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rester

rester [ rɛste ] v. intr. <conjug. : 1>
• 2e moitié XIIe; lat. restare
I
1Continuer d'être dans un lieu. demeurer. (Sujet personne) « C'était dans un champ de carottes, nous y sommes restés cinq heures » (Zola). « Restez là, jusqu'à ce que je revienne » (Sand). Allus. hist. J'y suis, j'y reste (mot attribué à Mac-Mahon). — Rester au lit, à table. Rester auprès de qqn. demeurer. « Restaient seulement avec nous Millie et son père » (Alain-Fournier). Rester au même endroit ( séjourner) , y rester trop longtemps. s'attarder, s'éterniser, moisir. Fig. fam. Rester sur un travail. Tu ne vas pas rester des heures là-dessus ? Loc. Rester sur le carreau. Fam. Y rester : mourir. « J'ai nettement envisagé la mort. C'est-à-dire que je m'étais, avant l'opération, mis en disposition d'y rester » (A. Gide). Il a bien failli y rester. Rester sur place. Rester en chemin, en route : être laissé sur place. Fam. Rester en carafe. Rester en plan. Ne pas rester en place.
Absolt (opposé à partir, s'en aller). Je ne peux pas rester, je reviendrai demain. Je resterai pour garder la maison. Fam. « Cette bonne fille est restée consoler son amie » (A. Daudet). Rester à (et inf. de but). Restez à déjeuner avec nous. Ellipt Tu restes dîner avec nous.
(Sujet chose) La lettre « est toujours là; dans la malle; qu'elle y reste » (Duhamel). « L'odeur de sueur qui lui restait aux doigts » (Romains). La tache est restée, malgré les lavages répétés. Par métaph. Cela me reste sur le cœur, sur l'estomac : je ne peux le digérer, cela m'écœure. Loc. Rester en travers (de la gorge) : ne pouvoir être avalé; fig. être intolérable. « Et j'avais honte de les supplier, car ça me reste en travers, quand je demande » (Zola). Fig. Rester dans la mémoire, dans le souvenir des hommes. Loc. Cela doit rester entre nous : n'en parlez pas aux autres (cf. Motus et bouche cousue).
2(1200) Continuer d'être (dans une position, une situation, un état). Rester debout. Rester face à face. Rester en arrière, en contact avec qqn, en suspens. Ne pas rester les bras croisés : agir. La voiture est restée en panne. Rester dans le même état. se maintenir. Rester dans l'ignorance. demeurer; croupir, pourrir. « L'ouvrier restait la main en l'air à la chaîne du soufflet » (Alain-Fournier). Rester sans bouger. Rester tout un jour sans manger. passer.
♢ RESTER À (et l'inf.) :être longuement occupé à, continuer à passer son temps à. « Il restait à fumer au coin du feu » (Flaubert). « Cantilly seul resta à attendre ses compagnons » (Barbey). Rester des heures à bavarder.
(Suivi d'un attribut) « Elle restait inerte, la tête renversée, les yeux clos » (France). Rester sourd aux prières de qqn. Rester de marbre. Rester jeune. Rester amis. Il est resté très timide. Rester vieille fille, vieux garçon. Rester célibataire. « Mon ultime raison, mon excuse suprême De vivre et d'être un homme et de rester moi-même » (Verlaine). Le magasin restera ouvert en août. Rester sans nouvelles. Impers. Il reste entendu, vrai que. (Avec en « à cause de cela ») Loc. En rester comme deux ronds de flan, en rester baba, sur le cul, tout bête.
3Absolt Subsister à travers le temps, ne pas être détruit malgré l'écoulement du temps. persister. « La passion passe. La raison reste » (R. Rolland). C'est une œuvre, un artiste qui restera. durer. PROV. Les paroles s'envolent, les écrits restent.
4Rester à qqn : continuer d'être, d'appartenir à qqn. L'avantage est resté à nos troupes. Ce surnom lui est resté. Le souvenir qui m'en est resté. « Cette gaîté de race et de jeunesse, qui leur était restée envers et contre tout » (Loti).
5(XVIIIe) EN RESTER À... : s'arrêter, être arrêté à (un moment d'une action en cours, ou d'une évolution). « Il en était resté à monsieur Voltaire, à monsieur le comte de Buffon » (Balzac). Une région où les paysans en sont restés aux lampes à pétrole. Où en est-il resté de sa lecture ? Ne pas aller plus loin, au-delà de; se borner à. tenir (s'en tenir à). Faut-il en rester là de cette discussion ? Restons-en là, inutile de nous revoir.
(XIXe) RESTER SUR : s'en tenir à (une impression, un état de choses), sans vouloir ou pouvoir rien changer. Continuons, ne restons pas sur un échec. Loc. Rester sur la bonne bouche, sur une bonne impression. Rester sur sa faim.
IIRégion. Habiter. Il reste en banlieue. « Françoise disait que quelqu'un restait dans ma rue pour dire qu'il y demeurait » (Proust). III(En parlant d'éléments d'un tout) Être encore présent ou disponible (après élimination effective ou théorique des autres éléments ou unités). reste (n. m.).
1Subsister. Le peu de jours qui reste (ou qui restent selon le sens ). Rien ne reste de ces chefs-d'œuvre. (Avec un compl. ind.) « Je regarde ce que je perds, et ne vois point ce qui me reste » (Molière).
(En tête de phrase, avec inversion du sujet) « Restait cette redoutable infanterie » (Bossuet). Restent deux questions. (V. au sing. devant un sujet plur.) « Reste ceux qu'on n'ose pas déranger » (Triolet).
Impers. Il ne restait qu'un bout de pain. Il en reste un fond de bouteille. « Et s'il n'en reste qu'un, je serai celui-là ! » (Hugo). Quatre ôté de neuf, (il) reste cinq ( différence) . (Avec un compl. ind.) Il lui restait trois francs. Il nous restait encore largement de quoi vivre. « Que reste-t-il de nos amours » (Trenet). Cela reste à prouver.
♢ TOUT CE QUI RESTE DE. (Construit avec le plur.) Vx « Tout ce qui reste ici de braves janissaires sont prêts de vous conduire à la Porte sacrée » (Racine). (Construit avec le sing.) Mod. Tout ce qui reste des fruits est sur la table.
2Spécialt RESTER À (et l'inf.) :devoir encore être. Une trentaine de mille francs restaient à payer. « Une bande de terre nue restait à traverser pour gagner le bord du fleuve » (Maupassant).
Impers. Il reste beaucoup à faire. « Je sais ce qu'il me reste à faire » (H. Bazin). Le temps qu'il me reste à vivre. (Marquant une action à venir) Il ne me reste plus qu'à vous remercier : je n'ai plus qu'à vous remercier (formule de remerciements). Il ne vous reste plus qu'à renoncer, qu'à partir. Ellipt « Reste à régler la cérémonie » (Vallès). Loc. Reste à savoir. « Reste à savoir lequel vaut mieux, de périr d'un coup ou de mourir lentement » (Michelet). Reste à savoir pourquoi.
3 ♦ IL RESTE QUE; IL N'EN RESTE PAS MOINS QUE (et l'indic.) :il n'en est pas moins vrai que... (cf. Toujours est-il que). « Il n'en reste pas moins que Monsieur Floche est un digne homme et dont je garderai bon souvenir » (A. Gide). Ellipt Reste qu'il faudra bien lui en parler (cf. Toujours est-il que).
⊗ CONTR. Déplacer (se), disparaître, esquiver (s'), 1. partir, quitter; bouger; effacer (s'), passer.

rester verbe intransitif (latin restare, s'arrêter) Continuer à séjourner dans un lieu ou auprès de quelqu'un : Rester à Paris tout l'été. Rester auprès d'un malade. Familier, Afrique, Antilles. Habiter à tel endroit, y avoir son domicile ; résider : Il reste dans le même quartier que nous. Demeurer en un endroit, ne pas changer de place : La voiture est restée au garage. Ne pas disparaître, en parlant d'une marque : La tache est restée malgré les lavages répétées. Se maintenir, continuer à être dans la même position, le même état : Rester debout. Rester jeune. Je reste votre ami. S'attarder à faire quelque chose : Rester à lire jusque tard dans la nuit. Continuer de ressentir l'effet agréable ou pénible de quelque chose, s'y tenir : Rester sur une impression de malaise. Subsister après disparition de quelque chose, de quelqu'un, d'un groupe : Un seul Français reste désormais en course. Se maintenir, ne pas disparaître, ne pas tomber dans l'oubli : Cet écrivain restera. Être encore à faire par quelqu'un : Tout reste à découvrir en ce domaine.rester (citations) verbe intransitif (latin restare, s'arrêter) Henri Bosco Avignon 1888-Nice 1976 Ce qui reste finit par nous rendre ce qu'on a perdu. Un oubli moins profond Gallimard Victor Hugo Besançon 1802-Paris 1885 Si l'on n'est plus que mille, eh bien, j'en suis ! Si même Ils ne sont plus que cent, je brave encore Sylla ; S'il en demeure dix, je serai le dixième ; Et s'il n'en reste qu'un, je serai celui-là. Les Châtiments, Ultima Verba, VII, 16 Edme Patrice Maurice, comte de Mac-Mahon, duc de Magenta Sully, Saône-et-Loire, 1808-château de La Forêt, Loiret, 1893 J'y suis, j'y reste. Commentaire Interrogé sur cette parole, Mac-Mahon aurait répondu : « Je ne fais jamais de mots. » Celui-ci, qui vise l'attitude du maréchal à Malakoff (1855), où il refusa d'abandonner le fort aux Russes, paraît avoir été inventé plus tard, pour des besoins de propagande, quand il s'agit de faire prolonger le terme de sa présidence. ● rester (difficultés) verbe intransitif (latin restare, s'arrêter) Orthographe et construction Ne pas confondre le participe présent et l'adjectif. 1. Restant, participe présent, est toujours invariable et peut avoir un complément : les places restant inoccupées ; les postes restant à pourvoir. 2. Restant, e, adjectif, varie en genre et en nombre et n'est jamais suivi de complément : places restantes ; poste restante. Conjugaison Avec l'auxiliaire être : elle n'est restée qu'un instant. Remarque Autrefois, on pouvait conjuguer rester avec l'auxiliaire avoir quand il s'agissait d'une action brève et révolue : elle a resté deux jours à Lyon. Cet emploi est sorti de l'usage. Construction Rester à dîner, rester dîner. Les deux constructions sont admises. La construction avec à est plus soutenue, la construction directe (rester dîner) plus courante. Accord 1. Reste dans une soustraction. Reste est toujours invariable quand il est employé dans une soustraction : quatre ôté de huit, reste quatre. 2. Ce qui reste de. Après ce qui reste de suivi d'un pluriel, le verbe se met au singulier : ce qui reste de maisons a été détruit. 3. Reste en tête de proposition. Reste placé en tête de proposition s'accorde généralement avec le sujet : restent plusieurs problèmes à résoudre ; reste la délicate question des indemnisations. Remarque Reste, en tête de proposition, est souvent traité aujourd'hui comme une forme abrégée de il reste, et ne s'accorde pas : reste plusieurs problèmes à résoudre. Cette façon d'écrire n'est pas fautive. 4. Il reste... Attention reste dans il reste est toujours au singulier (il s'accorde avec le pronom neutre il et non avec ce qui suit) : il reste trois problèmes à résoudre. Emploi Rester court / être à court de qqch. Ne pas confondre rester, demeurer court (= rester sans réaction, manquer d'à-propos) et être à court de (= manquer de). ● rester (expressions) verbe intransitif (latin restare, s'arrêter) En rester à, s'y arrêter, ne pas aller au-delà : En rester à un accord limité. En rester là, ne pas poursuivre une action, une collaboration, des relations. Il reste que, il n'en reste pas moins que, on ne peut nier que : Reste qu'il nous a trompés. Rester dans la main, se dit du cheval qui ne cherche pas à échapper à l'action du mors. Familier. Y rester, perdre la vie dans une entreprise dangereuse. ● rester (synonymes) verbe intransitif (latin restare, s'arrêter) Continuer à séjourner dans un lieu ou auprès de quelqu'un
Synonymes :
Contraires :
- déserter
- s'écarter
- s'éloigner
Familier, Habiter à tel endroit, y avoir son domicile ; résider
Synonymes :
- résider
Ne pas disparaître, en parlant d'une marque
Synonymes :
Contraires :
- disparaître
Se maintenir, continuer à être dans la même position, le...
Synonymes :
Continuer de ressentir l'effet agréable ou pénible de quelque chose, s'y...
Contraires :
- sortir de
Se maintenir, ne pas disparaître, ne pas tomber dans l'oubli
Synonymes :
- se perpétuer
Familier. Y rester
Contraires :
- résister

rester
v. intr.
rI./r
d1./d Continuer d'être (à tel endroit; dans tel état). Rester chez soi. Rester calme.
Restez (à) dîner.
|| (Afr. subsah., Belgique, France rég., Liban, Québec, Réunion) Syn. de habiter (sens II), vivre (en un endroit). Cela fait dix ans que je reste dans ce quartier.
Rester avec qqn: vivre chez lui. (Fam. Belgique.)
d2./d Persister, durer. Cette oeuvre restera.
d3./d En rester à: s'arrêter à, s'en tenir à. Restons-en là.
d4./d Rester sur une impression, ne pas vouloir ou ne pas pouvoir l'oublier.
|| Rester, être resté sur sa faim: n'avoir pas mangé à sa faim; fig. ne pas voir ses aspirations, ses désirs pleinement satisfaits.
d5./d (Choses) Rester à qqn, lui demeurer attaché. Ce surnom lui est resté.
rII./r
d1./d Subsister (par rapport à d'autres éléments qui ne sont plus). Ruines qui restent d'un édifice. Voyons ce qui reste à faire.
Ellipt. Reste à savoir si...
d2./d Il reste que (+ indic.): il est néanmoins vrai que.

⇒RESTER, verbe intrans.
I. — Continuer d'être de façon plus ou moins prolongée ou durable, dans un lieu ou dans un état.
A. — [Dans un lieu]
1. [Le suj. désigne une pers.] Rester à la maison, chez soi, au lit. Je ne peux même pas rester à Paris avec toi: il faut que je rentre coucher ce soir à Maisons! (MARTIN DU G., Thib., Épil., 1940, p. 790). Aujourd'hui, je me suis astreint à rester au studio jusqu'à la fin (SCHAEFFER, Rech. mus. concr., 1952, p. 104).
♦ [Suivi d'un inf. précédé ou non de la prép. à] Si tu veux rester à dîner avec Lanoue, reste (DUHAMEL, Confess. min., 1920, p. 52). Vous restez déjeuner avec moi. Nous partagerons le bifteck en deux (ROMAINS, Hommes bonne vol., 1932, p. 99).
En partic.
Absol. [P. oppos. à partir, s'en aller] Prolonger la durée de sa présence. Il ne sait jamais ce qu'il doit faire, s'il doit s'en aller ou rester, être ici ou ailleurs! (MIRBEAU, Journal femme ch., 1900, p. 82). Il ne laissait pas les hommes souffler. Aux malades, il demandait tous les quarts d'heure: « Ça va-t-il mieux? », pressé de les inscrire sur sa liste de départ. Lui, il restait (BENJAMIN, Gaspard, 1915, p. 110).
♦ [P. allus. hist.: J'y suis, j'y reste (phrase attribuée à Mac Mahon après la prise du fort de Malakoff en septembre 1855)] P. anal. Il faut admirer, ces grandes revues qui s'installent sur un domaine du savoir avec la certitude tranquille, l'indifférente placidité d'une pyramide d'Égypte. Elles y sont. Elles y restent (L. FEBVRE, Face au vent, [1946] ds Combats, 1953, p. 34).
Fam. Habiter, demeurer. Voyez-vous les fenêtres où il y a des giroflées? c'est là que reste madame Étienne (BALZAC, Ferragus, 1833, p. 106).
2. [Le suj. désigne une chose] Il y avait aussi [dans la malle] un « cahier de devoirs mensuels ». J'en fus surpris, car ces cahiers restaient au cours et les élèves ne les emportaient jamais au dehors (ALAIN-FOURNIER, Meaulnes, 1913, p. 328). L'Inspecteur: (...) Qu'est-ce que tu emportes là? Gilberte: Le tableau bleu, Monsieur l'Inspecteur. L'Inspecteur: Que le tableau bleu reste ici! (GIRAUDOUX, Intermezzo, 1933, I, 6, p. 66).
3. Loc. ou expr. div.
a) [Suivi de la prép. en] Rester en arrière (v. arrière1), en tête; rester en chemin, en route; rester en plan (v. plan3), en rade (v. rade1); (ne pas) rester en place.
b) [Suivi de la prép. à] Rester à sa place.
c) [Suivi de la prép. sur] Rester sur le cœur, sur l'estomac; rester sur le terrain; rester sur place; rester sur la place; rester sur le carreau.
d) Y rester (fam.). Ne pas sortir vivant d'une situation dangereuse, y laisser sa vie. Ils ne pouvaient plus courir, ils fendaient péniblement le flot, avec la pensée qu'une minute de retard allait être la mort. — Nom de Dieu! c'est le cuvelage qui a crevé, cria Étienne. Je le disais bien que nous y resterions (ZOLA, Germinal, 1885, p. 1537).
e) Région. Rester de + subst. (désignant une maladie). Mourir de. Le Curé: On va bien, au Landier! le père, la mère? La Guitte: Le père est resté de rhumatismes. La mère va; merci, Monsieur le Curé (LA VARENDE, Tourmente, 1948, p. 36).
f) Rester dans (en travers de) la gorge.
B. — [Dans un état, une situation]
1. a) [Le suj. désigne une pers.] J'allai voir sa mère, et je lui parlai de mon rival. Elle m'assura qu'on ne le voyait plus. « Femme fausse! » pensai-je, « tu ignores que je sais ta démarche d'hier: reste dans le doute » (RESTIF DE LA BRET., M. Nicolas, 1796, p. 203). Il ne la regarde même pas s'en aller: il reste les bras ballants, béant devant la place où elle était (BARBUSSE, Feu, 1916, p. 91).
[Suivi d'un adj. attribut ou d'une expr.] Rester coi, rester court (v. court1), en rester baba (v. baba1); en rester comme deux ronds de flan (v. flan1); en rester tout bête (v. bête2); en rester (tomber) sur le cul; rester sourd (à qqc.). Elle devait avoir trente-cinq ans environ, et restait belle, fort belle, bien qu'un peu grasse (MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, Mme Parisse, 1886, p. 730). Allons. Reste tranquille. Deux minutes. Deux minutes seulement (AUDIBERTI, Mal court, 1947, II, p. 173).
[Suivi d'un subst. attribut; précédé ou non de l'art.] Je lui offris de rester brigand pour lui plaire. Tout, monsieur, tout! Je lui offris tout, pourvu qu'elle voulût m'aimer encore! (MÉRIMÉE, Carmen, 1845, p. 72). On ne trouvait plus dans ses œuvres [de Lecocq] que des qualités de métier: il restait le bon harmoniste d'autrefois, il savait à souhait faire concorder la parole avec la note et la note avec l'accord (L. SCHNEIDER, Maîtres opérette fr., 1924, p. 238).
Loc. Rester (vieille) fille, (vieux) garçon. Vous ensevelir dans un couvent, ce serait de l'égoïsme; quant à rester vieille fille, vous ne le devez pas (BALZAC, E. Grandet, 1834, p. 245). Mariez-vous donc! Mariez-vous donc! C'est si gentil, c'est si bon! Pourquoi rester garçon? Allons... Mariez-vous donc! (BENJAMIN, Gaspard, 1915, p. 44).
[Suivi d'un inf. précédé de sans] Il restait sans parler, un peu intimidé. Très vite il se remit (ROLLAND, J.-Chr., Nouv. journée, 1912, p. 1495). Elle reste sans bouger, le dos à la salle, puis elle referme la fenêtre (ANOUILH, Antig., 1946, p. 159).
Loc. Rester sans mot dire.
[Suivi d'un inf. précédé de à] Tout Petit, se faufile sous la table de la cuisine et reste à regarder, avec des yeux d'envie (...), les pommes de terre (GONCOURT, Journal, 1864, p. 60).
b) [Le suj. désigne un état d'esprit, un jugement] Continuer d'être. Très grosses pertes pendant les quatre jours de combat. Le moral reste bon (JOFFRE, Mém., t. 1, 1931, p. 413). Le docteur eut beau l'assurer qu'il y en avait un sur le palier du premier étage, et probablement mort, la conviction de M. Michel restait entière. Il n'y avait pas de rats dans la maison (CAMUS, Peste, 1947, p. 1221).
c) En partic.
Rester à qqn. Continuer d'être sien, de lui appartenir. Lucile vous reste. Embrasse-la pour moi aussi. Soyez heureux tous les trois... (SIMENON, Vac. Maigret, 1948, p. 134).
Rester avec qqn, du côté de qqn. Continuer d'être avec lui, de par ses idées, ses opinions. Plus d'un sans doute n'attendait qu'un signe pour rester des nôtres (AMBRIÈRE, Gdes vac., 1946, p. 294).
Fam. Sa voix s'éleva: — Et puis, vous savez, je reste du syndicat! Compagnon comme devant, le vieux Gilbert! — Vous faites bien! (R. BAZIN, Blé, 1907, p. 373).
Rester en vie (p. oppos. à mourir). Continuer d'être vivant. Sigismond sera peut-être assassiné dans une heure. Que des hommes de son espèce restent en vie, c'est un continuel miracle (MONTHERL., Malatesta, 1946, I, 4, p. 446).
Absol. Ceux qui restent. Les vivants (p. oppos. à ceux qui sont morts). Les vêtements d'un mort trompent la douleur de ceux qui restent (RENARD, Journal, 1900, p. 582).
2. [Le suj. désigne un inanimé concr., le verbe a souvent une valeur attributive] Aucune n'ose tirer la chaîne de la cloche. Je me pends après, déchaînant ainsi un tocsin formidable (...). Rien, la porte reste close (COLETTE, Cl. école, 1900, p. 275). Le bureau de la bourse reste ouvert toute la nuit (HERMANT, M. de Courpière, 1907, II, 10, p. 19).
♦ [Le suj. désigne le temps] Pourvu que le temps reste sec (FRAPIÉ, Maternelle, 1904, p. 69). Le temps resta beau (HÉMON, M. Chapdelaine, 1916, p. 96).
♦ [Le suj. désigne une théorie, une règle] Nous savons aujourd'hui que par les lois d'un magnétisme universel dont la cause reste inconnue, deux corps, que nul obstacle n'arrête, tendent à se réunir par une force d'impulsion accélérée que l'on appelle gravitation (PROUDHON, Propriété, 1840, p. 137). Le préfet peut (...) régler (...) la police des débits de boissons. Dans les communes qui ne sont pas visées par l'arrêté préfectoral, les règlements locaux restent en vigueur (BARADAT, Organ. préfect., 1907, p. 331).
En partic. Rester à qqn. Continuer d'être sien, de lui appartenir. Ce n'est pas le temps de savoir, mais c'est toujours le temps de chercher. Mes matériaux me restent: nous avons les localisations (BARRÈS, Cahiers, t. 5, 1906, p. 237).
Fam. Ce surnom lui est resté. Sa mère l'appelant Paulet par câlinerie, il ne pouvait articuler ce mot et le prononçait Poulet (...). Le surnom de Poulet lui resta (MAUPASS., Une Vie, 1883, p. 203).
Absol. Continuer d'exister, malgré l'écoulement du temps. Les paroles s'envolent, les écrits restent. Le mensonge passe, la vérité reste. Les gens sages, la postérité surtout, ne jugent que sur les faits (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 285). Un bon livre pénètre et reste, une pièce meurt avec le succès qui la faisait vivre (RENARD, Œil clair, 1910, p. 183).
3. Loc. ou expr. div.
a) Rester lettre-morte; rester maître de soi (v. maître2); rester en contact; rester le bec dans l'eau.
b) Que ceci reste entre nous. Que ceci continue de demeurer entre nous et ne soit pas divulgué. Profitendieu père est mon collègue; un homme des plus remarquables et que j'estime tout particulièrement. Mais... (que ceci reste entre nous)... voici que j'apprends qu'il n'est pas le père de l'enfant qui porte son nom! Qu'est-ce que vous dites de ça? (GIDE, Faux-monn., 1925, p. 1118).
c) [Rester est suivi de la prép. en] Rester en carafe, en panne (v. panne3), en repos, en suspens, en tutelle.
d) [Rester est suivi de la prép. sur]
Rester sur la brèche (v. brèche1), sur la défensive, sur la bonne bouche, sur sa faim.
Rester des heures sur qqc. (un travail, un ouvrage). Passer beaucoup de temps à faire quelque chose.
Au fig. S'en tenir à un comportement, à un sentiment, à un état de choses. Rester sur une bonne/mauvaise impression; rester sur un échec, une victoire. La crainte d'être désagréable à un homme qui l'avait comblé, lui et son ami, de prévenances, le retenait; il continua donc de rester sur la même réserve que lui (DUMAS père, Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 526). Quel charme!... Ces rythmes allitérés... (...) on pourrait analyser. Mais ce serait besogne de pédant. J'aime mieux rester sur ma sensation (MIOMANDRE, Écrit sur eau, 1908, p. 156).
e) En rester à, en être resté à
S'arrêter, s'être arrêté dans un processus, une action en cours. Freud en était resté aux identifications privées et c'est pourquoi il ne pouvait rejoindre la sociologie (Traité sociol., 1968, p. 410):
1. Il faudra sans doute bien du temps avant que la vérité soit connue sur ce mystère de l'astrologie. En attendant qu'il soit levé — et rien ne nous empêche d'en rester sur ce point à une hypothèse de travail — la théorie symboliste fait apparaître une lumière nouvelle sur le plan de la pratique astrologique...
BARBAULT, De psychanal. à astrol., 1961, p. 27.
En rester là (de qqc.); restons-en là. Eugénie, ne comprenant plus rien à la fortune de son père, en resta là de ses calculs (BALZAC, E. Grandet, 1834, p. 113). Tout ce que je vous en dis n'est que pour vous servir. Mais je vois que je vous contrarie. Restons-en là et quittons-nous bons amis (A. FRANCE, Jocaste, 1879, p. 103).
S'arrêter, au lieu d'aller dans le sens du progrès, ne pas aller de l'avant. Si l'on excepte les peuplades restées encore au stade de la cueillette ou de la chasse (esquimaux, quelques tribus africaines, etc.), l'agriculture est l'activité essentielle d'une économie rudimentaire (Tiers Monde, 1956, p. 144).
f) Loc. impers.
Il reste (suivi d'un adj. attribut) de + inf. Il reste indispensable de gérer et d'administrer nos communes (FONTENEAU, Cons. munic., 1965, p. 11).
Il reste (suivi d'un adj. attribut) que + prop. Il reste entendu que l'État peut, dans l'intérêt général, exiger des maintiens ou des modifications de tarifs (PINEAU, S.N.C.F. et transp., 1950, p. 61).
Il n'en reste pas moins (suivi d'un adj. attribut) que + prop. Il n'en reste pas moins vrai qu'on ne produit pas pour accumuler des stocks de marchandises, mais bien pour consommer (BRUNERIE, Industr. alim., 1949, p. 201).
Rem. Conjugué de nos jours avec l'auxil. être, rester se conjuguait dans ce sens avec être ou avoir jusqu'au déb. du XIXe s. J'ai resté quelques momens dans la bibliothèque (SÉNAC DE MEILHAN, Émigré, 1797, p. 1709). J'ai resté seul avec ma femme dans une grande voiture (MAINE DE BIRAN, Journal, 1816, p. 206).
II. — Être encore présent, disponible; subsister.
A. — [Le suj. désigne le plus souvent un inanimé] Que de sable lavé, que de rêves promis, Pour qu'un peu d'or, enfin, reste au fond du tamis! Prends ton bâton, chercheur! (CROS, Coffret santal, 1873, p. 36). Je prends ma tasse, où reste encore un peu de thé (SARTRE, Nausée, 1938, p. 192).
Qqc. reste à qqn. Peut-être cette immense quantité de valeurs ne provenait pas entièrement de cadeaux et constituait des gages qui lui étaient restés [à Gobseck] faute de paiement (BALZAC, Gobseck, 1830, p. 440).
Qqn reste à qqn. Un seul parent me restait: un oncle, vieil officier retraité (FRAPIÉ, Maternelle, 1904, p. 2).
Absol. Jenny sourit: — « Tant pis pour les écheveaux qui restent. Finissons seulement celui-ci... » (MARTIN DU G., Thib., Épil., 1940, p. 881).
Loc. Rester pour compte.
B. — [En empl. impers., le suj. réel désigne un animé ou un inanimé concr. ou abstr.]
1. Il reste (+ subst.). Quand les aunes eurent disparu, il restait les souches (HÉMON, M. Chapdelaine, 1916, p. 63). L'Europe était alors [au temps de Montesquieu] le meilleur des mondes possibles (...). La science était déjà assez belle, et les arts très délicats; il restait de la religion (VALÉRY, Variété II, 1929, p. 63). Il reste les autres: les fidèles qui demeurent à mi-côte, qui luttent, succombent, se relèvent (MAURIAC, Journal 2, 1937, p. 189).
Littér. Si l'on n'est plus que mille, eh bien, j'en suis! Si même Ils ne sont plus que cent, je brave encor Sylla; S'il en demeure dix, je serai le dixième; Et s'il n'en reste qu'un, je serai celui-là! (HUGO, Châtim., 1853, p. 430).
♦ [Constr. avec un compl. indir.] Le progrès de la réflexion et de la conscience psychologique finira sans doute par éliminer les poètes inspirés. Il nous restera des poètes-artistes qui sauront au besoin imiter même l'inspiration pour leur plaisir et celui des autres (LEMAITRE, Contemp., 1885, p. 91). Il lui restait de l'essence pour un quart d'heure, au maximum (MALRAUX, Espoir, 1937, p. 560). Il lui restait une chance, une petite chance (SARTRE, Nausée, 1938, p. 207).
ARITHM. [Dans l'opération de la soustraction] Quatre ôté de huit, (il) reste quatre. Si de douze, je retiens quatre, combien me reste-t-il? (A. FRANCE, P. Nozière, 1899, p. 45).
[Avec ell. du pron. pers.; le verbe demeure parfois inv.] Il se mit à fourrager parmi les assiettes, cherchant le pain et le saindoux (...). Il trouva un pain. Restait le saindoux. Il le découvrit sans le vouloir (VAN DER MEERSCH, Invas. 14, 1935, p. 210). Restait apparemment quelques points à éclaircir, car Chabot demanda qu'on le laissât seul un instant en société du professeur (DUHAMEL, Voy. Périot, 1950, p. 183):
2. Sur les cent cinquante électeurs dont se composait le collége (...) se trouvaient vingt légitimistes, (...) et vingt autres noms qui, pour des motifs divers, ne devaient pas répondre à l'appel. Restaient cent-dix votants.
REYBAUD, J. Paturot, 1842, p. 321.
2. Il reste que; il n'en reste pas moins que. [En parlant de ce qui est encore à considérer, qu'on ne peut négliger] Malgré les perfectionnements remarquables apportés à la locomotive à vapeur au cours de ces dernières années, il n'en reste pas moins que le rendement de cet engin demeure très limité (BAILLEUL, Matér. roulant ch. de fer, 1951, p. 87). Sans doute, Vichy y a-t-il pu (...) maintenir dans la neutralisation une large partie de nos territoires d'outre-mer. Mais il reste que l'Afrique équatoriale, (...) les établissements français des Indes, Saint-Pierre et Miquelon, se sont déjà affranchis de la capitulation (DE GAULLE, Mém. guerre, 1954, p. 675).
[Avec ell. du pron. pers.] Reste que, pour qu'on passe de la grève révolte à la grève moyen d'action dans une négociation, il faut que l'autre voie soit ouverte et que le moyen de négocier existe (REYNAUD, Syndic. en Fr., 1963, p. 155).
3. (Tout) ce qu'il reste (de); (tout) ce qui reste (de). [Il] paya trente mille francs (...) les cent cinquante hectares de la Borderie, tout ce qu'il restait de l'ancien domaine des Rognes-Bouqueval (ZOLA, Terre, 1887, p. 92). Va vite me chercher ce qui reste de chocolat (MIOMANDRE, Écrit sur eau, 1908, p. 278).
♦ [Avec un compl. indir.] Grâce à une certaine habileté, je ne perdis que ce qu'il me restait d'amour-propre (CÉLINE, Voyage, 1932, p. 142):
3. Avais-je le droit, historien, de refaire de l'histoire? De consacrer à l'histoire mon temps, mon activité, tout ce qui me restait de forces, alors que tant d'autres besognes requéraient impérieusement les citoyens?
L. FEBVRE, Face au vent, [1946] ds Combats, 1953, p. 41.
Rem. La forme ce qu'il reste est d'un niveau de lang. plus soigné que ce qui reste. Pourtant la lang. écrite, comme la lang. parlée tend de plus en plus à employer ce qui reste.
C. — [Empl. comme semi-auxil. avec aspect duratif, rester est suivi d'un inf. introd. par la prép. à] Pour les vignes, qu'on ne m'en parle plus. Une rente mensuelle, dont le montant reste à fixer, me sera versée par le notaire (MAURIAC, Nœud vip., 1932, p. 257).
Loc. Tout reste à faire dans (ce domaine). On peut dire que dans ce domaine [des recherches scientifiques sur l'hygiène alimentaire] tout reste à peu près à faire dans notre pays (BRUNERIE, Industr. alim., 1949, p. 204).
En empl. impers.
Il reste à + inf.; il ne reste (plus) qu'à + inf. Nous sommes fatigués, nous avons froid, nous avons faim. Il s'agit donc de trouver abri, feu et nourriture. La forêt a du bois, les nids ont des œufs: il reste à chercher la maison (VERNE, Île myst., 1874, p. 26). Il ne restait qu'à longer le quai jusqu'au bout (SIMENON, Vac. Maigret, 1948, p. 26).
[Avec un compl. indir.] Il me reste à + inf.; il ne me reste (plus) qu'à + inf. Il me reste à vous remercier, à vous informer, à vous entretenir. Il me reste beaucoup à apprendre des hommes (BERNANOS, M. Ouine, 1943, p. 1464). Il ne me reste plus qu'à me retirer en silence (CLAUDEL, Soulier, 1944, 1re part., 1re journée, 2, p. 980).
[Avec ell. du pron. pers.] J'écrivis les deux derniers chapitres. Reste à faire les notes (MICHELET, Journal, 1858, p. 421). Reste à savoir si/pourquoi. [Suivi d'une interr. indir.] Ce sont nos différences qui nous unissent (...), et (...) en les étudiant nous découvrons nos ressemblances. Reste à savoir pourquoi ces différences existent et pourquoi, bien que croissent nos ressemblances, il est probable qu'elles existeront (...) toujours (FAURE, Espr. formes, 1927, p. 80).
Ce qu'il reste à + inf.; ce qui reste à + inf. Cet ordre fut donné dans l'intérêt de la patrie — ce qui reste à démontrer (CLEMENCEAU, Vers réparation, 1899, p. 166). Il sait ce qu'il reste à faire (MILOSZ, Amour. init., 1910, p. 71).
[Avec un compl. indir.] S'ils ont un peu de dignité, ils savent ce qui leur reste à faire (GIRAUDOUX, Intermezzo, 1933, I, 4, p. 22):
4. Aussi la domestication du cheval, qui eut lieu vers la fin de la période néolithique, est-elle un fait qu'il est légitime de mettre en rapport, comme principe initial, avec une série de faits archéologiques et historiques. C'est ce qu'il nous reste à montrer...
VIDAL DE LA BL., Princ. géogr. hum., 1921, p. 226.
Il reste de + inf.; il ne reste plus que de + inf. (plus rare). Et maintenant il ne restait plus que de se taire et d'attendre la longue suite des effets et l'enchaînement des conséquences (MAURIAC, Nœud vip., 1932, p. 75). Dans l'impossibilité de prévenir Caracalla avant qu'il se rende au Carrousel, il reste de le prévenir au moment où il y arrivera (VAILLAND, Drôle de jeu, 1945, p. 232).
D. — En partic.
1. a) Fam. [Le suj. désigne une chose] Rester dans la main, dans les doigts de qqn. Se trouver dans la main (dans les doigts) de quelqu'un après qu'une partie ait été déchirée ou brisée. Ce bouton m'est resté dans la main. Une tenture de velours cramoisi lui barrait encore le passage. Y toucher, à celle-là, terre et cieux! Il n'osait pas; fermant l'œil, il s'y contraignit enfin; arrachée, l'étoffe lui resta dans les doigts (CLADEL, Ompdrailles, 1879, p. 367). Du haut de la pendule, Spartacus (...) jetait un regard indigné. Ses chaînes, que je tirais par désœuvrement, me restèrent un jour dans la main (A. FRANCE, Bergeret, 1901, p. 54).
b) ÉQUIT. [Le suj. désigne un cheval] Rester dans la main. Se soumettre volontiers à l'action du mors (d'apr. GDEL).
2. Fam. Rester sur les bras de qqn.
3. MAR. [Le suj. désigne une terre] Demeurer, être situé (sur une aire de vent déterminée). Enfin vers les 9 heures toutes ces terres nous restent au vent, et désormais, débarrassé de toute inquiétude, je fais mettre en panne pour attendre le jour (DUMONT D'URVILLE, Voy. Pôle Sud, t. 5, 1843, p. 219).
Rem. Dans ce sens, rester s'est toujours conjugué avec l'auxil. être.
REM. Restage, subst. masc., hapax. Synon. de séjour. Maintenant, en cas d'impossibilité de prolonger mon « restage » ici, (...) je suis à peu près sûr d'un gîte pour plusieurs (...) jours (VERLAINE, Corresp., t. 2, 1887, p. 77).
Prononc. et Orth.:[], (il) reste []. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. 1174-76 « s'arrêter » (GUERNES DE PONT-STE-MAXENCE, St Thomas, éd. E. Walberg, 5507); 1861 rester en route (AUGIER, Effrontés, p. 355); 2. a) ca 1180 « demeurer au même endroit » (MARIE DE FRANCE, Fables, éd. K. Warnke, 18, 5); b) 1617 rester à « se borner à » (D'AUBIGNÉ, Faeneste, III, 14 ds GDF. Compl.); c) 1754 en rester là « s'arrêter, ne pas poursuivre » (VOLTAIRE, Lettre à Guiot ds LITTRÉ); 1835 rester sur la bonne bouche (Ac.); 3. 1585 y rester « y laisser sa vie » (NOËL DU FAIL, Contes d'Eutrapel, éd. J. Assézat, II, 190); 1730-38 rester sur le champ de bataille (ROLLIN, Hist. anc., Œuvres, t. 8, p. 277 d'apr. POUGENS ds LITTRÉ). B. 1. 1671 « persévérer dans telle ou telle situation (de personnes) » (BOILEAU, Lutrin, IV, ibid.); 2. 1773 « demeurer dans la mémoire des hommes » (VOLTAIRE, Lettre à Mme du Deffand, ibid.). C. 1. 1382 rester à paier qqc. (RUNK.); 2. ca 1480 il reste (charger) « il reste encore à » (Mistere Viel Testament, éd. J. de Rothschild, 17731); id. reste ... à faire (ibid., 48568); id. il reste faire de (ibid., 10065); av. 1704 reste de (BOURDALOUE, Pensées, t. 1, p. 180 ds LITTRÉ); 1580 il reste à + inf. « il y a encore à » (MONTAIGNE, Essais, éd. P. Villey et V. L. Saulnier, p. 260); 3. 1657-62 reste zero (PASCAL, Pensées, éd. L. Lafuma, p. 527). D. 1. 1550 il reste que + subj. « il est encore donné à quelqu'un de faire quelque chose » (Bible Louvain, Héb. 4, 6 ds FEW t. 10, p. 316); 2. 1604 « être encore vivant » (MONTCHRESTIEN, Les Lacenes, p. 184); 3. 1754 reste à sçavoir (P. CLÉMENT, Les Cinq années littér., II, 5 [A Berlin] ds QUEM. DDL t. 30); 4. 1936 reste que + ind. « il est néanmoins vrai que » (THIBAUDET, Réflex. litt., p. 256). Empr. au lat. restare « s'arrêter, rester », « persister », « être de reste ». Fréq. abs. littér.:51 347. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 63 816, b) 82 115; XXe s.: a) 78 461, b) 72 727. Bbg. BOGACKI (K.). Les Prédicats locatifs statiques en fr.: ét. de sém. et de synt. Warszawa, 1977, p. 69. — GALISSON (R.). Lexicogr. différentielle... Ét. Ling. appl. 1975, n ° 18, pp. 128-143. — MEIER (H.). Neue lateinisch-romanische Etymologien. Bonn, 1980, pp. 95-101. — QUEM. DDL t. 17; 19 et 30 (s.v. reste à savoir). — SANKOFF (G.), THIBAULT (P.). L'Alternance entre les auxil. avoir et être en fr. parlé à Montréal. Lang. fr. 1977, n ° 34, pp. 101-103.

rester [ʀɛste] v. intr.
ÉTYM. Après 1150; lat. restare.
———
I Continuer d'être (volontairement ou non).
REM. Conjugué de nos jours avec l'auxiliaire être, sauf dans certains emplois dialectaux, rester prenait autrefois (et encore au XIXe s.) être ou avoir. « Dans ses temps composés, ce verbe prend l'auxiliaire avoir, si l'on veut faire entendre que le sujet n'est plus au lieu dont on parle… Mais si l'on veut faire entendre que le sujet est encore au lieu dont il est question, rester prend l'auxiliaire être… » (Bescherelle, Dict., Rester).
1 (Sujet n. de personne). Continuer d'être (dans un lieu). Demeurer (cit. 1 et 33). a Rester à Brest (→ Cours, cit. 24). || Il reste là (→ Agenouiller, cit. 5), ici (→ Emmener, cit. 2)… || Rester au foyer (→ Féminisme, cit. 3), à la campagne (→ Meubler, cit. 3), au lit (→ Pénitence, cit. 9), à table (→ Hâbleur, cit. 4), auprès de qqn (→ Pronostiquer, cit. 2). || Rester dans une ville, dans un pays. || Aimer à rester chez soi. Casanier. || Rester longuement au même endroit. Attarder (s'), éterniser (s'; cit. 16), moisir.
1 J'ai resté huit jours dans la maison pour voir si je pourrais y travailler le jour et y dormir la nuit (…)
Voltaire, Correspondance, 60, 24 août 1724.
2 Restez là jusqu'à ce que je revienne.
G. Sand, Jean de la Roche, X.
3 À Solférino, c'était dans un champ de carottes, nous y sommes restés cinq heures, le nez par terre.
Zola, la Débâcle, II, II.
Allus. hist. « J'y suis, j'y reste », mots attribués à Mac-Mahon après la prise du fort de Malakoff (sept. 1855), et repris plus tard par ses adversaires devant son refus de démissionner de la présidence de la République.
(Avec inversion du sujet, l'idée de rester étant « en quelque sorte préparée et annoncée par les verbes, de sens opposé, exprimés dans le contexte qui précède immédiatement… » R. Le Bidois, De l'inversion du sujet, p. 15).
4 Mes grands-parents repartis, restaient seulement avec nous, Millie et mon père (…)
Alain-Fournier, le Grand Meaulnes, II, I.
Continuer à s'occuper de (qqch.). || Rester sur un travail, un sujet : y passer beaucoup trop de temps. || Tu ne vas pas rester des heures là-dessus ? (→ ci-dessous Rester à…).
Loc. (1771). Rester sur le carreau (→ Massacre, cit. 4), ou, vx, sur la place (infra cit. 11) : être laissé pour mort, mourir (de mort violente, le plus souvent).Y rester : ne pas échapper à la mort, mourir.
5 Je crois être sincère en disant que j'ai nettement envisagé la mort. C'est-à-dire que je m'étais, avant l'opération, mis en disposition d'y rester; et cela très naturellement.
Gide, Journal, 10 janv. 1925.
5.1 (…) il s'aperçut que tantôt il pensait : « Cette fois, tu vas y rester » et tantôt : « Cette fois encore, tu vas en réchapper ».
Robert Merle, Week-end à Zuydcoote, p. 224.
Rester en place, sur place. — ☑ Fig. Rester en chemin, en plan (fam.), en route.
Ne pas rester en place : s'agiter sans arrêt.
b (1647). Spécialt (régional, rural). Habiter. || Il reste en banlieue. || Rester avec qqn : habiter, vivre chez lui.
6 C'est ainsi que Françoise disait que quelqu'un restait dans ma rue pour dire qu'il y demeurait, et qu'on pouvait demeurer deux minutes pour rester, les fautes des gens du peuple consistant seulement très souvent à interchanger — comme a fait d'ailleurs la langue française — des termes qui au cours des siècles ont pris réciproquement la place l'un de l'autre.
Proust, la Fugitive, Pl., t. III, p. 515 (note).
REM. Cet emploi est normal, non marqué, en franç. d'Afrique.
c Absolt, par oppos. à partir (cit. 4), s'en aller (cit. 103). → aussi Avouer, cit. 19; 1. feu, cit. 28. || Je ne peux pas rester, je reviendrai demain. Attendre. || Tu vas rester jusqu'à (cit. 29) après-demain. Séjourner. || Il s'installe comme s'il devait rester en permanence.Rester pour garder (cit. 14) la maison. Fam. || Rester garder la maison.Rester à…, suivi d'un inf. de but. || Restez à déjeuner avec nous. Ellipt. || Tu restes dîner avec nous (→ Prier, cit. 13).
7 Elle est arrivée ce matin (…) et cette bonne fille est restée consoler son amie.
Alphonse Daudet, Sapho, XIV.
8 Madame Rasseneur (…) venait de le prier d'attendre une minute, pour qu'elle le conduisît à sa chambre (…) Devait-il rester ? Une hésitation l'avait repris (…)
Zola, Germinal, I, VI.
2 (Sujet n. de chose). Se trouver longuement, pendant longtemps quelque part. || La lettre est dans la malle; qu'elle y reste (→ Jamais, cit. 21). || Un objet restât-il cinq ans dans la boutique… (→ Près, cit. 28). || La charrette qui (cit. 2) est restée sous le porche ( Stationner). || Les graviers (cit. 4) me restaient au talon. || Les bouchées lui restaient au fond de la gorge et l'étouffaient (cit. 10). — ☑ Par métaphore. Rester sur le cœur, sur l'estomac.Loc. fig. Cela m'est resté en travers de la gorge. → Je ne l'ai pas avalé (supporté). — Fam. || L'S est resté au bout de la plume, dans l'encrier.
9 (…) l'épée même eût resté dans leurs mains si je m'étais moins obstiné.
Rousseau, les Confessions, II.
10 Ou bien il grattait longuement un coin de peau (…) et flairait ensuite (…) l'odeur de sueur qui lui restait aux doigts.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. II, XII, p. 122.
Fig. || Rester dans la mémoire, dans le souvenir des hommes (→ Année, cit. 6), au panthéon (cit. 3) de l'histoire, dans l'âme (→ Empoisonner, cit. 22; 1. que, cit. 41), dans l'imagination (→ Étude, cit. 13)… — ☑ Cela doit rester entre nous (→ Recauser, cit. 1).
3 (1671). Continuer d'être (dans une position, une situation, un état…). || Rester debout (→ Courtisane, cit. 4), comme un échassier (cit. 2). || Restons face à face (cit. 66). || Rester en arrière (→ Fortune, cit. 36).Fig. Rester en arrière : être en reste (→ ci-dessous cit. 12, Zola).Rester en dedans (→ Laisser, cit. 22), en contact avec… (→ Inerte, cit. 3), en suspens (→ Ivresse, cit. 15), le nez (cit. 33) sur son livre, sans mouvement (cit. 17)…, les bras croisés. — ☑ Loc. fam. Rester le bec dans l'eau.Rester le derrière par terre : être décontenancé.En rester sur le cul, comme deux ronds de flan ( Étonné). — ☑ Rester en carafe (fam.), en panne, en rade (fam.) : être en panne (véhicule, etc.), et, fig., ne plus avancer, être laissé, abandonné sur place. || Rester dans le même état (→ Habitude, cit. 44). Maintenir (se); stationnaire. || Rester en haleine (cit. 25), en tutelle (→ Prolétaire, cit. 2), sur la défensive (cit. 5) || Rester dans l'ignorance. Croupir, pourrir.
11 L'ouvrier restait la main en l'air à la chaîne du soufflet, mettait son poing gauche sur la hanche et nous regardait en riant.
Alain-Fournier, le Grand Meaulnes, I, III.
12 Enfin, le concierge céda; il arrangerait la chose (…) Et Gervaise, en rentrant, acheta des gâteaux pour Pauline. Elle n'aimait pas rester en arrière, il y avait tout bénéfice avec elle à se montrer complaisant.
Zola, l'Assommoir, V, t. I, p. 164.
Rester sans bouger (→ Astre, cit. 3), sans savoir (→ Fin, cit. 3)… || Les œufs ne restent jamais sans être couvés (→ Incubation, cit. 2).Rester tout un jour sans manger. Passer (→ Mortification, cit. 3).
13 Ils restèrent sans parler (…)
Huysmans, En ménage, XVI.
Rester à… (suivi de l'inf.) : être longuement occupé à…, continuer à passer son temps à… Demeurer.REM. Cet emploi est condamné par Littré. || Elle reste au soleil à regarder… (→ Pleurer, cit. 16, Musset). || Il ne faut pas rester à vous dorloter (cit. 3, Sand). || Il restait à fumer au coin du feu (→ Désobligeant, cit. 2, Flaubert; et aussi gageure, cit. 2). || On allait rester ensemble à manger le lièvre (cit. 3, Zola). → aussi Fourrager, cit. 8.
14 Cantilly seul resta à attendre ses compagnons, couché sur le monceau de vareuses sanglantes (…)
Barbey d'Aurevilly, le Chevalier des Touches, V.
(Suivi d'un attribut). || Restez couvert. || Rester ahuri (cit. 4), coi (cit. 1), court (cit. 24); rester stupéfait. Fam. || Il en est resté tout bête.Loc. Rester baba, rester bleu, étonné, stupéfait.Rester sourd à qqch., à qqn (→ Anarchiste, cit. 2), neutre (→ Arbitrer, cit. 4). || Rester tranquille (→ Éclat, cit. 15), jeune (→ Fatuité, cit. 3), fidèle (cit. 10), immobile (→ Flux, cit. 3)… || Rester débiteur : ne pas s'acquitter de… || Rester soi-même. || Vieillard resté fringant (cit. 5). || Chose qui reste vaine (→ Acte, cit. 5), inconnue (→ Art, cit. 81)… || La porte restée ouverte (→ Ours, cit. 8). || Les magasins resteront ouverts jusqu'à 19 h (→ aussi Ouvrir, cit. 42). || Il n'est pas resté ce qu'il était (→ Glissant, cit. 5).Le juif restera le bouc émissaire (→ Arrogant, cit. 4). || Elle resta l'amie de… (→ Indication, cit. 6). || La France est restée un pays centralisé (cit.). || Le besoin d'instruire (cit. 9) autrui reste le trait dominant… || Prier pour les morts leur restait un devoir (cit. 14).Impers. || Il reste entendu, vrai que… (→ Monopole, cit. 4).
15 Les faits de la nature restent toujours ce qu'ils sont, en dépit de nos systèmes et de nos classifications arbitraires (…)
Maine de Biran, Du physique et du moral de l'homme, I, III.
16 Mon ultime raison, mon excuse suprême
De vivre et d'être un homme et de rester moi-même.
Verlaine, Élégies, XII.
17 (…) cherchant ses lèvres, il lui mit un long baiser sur la bouche. Elle restait inerte, la tête renversée, les yeux clos.
France, le Lys rouge, XVIII.
4 (Sujet n. de chose). Subsister à travers le temps, ne pas être détruit malgré l'écoulement du temps (par oppos. à passer, à disparaître [cit. 21]). Absolt. Perpétuer (se), persister, subsister, tenir. || Les générations passent, la langue reste (→ Dissoudre, cit. 7). || Les anciennes dénominations (cit. 2) restèrent. Conserver (se). || « La blessure guérit (cit. 34), mais la marque reste » (Rousseau). || « C'était un remède palliatif (cit. 1) et le mal restait toujours » (Montesquieu). || C'est une œuvre, un artiste qui restera. Durer.Prov. Les paroles s'envolent, les écrits restent.
18 (…) dans tout orateur, il y a deux choses, un penseur et un comédien. Le penseur reste, le comédien s'en va avec l'homme.
Hugo, Littérature et Philosophie mêlées, 1834, Sur Mirabeau, VI.
19 La passion passe. La raison reste. La raison et l'amour ?
R. Rolland, Au-dessus de la mêlée, p. 115.
5 (Sujet n. de chose). || Rester à qqn : continuer d'être à qqn, demeurer en sa possession. || L'avantage est resté à nos troupes. || Pourvu que force reste à la loi (→ Perte, cit. 7). || Ce nom lui est resté (→ Papier, cit. 3; physicien, cit. 2). || L'honneur (cit. 8) reste à tout homme qui… || Le souvenir qui m'en est resté (→ Lacune, cit. 1).Qu'il nous reste et devienne un frère de notre Ordre (→ Quereller, cit. 5).
20 (…) cette gaieté de race et de jeunesse, qui leur était restée envers et contre tout (…)
Loti, les Désenchantées, III, XIV.
6 (XVIIIe). Sujet n. de personne. || En rester à… : s'arrêter, être arrêté à… (un moment d'une action en cours d'accomplissement, ou d'une évolution). || Reprenons l'exposé, nous en étions restés au troisième point. || Où en est-il resté de sa lecture ? (→ aussi Marque, cit. 9). || Une région où les paysans en sont restés aux lampes à pétrole.Ne pas aller plus loin, au delà de… (dans le sens d'un approfondissement, d'une aggravation, d'une extension… des choses); se borner à… Tenir (s'en tenir à).Faut-il en rester là de cette discussion ? (→ 1. Point, cit. 17). Restons-en là, inutile de continuer à nous voir. || La persécution n'en restera pas là (→ Noircir, cit. 9).
21 Il pouvait tenir sa place près des gens de cour, pourvu qu'on ne lui parlât point de Mosè, ni de drame, ni de romantisme, ni de couleur locale, ni de chemins de fer. Il en était resté à monsieur de Voltaire, à monsieur le comte de Buffon, à Peyronnet et au chevalier Gluck (…)
Balzac, Mme Firmiani, Pl., t. I, p. 1035.
(XIXe). || Rester sur… : s'en tenir, de gré ou de force, à une impression, un état de choses, un fait… auquel on ne veut ou ne peut rien changer.Rester sur la bonne bouche ( Demeurer, infra cit. 18), sur une mauvaise impression.Rester sur sa faim (faute de nourriture, par hygiène…) : ne pas manger à satiété; au fig. Appétit (infra cit. 18). || Athlète qui reste sur une victoire, sur un échec. || Un peuple ne peut pas rester sur une injure (→ Honneur, cit. 23).
22 — Je parie que tu ne manges point ton content chez ta mère (…) il vaut toujours mieux rester sur sa faim.
J. Renard, Poil de Carotte, Parrain.
———
II (En parlant d'un ou plusieurs éléments ou unités d'un tout.) Être encore présent ou disponible (après élimination effective ou théorique des autres éléments ou unités). Reste, n. m.
REM. Dans cet emploi, rester s'est toujours conjugué avec l'auxiliaire être (sauf exceptions, très rares, au XVIIe s.).
1 Subsister. || Le bouillon, liquide qui reste de l'eau où le pot-au-feu (cit. 3) a cuit. || Le peu (cit. 5) de jours qui reste. || Ce qui reste d'un pain (→ Maie, cit. 2). || La police a saisi ce qui restait de l'édition (→ Poursuivre, cit. 8). || Rien ne reste de ces chefs-d'œuvre (→ Fugitif, cit. 13). || Un seul roi reste en France, c'est l'intendant (cit. 2).(Avec un compl. ind.). || Le peu (cit. 1) de religion qui me reste. || « Le seul bien qui me reste au monde… » (cit. 36, Musset; → aussi Fois, cit. 7). || « Rien ne nous restera de ces coteaux fleuris » (→ Impossible, cit. 6, Hugo). || Le plus proche parent qui lui restât (→ Réchauffer, cit. 6).
23 Je regarde ce que je perds,
Et ne vois point ce qui me reste.
Molière, Psyché, II, 1.
Impers. || Il reste, il ne reste… || De ce palais mutilé (cit. 3), il ne reste plus que des morceaux. || « Que reste-t-il de nos amours ? » (Chanson de Charles Trenet). || Il ne restait qu'un bout de pain (→ Lichette, cit. 1). || Il en reste un fond de bouteille (→ Orgeat, cit.). || Qu'est-il resté de tout cela ?|| « Et s'il (cit. 24) n'en reste qu'un, je serai celui-là ! » (Hugo).(Avec un compl. ind.). || Rester à (qqn), en parlant d'une chose. || Il lui restait trois francs (→ 2. Moyen, cit. 21). || Il nous restait encore largement de quoi vivre (→ Fournisseur, cit. 3). || Il leur restait à peine le temps de… (→ Convoi, cit. 3).
24 Oh ! s'il te reste un cœur, duc, ou du moins une âme (…)
(…) Attends jusqu'à demain ! Demain tu reviendras !
Hugo, Hernani, V, 5.
25 Que me reste-t-il donc ? Ma raison révoltée
Essaye en vain de croire et mon cœur de douter.
A. de Musset, Poésies nouvelles, « L'espoir en Dieu ».
(Ce) qui reste ou (ce) qu'il reste. Que, qui (rem. 3). → aussi ci-dessous (cit. 30, 31 et supra). || Ce qui lui restait de superflu (→ Aumône, cit. 4). || Ce qu'il leur restait d'inégalité (→ Améliorer, cit. 4). || Ménager (cit. 2) le temps qui me reste; le seul ami qu'il me reste.REM. (Tout) ce qui ou (tout) ce qu'il reste, suivis d'un nom au pluriel, se construisent avec le singulier ou (plus rarement) le pluriel. — (Construit avec le plur.). Vx. || « Tout ce qui reste ici de braves janissaires (…) / Sont prêts de vous conduire à la Porte sacrée » (Racine, Bajazet, II, 3).(Construit avec le sing.). Mod. || Tout ce qui reste des fruits est sur la table.
Rester, placé en tête d'une phrase indépendante, avec inversion de son sujet. || « Restait cette redoutable infanterie… » (→ Déroute cit. 1, Bossuet). || Restait le roi (→ Loin, cit. 21). || Reste l'œuvre (cit. 18) même.
REM. « L'inversion absolue est très fréquente après ce verbe, surtout quand il fait fonction de simple copule… que l'on pourrait sans inconvénient remplacer par le tour impersonnel il y a… C'est ce que montrent les exemples où ce verbe est au singulier devant un sujet pluriel : (J'ai perdu mes amis.) “Reste ceux qu'on n'ose pas déranger…”, E. Triolet, Mille Regrets, 36 (R. Le Bidois, De l'inversion du sujet, p. 24-25). Ce singulier de rester devant un sujet plur. est parfois considéré comme la conséquence d'un emploi impersonnel avec ellipse de “il” (Cf. Grevisse, le Bon Usage, no 820, 5). »
26 Quel problème que celui du déjeuner ! Ils quittèrent le café au lait (…) et ensuite le chocolat (…) Restait donc le thé.
Flaubert, Bouvard et Pécuchet, III.
2 Spécialt. || Rester, employé avec un infinitif introduit par la préposition à ou (plus rarement) de :
a Le sujet de rester étant le complément d'objet direct de l'infinitif. || Une trentaine de mille francs restait à payer (→ 2. Outre, cit. 15), était encore à payer. || Tout encore reste à dire (→ Atermoiement, cit. 2). || Le seul plaisir qui me reste à goûter (→ Abreuver, cit. 5).Avec inversion du sujet : || Reste à jeter un coup d'œil… (→ Profiter, cit. 12).
27 Une bande de terre nue restait à traverser pour gagner le bord du fleuve. Ils se mirent à courir (…)
Maupassant, Mlle Fifi, « Deux amis », p. 242.
Impers. || Il reste beaucoup à faire (→ Heureux, cit. 43). || Il restait tant de choses à voir (→ Munificence, cit. 2). || Que lui (cit. 1) reste-t-il à désirer ? || « Il me reste à pourvoir un arrière-neveu » (cit. 1, La Fontaine).
28 (…) il nous restera des devoirs à remplir sur la terre (…)
G. Sand, Mont-Revêche, XI.
29 Il ne lui restait rien à faire que de subir leur verdict; elle obéirait à ce qu'on lui ordonnerait (…)
F. Mauriac, Fin de la nuit, XI.
Ce qui resterait à dire (→ Imaginer, cit. 11) ou ce qu'il resterait à dire (→ ci-dessus, infra cit. 25). || Le temps qui me reste, ou qu'il me reste à vivre, qu'il me reste (vx ou littér.) de vivre (→ Passer, cit. 104).
REM. « …ce qu'il, sans s'imposer absolument, est préférable à ce qui : Vous oubliez ce qu'il reste à dire; c'est surtout en combinaison avec un infinitif prépositionnel que s'emploie ce qu'il devant l'impersonnel; mais cette condition n'est nullement nécessaire, cf. “Ce qu'il reste de gouttière et de gargouilles (…) déverse des torrents d'eau jaunâtre” (P. Benoît, Axelle, 68-69)… la langue peu surveillée préfère de plus en plus ce qui à ce qu'il… » (G. et R. Le Bidois, Syntaxe du franç. moderne, no 563).
30 Préparez-vous, mademoiselle, à ce qui me reste à vous dire.
Henry Becque, les Corbeaux, IV, 6.
31 Je sais ce qu'il me reste à faire.
Hervé Bazin, l'Huile sur le feu, XXX.
b Dans des tours impersonnels figés : || Rester à… (l'infinitif marquant une action à venir). || Les ballets (cit. 2) dont il me reste à parler. || Il nous reste à entretenir le lecteur de notre (cit. 17) ouvrage.Il ne me reste plus qu'à vous remercier (→ Grâce, cit. 6) : je n'ai plus qu'à vous remercier (formule par laquelle on remercie). Avoir.Il ne lui restait plus qu'à mourir (→ Capitole, cit. 2).
Avec omission de il (dans des constructions analogues à l'inversion absolue). || Reste à se débarrasser de lui.
32 Nous faisons des répétitions (…) C'est fini ! Reste à régler la cérémonie.
J. Vallès, l'Enfant, VII.
33 Je ne serai jamais bourru. Reste à me rendre bienfaisant (…)
G. Duhamel, Salavin, Journal, 30 janv.
Loc. Reste à savoir…, introduisant une interrogative indirecte (→ Grimace, cit. 12; influx, cit. 1; lentement, cit. 3).
34 — Oui, je vous prends (…) pour une excellente fille, pleine de franchise et de volonté. Reste à savoir si vous avez réellement les petits talents que je réclame.
G. Sand, le Marquis de Villemer, I.
Vx ou littér. || Rester de… || Il reste donc de prendre un précepteur ou une institutrice (cit. 2, Mauriac).REM. S'il s'agit, non d'une action à venir, mais d'un fait passé qui a produit un résultat permanent ou durable, l'emploi de de est encore recommandé de nos jours (→ ci-dessous, cit. 37, Montherlant).
35 Tant d'horreurs n'avaient point épuisé son courroux,
Madame : il me restait d'être oublié de vous.
Racine, Britannicus, III, 7.
36 Il me reste de me confier à Desbats : il serait peut-être plus fort qu'Aline.
F. Mauriac, les Anges noirs, Prologue.
37 Si ce que j'ai fait est vain, qu'il me reste au moins de m'être dépassé en le faisant.
Montherlant, Pitié pour les femmes p. 695.
3 Rester, employé impersonnellement, avec une proposition complétant son sujet (« il »).
a Il reste que… (suivi de l'indic.) : || Il reste le fait que…, il reste certain que (→ Graphologue, cit. 3). || Il n'en reste pas moins que… (→ Prescription, cit. 1).Suivi du subj. || « Il reste que nous nous expliquions… » (Bossuet, in Littré) : il nous reste à nous expliquer.
38 Trop tard à présent. Il n'en reste pas moins que Monsieur Floche est un digne homme et dont je garderai bon souvenir (…)
Gide, Isabelle, IV.
b Littér. || Reste que… (suivi de l'indic.). Toujours (est-il que); la loc. adv. En tout cas. || Reste qu'il faudra bien lui en parler.
39 Reste qu'un beyliste est beaucoup plus facile à définir qu'un stendhalien.
Thibaudet, Réflexions sur la littérature, 256, in Robert Le Bidois, l'Inversion du sujet…, p. 25.
CONTR. Absenter (s'), accourir, déplacer (se), déserter, détaler, disparaître, écarter (s'), enfuir (s'), esquiver (s'), évacuer, fuir, partir, quitter; bouger, branler; devenir, écouler (s'), effacer (s'), envoler (s'), passer.
DÉR. 1. Restant, 2. restant.

Encyclopédie Universelle. 2012.