou de contrôle, elle se prend volontiers pour une aristocratie nationale, croit compter dans ses rangs plus de chefs. Non pas plus de chefs — plus de fonctionnaires, ce n'est pas la même chose.
Bernanos, les Grands Cimetières sous la lune, p. 52.
6.1 Une nouvelle mystification monte : les classes moyennes n'auront qu'une ombre de pouvoir, que des miettes de richesse, mais c'est autour d'elles que s'organise le scénario. Leurs « valeurs », leur « culture » l'emportent ou semblent l'emporter parce que « supérieures » à celles de la classe ouvrière.
Henri Lefebvre, la Vie quotidienne dans le monde moderne, p. 82.
♦ Gramm. || Voix moyenne, ou, n. m., le moyen : conjugaison qui, dans certaines langues (grec ancien…), tient le milieu entre l'actif et le passif, exprimant l'intérêt ou la part que le sujet prend à l'action. ⇒ aussi Médiopassif. — Verbe moyen, conjugué à la voix moyenne. || Désinences moyennes, propres au moyen.
♦ Phonét. || Voyelle moyenne, dont l'articulation comporte une aperture intermédiaire entre celle d'une voyelle ouverte et celle d'une voyelle fermée.
3 (Après le nom). Qui est du type le plus courant. ⇒ Courant, ordinaire. ☑ Le Français (cit. 10) moyen, personne représentative du commun des Français. || L'individu moyen. ⇒ Lambda (fam.). || Le lecteur moyen et le lecteur délicat (→ Audience, cit. 6). — Méd. || Études faites sur un sujet moyen (→ Graisseux, cit. 3).
7 (…) l'invention artistique était la fleur d'une civilisation et une des raisons d'aimer la vie que les hommes de génie procurent à l'humanité moyenne.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. V, XXVII, p. 283.
4 (Après le nom). Qui, dans l'ordre de la qualité, n'est ni bon ni mauvais. || Qualité moyenne. ⇒ Correct. || Intelligence moyenne. || Nature moyenne, qui n'a rien d'exceptionnel (→ Élever, cit. 60). || Un élève moyen, moyen en mathématiques,… moyen en tout. — Travail, résultats moyens. ⇒ Honnête, honorable, médiocre (1., vx), passable. — REM. Ce mot prend souvent un sens dépréciatif proche de médiocre (2.). || Ce devoir, cet élève est très moyen, il est plutôt mauvais que bon.
8 Il ne subissait pas volontiers le joug de cet esprit moyen qui, n'ayant ni le besoin de talent qu'éprouve une élite, ni l'entraînement du peuple, son instinct naïf et profond, exige qu'on soit moyen, juste à la même hauteur, pas plus haut et pas plus bas, et qui, tout défiant qu'il peut être, se laisse néanmoins gouverner par une tactique médiocre. La Révolution qui montait amenait à la puissance ces médiocrités actives.
Michelet, Hist. de la Révolution franç., IV, X.
———
II Didact. et cour. (Après le nom). Que l'on établit, calcule en faisant une moyenne. ⇒ Moyenne. || Température moyenne annuelle d'un lieu. || La durée moyenne de la vie (→ Homme, cit. 15; hygiène, cit. 3) ou la vie moyenne. || Vie moyenne dans un pays à une époque donnée. || Cours moyens de la Bourse. || Fréquence (cit. 3) moyenne de… || Valeur moyenne d'une variable aléatoire, son espérance mathématique. || Type moyen établi par de nombreuses mensurations (→ 2. Canon, cit. 3). || Vitesse moyenne d'un mobile entre deux instants donnés.
9 Cependant je ne doute pas que la vie moyenne de l'homme civilisé ne soit plus longue que la vie moyenne de l'homme sauvage.
Diderot, Suppl. au voyage de Bougainville, IV.
10 On appelle âge moyen d'une population la moyenne des âges de ses habitants, et âge médian d'une population l'âge qui sépare ses habitants en deux groupes d'effectifs égaux.
Dict. démographique multilingue, Nations Unies (1954).
♦ Temps solaire vrai et temps moyen. ⇒ Temps.
❖
CONTR. Extrême. — Excessif, limite. — Gigantesque, grand, gros, petit. — Exceptionnel, génial.
DÉR. V. 2. Moyen, moyenne, moyennement.
COMP. Moyen âge, moyen-courrier. Mi-moyen.
HOM. 2. Moyen. — (Du fém.) Moyenne.
————————
2. moyen [mwajɛ̃] n. m.
ÉTYM. V. 1361; de moyen, adj., « intermédiaire ».
❖
1 Ce qui sert pour arriver à une fin. ⇒ Cause (médiate), procédé, voie. || La fin et les moyens, le but et les moyens (→ Instinctif, cit. 4). || Prendre le moyen pour la fin (→ Gain, cit. 3), la fin (cit. 35) pour le moyen. || Traiter autrui comme une fin (cit. 34) et non comme un moyen. || L'art (cit. 84) n'est pas un moyen mais un but. — ☑ Prov. Qui veut la fin veut les moyens. ☑ La fin justifie (cit. 11 et 12) les moyens. ⇒ Fin (supra cit. 30). — Le, les moyens de faire quelque chose, de parvenir à quelque chose. || Par quel moyen ? ⇒ Comment. || Moyen de faire fortune (cit. 44). || Moyen de parvenir (⇒ Marchepied, porte, tremplin, fig. viatique). || Songer aux moyens de faire une chose (→ Affaire, cit. 32). || Aviser (cit. 12) aux moyens de sauver quelqu'un. || Concerter (cit. 1) avec quelqu'un les moyens de se venger. ⇒ Batterie (dresser ses batteries). || Chercher des moyens. ⇒ Ingénier (s'). || Trouver un moyen. ⇒ Formule, méthode, recette, solution; fam. biais, filon, joint, système, truc. || Trouver le moyen de faire quelque chose, de réussir. || Le moyen de résoudre un problème, de comprendre, de déchiffrer une énigme… ⇒ Clef. — (XVe). || Trouver moyen de… ⇒ Parvenir (→ Chanoine, cit. 3; manière, cit. 2). — Par antiphr. || Il a trouvé moyen de se fâcher avec elle pour une peccadille. — Inventer quelque moyen. ⇒ Machine (vx); ingéniosité (→ Escapade, cit. 3). || Donner, fournir… les moyens (en parlant d'une chose ou d'une personne). ⇒ Mettre (à même), permettre, outiller (→ Amour-propre, cit. 1; exercer, cit. 14). || Indiquer les moyens de… ⇒ Marche (à suivre). || Renseigner sur les moyens de… || Avoir le, les moyens de. ⇒ Pouvoir; possibilité. || S'il en avait le moyen, les moyens : s'il le pouvait. || Il détenait les moyens de contrôler toute l'affaire. ⇒ Fil (tenir les fils). || Prendre, employer, utiliser un moyen (→ Assistance, cit. 2). || Les moyens mis en œuvre (→ Coup, cit. 41). || Ensemble, organisation de moyens. ⇒ Combinaison, opération; plan, tactique. || Déjouer un moyen par une contrebatterie. || Disposer de plusieurs moyens (→ Avoir plusieurs cordes à son arc). || Un arsenal de moyens. || Avoir, laisser à quelqu'un le choix des moyens. || Ne pas s'entendre (cit. 80) sur les moyens à employer. || Il y a plusieurs moyens, mille moyens de… ⇒ Chemin, façon, manière. || Les trois moyens de croire (→ Coutume, cit. 12, Pascal). || Les différents moyens d'être heureux (→ Exception, cit. 2). || Tenter, essayer tous les moyens (cf. fam. Toutes les herbes de la Saint-Jean). → Accès, cit. 5; impression, cit. 33. || Utiliser tous les moyens (→ Faire jouer tous les ressorts; remuer ciel et terre; mettre toutes voiles dehors). ☑ Tous les moyens lui sont bons, tout lui est bon : il est peu difficile, peu scrupuleux sur le choix des moyens. || Ne reculer devant aucun moyen. || Par tous les moyens. ⇒ Force (à toute force), prix (à tout prix). → Intrigant, cit. 5. || Attaquer, lutter par tous moyens (→ Éparpillement, cit. 2; homme, cit. 68). || Changer de moyens (→ Changer de batteries). || Je n'ai pas, il n'y a pas d'autre moyen. || Il n'y a aucun moyen (→ Sans recours).
1 (…) je ne désirais pas de jouir, je voulais savoir; le désir de m'instruire m'en suggéra les moyens.
Laclos, les Liaisons dangereuses, LXXXI.
2 (Sparte) savait bien (…) qu'il lui faudrait, au retour de l'armée, ou subir la loi de ses hilotes, ou trouver moyen de les faire massacrer sans bruit.
Fustel de Coulanges, la Cité antique, IV, X.
3 (…) il y avait là le marquis de Champtercier, vieux, riche, avare, lequel trouvait moyen d'être tout ensemble ultra-royaliste et ultra-voltairien.
Hugo, les Misérables, I, I, IV.
4 Il la supplia de trouver le moyen de venir déjeuner avec lui, quelque part aux environs de Paris (…)
Maupassant, Fort comme la mort, I, III.
5 (…) vous avez carte blanche pour user de tous les moyens qui vous paraîtront propres à le dompter.
F. Mauriac, la Pharisienne, III.
6 J'ai de bonnes raisons pour être assuré que votre père, en ce peu de temps, peut faire fortune là-bas; je lui en fournirai les moyens.
Montherlant, le Maître de Santiago, I, 2.
♦ Moyen efficace, infaillible (→ Efficacité, cit. 1). || Un bon, un excellent moyen. || Mauvais moyen (→ Lire, cit. 28). || Le meilleur moyen pour… (→ Amener, cit. 10). || Le meilleur moyen de… (→ Attendre, cit. 31; avorter, cit. 6). || Moyen assuré (cit. 80) pour être aimé. || Le moyen le plus sûr de… (→ Accoutumer, cit. 2; bonheur, cit. 24), pour… (→ Avancer, cit. 55). || Le plus sûr moyen de ne pas dire de bêtises (cit. 13) est de se taire. || Le seul, l'unique moyen (→ Court, cit. 19; guérir, cit. 26; marquer, cit. 1). || Moyen le plus court, le plus simple (→ Hérésie, cit. 1; hypocrite, cit. 29). || Moyen rapide, expéditif, prompt (→ Flatter, cit. 23). || Moyen provisoire, insuffisant. ⇒ Demi-mesure, expédient, palliatif. || Moyens de fortune. ☑ Se débrouiller par, avec les moyens du bord (→ Bord, cit. 5.1), les seuls moyens que fournissent une situation, un lieu donné. || Moyens énergiques. ☑ Employer les grands moyens (1868), ceux dont l'effet doit être décisif par la force, l'importance des éléments mis en jeu (→ La grosse artillerie). || Il s'est décidé à employer les grands moyens (→ Trancher dans le vif). — Moyens violents, dangereux (→ Bannir, cit. 28). || Recourir à des moyens extrêmes. ⇒ Venir (en venir à). → En désespoir de cause. || Moyen d'exception, moyen singulier (→ Insurrection, cit. 1). || Dernier moyen. ⇒ Carte, chance, planche (de salut), recours, ressource, va-tout. || Moyen direct. || Moyen indirect, détourné. ⇒ Artifice, astuce, biais, calcul, manœuvre, menée, ruse, subterfuge, tournant, traverse (chemin de). || Moyen subsidiaire. || Moyen loyal, courtois, honnête (→ Louable, cit. 1). || Moyen déloyal, perfide… ⇒ Engin (vx), piège, trucage (→ Malice, cit. 1). || Le manège (cit. 7) et l'intrigue, moyens méprisables. || Moyen subreptice, secret. || Moyen adroit pour se tirer d'affaire. ⇒ Échappatoire (cit. 3), excuse. || Moyens dilatoires. ⇒ Fuite. || Moyen qui se retourne contre celui qui l'utilise (→ Arme à double tranchant). — Moyens nécessaires au fonctionnement d'une administration. ⇒ Rouage(s). || Moyens matériels (⇒ Instrument). || Moyens primitifs d'un inventeur (→ Goudronnage, cit.). || Avec peu de moyens, les ferronniers du moyen âge avaient une technique parfaite (→ Ferronnerie, cit. 1). || Moyens mécaniques (⇒ Technique). → Fluide, cit. 8. || Moyens psychologiques, intellectuels (→ Matérialiste, cit. 3). || Moyen magique. ⇒ Charme, sortilège. || Par des moyens inconnus, mystérieux (→ fam. Par l'opération du Saint-Esprit). || Utiliser une personne comme moyen. ⇒ Agent, instrument (cit. 13), organe.
7 Il est donc vrai que vous avez refusé un moyen de me voir ? Un moyen simple, commode et sûr ?
Laclos, les Liaisons dangereuses, XCIII.
8 Le moyen infaillible de rajeunir une citation est de la faire exacte.
9 N'était-ce pas le plus sûr moyen qu'il restât beaucoup chez lui, — et beaucoup chez elle ?
Paul Bourget, Cruelle énigme, I.
♦ ☑ Il y a, il n'y a pas moyen de… : il est possible, il est impossible de… (→ Arrêter, cit. 5; ignorant, cit. 7). || Il n'y a pas moyen de le faire obéir, de lui ôter cette folie (cit. 22) de la tête,… qu'il arrive à l'heure. || Il n'y a plus moyen de s'en sortir. — Ellipt. || Pas moyen de le voir en ce moment ! ⇒ Impossible. || Pas moyen ! rien à faire ! ⇒ 2. Mèche. ☑ Pop. Pas moyen de moyenner. — Alors ? Il n'y a plus moyen ? (en s'adressant à une personne qui ne fait pas ce qu'on attend d'elle, qui est en retard…).
10 La ville est un lieu où il n'y a plus moyen de vivre (…)
La Bruyère, les Caractères, Théophraste, Des Grands d'une République.
♦ Il n'y a pas moyen que… (avec le subj.). || N'y a-t-il pas moyen que vous arriviez à l'heure ?
11 Il n'y a plus moyen que vous trouviez pour marcher en cette Ville une rue non créancière (…)
Cyrano de Bergerac, Lettres satiriques, Contre Soucidas.
12 Mais, Claudine, n'y a-t-il pas moyen que je la puisse entretenir ?
Molière, George Dandin, II, 4.
♦ Ellipt. (vx ou littér.). || Le moyen de…, que… (formule d'interrogation ou d'exclamation pour émettre un doute, exprimer une impossibilité, etc.). ⇒ Comment. || Le moyen de choisir (→ Égal, cit. 8) entre deux beautés ? || Le moyen de n'être pas sensible à une telle louange ? (→ Apprêter, cit. 8). || Quel moyen de résister ? (→ Fraternel, cit. 6). || « Le moyen que ce qui est si faible, étant enfant, soit bien fort (cit. 16) étant plus âgé ! » (Pascal).
13 J'aurais cent choses à vous dire; mais le moyen, quand on a le cœur pressé ?
Mme de Sévigné, 726, 25 août 1679.
14 (…) les clients se lassaient ou s'adressaient ailleurs. Sans rancune du reste. Le moyen de se fâcher avec cette aimable personne, qui parlait d'une voix douce, et ne s'émouvait de rien !
R. Rolland, Jean-Christophe, L'adolescent, II, p. 272.
♦ Moyen d'action : ce qui permet d'agir. ⇒ Levier, pouvoir, ressort. || Moyen d'action sur les personnes, les choses (→ Absolutisme, cit. 1; achopper, cit. 4; exportation, cit. 3). || Moyens de pression d'un gouvernement (→ Endoctrinement, cit.). || Moyen d'intimidation. || Moyens de conciliation. || Moyens de défense d'un pays (⇒ Arme, armement, munition), d'une personne (⇒ fig. Arme), de l'organisme… || Moyen de succès (→ Femme, cit. 16), de réussite. || L'observation, l'intuition (cit. 3), moyens de connaissance. || Moyen de contrôle. || Puissant moyen de vulgarisation (→ Gravure, cit. 3).
15 Le suffrage devint le grand moyen de gouvernement.
Fustel de Coulanges, la Cité antique, IV, IX.
16 Nous avons des moyens d'investigation très nouveaux (…)
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. V, XIV, p. 107.
♦ (1843). || Moyens de transport (⇒ Véhicule), de communication (→ Emporter, cit. 19; industriel, cit. 2).
♦ Moyens de production, nécessaires pour produire (objets sur lesquels porte le travail et instruments utilisés pour le travail).
♦ Dr. « Raison de droit ou de fait invoquée devant un tribunal à l'appui d'une prétention » (Capitant). ⇒ Raison. || Les moyens d'une cause. || Moyens de défense. || Moyens d'opposition. || Moyens de faux. || La fin (cit. 41) de non-recevoir, moyen tendant à faire écarter la demande. ⇒ Exception. || Acte contenant les moyens et les conclusions (→ Incident, II., cit. 14).
17 La requête contiendra les moyens d'opposition, à moins que des moyens de défense n'aient été signifiés avant le jugement, auquel cas il suffira de déclarer qu'on les emploie comme moyen d'opposition (…)
Code de procédure civile, art. 161.
♦ Plur. Législ. fin. Procédés par lesquels le Trésor public se procure les ressources nécessaires à l'équilibre du budget. || Voies et moyens.
♦ ☑ (XVe). Par le moyen de : par l'intermédiaire de, grâce à… ⇒ Canal, entremise, intermédiaire, instrument, truchement; par. || Le graveur imite par le moyen de son art les effets de la peinture (→ Gravure, cit. 2). || Style par le moyen duquel on exprime l'inexprimable (cit. 8).
18 (…) le poumon (…) ayant communication avec le cerveau (…) par le moyen de la veine cave (…)
Molière, le Médecin malgré lui, II, 4.
♦ ☑ (1466). Au moyen de : à l'aide de (le moyen exprimé étant généralement concret). ⇒ Aide (à l'aide de), avec, grâce (à), moyennant, par. || Se diriger au moyen d'une boussole, de repères, d'alignements (cit. 2). || Route indiquée au moyen de jalons (cit. 1). || Machine qui s'oriente au moyen d'un gouvernail (cit. 1). || Les labiales sont articulées (cit. 10) au moyen des lèvres. || L'algèbre permet de trouver les inconnues (cit. 7.1) au moyen des connues. — Sans le moyen de… || Monter à une corde sans le moyen des pieds. ⇒ Secours.
♦ (Déb. XXe). Gramm. || Complément de moyen, exprimant le moyen par lequel s'accomplit l'action exprimée par le verbe (ex. : rentes, dans vivre de ses rentes).
2 (1580). || Les moyens : pouvoir naturel et permanent d'une personne, dans l'ordre physique, intellectuel ou moral. ⇒ Capacité, faculté, force. || Moyens physiques d'un sportif. || Les moyens d'un élève, d'un employé (→ État-major, cit. 3). || Avoir des moyens, de grands moyens, peu de moyens. ⇒ Don, facilité. ☑ Perdre ses moyens : se troubler. — Une tâche, une mission à la mesure de ses moyens, au-dessus de ses moyens. || Connaître ses moyens (⇒ Limite). || Être en possession de tous ses moyens : être en bonne forme physique ou morale.
19 J'ai connu, sur les bancs du collège, un garçon qui avait de l'ambition et des moyens; il s'appliquait, il comprenait, il retenait.
Alain, Propos, 18 févr. 1911, Grandet.
♦ ☑ Par ses propres moyens : sans aide étrangère, en agissant seul. || Un bricoleur, une personne ingénieuse qui fait tout par ses propres moyens. || Gagner une fortune par ses propres moyens (→ Fonctionnarisme, cit. 3). || Débrouillez-vous par vos propres moyens ! ⇒ Seul (tout seul). || Il est rentré chez lui par ses propres moyens, sans être accompagné, ou sans utiliser les transports publics. || Un homme qui a réussi, qui est arrivé par ses propres moyens (→ Self-made-man).
3 (Fin XVe). Ressources pécuniaires. || Moyens d'existence, moyens de vivre. || Tirer de son travail, de sa plume ses moyens de subsistance. ⇒ Revenu. — Mes moyens me permettent de manger à ma faim (→ Désaltérer, cit. 5). || Ses parents n'avaient pas les moyens de lui faire faire des études. || C'est trop cher, c'est au-dessus de mes moyens, je n'en ai pas les moyens. || Donner dans la mesure, dans la limite de ses moyens, selon ses moyens. ⇒ Richesse (→ Enterrer, cit. 12). — Fam. (L'emploi qu'on en fait n'étant pas précisé). || Avoir de petits, de gros moyens. ☑ Des gens qui ont les moyens, qui n'ont pas les moyens : des gens riches, pauvres.
20 Lorsque je quittai la maison, mon père, ma mère, mon parrain, m'avaient tous donné quelque chose, chacun selon ses petits moyens : et j'avais en réserve cinq louis (…)
Diderot, Jacques le fataliste, Pl., p. 536.
21 Marius renvoya les trente louis à sa tante avec une lettre respectueuse où il déclarait avoir des moyens d'existence et pouvoir suffire désormais à tous ses besoins. En ce moment-là, il lui restait trois francs.
Hugo, les Misérables, III, IV, VI.
22 La moindre petite enquête vous aurait montré que cette femme est la maîtresse d'un nommé Robert qui doit avoir une trentaine d'années de moins que vous et qui n'a pas de moyens d'existence avoués. Une partie de l'argent que vous remettez généreusement à votre maîtresse sert à le faire subsister.
René Floriot, la Vérité tient à un fil, p. 17.
❖
CONTR. Fin. — Impossibilité, impuissance.
DÉR. Moyenner.
HOM. 1. Moyen.
Encyclopédie Universelle. 2012.