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payer

payer [ peje ] v. tr. <conjug. : 8>
soi paier de « s'acquitter de » v. 1200; paier « se réconcilier avec qqn » fin Xe ; lat. pacare « pacifier, apaiser »
I
1(1175) Mettre (qqn) en possession de ce qui lui est dû en exécution d'une obligation, d'un marché. Payer un créancier. rembourser, satisfaire. Payer un salarié, un employé. Payer son personnel, ses fournisseurs. rémunérer; appointements, honoraires; rétribution, salaire. Être bien, mal payé. Payer insuffisamment. sous-payer. Payer généreusement, grassement. Payer trop cher. surpayer. Être payé à l'heure, à la semaine, au mois, à la pige, à la tâche. Payer qqn en espèces, en argent, en nature. Payer qqn pour un travail, pour faire qqch. Loc. fig. Je suis payé pour savoir que : j'ai appris à mes dépens que. Si c'est dangereux ? Je suis payé pour le savoir. Payer qqn de retour, reconnaître ses procédés, ses sentiments par des procédés et des sentiments semblables (cf. Rendre la pareille, renvoyer l'ascenseur).
Payer qqn de ses services, de sa peine. dédommager, récompenser.
2S'acquitter, par un versement de (ce qu'on doit). Payer ses dettes. liquider, régler, rembourser. PROV. Qui paie ses dettes s'enrichit. Payer un intérêt, une rente. servir. Payer sa part. Payer un loyer, une indemnité, des dommages-intérêts, une facture, la note, ses impôts. Payez contre ce chèque (formule figurant sur les chèques). « On reconnaît qu'une classe est politiquement dirigeante quand elle ne paie pas sa part d'impôts » (Siegfried). Payer le prix. Fig. « Un arriéré de trois mois de tendresse maternelle qu'elle lui payait tout en une fois » (A. Daudet).
3Verser de l'argent en contrepartie de (qqch. : objet, travail). Payer un objet, un service. Un meuble qu'elle a payé très cher. Payer comptant une marchandise. « Je me suis vendu aux pétroliers pour payer les prodigalités de ma maîtresse » (Romains). Payer d'avance. prépayer. Loc. fig. Payer les pots cassés. PROV. Qui casse les verres les paie. P. p. adj. Travail bien, mal payé. Congés payés. Fam. offrir. Viens, je te paie un verre. Payer la tournée.
Fig. (de ce qui entraîne, en contrepartie, des sacrifices, une punition) acheter, expier. Une victoire, un succès, un bien qu'on paie très cher. C'est cher payé. Il m'a joué un vilain tour, mais il me le paiera. (De ce qui mérite salaire) « À ce que je puis voir, maître Jacques, on paye mal votre franchise » (Molière). récompenser.
4Absolt Verser de l'argent. Payer comptant, cash, rubis sur l'ongle, recta. C'est toujours lui qui paie. fam. casquer, cracher, douiller, raquer. Partir (d'un restaurant) sans payer ( grivèlerie) . Commandement de payer. « Pourriez-vous disposer d'un lit ? Non. Quoi ! pas même en payant, en payant bien ! » (Diderot). Il peut, il ne peut pas payer. solvable; insolvable. Fig. Subir les conséquences fâcheuses, expier. Les bons paient pour les méchants. Il a payé pour tout le monde.
♢ PAYER DE : payer avec. Payer de ses deniers, de sa poche, avec son propre argent. — Par ext. (1692 ) Payer de sa personne : faire un effort, se dépenser ou subir qqch. « L'oncle et le médecin, n'ayant plus à payer de leur poche, payaient de leurs personnes » (Cocteau). Loc. Il ne paie pas de mine. Il faut payer d'audace : montrer de l'audace faute d'autre chose.
5(Sujet chose) Rapporter, être profitable. Un métier qui paie bien, rémunérateur. Une tactique, un coup qui paie. payant. Prov. Le crime ne paie pas.
II ♦ SE PAYER.
1(Réfl. dir.) Voilà mille francs, payez-vous et rendez-moi la monnaie. Loc. fam. Se payer sur la bête, directement, sans intermédiaire. — Fig. Se payer de mots : se contenter de vaines paroles.
2(1867) (Réfl. ind.) Fam. s'offrir. « Comme il avait faim et qu'aujourd'hui on pouvait se payer un extra » (Dabit).
Se payer le luxe de faire, de dire qqch. Se payer du bon temps. S'en payer une tranche. Fam. Se payer la tête de qqn, se moquer de lui. « Il voyait bien à l'œil rusé de l'autre, qu'il se payait doucement sa gueule » (Aragon).
3Très fam. Mettre à mal. Celui-là, je vais me le payer, le corriger. ⇒ 1. faire . On a failli se payer un arbre, rentrer dedans.
4(Pass.) Les commandes se paient à la livraison. payable. Fig. Tout se paie : tout finit par coûter cher; fig. tout s'expie.
⊗ CONTR. 1. Devoir. Encaisser, recevoir. Donner, vendre. ⊗ HOM. Paie :pais (paître).

payer verbe transitif (latin pacare, satisfaire) Donner à quelqu'un ce qui lui est dû, s'acquitter de ce qu'on doit : Payer ses impôts au percepteur. Payer une amende. Verser à quelqu'un une somme d'argent pour un travail, en contrepartie d'un service, d'une marchandise, d'un achat : Payer ses ouvriers. Combien avez-vous payé votre appartement ? Acheter quelque chose pour l'offrir à quelqu'un, inviter quelqu'un en payant pour lui : Je lui ai payé un diamant pour son anniversaire. Payer à boire à des camarades. Acquérir quelque chose (abstrait) par un effort, un sacrifice : Payer sa réussite de sa santé. Subir les conséquences fâcheuses d'un acte : C'est payer cher d'avoir été négligent. Payer ses erreurs de jeunesse. Récompenser quelqu'un par quelque chose, le dédommager d'une peine en parlant de quelque chose : Ces félicitations me paient de mes efforts, d'avoir persévéré. Acheter quelqu'un pour l'inciter à accomplir une action criminelle à son profit : Payer un tueur. Procurer un avantage, un bénéfice pécuniaire à celui qui fait quelque chose : C'est un travail qui paie mal. Le crime ne paie pas. Rembourser, compenser la dépense : Les frais de déplacement ne paient pas ma consommation d'essence.payer (citations) verbe transitif (latin pacare, satisfaire) Henri Pourrat Ambert 1887-Ambert 1959 Tous ont bien ce qui achète, il faut avoir ce qui paye. Gaspard des montagnes Albin Michel Jules Mazarin, en italien Giulio Mazarini Pescina, Abruzzes, 1602-Vincennes 1661 Qu'ils chantent, pourvu qu'ils paient. Commentaire On rapporte ce mot comme étant de Mazarin, qui fut sans doute l'homme d'État français le plus chansonné. Apprenant qu'on le brocardait dans Paris après l'institution d'un nouvel impôt, il aurait dit : « Ils chantent, ils paieront. » Luigi Settembrini Naples 1813-Naples 1876 Le monde estime peu celui qui paie peu. Il mondo stima poco quello che paga poco. Ricordanze della mia vita payer (difficultés) verbe transitif (latin pacare, satisfaire) Conjugaison Les formes conjuguées du verbe peuvent s'écrire avec un y ou avec un i devant e muet : il paie ou il paye, il paiera ou il payera. On écrit plus souvent aujourd'hui il paie, il paiera. - Attention au i après le y aux première et deuxième personnes du pluriel, à l'indicatif imparfait et au subjonctif présent : (que) nous payions, (que) vous payiez. Prononciation Il paie : [&ph93;&ph96;&ph100;ɛ], la finale se prononce comme paix. - Il paye : [&ph93;&ph96;&ph100;ɛ&ph94;], la finale se prononce comme celle de abeille. Registre Payer qqch à qqn = le lui offrir (j'ai payé un vélo à mon fils), est familier. Recommandation Employer plutôt offrir, faire cadeau de : j'ai offert un vélo à mon fils ; je lui ai fait cadeau d'un vélo. ● payer (expressions) verbe transitif (latin pacare, satisfaire) Payer quelqu'un de belles paroles, ne lui donner comme paiement, comme satisfaction que des paroles. Payer quelqu'un de retour, lui rendre la pareille. Tu, il, etc., me le payera(s) [cher], je me vengerai. ● payer (homonymes) verbe transitif (latin pacare, satisfaire)payer (synonymes) verbe transitif (latin pacare, satisfaire) Donner à quelqu'un ce qui lui est dÛ, s'acquitter de...
Synonymes :
- acquitter
- casquer (populaire)
- cracher (populaire)
- débourser
- décaisser
- liquider
- régler
- rembourser
- solder
Contraires :
- devoir
- emprunter
Verser à quelqu'un une somme d'argent pour un travail, en...
Synonymes :
- rémunérer
- rétribuer
Acheter quelque chose pour l'offrir à quelqu'un, inviter quelqu'un en payant...
Synonymes :
- régaler (familier)
- se fendre (populaire)
Subir les conséquences fâcheuses d'un acte
Synonymes :
- expier
Récompenser quelqu'un par quelque chose, le dédommager d'une peine en parlant...
Synonymes :
- récompenser
Rembourser, compenser la dépense
Synonymes :
- financer (familier)

payer
v.
rI./r v. tr.
d1./d Acquitter (une dette, un droit, etc.) par un versement. Payer ses dettes, ses impôts.
Payer son loyer.
|| (Sujet nom de chose.) Produit qui paie un droit de douane.
d2./d Remettre à (qqn) ce qui lui est dû (généralement en argent). Payer un commerçant.
Payer qqn par chèque. Payer en nature, sous forme d'échange non monétaire.
|| Fig., Fam. être payé pour savoir telle chose, en avoir fait la fâcheuse expérience.
|| Récompenser; dédommager. Payer qqn de ses efforts.
d3./d Verser une somme correspondant au prix de (telle chose). Payer des denrées.
Fam. Offrir. Payer la tournée.
Absol. Payer comptant. Payer rubis sur l'ongle.
|| Payer pour: payer ou, fig., subir, expier, à la place de. Payer pour les autres.
|| Fam. Il me le paiera: je me vengerai de lui.
|| Obtenir au prix de sacrifices, de dommages. Payer cher sa réussite.
d4./d (Afr. subsah.) Acheter. Va payer une miche de pain!
rII./r v. intr.
d1./d Payer de: user de, faire preuve de. Payer d'audace.
Payer de sa personne: s'exposer, agir personnellement.
d2./d (Sujet nom de chose.) Fam. être profitable, rapporter. Travail qui paie.
rIII/r v. Pron.
d1./d Retenir telle somme; être payé. Payez-vous sur ce billet.
|| Loc. fig. Se payer de mots: se contenter de parler, sans agir.
d2./d Fam. S'offrir. Se payer un chapeau.
|| Se payer la tête de qqn, se moquer de lui.

⇒PAYER, verbe
I. Empl. trans. dir.
A. Qqn paye qqc. (à qqn)
1. a) S'acquitter, par un versement, de ce qui est dû. Synon. régler. Payer une amende, une taxe, un procès; payer ses dettes, ses impôts, ses intérêts, ses échéances. Le jour où il [le contribuable] paie ses contributions est le meilleur de sa vie. Cela expie son égoïsme et sanctifie son bien souvent mal acquis et dont il fait mauvais usage (RENAN, Avenir sc., 1890, p.511):
1. ... ne voit-on pas un extracteur comme Chambeyron, qui exploite certaines mines pour le compte de Mme de Chatellus, faire sortir une partie du charbon par une galerie qui rejoint une mine dont il est propriétaire, pour éviter de payer le quart franc porté au contrat.
E. SCHNEIDER, Charbon, 1945, p.129.
Expr. Les battus paient l'amende. V. amende A 2.
Proverbe. Qui paie ses dettes s'enrichit. V. enrichir A.
Loc. fig.
Payer ses dettes à la justice, à la société. V. dette C 1.
Payer le tribut (à qqc.). Subir les pénibles conséquences (de quelque chose):
2. L'absorption accidentelle de liquides caustiques acides ou alcalins provoque au niveau de l'oesophage des brûlures profondes, étendues (...). Ce sont malheureusement les enfants qui paient le plus lourd tribut à cette affection.
QUILLET Méd. 1965, p.136.
Payer son tribut à la nature. Mourir. (Dict.XIXe et XXes.).
b) En partic. [Le compl. désigne le montant de la somme à verser pour s'acquitter] Donner. L'ouvrier qui, pour un revenu de 1000 Fr., paye 125 Fr. au fisc, rend à l'ordre public une demi-part, soit un huitième de son revenu (PROUDHON, Syst.contrad. écon., t.1, 1846, p.269). Pour un achat d'à peu près douze mille francs, Germaine a dû verser cinq mille, et elle paie six pour cent d'intérêt sur le reste (ROMAINS, Hommes bonne vol., 1932, p.123).
2. a) Verser une somme d'argent en échange de quelque chose (objet, travail, loisir). Payer une marchandise, sa place de cinéma, sa chambre d'hôtel, des travaux dans sa maison; payer qqc. cher, bon marché; payer sa part (de qqc.); travail bien, mal payé; c'est bien payé. Les élèves sont des apprentis qui prennent part à la vie et à la gloire des maîtres, et non des amateurs qui se sentent libres sitôt qu'ils ont payé la leçon (TAINE, Philos. art, t.1, 1865, p.212). Colbert donna des instructions strictes, déclarant que le roi ne se chargeait de payer que les chemins ou les ouvrages importants, laissant les autres au budget des villes (P. ROUSSEAU, Hist. transp., 1961, p.156). Un épicier achète du sucre pour une somme de 5000 F; mais il n'a pas dans l'immédiat les fonds nécessaires pour payer son sucre. Il demande un délai (LESOURD, GÉRARD, Hist. écon., 1968, p.63).
Congé payé. V. congé B 2.
Payer le prix de qqc. La clientèle peut payer le prix élevé des places [de voyage en avion] (ALBITRECCIA, Gds moyens transp., 1931, p.139).
Proverbe. Qui casse les verres les paie. V. casser I A 1. Payer la casse, les pots cassés. V. casser I A 1.
Loc. fig. Payer les violons (du bal). Faire les frais de quelque chose sans en avoir le profit. (Dict.XIXe et XXes.).
b) En partic. [Le compl. second. désigne le montant de la somme versée en échange de qqc.] Acheter. J'ai plus de profit à vendre (...) des oeufs, quoique je les paie déjà six sous pièce (MAUROIS, Silences Bramble, 1918, p.109). Le fauteuil d'orchestre que l'on payait 15 Fr. à l'Opéra de Paris en 1914, coûte aujourd'hui 60 Fr. (Arts et litt., 1936, p.80-12).
Empl. pronom. passif. S'acheter. Le beurre se paie 700 francs le kilo (VAILLAND, Drôle de jeu, 1945, p.41).
c) Au fig.
Acquérir par l'effort et malgré les difficultés. À mon avis, la perfection coûte très cher: on la paye de tout son être, et pour la posséder il faut cesser d'exister (A. FRANCE, Thaïs, 1890, p.181). C'est le prix dont il faut payer la liberté (VEDEL, Dr. constit., 1949, p.246).
Empl. pronom. passif. [Un] monde où chaque pas en avant se paie d'un effort douloureux (BERNANOS, Soleil Satan, 1926, p.146).
Subir les conséquences de ses actes, expier. V. badauderie ex.4:
3. Les armées alliées occupent toute l'Allemagne et le peuple allemand a commencé à payer les crimes horribles commis sous le commandement de ceux que, dans l'heure de la victoire, il a approuvés ouvertement et auxquels il a obéi aveuglément.
Charte Nations Unies, 1946, p.143.
Locutions
Payer cher qqc. Obtenir un avantage apparent ou momentané à un prix qui se révèlera très élevé. C'est vilain, la vie: Si on y trouve une fois un peu de douceur, on est coupable de s'y abandonner et on le paye bien cher plus tard (MAUPASS., Pierre et Jean, 1888, p.422). V. aussi cher ex. 11.
Il me le paiera, il me la paiera (fam.). Je lui ferai subir violemment les conséquences de ses actes afin de me venger. M. Tancogne n'avait pas l'air trop content. Il faisait comme ça avec son poing, en criant: «Il me la paiera, celle-là! Pour sûr qu'il me la paiera!» (GENEVOIX, Raboliot, 1925, p.213).
Payer qqc. (une faute, un crime) de sa tête, de sa vie. Expier quelque chose (une faute, un crime) en mourant. Nous sommes réduits au silence lorsqu'on nous rappelle que les clercs doivent payer de leur tête le moindre mot que la passion politique leur inspire et qu'au talent se mesure le crime (MAURIAC, Bâillon dén., 1945, p.484):
4. Il y a moins de vingt-cinq ans, des européens (l'un au Vietnam, l'autre en Thailande) (...) ont failli payer de leur vie le fait, étant doublement profanes aux yeux des profanes indigènes, d'avoir surpris l'existence de secrets impénétrables.
CUISINIER, Danse sacrée, 1951, p.108.
3. Le plus souvent fam.
a) Offrir ou proposer d'offrir (quelque chose à quelqu'un). Payer un verre, le cinéma, le restaurant, des fleurs à qqn; payer à boire, à dîner à qqn. Allez au Havre, vous arriverez encore à temps pour voir une pièce, je vous paye le spectacle (BALZAC, Modeste Mignon, 1844, p.40). Je paie une tournée, cria Mimar. Lucie, un petit quinquina? (DABIT, Hôtel Nord, 1929, p.182). Je t'emmène avec moi. Je te paie une cure à Vichy (CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p.43).
b) Empl. pronom. réfl. indir. Il n'avait pas même fait ce fameux voyage à Marseille, que tout bon Provençal se paie à sa majorité (A. DAUDET, Tartarin de T., 1872, p.21). Nombre de petites ouvrières nipponnes seraient bien en peine de se payer tous ces peignes de luxe (ROUSSET, Trav. pts matér., 1928, p.73).
Au fig. S'offrir quelque chose d'agréable. Se payer du bon temps; se payer une tranche de bonheur. Je me suis payé [après l'examen] quatre ou cinq jours de repos, de vagabondages aux Matignons (COLETTE, Cl. école, 1900, p.244). Au fig. S'en payer (une tranche) (pop.). Paraît qu'il s'en est payé dans sa jeunesse (LA VARENDE, Amour sacré, 1959, p.7).
Locutions
Se payer le luxe de + inf. V. luxe A 2 b.
Se payer la tête de qqn. Se moquer de lui. Il avait même laissé entrevoir qu'il pourrait bien retenir sur la solde du coupable une partie du prix des fagots. Conan était sorti du bureau tout écumant de rage, en hurlant dans les corridors qu'on ne se paierait point sa tête pour trois bouts de trique (VERCEL, Cap.Conan, 1934, p.91).
Se payer une femme, un homme (vulg.). Payer pour avoir des rapports sexuels (avec une femme, un homme) et p.ext. avoir des rapports sexuels (avec une femme, un homme). Synon. se farcir, s'offrir, se taper. [Un certain viveur] se paie les femmes les plus haut cotées à la bourse de la galanterie (BOURGET, Pastels, 1889, p.8):
5. —Dix mille francs en trois mois! gueulait-il. Nom de Dieu! Qu'en as-tu fait? Hein? Réponds!... Tout ça passe à ta carcasse de tante, hein? Ou tu te paies des hommes, c'est clair... Veux-tu répondre!
ZOLA, Nana, 1880, p.1305.
P. antiphr., fam. Accomplir ou subir quelque chose de compliqué ou de pénible. Synon. fam. se farcir, se taper. Se payer le travail le plus ingrat; se payer un platane en conduisant sa voiture. Dès que la matière lui résistait, il se payait une épilepsie (CÉLINE, Mort à crédit, 1936, p.407):
6. Un président américain, si populaire soit-il, ne peut se payer impunément à trois mois de distance l'échec d'une offensive de paix et l'échec d'un protégé symbolisant son offensive politico-militaire sur le même front.
Le Monde, 14 avr. 1966, p.4, col. 3.
B. Absol. Qqn paye. Verser une somme d'argent, pour s'acquitter de ce qui est dû ou pour acheter quelque chose. Entrer, sortir sans payer; payer d'avance, par mensualités, par termes; payer par chèques, en espèces, en liquide, en petite monnaie. Pour les rubans, allez-y gaiement, faites des folies, c'est moi qui paie! (COLETTE, Cl. école, 1900, p.261). C'est toujours le client qui a raison parce qu'il paie (HAMP, Champagne, 1909, p.161). La cotisation ouvrière est un vol, les patrons devraient payer (REYNAUD, Syndic. en Fr., 1963, p.75).
1. Expressions
Payer (argent) comptant. V. comptant II.
Payer à crédit. V. crédit C 1.
Payer à l'ordre de.
Payer recta, rubis sur l'ongle (fam.). Payer intégralement et sur le champ. Nous sommes des gens carrés en affaires! Nous payons rubis sur l'ongle (FARRÈRE, Homme qui assass., 1907, p.44).
2. Payer de
Loc. Payer de ses deniers, de sa poche. Payer avec son argent. Le particulier qui paye de ses propres deniers est parfaitement libre de s'adresser, pour élever la bâtisse, à un jardinier ou à un peintre décorateur (VIOLLET-LE-DUC, Archit., 1872, p.101). L'oncle et le médecin, n'ayant plus à payer de leur poche, payaient de leurs personnes. Ils n'en récoltèrent pas davantage de gratitude. Élisabeth se déchargeait sur eux de toutes les charges (COCTEAU, Enfants, 1929, p.127).
Loc. fig. Payer de sa personne. S'engager personnellement et entièrement dans une entreprise pénible et difficile, se sacrifier. Dans la carrière du barreau plus que dans aucune autre, il faut payer de sa personne (...) vous sentez-vous éloquent, monsieur le marquis? (FEUILLET, Rom. j. homme pauvre, 1858, p.38). V. supra ex. de Cocteau.
3. Au fig. Subir les conséquences de ses actes, expier. Il y a des gens qui ont souffert pour nous jusqu'à la mort et cela nous amusait beaucoup. À présent, il faut payer (SARTRE, Huit clos, 1944, 5, p.133). Tu vois où me mènent tes conneries. C'est moi qui paie, comme toujours (H. BAZIN, Vipère, 1948, p.169).
Payer pour qqn. Subir les conséquences des fautes commises par autrui, expier pour autrui. L'innocent va payer bientôt pour tout le monde! (BERNANOS, Dialog. Carm., 1948, 4e tabl., 10, p.1675). Les vieux s'en tirent toujours; ce sont les fils qui paient pour eux (MONTHERL., Demain, 1949, III, p.743).
C. —Qqn paye qqn (de qqc.)
1. Qqn paye qqn. Donner (à quelqu'un) ce qui (lui) est dû (le plus souvent de l'argent) en échange de quelque chose (travail, loisir, objet). Payer un commerçant, son propriétaire, ses employés, ses fournisseurs; payer qqn à l'heure, à la semaine, au mois; payer qqn au cachet; payer qqn à ne rien faire; ne pas être payé pour (cela). Il faudrait (...) établir des différences dans la manière de payer les professeurs (CONDORCET, Organ. publ. instr., 1792, p.492). Nouilhac n'aurait certainement pas admis M. Fellaire dans son personnel. Il le payait toutefois, mais avec l'argent de Longuemare (A. FRANCE, Jocaste, 1879, p.158). Je vous paie pour vous occuper de mes enfants et non pour les dresser contre leur mère (H. BAZIN, op.cit., p.54).
Payer (qqn) en nature, en espèces (v. espèce).
a) Empl. pronom.
Empl. pronom. réfl. dir. Prélever soi-même la somme qui est due en échange de quelque chose. Ils ne se défient pas assez du notaire, sans lequel ils n'osent rien conclure, et pourtant les notaires se paient d'avance (RENARD, Journal, 1897, p.425).
Empl. pronom. réciproque. Les membres d'un même groupe social ou politique (...) agissent les uns sur les autres par des actes réciproques, ils se commandent, se contraignent, se paient l'un l'autre (LANGLOIS, SEIGNOBOS, Introd. ét. hist., 1898, p.209).
Loc. péj. [Le suj. désigne un homme] Se payer sur la bête. Avoir des rapports sexuels avec une femme qui ne peut s'acquitter en argent. Elle n'avait pas un sou et il s'était payé sur la bête (ARNOUX, Paris, 1939, p.248).
b) Locutions
Payer qqn en monnaie de singe. V. monnaie B.
Payer (qqn) de retour. Rendre (à quelqu'un) une chose, un service analogue à celui que l'on a reçu. Synon. rendre la pareille. Il [le trombone] était en amicale liaison avec un être aimé qui le payait de retour et lui faisait tout oublier (E. DE GONCOURT, Zemganno, 1879, p.40). Vous savez avec qui est réellement la France et (...) vous avez gardé confiance dans son avenir. Nous saurons, comme nos pères, payer de retour (DE GAULLE, Mém. guerre, 1954, p.611).
Payer une femme (péj.). Donner de l'argent à une femme en échange de rapports charnels. Est-ce que tu t'imagines que je t'aime pour tes formes? Quand on a une gueule comme la tienne, on paie les femmes qui veulent bien vous tolérer (ZOLA, Nana, 1880, p.1449).
c) Expr. fam. Être (bien) payé pour savoir qqc., le savoir. Avoir appris quelque chose à ses dépens. Victor Hugo (...) savait ce que pèse une réussite (...). Il était payé pour le savoir (PÉGUY, V.-M.., comte Hugo, 1910, p.756).
2. Qqn paye qqn de/pour qqc. Dédommager. Mais Edmond considérait ce qui venait de sa famille comme un dû: Est-ce que je ne les paie pas de la pension qu'ils me font? Et au delà! Toute ma jeunesse (ARAGON, Beaux quart., 1936, p.314).
Au fig.
♦Consoler, récompenser. Dieu veuille qu'une larme de vous me paie un jour de celles que vous me faites répandre en ce moment! (MUSSET, Confess. enf. s., 1836, p.346):
7. Oui, la victoire, la puissance, la rénovation, cela coûte cher, en fait de labeur, de peines et de sacrifices. Mais c'est cela que nous voulons et c'est cela qui nous paiera de tout!
DE GAULLE, op.cit., 1959, p.425.
Empl. pronom., loc. Se payer de mots, de belles paroles, de (belles) phrases. V. mot I A 2.
D. Qqc. paye qqc.
1. Rembourser, permettre de faire face à (une dépense). Je t'envoie sous ce pli une traite de 750 Fr. à ton ordre sur Mallet Frères. Cela paie la note de 724 Fr. 15 envoyée par Victor (HUGO, Corresp., 1866, p.543). La pension, quelques petites affaires de hasard, payaient les frais du ménage (GUÉHENNO, Jean-Jacques, 1948, p.68).
2. [Le suj. désigne une marchandise] Être soumis au paiement (d'un droit). Il n'y a que les sels dénaturés et les sels exportés qui ne paient pas de droits (Ch. DURAND, Industr. minér. Lorr., 1893, p.28). À Paris, une lettre simple non affranchie paye un surplus de droit de 5 centimes (PRADELLE, Serv. P.T.T. Fr., 1903, p.59).
II. Empl. trans. indir., vieilli. Qqn paye de + subst. désignant l'attitude ou la conduite d'une pers. Faire preuve de. Payer d'obéissance. C'est le moment de payer d'assurance, dit Consuelo en s'arrêtant; Joseph, faites et dites comme moi (SAND, Consuelo, t.2, 1842-43, p.324). L'aplomb est toujours un moyen de succès. Toute la soirée, je tranchai du grand seigneur, je payai d'impertinence et d'audace (LOTI, Aziyadé, 1879, p.207).
Locutions
Payer de mine, ne pas payer de mine. V. mine1 I B.
Payer de veine (arg.). Avoir de la chance. Remarquez que ce dernier parti est, je crois, celui auquel nos chefs s'arrêtèrent après les 20 et 22 Août 1914, où nous n'avions pas payé de veine (Capitaine Z ds L'OEuvre, 20 oct. 1916, p.3, col. 1 ds ESN. Poilu 1919).
III. Empl. intrans. Qqc. paye. Procurer un bénéfice, être rentable. Synon. fam. rapporter, rendre. Il aura à se poser chaque fois la question de savoir si l'aménagement nouveau qu'il préconise lui sera profitable. Si cet aménagement «ne paie pas» ou s'il «paie mal», il doit en écarter le choix (VILLEMER, Organ. industr., 1947, p.11).
Au fig. Procurer un avantage, être efficace. Le crime ne paie pas. La trahison paie mal; voilà quatre ans que je trahis tout le monde (...) et je n'ai pas mis un sou de côté (VAILLAND, Drôle de jeu, 1945, p.42). Je me rendais compte qu'en Amérique, la solitude ne paie pas (BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p.302).
Prononc. et Orth.: [peje]; [-], (il) paye, paie [], []. Ds FÉR. 1768, MART. Comment prononce 1913, p.193, préférence aux formes sans [j], en ce qui concerne en tout cas le fut. et le cond.: [] (il) paie, [], [pe-] (il) paierait, etc. Att. ds Ac. dep.1694. Étymol. et Hist.1. 2e moitié Xes. réfl. «se réconcilier avec quelqu'un» (Saint Léger, éd. J. Linskill, 108) —XIIIes., v. GDF. et T.-L.; 2. a) fin Xes. «se satisfaire de» (Passion, éd. d'Arco Silvio Avalle, 208); b) 1453 (Pierre de Provence et la belle Maguelonne, éd. A. Biedermann, p.71-72: la contesse se tenoit fort pour payée des bonnes paroles que luy avoit dit l'ospitaliere); 3. a) 1170 trans. «donner ce qui est dû» (CHRÉTIEN DE TROYES, Erec et Enide, éd. M. Roques, 2056); b) 1176-80 paier de cos (ID., Chevalier Lyon, éd. M. Roques, 6242); c) 1180 «rétribuer quelqu'un» (MARIE DE FRANCE, Fables, éd. K. Warnke, IV, 40); d) 1585 payer en monnoye de singe (NOËL DU FAIL, Contes d'Eutrapel, éd. J. Assézat, t.2, p.298); e) 1538 payer qqc. «expier» (EST.); f) 1635 payer de sa personne «s'employer activement à quelque chose» (J. DE MAIRET, La Sophonisbe, II, 2); g) 1640 absol. «acquitter un droit (en parlant de marchandises)» (Journal d'un bourgeois de Paris, éd. Tuetey, p.354); 4. 1875 «rapporter, donner du profit» (L. SIMONIN, Rev. des Deux-Mond., 15 nov., p.90 ds LITTRÉ SUPPL.). Du lat. pacare (dér. de pax «paix») «faire la paix, pacifier» qui a dû être transposé à basse époque au domaine mor. au sens de «satisfaire, apaiser», d'où le sens développé dans les lang. rom. de «satisfaire, apaiser avec de l'argent», v. REW3, n° 6132; payer dans ce sens, s'est répandu, peut-être du Sud vers le Nord de la France, le prov. pagar étant att. antérieurement (ca 1137, CERCAMON, Tenson avec Guilhalmi, 54 ds OEuvres, éd. A. Jeanroy, p.25; v. aussi FEW t.12, p.81 et A. STEFENELLI, Geschichte des Kernwortschatzes, p.60 et p.164, note 87), en évinçant l'a. m. fr. soudre att. du XIIe au XIVes., issu de solvere, littéral. «délier» d'où «payer, acquitter» (v. T.-L.). Le sens 4 est empr. à l'angl. to pay (empr. au fr. au XIIIes.) att. dep.1812 dans cet empl. intrans. en parlant d'une chose, v. NED et REY-GAGNON Anglic. Fréq. abs. littér.: 12114. Fréq. rel. littér.: XIXes.: a) 20560, b) 19575; XXes.: a) 17577, b) 12911.
DÉR. Paierie, subst. fém. Bureau d'un trésorier-payeur. Certains comptables (paierie générale de la Seine) et des contrôleurs financiers ne peuvent exercer une véritable analyse des pièces qui leur sont soumises car ils en ont trop à examiner (BELORGEY, Gouvern. et admin. Fr., 1967, p.209). [], [pe-]. 1re attest. 1949 (Nouv. Lar. univ.); de payer, suff. -erie.
BBG. —CHAUTARD Vie étrange Argot 1931, p.528.—DARM. Vie 1932, p.61. - DAUZAT Ling. fr. 1946, p.185. —GOUGENHEIM (G.). Chercher et fouiller... In: [Mél. Harmer (L. Ch.). London-Toronto-Wellington-Sydney, 1970, pp.17-20.

payer [peje] v. tr.
CONJUG. je paye [pɛj] ou je paie [pɛ], nous payons; je payais, nous payions; je payerai ou je paierai.
ÉTYM. Fin Xe, paier « se réconcilier avec qqn »; soi paier de « s'acquitter de », v. 1200; du lat. pacare « pacifier, apaiser ».
A (Avec compl. dir.).
1 (Compl. n. de personne). Mettre (qqn) en possession de ce qui lui est dû (de l'argent, le plus souvent) en exécution d'une obligation ou d'un marché. || Payer un créancier. Contenter, désintéresser, rembourser, satisfaire (→ Coffrer, cit. 1; gage, cit. 1; intérêt, cit. 1). || Payer un logeur (→ Hôtel, cit. 3), un fournisseur, un marchand (→ Laine, cit. 13), des entrepreneurs (→ Opération, cit. 10). || Payer ses fournisseurs, son tailleur (→ Engager, cit. 1; fashionable, cit. 2). Régler. || Payer un domestique, un employé, un fonctionnaire, un ouvrier… Appointer, rémunérer, rétribuer, salarier; appointement, rétribution, salaire (→ Joli, cit. 13; magister, cit. 1; morgue, cit. 2).(Au passif). || Être payé à l'heure, à la semaine, au mois, au cachet, à la pige…; payer qqn bien ( Surpayer), mal ( Sous-payer). → Incident, cit. 10; journal, cit. 8; malandrin, cit. 1; médecin, cit. 4. || Payer qqn grassement (cit. 2), généreusement. Or (couvrir d'). || Vous serez payé sur-le-champ (→ Éclair, cit. 7). || Payer qqn pour un travail, pour faire…, pour qu'il fasse… (→ Montrer, cit. 32). || Je ne vous paie pas pour ne rien faire ! || Payer qqn à ne rien faire. || Tout le monde se fait payer (→ Mœurs, cit. 1). || Avoir du mal à se faire payer.Spécialt. || Payer une femme (→ Mesure, cit. 34).Péj. Corrompre à prix d'argent. Arroser, soudoyer, stipendier; mercenaire. || Payer des assassins (cit. 11), des tueurs (→ Compte, cit. 7). || Être payé par l'ennemi pour… (→ Démoralisation, cit. 3). Servir, solde (être à la).
1 Mais elle bat ses gens, et ne les paye point.
Molière, le Misanthrope, III, 4.
2 Les dettes du jeu sont sacrées.
On peut faire attendre un marchand,
Un ouvrier, un indigent
Qui nous a fourni ses denrées;
Mais un escroc ? l'honneur veut qu'au même moment
On le paie, et très poliment.
Florian, Fables, IV, 14.
3 (…) les industriels, pour payer leurs ouvriers, étaient obligés (…) de substituer le paiement en nature au paiement en espèces.
Jaurès, Hist. socialiste, t. III, p. 327.
Au p. p. || Être bien, mal payé.
4 La différence qui sépare, à culture égale, l'employé à salaire fixe, même bien payé, du commerçant, chez qui l'argent circule avec plus de facilité, plus de caprice, et surtout ne correspond pas aussi étroitement à du travail.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. III, XXIII, p. 317.
(Par antiphrase). Fam.Je suis payé pour savoir que… : j'ai appris à mes dépens, pour en avoir fait la triste expérience, que… || Il est pourtant payé pour le comprendre, pour ne plus s'en étonner. — ☑ (Par plais.). Je ne suis pas payé pour… : je n'ai aucune raison de…, j'ai de bonnes raisons de ne… pas… || Je ne suis pas payé pour le mettre au courant, qu'il se débrouille !
5 (…) elle croit aussi à tout cela ? — Mais oui. — Oh ! du reste, elle est payée pour y croire, car tous ses songes se sont réalisés.
Huysmans, En ménage, XI.
5.1 Nous sommes payés pour savoir ce qu'il en coûte à un peuple de voir l'État qui se défait : c'est être frappé à la tête.
Mauriac, le Nouveau Bloc-notes 1958-1960, p. 153.
(Avec un compl. de moyen).(Introduit par en). || Payer qqn en or, en espèces, en nature.Loc. (vx). Je le paie en sa monnaie : je le traite comme il me traite, je lui rends la pareille (→ Enfiler, cit. 11). — ☑ Loc. Payer qqn en monnaie de singe.Fig. Payer qqn en coups de gaules (cit. 3), en soufflets (→ Honnête, cit. 28).(Avec de). || Je la paie d'un fin (cit. 7) morceau. Par métaphore. || « Il faut bien le payer de la même monnaie » (→ Empressement, cit. 9, Molière). Fig. || « Flattez-les, payez-les d'agréables (cit. 11) mensonges » (La Fontaine).
Mod. || Nous payons de mots (cit. 23) les autres, nous les payons de belles paroles, de promesses qui ne coûtent rien, de mauvaises raisons…Payer qqn d'ingratitude, répondre à ses bienfaits par de l'ingratitude. Vx. || Payer qqn de raison, lui donner de bonnes raisons.
6 Il est bon de les payer (les créanciers) de quelque chose, et j'ai le secret de les renvoyer satisfaits sans leur donner un double.
Molière, Dom Juan, IV, 2.
7 J'ai tort, je le confesse, et mon âme confuse
Ne cherche à vous payer d'aucune vaine excuse.
Molière, le Misanthrope, V, 4.
8 (…) le fils d'un fermier, nommé Jarry, qui était ce qu'on appelle un mauvais gars, l'ayant embrassée un jour, à la danse, avait été payé d'un bon soufflet.
A. de Musset, Nouvelles, « Margot », II.
REM. Sauf dans les syntagmes payer de mots, de paroles, l'ensemble de ces emplois est vieilli.
9 Brissot, le diplomate de la Gironde, payait l'Assemblée de paroles. Il comptait que les nations refuseraient de combattre la France révolutionnaire.
J. Bainville, Hist. de France, XVI, p. 353.
Payer qqn de retour, reconnaître ses procédés, ses sentiments par des procédés et des sentiments semblables (→ Abandonner, cit. 25).
(Avec un compl. de cause introduit par de). || Payer qqn de ses services, de sa peine. Dédommager, récompenser (→ Mouche, cit. 7).(Au passif, plus cour.). || Être payé de sa peine (→ Heureux, cit. 24), de toutes ses peines. Iron. || « Puisse le juste ciel dignement (cit. 1) te payer » (du mal que tu as fait), Racine. || On l'a payé de son insolence (Littré). Punir.Cela m'a payé de mes peines, je ne demande rien d'autre. || Il n'a pas été payé de sa peine. || Quelques génuflexions ne peuvent payer Dieu de notre insouciance criminelle (→ Dimanche, cit. 3). || Rien ne peut me payer d'une telle perte.
10 Vous êtes bien payé de toutes vos caresses,
Et Monsieur d'un beau prix reconnaît vos tendresses.
Molière, Tartuffe, III, 5.
11 (…) leur funeste bonté
Ne me saurait payer de ce qu'ils m'ont ôté.
Racine, Phèdre, V, 7.
12 Un souverain est-il payé de ses peines par le plaisir que semble donner une puissance absolue (…) ?
La Bruyère, les Caractères, X, 34.
2 (Le compl. désigne une obligation). S'acquitter, par un versement de (une obligation, une dette). Libérer (se). || Payer ce qu'on doit. Acquitter (cit. 2). || Payer à qqn son dû. Donner, verser. || Payer ses dettes. Liquider, régler (→ Cession, cit. 1; engager, cit. 15; équilibre, cit. 23; faillite, cit. 1; gêne, cit. 8; liquider, cit. 1; 2. mal, cit. 2).Prov. Qui paie ses dettes s'enrichit.Payer un intérêt, une rente à qqn. Servir. || Dette à payer par annuités. Remboursement. || Payer tant par jour à qqn (pour qqch.). || Payer un billet à présentation, un coupon. || Payer l'amende (cit. 4; → Cause, cit. 47), les dépens, l'impôt (cit. 8; → Convenir, cit. 23; fonction, cit. 7; incidence, cit. 5; monopole, cit. 3). Mod. || Payer ses impôts. || Je n'ai pas encore payé mon acompte. || Payer ses contributions (→ Foncier, cit. 1; denier, cit. 5). Hist. || Payer la dîme (cit. 2), la taille (→ Corvée, cit. 3), un tribut (→ Démanteler, cit. 1; expiatoire, cit. 3).Payer une rançon ( Racheter). || Payer un droit (→ Ancrage, cit. 1), des réparations (→ Désarmer, cit. 11).Loc. fig. Payer son tribut : mourir.Payer une cotisation (cit.; Cotiser), son écot (cit. 3), sa quote-part, sa part. Contribuer. || Payer une patente, un loyer (→ 2. Ensemble, cit. 20; exceptionnel, cit. 9; famille, cit. 12). || Payer l'échéance, le terme (→ Locataire, cit. 3; menacer, cit. 6), une rente, une pension, une indemnité, des dommages-intérêts (→ Garantir, cit. 3). || Payer une soulte, une note (cit. 30), une facture de fournisseur. || Payer le solde d'un compte. Solder. || Déduction, décompte sur une somme qu'on paie.Par métaphore.infra cit. 15.
13 Il (Graslin) ne donna plus rien à sa femme, en lui disant qu'il paierait tous les mémoires.
Balzac, le Curé de village, Pl., t. VIII, p. 567.
14 Trop fier pour vivre en parasite, il prenait à tâche de dissimuler ses secrets motifs de sagesse, refusait dédaigneusement des parties de plaisir où il ne pouvait payer son écot, et s'étudiait à ne toucher aux riches que dans ses jours de richesse.
A. de Musset, Nouvelles, « Deux maîtresses », I.
15 Un arriéré de trois mois de tendresse maternelle qu'elle lui payait tout en une fois.
Alphonse Daudet, Contes du lundi, « Les mères ».
16 On reconnaît qu'une classe est politiquement dirigeante quand elle ne paie pas sa part d'impôts.
André Siegfried, La Fontaine…, p. 89.
Payer à qqn ses gages, son salaire, ses honoraires… Régler.
Payer trente mille francs d'impôts.
3 (Le compl. désigne ce qui est acquis). a Verser de l'argent en contrepartie de (un objet, un travail, un service, etc.). Acheter (on paye qqch. pour l'acheter; on achète qqch. en payant). || Payer comptant une marchandise (→ Libraire, cit. 5; mien, cit. 8). || Faire payer la marchandise. Vendre. || Payer les consommations (cit. 10), son dîner (→ Extra, cit. 1), une note de restaurant, d'hôtel. || Le rôtisseur voulait qu'il lui payât la fumée (cit. 9) de son rôt (Rabelais). || Payer sa place (→ Fauteuil, cit. 4), son retour (→ 1. Bourse, cit. 9), sa chambre à l'hôtel (→ Border, cit. 4; consigne, cit. 4). — ☑ Loc. Payer les pots cassés, la casse, (vx) les violons.Prov. Qui casse les verres les paie… → Les casseurs seront les payeurs. — Payer les études (cit. 24) de son fils (→ Établissement, cit. 6). || Payer le travail, les services de qqn (→ Fort, cit. 54; obliger, cit. 20). || Ce médecin ne fait pas payer ses visites aux indigents. Vx (sans déterminant devant le complément) :
17 Veux-tu paier pinte, chopine ?
Furetière, Dictionnaire, art. Paier.
18 Les actrices payent aussi les éloges, mais les plus habiles payent les critiques, le silence est ce qu'elles redoutent le plus. Aussi une critique, faite pour être rétorquée ailleurs, vaut-elle mieux et se paye-t-elle plus cher qu'un éloge tout sec, oublié le lendemain.
Balzac, Illusions perdues, Pl., t. IV, p. 679.
REM. Le complément, outre des objets matériels, peut désigner des services, des avantages, etc., et, par métonymie, des actions ayant une valeur économique reconnue (ex. : payer les pots cassés, payer la casse).
(Le compl. désigne par un n. abstrait ou une métonymie l'équivalent d'une dépense ou d'une obligation provenant d'une autre personne que le sujet). || Payer les dépenses, les frais de qqn ( Défrayer).
19 Je me suis vendu aux pétroliers pour payer les prodigalités de ma maîtresse (…)
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. IV, XI, p. 120.
b (Qualifié par un adv. ou un compl.). Acquérir (qqch.) en versant plus ou moins d'argent. || Payer qqch. cher, bon marché. || Ce tableau est assez beau, mais vous l'avez payé trop cher. Acheter. || Payer qqch. extrêmement cher, au poids de l'or. || Comment payez-vous ce vase ? Par chèque, en liquide, avec une carte de crédit. Régler.Payer qqch. (le compl. second, dir., désigne une somme d'argent) cent, mille francs.(Avec un compl. second introduit par une prép.). || Payer d'une obole le passage du fleuve des Enfers (→ Nautonier, cit. 2). || Payer qqch. en monnaie française, par un chèque…
c Payer qqch. à qqn. Acheter, donner, offrir. || Viens, je te paie un verre. || Payer la tournée. — ☑ Vieilli. Payer bouteille à quelqu'un.
20 (…) il se posa naturellement en grand seigneur, il leur paya des talmouses et un verre de vin d'Alicante, ainsi qu'à Mistigris et à son maître, en profitant de cette largesse pour demander leurs noms.
Balzac, Un début dans la vie, Pl., t. I, p. 647.
d (Dans quelques contextes : nourriture, boisson). || Payer à (et inf.) : donner de l'argent pour…, en général en offrant à qqn d'autre. || Payer à boire, à manger à qqn. || Il nous a payé à dîner (→ 2. Niche, cit. 6).
e En franç. d'Afrique. Acheter.
4 Fig. (Le compl. désigne ce qui entraîne, en contrepartie, des sacrifices, une punition). Acheter, expier.
a (Sans compl. second). || Il le paiera ! (→ ci-dessous cit. 21). || Je lui ferai payer ses mensonges.
b (Avec un adv. ou un compl.). || Une victoire, un succès, un bien qu'on paie très cher (→ Honnête, cit. 1). || Tu vas payer bien cher ton insouciance (→ Incurablement, cit. 2). || Il m'a joué un vilain tour, mais il le paiera cher ! Menace; venger (se).(Compl. second introduit par de, quelquefois par par). || Il a payé son crime de sa vie, de sa tête. || Ils me paieront ça avec du sang ! (→ 1. Lever, cit. 8). || La civilisation a été payée par beaucoup de sang (→ Fer, cit. 15). || Plaisir qu'on paie de douleurs (→ Gratter, cit. 22), de dérangement (→ Jeu, cit. 49).
c (Avec un compl. de personne introduit par à…).Sans compl. second.Il me le paiera ! (→ ci-dessous cit. 23).
21 Je te pardonne; (elle dit le reste bas) mais tu le payeras.
Molière, le Médecin malgré lui, I, 2.
22 Et ce sont ces plaisirs et ces pleurs que j'envie,
Que tout autre que lui me paierait de sa vie.
Racine, Britannicus, II, 3.
23 (…) je jurai que le prélat me le payerait, et que je réjouirais toute la ville à ses dépens (…)
A. R. Lesage, Gil Blas, VII, V.
24 (…) Ah ! ma dette est énorme !
Et je la lui paîrai (sic), je vous le jure à tous,
De tout mon sang ! — Marquis, depuis quand payez-vous
Vos dettes ? — J'ai toujours payé celles qu'on paie
Avec du sang. Mon sang, c'est ma seule monnaie.
Hugo, Marion de Lorme, II, 2.
25 Tout cela me décourage fort : et si jamais j'ai du pouvoir absolu, je le ferai payer à plus d'un que je sais, pour me venger.
Sainte-Beuve, Correspondance, 1338, 25 mai 1842.
26 Pourtant, de combien d'efforts, de sacrifices et de douleurs ne l'avons-nous pas payé, cet affranchissement-là ?
Loti, les Désenchantées, III, XVI.
Spécialt. (Avec un adv. ou un compl. en de). Récompenser (bien ou mal) une action. || « Nous nous faisons payer grassement nos aveux » (→ Bourbeux, cit. 3, Baudelaire). || Payer d'un amour égal à l'amour d'un autre (→ Courtisane, cit. 3). || « Un suicide payé d'éternité » (→ Froc, cit. 4, Hugo). || Payer de haine l'amour qu'on inspire (→ Ici, cit. 22).
27 À ce que je puis voir, maître Jacques, on paye mal votre franchise.
Molière, l'Avare, III, 2.
28 Lorsqu'un heureux hymen, joignant nos destinées,
Peut payer en un jour les vœux de cinq années (…)
Racine, Bérénice, II, 2.
Fam. Ce n'est pas payé ! : cela méritait un meilleur sort, l'effort est mal récompensé.
5 Le compl. désigne ce qui est versé, l'argent, soit pour s'acquitter (sens 2), soit pour acquérir un bien, un service… (sens 3). || S'engager à payer une certaine somme. Souscrire (→ Chèque, cit. 1; effet, cit. 41; exécutoire, cit. 3; inscription, cit. 4). || Payer trois mille francs de principal (→ Exploit, cit. 8), mille francs de loyer…
28.1 (…) la cour condamne le défendeur à payer deux mille piastres fortes à la demanderesse (…)
Beaumarchais, le Mariage de Figaro, III, 15.
REM. Payer de l'argent semble un pléonasme, mais au passif cet emploi est moins choquant : l'argent a été payé; l'argent que vous (m')avez payé.
(Le compl. est le mot prix). || Payer le prix (de qqch.). || Payer le prix du terrain (→ Cri, cit. 17). || Si l'acheteur ne paie pas le prix de la chose (→ Délivrer, cit. 11). || Le prix à payer pour une marchandise (→ Importateur, cit.). || Le prix qui n'a pas été payé (→ Courant, cit. 5).
B (Sans compl. dir.)
1 Verser de l'argent (pour s'acquitter, pour un achat…). Débourser, décaisser, dépenser, financer, et, fam., casquer, cracher, éclairer, fendre (se); allonger (les), lâcher (les). || Payer comptant (cit. 2), recta, rubis sur l'ongle, sans discuter (→ Jouvenceau, cit. 2). || Acheter sans payer. || Accorder un délai pour payer (→ Escompte, cit. 2). || Il n'a pas encore payé, mais il paiera. || Payer d'avance (→ Heure, cit. 16). || Les marchands ne pouvaient ou ne voulaient pas payer (→ Invendable, cit.). || Il doit payer dans les trois jours (→ Mot, cit. 40). || Être astreint à payer (→ Dommage, cit. 6). || Aller au spectacle en payant, sans payer (→ Entrée, cit. 14). || Au moment de payer (→ Éparpiller, cit. 15).Payer de sa poche. || Payer pour un autre (→ Obliger, cit. 2). || Paie pour moi, je n'ai pas de monnaie. || Il lui fallait payer, payer toujours… (→ Fonds, cit. 1). || Client, locataire (cit. 4) qui paie bien. || Client qui ne paie pas volontiers. Dur (à la dépense, à la desserre, à la détente). || Refuser de payer. || Partir sans payer (au restaurant, etc.). Grivèlerie. || Entrer sans payer, gratuitement. Cf. Pour pas un sou, un rond. || Avoir de quoi payer. Solvable. || La banque ne peut plus payer. || Faire payer les riches (→ Intéresser, cit. 24). || Incapable de payer. Insolvable.|| « Qu'ils chantent, pourvu qu'ils paient », mot attribué à Mazarin.
29 Pourriez-vous disposer d'un lit ? — Non. — Quoi ! pas même en payant, en payant bien ? — Oh ! en payant et en payant bien, pardonnez-moi. Mais l'ami, vous ne me paraissez guère en état de payer, et moins encore de bien payer.
Diderot, Jacques le fataliste, Pl., p. 545.
30 On y buvait, on y mangeait, on y criait; on y payait peu, on y payait mal, on n'y payait pas, on était toujours bienvenu.
Hugo, les Misérables, IV, XII, I.
2 Fig. || Payer de : payer avec. || Payer de ses deniers, de sa poche. Par ext. (fig.). S'acquitter (de ce qu'on doit, de quelque tâche) au moyen de…, donner satisfaction au moyen de…Payer de sa personne : agir personnellement, s'exposer, se dépenser. Employer (s').Payer, ne pas payer de mine (cit. 9, 10 et 11).Payer d'audace (cit. 15) : montrer de l'audace faute d'autre chose. Vx. || Payer d'obéissance (→ Déférence, cit. 1). Preuve (faire preuve de).
31 Il faut payer d'effronterie.
Racine, les Plaideurs, II, 4.
32 Toutes les infortunes sont sœurs, elles ont le même langage, la même générosité, la générosité de ceux qui ne possédant rien sont prodigues de sentiment, paient de leur temps et de leur personne.
Balzac, la Peau de chagrin, Pl., t. IX, p. 94.
33 Ça, monsieur le meunier, fit-elle, payant de hardiesse, ne vous rangeriez-vous pas un brin pour laisser passer le monde ?
G. Sand, François le Champi, XXI.
34 L'oncle et le médecin, n'ayant plus à payer de leur poche, payaient de leurs personnes. Ils n'en récoltèrent pas davantage de gratitude.
Cocteau, les Enfants terribles, p. 150.
35 (…) je crois que je saurais encore payer de ma personne, j'ai fait la guerre d'Espagne.
Camus, la Peste, p. 179.
3 Fig. Subir les conséquences fâcheuses, expier, être puni. || Fini le bon temps, maintenant il faut payer. || Il a payé pour tout le monde. || J'ai failli payer pour d'autres (→ Niquedouille, cit. 2).
4 (Sujet n. de chose). Anglic. Être profitable. Rapporter, rendre. || Le crime ne paie pas. || Une tactique, un coup qui paie. || Métier qui paie mal. Payant.
35.1 Mais je ne serais pas éloigné d'espérer que, du moins, leur trafic avec les tribus du Sud-Marocain, dont les besoins et les ressources augmenteront vraisemblablement à notre contact, « payera », au sens anglais du mot, et couvrira peut-être un jour, sur d'autres chapitres du budget, les frais de l'occupation militaire (…)
L. H. Lyautey, Paroles d'action, p. 39.
35.2 Petits métiers, grosses fatigues, acceptés par nécessité, quittés sans regret, durant peu et payant moins encore.
Claude Courchay, La vie finira bien par commencer, Gallimard, 1972, p. 8.
——————
se payer v. pron.
1 (Réfl. dir.). || Voilà cent francs, payez-vous et rendez-moi la monnaie. — ☑ Vx. (Dans le même sens). Se payer par ses mains : retenir le montant de sa créance.Fig. → Désintéresser, cit. 1, La Bruyère. — Le monde se paie de ce qu'il donne (→ Aloi, cit. 3). Contenter (se), satisfaire (se). — ☑ Loc. mod. Se payer de mots : se contenter de vains mots, de vaines paroles, sans tenir compte de la réalité (→ Éclairer, cit. 7; entendre, cit. 18; extérioriser, cit. 2 et ci-dessous cit. 38, 41 et 42).
36 Quoi ? vous voulez que je me paye d'un semblable discours ?
Molière, Dom Juan, V, 3.
37 (…) ceux qui se payent de mines et de façons de parler (…)
La Bruyère, les Caractères, VIII, 62.
38 La malheureuse facilité que nous avons à nous payer de mots que nous n'entendons point commence plus tôt qu'on ne pense.
Rousseau, Émile, I.
38.1 Quand je demandais à Rodin pourquoi ce départ m'avait été caché, pourquoi je n'avais pas suivi ma maîtresse, il m'assurait que l'unique raison avait été de prévenir une scène douloureuse pour l'une et pour l'autre, et qu'assurément je reverrais bientôt celle que j'aimais. Il fallut se payer de ces réponses, mais s'en convaincre était plus difficile.
Sade, Justine…, t. I, p. 123.
39 L'amour est la seule passion qui se paye d'une monnaie qu'elle fabrique elle-même.
Stendhal, De l'amour, Fragm. divers, 145.
40 Chemin faisant, ils prenaient, pillaient, se payant d'avance de leur sainte guerre. Tout ce qu'ils (les pèlerins) pouvaient trouver de juifs, ils les faisaient périr dans les tortures. Ils croyaient devoir punir les meurtriers du Christ avant de délivrer son tombeau.
Michelet, Hist. de France, IV, III.
41 Je ne me paye plus de mots, je vous assure, et je vais droit au cœur du problème. Je veux changer quelque chose au monde : moi.
G. Duhamel, Salavin, V, XIV.
42 On oublie très aisément que, par nécessité de son état, le poète doit être le dernier des hommes à se payer de mots.
Valéry, Variété II, p. 166.
2 (Mil. XIXe). Réfl. indir. Fam. Offrir (s'). || Se payer un voyage, un bon dîner… (→ Gueuleton, cit. 2; modéré, cit. 10). || Un spectacle que se paient gratuitement les passants (→ Morgue, cit. 2). || Se payer une demi-heure de flâne (cit. 2).Se payer du bon temps.Fam. Se payer une bosse, une bosse de rire…S'en payer une (bonne) tranche : s'amuser beaucoup. — ☑ Se payer le luxe (cit. 13) de faire, de dire (qqch.). → 1. Fumer, cit. 26.
43 (…) pas de curé, ça semblait dire qu'on était trop pauvre ou trop avare pour s'en payer un; enfin, on avait l'air au-dessous de tout, des riens de rien qui n'auraient pas dépensé dix sous à de l'inutile.
Zola, la Terre, IV, IV.
44 Quelques minutes plus tard, comme il avait faim et qu'aujourd'hui on pouvait se payer un extra, il lui dit (…)
Eugène Dabit, Hôtel du Nord, V.
Par plais. (Fam.). Se payer la tête de qqn : se moquer de lui.
45 (…) je n'ai pas envie de vous faire rigoler. Vous vous payez déjà suffisamment ma tête.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. IV, X, p. 99.
Var. (plus fam.).Se payer la gueule, la fiole (de qqn).
46 Armand avait l'air de prendre tout ça naturellement, mais il voyait bien à l'œil rusé de l'autre, qu'il se payait doucement sa gueule.
Aragon, les Beaux Quartiers, I, XII.
47 Si je te demande ça, c'est pour le service, t'entends, et je ne veux pas qu'on se paie ma fiole.
R. Dorgelès, le Cabaret de la belle femme, p. 196.
Très fam. || Se payer (qqn). a Mettre à mal. || Celui-là, je vais me le payer, le corriger. || On a failli se payer un cycliste, le renverser. b Avoir des relations sexuelles avec (qqn). → S'envoyer, se faire. || Il se l'est payée, elle se l'est payé.
3 (Passif). Fig. || Dettes qui se paient (→ Fouage, cit.). || Une levée qui se paie au prorata de la mise (→ Miser, cit. 1). Vieilli. || Cela ne peut se payer : c'est sans prix. Impayable. — ☑ Fig. Toute faute se paie, tout se paie, finit par coûter cher, tout s'expie. || Un honneur (cit. 71) qui se paie par un peu de médisance. || Manquements (cit. 3) qui se paient, chez les matelots, par quelques nuits de cachot.
48 Oui, je trouve ce oh, oh ! admirable (…) — Ce sont là de ces sortes de choses qui ne se peuvent payer.
Molière, les Précieuses ridicules, 9.
49 Ce n'est pas impunément que, pendant cinq années, l'univers s'est entredéchiré, que des œuvres de civilisation séculaires ont été détruites. Cela se paye, et cela se paye cher.
L. H. Lyautey, Paroles d'action, p. 339.
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payé, ée p. p. adj.
1 Collaborateurs payés et collaborateurs bénévoles. Rémunéré, rétribué, salarié…Bien, mal payé (→ cit. 4).Fig. (passif et participe). || Être payé pour… (→ ci-dessus cit. 5 et supra).
2 Marchandises livrées mais non payées. || Effets non payés. Impayé.
3 (→ ci-dessus A., 1.). || Besogne, fonction, travail bien payés, mal payés… (→ Approcher, cit. 21; attacher, cit. 112; capitaliste, cit. 3; crever, cit. 25; employer, cit. 21).Journée chômée et payée. || Congés payés.
CONTR. Devoir, emprunter. — Encaisser, recevoir. — Resquiller. — Donner, vendre.
DÉR. Paiement, paierie. — Payable, payant, paye (ou paie), payeur.
COMP. Impayable, impayé. — Sous-payer, surpayer.
HOM. Peiller.

Encyclopédie Universelle. 2012.