guerre [ gɛr ] n. f.
• 1080; frq. °werra
I ♦
1 ♦ Lutte armée entre groupes sociaux, et spécialt entre États, considérée comme un phénomène social. « La guerre est un mal qui déshonore le genre humain » (Fénelon). « Quelle connerie, la guerre » (Prévert). Mars, dieu de la guerre. L'art de la guerre. ⇒ stratégie, tactique. Étude de la guerre. ⇒ polémologie. Le nerf de la guerre. — Législation internationale sur la prévention directe ou indirecte (⇒ désarmement) de la guerre. Droit préventif de la guerre. ⇒ arbitrage, médiation, sanction. Le droit de la guerre a été codifié par les conventions de La Haye (1899; 1907).— Déclarer la guerre. Attaquer sans déclaration de guerre. Déclaration de guerre conditionnelle. ⇒ ultimatum. Faire la guerre. Pays qui s'abstient de participer à la guerre (⇒ neutralité) . Conventions entre pays pour faire la guerre. ⇒ alliance, coalition. La guerre et la paix. Loc. prov. Si tu veux la paix, prépare la guerre, adage latin (« Si vis pacem, para bellum »).
♢ EN GUERRE : en état de guerre. Nations en guerre. Ceux contre qui on est en guerre. ⇒ ennemi. Entrer en guerre.
♢ DE GUERRE. État de guerre. ⇒ belligérance. L'armistice ne fait pas cesser l'état de guerre. Faits de guerre; opérations de guerre. ⇒ bataille, campagne, combat, expédition; assaut, attaque, bombardement, débarquement, défensive, engagement, offensive, 1. retraite, siège. Crime, criminel de guerre. Ruse de guerre. ⇒ embuscade, piège. Fig. ⇒ artifice. Cri de guerre. Noms de guerre, que prenaient les soldats en s'enrôlant; fig. ⇒ pseudonyme, surnom. — Correspondant de guerre d'un journal. — Homme de guerre; gens de guerre : soldats de métier. Blessé, mutilé de guerre. Prise de guerre. ⇒ butin, capture. Prisonnier de guerre. Profiteur de guerre. Loc. Fauteur de guerre. Un foudre de guerre. — Croix de guerre. — Matériel de guerre. ⇒ armement. Armes de guerre. Au Moyen Âge, Armure de guerre (opposé à armure de tournoi) . Cheval de guerre. ⇒ destrier. Machines de guerre. Place de guerre. ⇒ fortification. — Navire de guerre. Marine de guerre. Port de guerre. — Industrie de guerre. Trésor de guerre. Indemnités de guerre, payées par le pays vaincu. Dommages de guerre.
2 ♦ (1680) Les questions militaires; l'organisation des armées (en temps de paix comme en temps de guerre). Conseil de guerre. Anciennt Ministère de la Guerre, et absolt la Guerre. ⇒ 1. défense.
3 ♦ (1080) UNE GUERRE; LA GUERRE : conflit considéré comme un phénomène historique, localisé dans l'espace et dans le temps. ⇒ conflagration, conflit, hostilité, lutte (armée). Menaces de guerre. En cas de guerre : au cas où la guerre éclaterait. Début d'une guerre. Guerre qui éclate. Issue d'une guerre; gagner, perdre une guerre. ⇒ victoire; capitulation, défaite. Attendre la fin de la guerre; la guerre est finie. Durant, pendant la guerre. Guerre entrecoupée de trêves. En temps de guerre.
♢ Campagne, conflit (précisément désigné). La guerre de Cent Ans. La guerre de 70 (1870). La Grande Guerre, la guerre de 14 (1914). La drôle de guerre. La Première, la Seconde Guerre mondiale (1914-1918; 1939-1945). Depuis la guerre, avant la guerre : depuis, avant la dernière guerre (⇒aussi entre-deux-guerres) .
♢ (En parlant du caractère d'un conflit) Guerre juste, injuste. Guerre propre; guerre conventionnelle. Guerre de défense; guerre de libération (⇒ résistance) . Guerre d'agression, de conquête. Guerre de pacification. Guerre d'extermination. Guerre raciale (⇒ génocide) . Guerre coloniale. — Guerre locale. Guerre mondiale. Guerre planétaire, qui s'étend à une partie importante de la planète. Guerre ouverte : hostilité déclarée. Guerre totale, qui utilise tous les moyens pour détruire l'adversaire. Guerre d'usure. Guerre préventive. — Guerre de positions, de tranchées. Guerre de mouvement. Guerre éclair, fondée sur le principe d'une attaque foudroyante. ⇒ blitzkrieg. Guerre terrestre; aérienne; navale; guerre sous-marine. Guerre chimique, bactériologique. Guerre presse-bouton, qui se fait au moyen de dispositifs automatiques. Guerre atomique, nucléaire. Guerre des étoiles : appellation courante de l'initiative de défense stratégique. ⇒ I. D. S. — Guerre de partisans. ⇒ guérilla. Guerre d'escarmouches. — PETITE GUERRE : guerre de harcèlement, et par ext. simulacre de guerre. ⇒ exercice, 1. manœuvre. — La guerre en dentelles, telle qu'on la faisait au XVII e ou au XVIII e s., avec des officiers vêtus de dentelles et se rendant force politesse. — Guerre sainte : guerre que mènent les fidèles d'une religion au nom de leur foi (⇒ croisade; djihad) . Guerres de Religion (spécialt en France) :les luttes armées entre catholiques et protestants aux XVI e et XVII e s. La guerre des pierres. ⇒ intifada. — GUERRE CIVILE, guerre intestine : lutte armée entre groupes et citoyens d'un même État. ⇒ révolte, révolution. Allumer, exciter la guerre civile.
4 ♦ Action de se battre dans un conflit armé; situation individuelle de celui qui se bat. ⇒ bataille, combat; fam. baroud, boucherie, casse-gueule, casse-pipe. Aller à la guerre, partir pour la guerre (cf. ci-dessus partir en guerre). Mourir à la guerre (cf. Mourir au champ d'honneur). ⇒ front. Indiens sur le sentier de la guerre.
5 ♦ Par ext. Hostilité, lutte entre groupes sociaux, États, n'allant pas jusqu'au conflit armé. ⇒ conflit. Guerre économique. Guerre des ondes. Guerre électronique : écoute et brouillage des émissions radioélectriques de l'adversaire (⇒ contre-mesure) . Guerre de propagande, guerre idéologique. Guerre psychologique. (v. 1940) Guerre des nerfs, visant à briser la résistance morale de l'adversaire. — Guerre froide : état de tension, d'hostilité entre États, spécialt entre l'U.R.S.S. et les États-Unis. « La guerre froide apparaît, dans la perspective militaire comme une course aux bases, aux alliés, aux matières premières et au prestige » (R. Aron).
II ♦ Fig.
1 ♦ Toute espèce de combat, de lutte. Vx Guerre de plume : querelle d'écrivains. — Loc. Vivre en guerre, sur le pied de guerre avec tout le monde. ⇒ hostilité, inimitié. Guerre ouverte, déclarée entre deux personnes. Entre eux deux, c'est la guerre. ⇒fam. guéguerre. Partir en guerre contre les préjugés.
♢ FAIRE LA GUERRE à qqn sur qqch., à propos de qqch., réprimer cette chose en lui. — Faire la guerre à une chose, chercher à la détruire. Faire la guerre aux abus, aux injustices.
2 ♦ Loc. DE GUERRE LASSE : en renonçant à résister, à combattre. Céder, accepter de guerre lasse. — DE BONNE GUERRE : sans hypocrisie ni traîtrise. ⇒ loyalement . — À la guerre comme à la guerre : il faut accepter les inconvénients qu'imposent les circonstances; la guerre justifie les moyens. — PROV. Qui terre a guerre a : la possession de terres, de richesses est source de conflits.
⊗ CONTR. Paix; concorde, entente.
⊗ HOM. Guère.
● guerre nom féminin (germanique werra, dispute) Lutte armée entre États. (La guerre entraîne l'application de règles particulières dans l'ensemble des rapports mutuels entre États ; elle commence par une déclaration de guerre ou un ultimatum et se termine par un armistice et, en principe, par un traité de paix qui met fin à l'état de guerre.) Lutte entre des groupes, entre des pays qui ne va pas jusqu'au conflit sanglant : Une guerre économique, de propagande. Lutte entre des personnes, hostilité : Entre lui et moi, c'est la guerre. ● guerre (citations) nom féminin (germanique werra, dispute) François Andrieux Strasbourg 1759-Paris 1833 Hélas ! Est-ce une loi sur notre pauvre terre Que toujours deux voisins auront entre eux la guerre ; Que la soif d'envahir et d'étendre ses droits Tourmentera toujours les meuniers et les rois ? Le Meunier sans souci Guillaume Apollinaire de Kostrowitzky, dit Guillaume Apollinaire Rome 1880-Paris 1918 Ah ! Dieu que la guerre est jolie Avec ses chants ses longs loisirs. Calligrammes, l'Adieu du cavalier Gallimard Guillaume Apollinaire de Kostrowitzky, dit Guillaume Apollinaire Rome 1880-Paris 1918 Où sont-ils ces beaux militaires Soldats passés Où sont les guerres Où sont les guerres d'autrefois. Calligrammes, C'est Lou qu'on la nommait Gallimard Henri Barbusse Asnières 1873-Moscou 1935 Faut tuer la guerre dans le ventre de tous les pays. Le Feu Flammarion Léon Blum Paris 1872-Jouy-en-Josas 1950 À l'issue d'une longue guerre nationale, la victoire bouleverse comme la défaite. À l'échelle humaine Gallimard Albert Camus Mondovi, aujourd'hui Deraan, Algérie, 1913-Villeblevin, Yonne, 1960 Pour la plupart des hommes, la guerre est la fin de la solitude. Pour moi, elle est la solitude définitive. Carnets Gallimard Georges Clemenceau Mouilleron-en-Pareds, Vendée, 1841-Paris 1929 Il est plus facile de faire la guerre que la paix. Discours de paix, 1919 Plon Georges Clemenceau Mouilleron-en-Pareds, Vendée, 1841-Paris 1929 Politique intérieure : je fais la guerre ; politique étrangère : je fais la guerre. Je fais toujours la guerre ! Les Russes nous trahissent, je continue de faire la guerre. La malheureuse Roumanie est obligée de capituler : je continue de faire la guerre, et je continuerai jusqu'au dernier quart d'heure. Réponse à une interpellation, mars 1918 Georges Clemenceau Mouilleron-en-Pareds, Vendée, 1841-Paris 1929 La guerre ! c'est une chose trop grave pour la confier à des militaires. Cité par Suarez dans Soixante Années d'histoire française : Clemenceau Tallandier Pierre Drieu La Rochelle Paris 1893-Paris 1945 La guerre moderne est une révolte maléfique de la matière asservie par l'homme. La Comédie de Charleroi Gallimard Charles de Gaulle Lille 1890-Colombey-les-Deux-Églises 1970 Dans le conflit présent comme dans ceux qui l'ont précédé, être inerte, c'est être battu. L'Avenir des forces mécanisées Plon Charles de Gaulle Lille 1890-Colombey-les-Deux-Églises 1970 La France a perdu une bataille, mais la France n'a pas perdu la guerre. Proclamation Commentaire Cette phrase célèbre ne figure pas, comme on le dit toujours, dans l'Appel du 18 juin ; elle est l'attaque d'une proclamation rédigée sans doute le même jour, mais affichée seulement en juillet à Londres. Victor Hugo Besançon 1802-Paris 1885 Depuis six mille ans la guerre Plaît aux peuples querelleurs, Et Dieu perd son temps à faire Les étoiles et les fleurs. Les Chansons des rues et des bois, Liberté, Égalité, Fraternité Victor Hugo Besançon 1802-Paris 1885 La guerre, c'est la guerre des hommes ; la paix c'est la guerre des idées. Fragments Victor Hugo Besançon 1802-Paris 1885 Un roi c'est de la guerre, un dieu c'est de la nuit. La Légende des siècles, le Satyre Victor Hugo Besançon 1802-Paris 1885 La bonté d'une guerre se juge à la quantité de mal qu'elle fait. Quatrevingt-Treize Jean de La Bruyère Paris 1645-Versailles 1696 De tout temps les hommes, pour quelque morceau de terre de plus ou de moins, sont convenus entre eux de se dépouiller, se brûler, se tuer, s'égorger les uns les autres ; et pour le faire plus ingénieusement et avec plus de sûreté, ils ont inventé de belles règles qu'on appelle l'art militaire. Les Caractères, Du souverain ou de la république Valery Larbaud Vichy 1881-Vichy 1957 La femme est une grande réalité, comme la guerre. A. O. Barnabooth, Journal intime Gallimard Jean-Marie Gustave Le Clézio Nice 1940 Les mots ne sont pas assez nombreux pour courir aussi vite que la guerre. La Guerre Gallimard Anne, dite Ninon de Lenclos Paris 1616-Paris 1705 Il est plus difficile de bien faire l'amour que de bien faire la guerre. Lettres comte Joseph de Maistre Chambéry 1753-Turin 1821 La guerre est […] divine en elle-même, puisque c'est une loi du monde. Les Soirées de Saint-Pétersbourg comte Joseph de Maistre Chambéry 1753-Turin 1821 Jamais le christianisme, si vous y regardez de près, ne vous paraîtra plus sublime, plus digne de Dieu, et plus fait pour l'homme qu'à la guerre. Les Soirées de Saint-Pétersbourg André Malraux Paris 1901-Créteil 1976 Il n'y a pas cinquante manières de combattre, il n'y en a qu'une, c'est d'être vainqueur. Ni la révolution ni la guerre ne consistent à se plaire à soi-même. L'Espoir Gallimard André Malraux Paris 1901-Créteil 1976 Il y a des guerres justes, il n'y a pas d'armées justes. L'Espoir Gallimard André Malraux Paris 1901-Créteil 1976 Ah ! que la victoire demeure avec ceux qui auront fait la guerre sans l'aimer ! Les Noyers de l'Altenburg Gallimard Clément Marot Cahors 1496-Turin 1544 Bref, nul ne peut (soit par feu, sang ou mine) Gagner profit en guerre féminine. Épîtres, Pour le capitaine Raisin audit seigneur de la Rocque Honoré Gabriel Riqueti, comte de Mirabeau Le Bignon, aujourd'hui Le Bignon-Mirabeau, Loiret, 1749-Paris 1791 Je deviens trop vieux pour user mon reste de forces à des guerres. Lettre au major de Mauvillon Honoré Gabriel Riqueti, comte de Mirabeau Le Bignon, aujourd'hui Le Bignon-Mirabeau, Loiret, 1749-Paris 1791 La guerre est l'industrie nationale de la Prusse. Commentaire Cette phrase, dont l'attribution à Mirabeau est traditionnelle depuis l'historien Albert Sorel, semble n'être, en réalité qu'une adaptation un peu trop libre d'une phrase de l'essai de Mirabeau De la monarchie prussienne sous Frédéric le Grand (1788). Blaise de Lasseran de Massencome, seigneur de Monluc Saint-Puy, Gers, vers 1502-Estillac, Lot-et-Garonne, 1577 Aux [guerres] civiles, il faut être ou maître ou valet, vu qu'on demeure sous même toit. Et ainsi il faut venir à la rigueur et à la cruauté. Commentaires, Livre V Blaise de Lasseran de Massencome, seigneur de Monluc Saint-Puy, Gers, vers 1502-Estillac, Lot-et-Garonne, 1577 La nécessité de la guerre nous force, en dépit de nous-mêmes, à faire mille maux, et faire non plus d'état de la vie des hommes que d'un poulet. Commentaires, VII Michel Eyquem de Montaigne château de Montaigne, aujourd'hui commune de Saint-Michel-de-Montaigne, Dordogne, 1533-château de Montaigne, aujourd'hui commune de Saint-Michel-de-Montaigne, Dordogne, 1592 L'une des plus grandes sagesses en l'art militaire, c'est de ne pousser son ennemi au désespoir. Essais, I, 47 Charles de Secondat, baron de La Brède et de Montesquieu château de La Brède, près de Bordeaux, 1689-Paris 1755 La France se perdra par les gens de guerre. Mes pensées Blaise Pascal Clermont, aujourd'hui Clermont-Ferrand, 1623-Paris 1662 Pourquoi me tuez-vous ? — Et quoi, ne demeurez-vous pas de l'autre côté de l'eau ? Mon ami, si vous demeuriez de ce côté, je serais un assassin et cela serait injuste de vous tuer de la sorte ; mais puisque vous demeurez de l'autre côté, je suis un brave, et cela est juste. Pensées, 293 Commentaire Chaque citation des Pensées porte en référence un numéro. Celui-ci est le numéro que porte dans l'édition Brunschvicg — laquelle demeure aujourd'hui la plus généralement répandue — le fragment d'où la citation est tirée. Charles Péguy Orléans 1873-Villeroy, Seine-et-Marne, 1914 Heureux ceux qui sont morts dans une juste guerre ! Heureux les épis mûrs et les blés moissonnés. Ève Gallimard François Rabelais La Devinière, près de Chinon, vers 1494-Paris 1553 Les nerfs des batailles sont les pécunes. Gargantua, 46 Raymond Radiguet Saint-Maur-des-Fossés 1903-Paris 1923 Que ceux déjà qui m'en veulent se représentent ce que fut la guerre pour tant de très jeunes garçons : quatre ans de grandes vacances. Le Diable au corps Grasset celle de 1914-1918 Romain Rolland Clamecy 1866-Vézelay 1944 Je trouve la guerre haïssable mais bien plus ceux qui la chantent sans la faire. Au-dessus de la mêlée Albin Michel Commentaire Cette citation est extraite d'un article que Romain Rolland avait publié dès le 30 octobre 1914 dans le Journal de Genève. Jules Romains, pseudonyme littéraire devenu ensuite le nom légal de Louis Farigoule Saint-Julien-Chapteuil, Haute-Loire, 1885-Paris 1972 Académie française, 1946 La victoire a beau grandir, elle ne réussit plus à rattraper les morts. Les Hommes de bonne volonté, Vorge contre Quinette Flammarion Jules Romains, pseudonyme littéraire devenu ensuite le nom légal de Louis Farigoule Saint-Julien-Chapteuil, Haute-Loire, 1885-Paris 1972 Académie française, 1946 Nous sommes tant sur terre, tant Qui n'avons pas besoin de guerre Pour nous enivrer de vertu. Ode génoise Camille Bloch Jean-Paul Sartre Paris 1905-Paris 1980 Quand les riches se font la guerre, ce sont les pauvres qui meurent. Le Diable et le Bon Dieu Gallimard Luc de Clapiers, marquis de Vauvenargues Aix-en-Provence 1715-Paris 1747 La guerre n'est pas si onéreuse que la servitude. Réflexions et Maximes Luc de Clapiers, marquis de Vauvenargues Aix-en-Provence 1715-Paris 1747 Le vice fomente la guerre ; la vertu combat. Réflexions et Maximes Nicole Vedrès 1911-1965 Les monuments aux morts des guerres que l'on perd sont moins laids que les monuments aux morts des guerres que l'on gagne. Suite parisienne Mercure de France Anonyme Si tu veux la paix, prépare la guerre. Si vis pacem, para bellum. Commentaire Formule voisine dans Végèce (Epitome rei militaris, III, Prol.) : « Qui desiderat pacem, praeparet bellum ». Horace, en latin Quintus Horatius Flaccus Venusia, Apulie, 65-Rome ? 8 avant J.-C. … et les guerres abhorrées des femmes. Bellaque matribus Detestata… Odes, I, I, 24-25 Commentaire Quelle que soit l'interprétation traditionnelle, on a tort d'oublier que matribus, ici comme souvent, ne signifie pas seulement les mères, mais les femmes (mères et épouses). Hérodote Halicarnasse vers 484-Thourioi vers 420 avant J.-C. Personne n'est assez insensé pour préférer la guerre à la paix ; en temps de paix les fils ensevelissent leurs pères ; en temps de guerre les pères ensevelissent leurs fils. Histoires, I, 87 (traduction Legrand) Thucydide Athènes vers 460-après 395 avant J.-C. À la guerre, l'occasion n'attend pas. Histoire de la guerre du Péloponnèse, I, 142, 1 (traduction J. de Romilly) Raymond Poincaré Bar-le-Duc 1860-Paris 1934 La mobilisation n'est pas la guerre. Commentaire Proclamation du 1er août 1914, accompagnant l'ordre de mobilisation générale. Elle était signée du président de la République, Raymond Poincaré, et de tous les membres du gouvernement ; en fait, elle avait été rédigée par René Viviani, président du Conseil. Ivan Alekseïevitch Bounine Voronej 1870-Paris 1953 Des millions d'hommes participent aux guerres actuelles ; bientôt l'Europe entière ne sera peuplée que d'assassins. Un crime Samuel Butler Strensham, Worcestershire, 1612-Londres 1680 À une juste guerre, préférons une injuste paix. An unjust Peace is to be preferr'd before a just War. Remains, Two Speeches made in the Rump Parliament Sir Arthur Neville Chamberlain Edgbaston, près de Birmingham, 1869-Heckfield, près de Reading, 1940 À la guerre […] il n'y a pas de gagnants, il n'y a que des perdants. In war […] there are no winners, but all are losers. Speech at Kettering, 3 juillet 1938 Benjamin Franklin Boston 1706-Philadelphie 1790 Il n'y a jamais eu de bonne guerre ni de mauvaise paix. There never was a good war or a bad peace. Letter to Quincey, 11 septembre 1783 Thomas Hardy Upper Bockhampton, Dorset, 1840-Max Gate, Dorchester, 1928 Ce que je maintiens, c'est que la guerre fait joliment bien dans l'histoire, et que la paix fournit une piètre lecture. My argument is that War makes rattling good history, but Peace is poor reading. The Dynasts, II, 5 Machiavel, en italien Niccolo Machiavelli Florence 1469-Florence 1527 Une guerre est juste quand elle est nécessaire. Quella guerra è giusta che è necessaria. Pensieri, II, 9 Mao Zedong, Mao Tsö-tong ou Mao Tsé-toung Shaoshan, Hunan, 1893-Pékin 1976 On ne peut abolir la guerre que par la guerre. Pour qu'il n'y ait plus de fusils, il faut prendre le fusil. Citations du président Mao Tsé-Toung, V Mao Zedong, Mao Tsö-tong ou Mao Tsé-toung Shaoshan, Hunan, 1893-Pékin 1976 La politique est une guerre sans effusion de sang, et la guerre une politique avec effusion de sang. Citations du président Mao Tsé-Toung, V Friedrich Nietzsche Röcken, près de Lützen, 1844-Weimar 1900 Aimez la paix comme le moyen de nouvelles guerres, et la paix brève plus que la longue. Ihr sollt den Frieden lieben als Mittel zu neuen Kriegen und den kurzen Frieden mehr als den langen. Ainsi parlait Zarathoustra ● guerre (difficultés) nom féminin (germanique werra, dispute) Orthographe 1. Guerre dans les noms propres de conflits. Dans les expressions qui désignent une guerre déterminée, guerre s'écrit avec une minuscule, sauf dans la Première Guerre mondiale (ou la Grande Guerre) et la Seconde Guerre mondiale. On écrit en revanche avec une minuscule à guerre : la guerre de Cent Ans, la guerre des Deux-Roses, la guerre de Dévolution, la guerre de Sécession, etc. 2. Après-guerre, avant-guerre, entre-deux-guerres : v. ces mots à leur ordre alphabétique . Guerre éclair (traduction de l'allemand Blitzkrieg) : sans trait d'union. La guerre éclair. 3. De guerre lasse. L'expression (= las de la guerre) s'est figée avec le féminin lasse, peut-être à cause d'une ancienne prononciation de las, [&ph96;ɑ&ph103;], comme pour rimer avec hélas : de guerre lasse, ils ont rendu les armes. ● guerre (expressions) nom féminin (germanique werra, dispute) Familier. À la guerre comme à la guerre, il faut s'accommoder des circonstances, si difficiles soient-elles. (C'est) de bonne guerre, se dit d'un comportement habile et rusé, qui répond à une attaque, une critique, une concurrence et qu'on considère comme légitime. De guerre lasse, à bout de résistance ; en renonçant par lassitude. Entrer en guerre, la commencer. État de guerre, situation d'une nation qui, avec ou sans déclaration de guerre, a ouvert les hostilités contre une ou plusieurs autres nations. Faire la guerre, participer à la lutte armée pendant la guerre ; adresser à quelqu'un des reproches, s'attaquer à lui sur un point particulier de sa conduite. Faire la guerre à, partir en guerre contre, attaquer quelque chose avec violence pour le faire disparaître : Faire la guerre aux préjugés. Fait de guerre, action militaire méritoire. Guerre bactériologique, utilisation d'agents biologiques à des fins militaires. Guerre froide, état de tension internationale prolongée, dû à une politique d'hostilité entre deux adversaires, qui ne va pas jusqu'au conflit armé (l'expression est employée depuis le « coup de Prague » de 1948) ; état de tension, d'hostilité, sans manifestation violente, entre deux personnes, deux groupes. Guerre nucléaire, biologique, chimique, ou guerre N.B.C., forme de guerre où seraient employés ces types d'armes. Guerre ouverte, hostilité déclarée. Guerre privée, guerre que les seigneurs se livraient pour régler leurs litiges ou réaliser une conquête. (Fréquentes et ruineuses, elles furent limitées par l'Église à partir de la fin du Xe s. par la paix de Dieu et la trêve de Dieu, puis interdites par la royauté [1258, 1311], interdiction qui ne fut respectée qu'au cours du XIVe s. avec l'affermissement de l'autorité royale.) Guerre sainte, guerre menée au nom de motifs religieux. Guerre totale, forme de guerre s'étendant à la totalité des activités de la nation et visant à l'anéantissement de l'adversaire. Littéraire. Homme de guerre, gens de guerre, soldat(s). Lois de la guerre, ensemble des conventions, règles et coutumes destinées à humaniser la guerre. Nom de guerre, pseudonyme sous lequel un écrivain, un artiste se fait connaître du public. Petite guerre, guerre d'escarmouches ; simulacre de combat, de conflit. ● guerre (homonymes) nom féminin (germanique werra, dispute) guère adverbe ● guerre (synonymes) nom féminin (germanique werra, dispute) Lutte armée entre États.
Synonymes :
- conflit
- hostilités
Contraires :
- paix
Lutte entre des groupes, entre des pays qui ne va...
Synonymes :
- bataille
- combat
guerre
n. f.
d1./d Conflit armé entre des nations, des états, des groupes humains. Déclarer, faire la guerre. être en guerre avec tel pays. Guerre d'invasion. Guerre offensive, défensive.
— Loc. Guerre civile, intestine, entre citoyens d'un même pays. Guerre de religion, causée par des dissensions religieuses. Guerres puniques: V. punique. Conseil de guerre.
— Première Guerre mondiale: guerre de 1914 à 1918. Seconde Guerre mondiale: guerre de 1939 à 1945.
— L'entre-deux-guerres, entre 1918 et 1939. La drôle de guerre: la période qui précéda l'invasion allemande en France, en Belgique et aux Pays-Bas, de septembre 1939 à mai 1940. Guerre N.B.C., qui utilise les armes n ucléaires, b actériologiques et c himiques.
d2./d Par ext. Petite guerre: manoeuvres simulant un combat, une guerre; jeu d'enfants qui simule la guerre, les combats.
— Guerre économique. Guerre des nerfs, psychologique. Guerre froide: crise, tension entre états (spécial., dans les années 1950, entre les États-Unis et l'U.R.S.S.).
|| Nom de guerre: pseudonyme.
d3./d Hostilité, lutte. C'est entre eux une guerre permanente. Faire la guerre à qqn sur qqch, à propos de qqch, s'opposer à lui à propos de qqch. Faire la guerre à une chose, la combattre.
— De guerre lasse, après une longue résistance. Il y a consenti de guerre lasse.
— De bonne guerre: conformément aux usages du combat; fig. conformément aux usages de la compétition, de la polémique.
— à la guerre comme à la guerre: il faut s'adapter aux circonstances.
⇒GUERRE, subst. fém.
Situation conflictuelle entre deux ou plusieurs pays, états, groupes sociaux, individus, avec ou sans lutte armée. Art, dieu, symbole de la guerre; guerre et paix :
• 1. Cette guerre à la guerre est guerre sans fin; je le comprends. Eh bien donc la paix d'abord dans mon proche gouvernement. Je signe d'abord ma paix avec les hommes; s'ils ne la signent point eux, avec moi et entre eux, qu'y puis-je? Et si je me mets en guerre contre eux, parce qu'ils ne veulent point faire la paix, voilà une guerre de plus.
ALAIN, Propos, 1923, p. 465.
• 2. Que craignons-nous? La guerre? La mort? Mais si nous avons Dieu, nous avons tout et ces craintes s'évanouissent. Dieu, c'est la paix à jamais, la paix avec soi-même (et la guerre avec le monde, mais dans cette guerre-là, il y a malgré tout la paix, une paix profonde que le monde ne peut nous ôter et qui est, je pense, une ombre de la béatitude sans fin).
GREEN, Journal, 1953, p. 230.
A. — Rapports conflictuels qui se règlent par une lutte armée, en vue de défendre un territoire, un droit ou de les conquérir, ou de faire triompher une idée. Guerre meurtrière, guerre à outrance; déclencher, entreprendre, faire, gagner, perdre, terminer la guerre; menacer de guerre; droit(s) de la guerre. L'Allemagne de 1914, lancée dans la Weltpolitik, n'eût jamais déclaré la guerre si elle avait posément compris son intérêt (FOCH, Mém., t. 1, 1929, p. 3). Au matin on repartait, groupe de la liaison, tous les cinq pour le quartier du général Des Entrayes, pour continuer la guerre (CÉLINE, Voyage, 1932, p. 31) :
• 3. Un ministre (Louvois) l'engagea dans une guerre sanglante, pour avoir été tourmenté par lui sur les fenêtres d'un bâtiment; et, pendant soixante-huit années de règne, Louis XIV, bien qu'il n'eût aucun talent comme général, a pourtant fait cinquante-six ans la guerre.
STAËL, Consid. Révol. fr., t. 1, 1817, p. 31.
Guerre chaude (p. oppos. à guerre froide, cf. infra B) :
• 4. L'ennemi peut prendre le visage de l'ennemi réel et concret de la guerre, celui de l'ennemi virtuel de la diplomatie ou celui de l'ennemi absolu de l'idéologie. L'ennemi n'est pas exclusivement celui que l'on combat au cours d'une guerre chaude.
J. FREUND, L'Essence du politique, 1965, ds GILB. 1971.
1. [Le déterminant évoque les puissances ou les groupes d'une même puissance entre lesquels s'exercent les rapports conflictuels] Guerre étrangère, locale, planétaire, raciale. Une plaie s'ouvrait : Pékin, Port-Arthur, Moukden, Tachataldja. Guerres continentales, guerres coloniales. L'homme blanc accomplissait sa mission (GUÉHENNO, Journal homme 40 ans, 1934, p. 94).
[En parlant d'un conflit particulier] Drôle de guerre; Grande Guerre; guerre médique, punique; guerre de succession. Il paraît utile de procéder à une mise au point en partant d'une période de référence, caractérisée par sa stabilité, et qui a pris fin avec la guerre de 1914 (M. BENOIST, F. PETTIER, Trans. mar., 1961, p. 20). Une amélioration depuis la deuxième guerre mondiale. Les prêteurs de capitaux (LESOURD, GÉRARD, Hist. écon., 1968, p. 111).
— En partic.
♦ Guerre civile. Lutte armée entre citoyens d'un même pays. La famille royale, qui aurait plongé la France dans les horreurs des guerres civiles (MARAT, Pamphlets, Nouv. dénonciation contre Necker, 1790, p. 113).
♦ Guerre intestine. Mais les guerres intestines qui la déchiroient, faisoient trembler tous les Chrétiens sur le sort qui lui étoit réservé (Mme COTTIN, Mathilde, t. 1, 1805, p. 116).
♦ Guerre de religion ou guerre(s) religieuse(s), guerre sainte. Lutte armée entre partisans de religions différentes. Sans parler ici des barbares sacrifices (...), ni des guerres religieuses des Anciens (DUPUIS, Orig. cultes, 1796, p. 457).
Rem. En France, guerres de religion s'applique aux guerres qui ont opposé les catholiques aux protestants durant le XVIe s.
2. [Le déterminant indique les formes différentes que peut prendre cette lutte armée] Guerre atomique, bactériologique, chimique, sous-marine, terrestre, totale; guerre de mouvement, de tranchées, d'usure. En cas de guerre continentale, un décret peut autoriser l'acceptation, comme engagés pour la durée de la guerre, des jeunes Français ayant dix-sept ans (J.O., Loi rel. recrut. arm., 1928, p. 3820). Dans la zone européenne, l'intérêt principal de la guerre navale se concentra surtout sur la dure bataille de l'Atlantique (LE MASSON, Mar., 1951, p. 11) :
• 5. Et ces quelques chiffres montrent mieux que de longs discours quels progrès nous avions faits dans l'ordre matériel au cours de cette première année de guerre de position.
JOFFRE, Mém., t. 2, 1931, p. 94.
• 6. ... ces conclusions, qui ne s'appliquent qu'aux formes de la guerre aérienne classique ou nucléaire sub-limitée, sont à réviser entièrement dans le cas de la guerre [it. ds le texte] nucléaire contrôlée...
BEAUFRE, Dissuasion et strat., 1964, p. 135.
3. [Le déterminant indique s'il s'agit d'un conflit défensif ou offensif] Guerre d'agression, de conquête, de libération. Je ne fis jamais de guerre préventive ni d'expédition punitive (SARTRE, Mots, 1964, p. 93) :
• 7. La guerre défensive est la seule légitime; et quand on peut accepter la paix ou l'offrir, une déclaration de guerre est le plus horrible des crimes...
GENLIS, Chev. Cygne, t. 2, 1795, p. 304.
4. Expressions
♦ La guerre pour la guerre. Ces hommes alors aiment la guerre pour la guerre (CONSTANT, Wallstein, 1809, p. VIII).
♦ À la guerre comme à la guerre. Il faut s'accommoder des inconvénients liés à cette situation. Mais les formalités... — On a tout simplifié. À la guerre comme à la guerre (MARTIN DU G., Thib., Été 14, 1936, p. 668).
Rem. Peut aussi se dire au figuré.
♦ La guerre fraîche et joyeuse. V. frais1 C 4 a.
♦ [P. réf. au proverbe lat. si vis pacem, para bellum] Si tu veux la paix, prépare la guerre.
— Loc. cour.
♦ En guerre. Entrer, être en guerre; états, nations en guerre. Et réciproquement, ces Indiens ne pouvant être en guerre, puisqu'ils n'ont pas de voisins, n'ont pas besoin d'un chef qui ait une autorité un peu étendue (Voy. La Pérouse, t. 2, 1797, p. 88).
♦ De (la) guerre. Butin, cas, char, cheval, correspondant, cri, dommage, fait, foudre, flotte, gens, homme, indemnité, industrie, journal, machine, marine, méthode, menace, munitions, navire, note, opération, port, prise, prisonnier, risque, souvenir, stratégie, tir, trésor, vaisseau, veuve de guerre; honneur(s), morts de la guerre. Il se rappelle ce qu'une infirmière lui a raconté de ce grand blessé de guerre qui arrachait ses médailles (MONTHERL., Lépreuses, 1939, p. 1490). Raoul a descendu son deuxième Messerschmidt : croix de guerre, peut-être légion d'honneur (ABELLIO, Pacifiques, 1946, p. 295) :
• 8. Tout le matériel de guerre et approvisionnements de toute nature, qui ne pourront être évacués par les troupes allemandes dans les délais fixés, devront être laissés sur place...
FOCH, Mém., t. 2, 1929, p. 271.
• 9. Commission des pensions (pensions civiles et militaires et victimes de la guerre et de l'oppression).
LIDDERDALE, Parlement fr., 1954, p. 176.
Crime de guerre. Crime contre la paix (par la préparation d'une guerre d'agression), crime contre l'humanité.
Nom de guerre. Pseudonyme utilisé en temps de guerre et, p. ext., dans d'autres circonstances. Listolier adorait Dahlia, qui avait pris pour nom de guerre un nom de fleur (HUGO, Misér., t. 1, 1862, p. 154).
5. P. méton.
a) Période limitée dans l'espace et le temps, pendant laquelle a lieu le conflit. Après la guerre, depuis la guerre, lendemain de guerre, pendant la guerre, période de guerre, veille de guerre. [Malvyl] au début de la guerre, en compagnie de sa maîtresse Nelly Béryl, avait fait scandale (L. DAUDET, Brév. journ., 1936, p. 172) :
• 10. Il est évident que des racines d'une valeur négative se trouvent dans les atrocités de la dernière guerre et dans les doctrines barbares des nazis et des fascistes.
Déclar. univ. Dr. Homme, 1949, p. 14.
• 11. Ils ont attendu le courrier, les permes, l'attaque allemande et c'était leur manière d'attendre la fin de la guerre.
SARTRE, Mort ds âme, 1949, p. 213.
Avant guerre. En France il n'y avait, avant guerre, que 35 000 tracteurs environ et 46 000 en 1946 (Industr. fr. caoutch., 1965, p. 45).
b) Institutions politiques et militaires qui se rattachent au domaine de la guerre. M. le duc de Bellune venait d'être obligé de quitter le portefeuille de la guerre (CHATEAUBR., Mém., t. 3, 1848, p. 230). L'École de guerre (FOCH, Mém., t. 1, 1929, p. XVI) :
• 12. Environ ce temps, le ministre de la guerre, se rendant auprès de son chef d'état-major, vit...
A. FRANCE, Île ping., 1908, p. 282.
• 13. En faisant des réserves sur la nécessité d'augmenter ces forces au-delà de l'effectif fixé par le Conseil supérieur de guerre.
FOCH, Mém., t. 2, 1929, p. 196.
c) Au fig. Le nerf de la guerre. L'argent. Ce qui nous manque, (...) c'est le nerf de la guerre, parbleu! c'est l'argent (A. FRANCE, Bergeret, 1901, p. 182).
B. — Rapports conflictuels qui ne prennent pas la forme d'une lutte armée. Faire la guerre à; guerre idéologique, larvée, ouverte, sourde; guerre des ondes. En échange de ses colonies, en échange de garanties qui lui éviteront une guerre économique après la paix, elle [l'Allemagne] peut bien consentir à prendre de son plein gré des territoires (BARRÈS, Cahiers, t. 11, 1917, p. 289).
Guerre froide (p. oppos. à guerre chaude, cf. supra A) :
• 14. L'échec de la négociation avec l'Union Soviétique sur la cessation des explosions nucléaires et la recrudescence de la guerre froide devraient, semble-t-il, amener le Congrès à revoir prochainement sa position vis-à-vis de la France et avant le prochain coup de théâtre politique mondial...
GOLDSCHMIDT, Avent. atom., 1962, p. 204.
Guerre tiède. ,,État intermédiaire entre la guerre froide et la guerre chaude`` (GILB. 1971).
1. Lutte qui est dirigée dans des domaines variés contre une personne, un ou plusieurs groupes. Guerre poétique; guerre de plume. C'est une querelle de pure littérature que je vous fais, une guerre de mots, une chicane sur les expressions (SAND, Corresp., 1843, p. 248). Il fallait renoncer à la guerre économique ou bien forcer la Flandre à servir la politique française (BAINVILLE, Hist. Fr., 1924, p. 78) :
• 15. En effet, l'industrie tout entière y gagnerait, en établissant à l'intérieur ce bon marché si nécessaire à l'extérieur pour soutenir victorieusement la guerre industrielle avec l'étranger; bataille tout aussi meurtrière que celle des armes.
BALZAC, Député d'Arcis, 1847, p. 321.
• 16. La traduction de l'Iliade par madame Dacier (...) amena une des guerres littéraires les plus vives et les plus curieuses qu'on ait vues, et comme il s'en produit quelquefois en France quand les esprits sont reposés et qu'on n'a rien de mieux à faire.
SAINTE-BEUVE, Caus. lundi, 1851-62, p. 495.
— Guerre des nerfs. Méthode de guerre tendant à briser la résistance nerveuse de l'adversaire. Synon. guerre psychologique. Qui sait mal attendre, sait mal agir : tout le secret de la « guerre des nerfs » est là (MOUNIER, Traité caract., 1946, p. 424).
— P. plaisant. La guerre en dentelles. V. dentelle A 2 loc.
— Expr. et proverbes
♦ Qui terre a, guerre a. La propriété est cause d'hostilité. V. BALZAC, Paysans, 1844, p. 3.
♦ De bonne guerre. [En parlant d'un procédé adroit consistant à mettre l'adversaire en difficulté] Elle laissa deviner les calomnies dites par Hélène (...). — Ces coups de langue, dit-il, sont de bonne guerre dans le grand monde (BALZAC, Modeste Mignon, 1844, p. 232).
♦ De guerre lasse. En abandonnant toute résistance. À force de m'obséder, je me rendis, de guerre lasse (CHATEAUBR., Mém., t. 2, 1848, p. 265).
♦ Être, se mettre sur le pied de guerre. Être toujours prêt à réagir :
• 18. Aussi (...) Madame Moreau se mettait-elle sur le pied de guerre et faisait-elle le pied de grue. Un artiste qui devait être son commensal (...) exigeait des frais.
BALZAC, Début vie, 1842, p. 398.
2. P. ext. et au fig. [La guerre peut s'exercer contre quelque chose, traduisant la volonté de destruction de l'homme] Action menée contre toute chose à laquelle on attribue une valeur nocive. Faire la guerre aux abus, à la drogue, au laisser aller, au tabac. On me dira que je fais la guerre aux titres, mais je n'aime pas ce titre d'Épaves qui affiche le naufrage (SAINTE-BEUVE, Nouv. lundis, t. 2, 1862, p. 253) :
• 19. ... il s'accommodait mal de l'extrême licence, souvent affectée, du milieu littéraire qu'il fréquentait. Il partait en guerre, contre les vers alexandrins, contre Mendès, contre les mœurs, contre l'époque, et terminait souvent un récit par cette phrase, qu'accompagnait un grand rire amusé (car il s'amusait de son indignation même) : — Mais enfin, Gide! Où allons-nous?
GIDE, Si le grain, 1924, p. 537.
Rem. 1. Faire la guerre à qqn (fam.). L'attaquer, le réprimander. « Voyons, qui as-tu vu? Adèle? Alexandrine? » Je ne savais pas encore distinguer mes deux cousines par leur nom. Je répondis « la jolie » (...) on rit beaucoup; celle qui n'était pas la jolie (...) me fit « la guerre » toute la soirée (RENAN, Feuilles dét., 1892, p. 84). 2. Avoir guerre. Ne pas pouvoir s'accorder avec. Lui-même [le Cid] on le voit d'abord au service de Sanche, roi de Castille, lequel avait guerre contre son frère Alphonse (SAINTE-BEUVE, op. cit., t. 7, 1864, p. 226).
REM. Guéguerre, subst. fém. Petite guerre jugée sans importance par celui qui parle. On ne peut avoir tous les ans une guéguerre, la Der-des-Ders à annoncer comme vacances (CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p. 303).
Prononc. et Orth. :[]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1100 « lutte armée entre groupes humains ou entre États » (Roland, éd. J. Bédier, 235); b) ca 1100 la/une guerre [limitée dans l'espace et le temps] (ibid., 242); 2. ca 1150 « inimitié; acte d'inimitié; dissension entre particuliers » (WACE, S. Nicolas, éd. E. Ronsjö, 644); 3. 1680 « les questions militaires; l'organisation des armées » (RICH. : conseil de guerre); 4. av. 1755 de guerre lasse (SAINT-SIMON, Mémoires, X, 395 ds ADAM, p. 72). De l'a. b. frq. werra « troubles, désordres; querelle », cf. l'a.h. all. werra « scandale; querelle », m. néerl. werre « confusion, désordre; querelle, guerre ». Attesté en lat. médiév. au IXe s. (DU CANGE; NIERM.), werra a éliminé le lat. class. bellum « guerre ». Pour l'explication de de guerre lasse, v. GOUG. Syst. gramm. 1925, p. 125, note 1. Fréq. abs. littér. :20 850. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 26 561, b) 16 877; XXe s. : a) 22 151, b) 43 649. Bbg. BRÜCH 1913, p. 174. - COLOMB. 1952/53, p. 341 - DUB. Pol. 1962, p. 314 - FABRE-LUCE (A.). Les Mots qui bougent. [Paris, 1970], p. 109 - HASSELROT 20e s. 1972, p. 101 (s.v. gueguerre). - LAUNAY (M.). Le Vocab. pol. de J.-J. Rousseau Genève-Paris, 1977, p. 113. - QUEM. DDL t. 15, 16, 18. - ROHLFS (G.). Die lexikalische Differenzierung der romanischen Sprachen. München, 1974, p. 60.
guerre [gɛʀ] n. f.
ÉTYM. 1080; du francique werra, a éliminé le lat. bellum.
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1 Lutte armée entre groupes sociaux, et, spécialt, entre États, considérée comme un phénomène social et historique (→ Concurrence, cit. 3). || Le concept de guerre. || On répète souvent que la guerre est éternelle (cit. 21). → 1. Être, cit. 19; fatalité, cit. 2. || La guerre, acceptation (cit. 4) de la mort. || La guerre est un fléau, un cataclysme, une calamité (→ Affliger, cit. 4). || La cruauté, la brutalité de la guerre (→ Barbarement, cit. 3; écharper, cit. 1). || Aspects, diverses images de la guerre (→ Artillerie, cit. 3). || La crainte, la peur, la haine de la guerre (→ Abstention, cit. 1; ancrer, cit. 8). || Vouloir délivrer l'humanité de la guerre. || Tenter une justification de la guerre (→ Agoniser, cit. 1). || Aimer la guerre, être affamé (cit. 8) de guerre et de sang. || Mystique de la guerre (→ Éteindre, cit. 19). — De la guerre, ouvrage de Clausewitz.
1 (…) de nombreuses définitions de la guerre ont été proposées. Insistant sur son aspect juridique, M. Quincy Wright pense que « la guerre est la condition légale qui permet à deux ou plusieurs groupes hostiles de mener un conflit par forces armées ». Considérant ses intentions, Clausewitz dit que « la guerre est un acte de violence dont le but est de forcer l'adversaire à exécuter notre volonté » (…)
Quoi qu'il en soit, disons, pour nous résumer, que la guerre est une forme de violence qui a pour caractéristique essentielle d'être méthodique et organisée quant aux groupes qui la font et aux manières dont ils la mènent. En outre, elle est limitée dans le temps et l'espace et soumise à des règles juridiques particulières, extrêmement variables (…) Sa dernière caractéristique est d'être sanglante, car lorsqu'elle ne comporte pas de destructions de vies humaines, elle n'est qu'un conflit ou un échange de menaces. La « guerre froide » n'est pas la guerre.
Gaston Bouthoul, la Guerre, p. 32-33.
2 Par la cruelle guerre on renverse les villes,
On déprave les lois divines et civiles,
On brûle les autels et les temples de Dieu;
L'équité ne fleurit, la justice n'a lieu,
Les maisons de leurs biens demeurent dépouillées,
Les vieillards sont occis, les filles violées,
Le pauvre laboureur du sien est dévêtu,
Et d'un vice exécrable on fait une vertu.
Ronsard, le Second livre des poèmes, Exhortation pour la paix.
3 La guerre est une chose si horrible, que je m'étonne comment le seul nom n'en donne pas de l'horreur (…)
Bossuet, Pensées chrétiennes et morales, XXXVI.
4 La guerre est un mal qui déshonore le genre humain (…)
Fénelon, Dialogues des morts, Socrate et Alcibiade.
5 Le nombre infini de maladies qui nous tuent est assez grand; et notre vie est assez courte pour qu'on puisse se passer du fléau de la guerre.
Voltaire, Lettre à Mme du Deffand, 4179, 27 févr. 1775.
6 La guerre est donc divine en elle-même, puisque c'est une loi du monde. La guerre est divine par ses conséquences d'un ordre surnaturel tant générales que particulières (…) La guerre est divine dans la gloire mystérieuse qui l'environne, et dans l'attrait non moins inexplicable qui nous y porte (…) La guerre est divine par la manière dont elle se déclare (…) La guerre est divine dans ses résultats qui échappent absolument aux spéculations de la raison humaine (…) La guerre est divine par l'indéfinissable force qui en détermine les succès.
J. de Maistre, les Soirées de Saint-Pétersbourg, II, VIIe entretien.
7 (…) il n'est point vrai que, même contre l'étranger, la guerre soit divine; il n'est point vrai que la terre soit avide de sang. La guerre est maudite de Dieu et des hommes mêmes qui la font et qui ont d'elle une secrète horreur, et la terre ne crie au ciel que pour lui demander l'eau fraîche de ses fleuves et la rosée pure de ses nuées.
A. de Vigny, Servitude et Grandeur militaires, II, I.
8 (…) est-il beaucoup plus humain de massacrer une famille de paysans allemands que vous ne connaissez pas, qui n'a eu avec vous de discussion d'aucune nature, que vous volez, que vous tuez sans remords, dont vous déshonorez en sûreté de conscience les femmes et les filles, parce que c'est la guerre ?
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. V, p. 254.
9 (…) la guerre, la guerre civilisée, épuise et totalise toutes les formes du banditisme, depuis le brigandage des trabucaires aux gorges du mont Jaxa jusqu'à la maraude des Indiens Comanches dans la Passe-Douteuse.
Hugo, les Misérables, III, IV, IV.
10 Mais la guerre éternelle a placé son empire destructeur sur les campagnes et moissonne avec joie des victimes nombreuses.
Lautréamont, les Chants de Maldoror, I, p. 52.
11 Si affreuses que puissent devenir les misères de la guerre, au moins elles peuvent être compensées. Il y a l'honneur de la guerre. Et il y a la grandeur de la guerre.
Péguy, la République…, p. 328.
11.1 Ah Dieu ! que la guerre est jolie
Avec ses chants, ses longs loisirs.
Apollinaire, Calligrammes, « L'adieu du cavalier ».
12 (…) ces hommes qui avaient été tenaillés par la fatigue, fouettés par la pluie, bouleversés par toute une nuit de tonnerre, ces rescapés des volcans et de l'inondation entrevoyaient à quel point la guerre, aussi hideuse au moral qu'au physique, non seulement viole le bon sens, avilit les grandes idées, commande tous les crimes — mais ils se rappelaient combien elle avait développé en eux et autour d'eux tous les mauvais instincts sans en excepter un seul : la méchanceté jusqu'au sadisme, l'égoïsme jusqu'à la férocité, le besoin de jouir jusqu'à la folie.
H. Barbusse, le Feu, XXIV.
13 — Ce serait un crime de montrer les beaux côtés de la guerre… même s'il y en avait !
H. Barbusse, le Feu, XXIV.
14 Qui veut la guerre veut par cela même des massacres inutiles, des exécutions pour l'exemple, et des otages fusillés.
Alain, Propos, 3 déc. 1921, Persuasion.
15 La guerre possède à un degré éminent le caractère essentiel du sacré; elle paraît interdire qu'on la considère avec objectivité. Elle paralyse l'esprit d'examen. Elle est redoutable et impressionnante. On la maudit et on l'exalte.
Roger Caillois, Quatre essais de sociologie contemporaine, p. 77.
16 La guerre n'est pas une maladie (…) C'est un mal insupportable parce qu'il vient aux hommes par les hommes.
Sartre, le Sursis, p. 205.
16.1 Il y a un côté de la guerre qu'il commençait, je crois, à apercevoir, lui dis-je, c'est qu'elle est humaine, se vit comme un amour ou comme une haine, pourrait être racontée comme un roman, et que par conséquent, si tel ou tel va répétant que la stratégie est une science, cela ne l'aide en rien à comprendre la guerre, parce que la guerre n'est pas stratégique.
Proust, le Temps retrouvé, Pl., t. III, p. 982.
16.2 Cette pluie sur la mer
Sur l'Arsenal
Sur le bateau d'Ouessant
Oh Barbara
Quelle connerie la guerre
Qu'es-tu devenue maintenant
Sous cette pluie de fer
De feu d'acier de sang (…)
Prévert, Paroles, « Barbara ».
♦ Connaissance, techniques de la guerre. ⇒ Tactique, stratégie. || Simulation d'opérations de guerre, « jeu de guerre ». ⇒ Kriegspiel, wargame.
♦ L'épée, le glaive, symboles de la guerre. || Personnification de la guerre. || Temple de la Guerre. || Mars, dieu de la guerre.
17 Bientôt ils défendront (…)
De figurer aux yeux la Guerre au front d'airain (…)
Boileau, l'Art poétique, III.
♦ Dr. || Législation internationale sur l'interdiction, la prévention directe (⇒ Charte, garantie, pacte) ou indirecte (⇒ Désarmement) de la guerre. || Droit préventif de la guerre (jus ad bellum). ⇒ Arbitrage, médiation, sanction. || Droit de guerre; droit de faire la guerre pour se défendre (→ Désarmement, cit. 2; état, cit. 143). — Droit de la guerre, les lois de la guerre (jus in bello). → Esclavage, cit. 3. || Violation des lois de la guerre (→ Crime de guerre, ci-dessous). || Le droit de la guerre a été codifié par les conventions de La Haye (1899; 1907). || « Lois et Coutumes de la Guerre », titre de la quatrième convention de La Haye (1907), réglant les questions concernant la qualité de belligérant; les moyens licites de lutte; l'attitude envers les ennemis blessés, prisonniers; l'occupation du territoire ennemi. — Commentaire de la guerre. || « La guerre ne commence régulièrement que par un avertissement préalable non équivoque » (Delbez). || Déclaration de guerre émanant de l'organe désigné par la Constitution. || Déclarer la guerre (→ Affronter, cit. 6; embargo, cit. 1). || Attaquer sans déclaration de guerre (→ Algarade, cit. 1). || La déclaration de la guerre (→ Faute, cit. 41). || Le droit de faire la paix et la guerre (→ Attribuer, cit. 3). || Déclaration de guerre conditionnelle. ⇒ Ultimatum. — État de guerre. ⇒ Belligérance. || Pays qui s'abstient de participer à la guerre. ⇒ Neutralité, neutre. || Conventions entre pays qui font la guerre. ⇒ Alliance, allié, coalition. — Fin de la guerre, par un accord, une convention, un traité de paix. || L'armistice ne fait pas cesser l'état de guerre.
18 La guerre ne peut être déclarée sans un vote de l'Assemblée nationale et l'avis préalable du Conseil de la République.
Constitution du 27 oct. 1946.
♦ En guerre : en état de guerre. || Nations en guerre (→ Arpent, cit. 2). || Ceux contre qui on est en guerre. ⇒ Ennemi, II. — Entrer en guerre. || Entrée (cit. 7) en guerre, dans la guerre.
♦ De guerre. || Faits de guerre (→ Bataille, cit. 6); opérations de guerre. ⇒ Bataille, campagne, combat, expédition; approche, assaut, attaque, attaquer, bombardement, bombarder, capturer, cerner, charge, charger, chasse (donner la), cheminement, contre-attaque, contre-attaquer, débarquement, débarquer, débusquer, défendre, défense, défensive, déloger, engagement, entourer, envahir, envelopper, extermination, exterminer, harceler, investir, observation, observer, offensive, poursuivre, progression, retraite, siège. || Exploit de guerre. || Ruse de guerre. ⇒ Embuscade, piège; fig. artifice, ruse (on disait aussi Tour de vieille guerre). — Crime de guerre : violation (notamment entraînant mort d'homme) des lois de la guerre. || Criminel de guerre. — Contrebande de guerre (→ 1. Agio, cit. 1). || Danse de guerre (→ Corybante, cit.). || Cri (cit. 18) de guerre; chant de guerre.
♦ ☑ (1660). Nom de guerre, que prenaient les soldats en s'enrôlant. Mod. et fig. ⇒ Pseudonyme, surnom. || Le nom de guerre d'un écrivain, d'une actrice.
18.1 — Je dois vous demander de me préciser votre identité. Vous ne vous appelez pas Liliane de Rosemar ? (…)
— Non, monsieur l'inspecteur, c'est un nom de guerre. J'ai été mannequin. Je m'appelle Simone Chamboisseau. J'ai trente-deux ans. Je suis célibataire.
René Floriot, La vérité tient à un fil, p. 61.
♦ Correspondance de guerre, lettres de guerre (→ Ascèse, cit. 5). || Le correspondant de guerre d'un journal. — Bulletin, communiqué de guerre. — Homme de guerre (→ Brûleur, cit. 1); gens de guerre (→ Aboucher, cit. 4) : soldats de métier. ⇒ Guerrier, soldat. || Blessé, mutilé de guerre; prisonnier de guerre. — ☑ Loc. Un foudre (cit. 18, 19) de guerre, de la guerre (vx). → Arbitre, cit. 10. — Croix de guerre. — Provisions, munitions de guerre (→ Amasser, cit. 13; arsenal, cit. 2). || Instrument de guerre (→ Armée, cit. 9). || Matériel de guerre. ⇒ Arme, armement, artillerie, aviation, etc. (→ Capitaine, cit. 8). || Arme de guerre; fusil de guerre (par oppos. à fusil de chasse). || Fabrication des armes de guerre (⇒ Arsenal). — Au moyen âge. || Fourche de guerre. || Armure de guerre (opposé à armure de tournoi). || Cheval de guerre. ⇒ Palefroi. || Machines de guerre. ⇒ Baliste, bélier, bombarde, catapulte, chausse-trape, onagre. — Place de guerre. ⇒ Fortification; avant-poste, poste (avancé). — Bateau, navire de guerre (→ Battre, cit. 43). || Marine de guerre; flotte (cit. 2) de guerre. || Port de guerre. || Aviation de guerre. — Usine, industrie, production de guerre. || Reconversion d'une économie de guerre en économie de paix. — Trésor de guerre. || Budget de guerre. || Indemnités de guerre, payées par le pays vaincu (→ Boucher, cit. 3). || Dommages de guerre. ⇒ Dommage (supra cit. 6).
♦ ☑ Loc. Armée sur le pied (→ Pied, III., 4.) de guerre. → ci-dessous le sens fig., II.
♦ L'art, le métier, la science de la guerre. ⇒ Stratégie, tactique (→ Discipline, cit. 2). || L'apprentissage, l'école (cit. 14) de la guerre. || Les exercices de la guerre (→ Baigner, cit. 22).
19 L'art de la guerre est l'art de détruire les hommes, comme la politique est celui de les tromper.
d'Alembert, Mélanges de littérature.
20 Qu'est-ce que la guerre ? disait-il (Napoléon); un métier de barbares où tout l'art consiste à être le plus fort sur un point donné.
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. III, p. 205.
♦ Absolt et vx. Le métier des armes. || Apprendre, savoir la guerre (→ Aventurier, cit. 6, Fénelon).
21 Celui-ci (Barclay) manœuvrera, il est brave, il sait la guerre; mais c'est un général de retraite.
Ph.-P. Ségur, Hist. de Napoléon, IV, 5.
2 (1680). Les questions militaires; l'organisation des armées (en temps de paix, comme en temps de guerre). || Conseil de guerre. — Anciennt (en France). || Ministère de la Guerre, et, absolt, la Guerre. ⇒ Défense (nationale).
22 Tu comprends, fiston, Lebrun passe des colonies à la guerre.
Aragon, les Beaux Quartiers, II, VII.
3 (1080). || Une, des guerres; la guerre : conflit considéré comme un phénomène historique, localisé dans l'espace et dans le temps. ⇒ Conflagration, conflit, hostilité, lutte (armée). → Cataclysme, cit. 2; courage, cit. 9; émigration, cit. 1. || Il va y avoir la guerre; il n'y aura pas de guerre (→ Alerte, cit. 4). || La guerre nous sera-t-elle épargnée ? (cit. 15). || La guerre peut encore s'éviter (cit. 50); la guerre est inévitable (→ Entêter, cit. 10). || Tout faire pour empêcher la guerre (→ Pacifisme, cit.). || Alternative (cit. 5) entre le commerce et la guerre. || La Guerre et la Paix, roman de Tolstoï. || En cas de guerre, au cas où la guerre éclaterait (→ Ajourner, cit. 3). || Menaces, bruits, rumeurs de guerre (→ Énerver, cit. 10; entraînement, cit. 1). || Occasion, prétexte de guerre. ⇒ Casus belli. || Accepter, envisager (cit. 13) l'éventualité de la guerre (→ Axiome, cit. 6). — (De guerre). || Projets de guerre (→ Assentiment, cit. 1); plan de guerre (→ Attentif, cit. 13). || Politique de guerre (→ Course aux armements).
♦ Esprit, vent de guerre (→ Discorde, cit. 2). || Fauteur de guerre. ⇒ didact. Belligène. — Se préparer à la guerre (→ Bon, cit. 48); mener un pays, un peuple à la guerre (→ Foi, cit. 16). || Être l'artisan (cit. 13) de la guerre. — Porter la guerre dans un pays (→ Couvrir, cit. 49). || Attiser, envenimer la guerre (→ Arrondir, cit. 8). || Faire durer, éterniser (cit. 8) une guerre. — La guerre éclate (cit. 18). → Empêtrer, cit. 15. || Pays, peuple assailli, surpris par la guerre (→ Fléau, cit. 5). || Pays ruiné par la guerre. || Les destructions (→ Casse, cit. 2), les deuils, les malheurs causés par la guerre (→ Endolorir, cit. 3; envie, cit. 14); les malheurs de la guerre. || État fondé sur la guerre et la conquête (→ Empiéter, cit. 2). || Pays, gens que la guerre enrichit (cit. 1). || Profiter de la guerre (→ Étrangler, cit. 19). || Profiteur de guerre. || Prise de guerre. ⇒ Butin, capture. || La guerre est une industrie (→ Apparaître, cit. 19). Allus. hist. || « La guerre est l'industrie nationale de la Prusse » (phrase attribuée à Mirabeau). — ☑ La guerre en dentelles. — ☑ Le nerf de la guerre : l'argent (cit. 52 et 53). — Une, des guerres. || L'enjeu (cit. 2), les conséquences d'une guerre (→ Avilissement, cit. 11; bouleverser, cit. 5; épuisement, cit. 6). || Le prix d'une guerre; guerre qui coûte des milliards. || Financer une guerre. — Issue d'une guerre. ⇒ Vaincre, victoire; capitulation, défaite, écrasement (→ Concorde, cit. 4). || Attendre la fin d'une guerre; la guerre est finie (→ Ennemi, cit. 19; flan, cit. 1). || Guerre qui s'arrête, qui recommence. ⇒ Trêve (→ Avec, cit. 83). || Suite de guerres. || Les guerres en chaîne, ouvrage de Raymond Aron. — L'enseignement, la leçon d'une guerre.
23 Plus que les charges qui ressemblent à des revues, plus que les batailles visibles déployées comme des oriflammes, plus même que les corps à corps où l'on se démène en criant, cette guerre, c'est la fatigue épouvantable, surnaturelle, et l'eau jusqu'au ventre, et la boue et l'ordure et l'infâme saleté. C'est les faces moisies et les chairs en loques et les cadavres qui ne ressemblent même plus à des cadavres, surnageant sur la terre vorace. C'est cela, cette monotonie infinie de misères, interrompue par des drames aigus, c'est cela, et non pas la baïonnette qui étincelle comme de l'argent, ni le chant du coq du clairon au soleil !
H. Barbusse, le Feu, XXIV.
24 La guerre (…) Je vois des ruines, de la boue, des files d'hommes fourbus, des bistrots où l'on se bat pour des litres de vin, des gendarmes aux aguets, des troncs d'arbres déchiquetés et des croix de bois, des croix, des croix (…) Tout cela défile, se mêle, se confond. La guerre (…)
R. Dorgelès, les Croix de bois, V.
25 Ceux-là, au lieu de tout mettre en œuvre pour éviter la guerre, ils ne pensent plus qu'à une chose; accroître, à tout hasard, le plus vite possible, leurs chances de victoire (…)
Martin du Gard, les Thibault, t. V, p. 184 (→ Défendre, cit. 10).
♦ ☑ Loc. prov. Si tu veux la paix, prépare la guerre, adage latin (si vis pacem, para bellum).
26 Les préparatifs de guerre, que le plus faux des adages préconise pour faire triompher la volonté de paix, créent, au contraire, d'abord la croyance chez chacun des deux adversaires que l'autre veut la rupture, croyance qui amène la rupture, et, quand elle a eu lieu, cette autre croyance chez chacun des deux que c'est l'autre qui l'a voulue.
Proust, À la recherche du temps perdu, t. XII, p. 200.
♦ Le temps que dure une guerre. || Années de guerre (→ Abolir, cit. 9). || La guerre (une guerre particulière). || Durant, pendant la guerre. || En temps de guerre (→ Armée, cit. 13). || Avant, après la guerre. ⇒ Avant-guerre; après-guerre.
27 (…) il suffit de considérer ce qui se passe en temps de guerre. Le meurtre et le pillage, comme aussi la perfidie, la fraude et le mensonge ne deviennent pas seulement licites; ils sont méritoires.
H. Bergson, les Deux Sources de la morale et de la religion, I, p. 26.
28 Que ceux déjà qui m'en veulent se représentent ce que fut la guerre pour tant de très jeunes garçons : quatre ans de grandes vacances.
R. Radiguet, le Diable au corps, p. 7.
N. B. Il s'agit de la guerre de 1914-1918.
♦ Hommes recrutés, levés, mobilisés pour une guerre (→ Chair [cit. 15] à canon, et aussi aiguiser, cit. 3). || La mobilisation n'est pas la guerre. || Troupes assemblées pour faire la guerre. ⇒ Armée.
4 Absolt. Action de se battre dans un conflit armé; situation individuelle de celui qui se bat. ⇒ Bataille, combat, lutte; (fam.) baroud, bagarre, boucherie (cit. 2), casse-cou (vx), casse-gueule, casse-pipe. || À la guerre (→ Approcher, cit. 35). || Aller à la guerre, en guerre, partir pour la guerre, en guerre (→ Avertir, cit. 21; chevalier, cit. 3). || Malbrough s'en va-t-en guerre, chanson populaire. — N. m. (Fam.). || C'est un va-t-en guerre. ⇒ Va-t-en guerre. — Revenir de la guerre (→ 2. Barrer, cit. 3). || Soldat, homme éprouvé, endurci dans la guerre, à la guerre. ⇒ Aguerri, chevronné (→ Alarmer, cit. 5). || Homme assuré (cit. 68) dans la guerre, à la guerre. || Bravoure, courage, vaillance à la guerre. || Périr, mourir, tomber à la guerre, au champ d'honneur. ⇒ Champ (de bataille), front; combat (→ Finir, cit. 20). || Les chances (cit. 5), les hasards de la guerre, du combat. || Les lauriers de la guerre (→ Estimer, cit. 6). ☑ Les honneurs de la guerre (→ Battre, cit. 46). || « La guerre a ses douceurs » (La Fontaine; → Alarme, cit. 8). || L'arène (cit. 10) de la guerre. — ☑ Indiens sur le sentier de la guerre.
29 La guerre, ah ! bon sang ! c'est ça qui fait les hommes ! (…) Lorsqu'on n'y est pas allé, on ne peut pas savoir. Il n'y a que ça, se foutre des coups (…)
Zola, la Terre, I, V.
♦ Faire la guerre : déclencher, mener une guerre (chefs d'État, chefs militaires); participer à un conflit armé. || Faire la guerre. ⇒ Battre (se), combattre, guerroyer. || On voit qu'il a fait la guerre, qu'il a vu le feu. || Les officiers qui ne font pas la guerre (→ Embusqué, planqué; camp, cit. 2). || Faire la guerre avec tel régiment, sous tel officier.
30 (…) faire la guerre au loin est assurément une épreuve très pénible, mais (…) la supporter sur le territoire national, et cela trois fois en un siècle, face au plus savamment cruel des ennemis, c'est beaucoup plus qu'il n'en faut pour surmener un peuple édifié tour à tour dans le malheur et la gloire.
G. Duhamel, la Pesée des âmes, IX.
31 La guerre, dès qu'on la fait à portée de fusil, calme les passions à ce point que je me crois capable, d'après les discours, de deviner si un homme a fait la guerre ou non.
Alain, Propos, 12 avr. 1921, Le règne des sots.
♦ ☑ Loc. Faites l'amour, pas la guerre !
♦ Allusion historique :
32 Ma formule est la même partout. Politique intérieure ? Je fais la guerre. Politique étrangère ? Je fais la guerre. Je fais toujours la guerre.
Clemenceau, Disc. du 8 mars 1918.
♦ En guerre. || Être heureux en guerre (→ Entreprise, cit. 1). || En amour comme en guerre (→ Avancer, cit. 20).
5 ⇒ Campagne, expédition. || Raconter ses guerres (→ Engager, cit. 50). || Vieux soldat qui a fait de nombreuses guerres.
6 Une guerre, la guerre de (qualifiée). a Campagne, expédition (précisément désignée). || La guerre des géants. ⇒ Gigantomachie (→ Assyrien, cit.). || La guerre de Troie (→ Fleurir, cit. 13). || La guerre de Troie n'aura pas lieu, pièce de Giraudoux. || Les guerres médiques, puniques. || Les guerres des Romains (→ Exercer, cit. 39). || Commentaires de la guerre des Gaules, ouvrage de César. || La guerre de Trente ans, la guerre de Cent ans. || La guerre des Deux-Roses. || Les guerres saintes. ⇒ Croisade. || La guerre contre (cit. 20) l'Autriche, contre les Arabes (→ Apprentissage, cit. 8), les Saxons (→ Exiger, cit. 2). || La guerre d'Espagne (→ Entonner, cit. 5). || Guerre russo-japonaise (→ Camouflet, cit.). || La guerre de 70, la guerre franco-allemande de 1870. — La Première, la Seconde Guerre mondiale (→ Asphyxiant, cit. 2; camouflage, cit. 1). || La Grande Guerre, la guerre de 14 (la guerre de 1914-1918). || La dernière guerre (→ fam. La der des der. ⇒ Dernier, cit. 11). ☑ Loc. La drôle de guerre. ⇒ Drôle, drôlet (la drôlette).
REM. Dans le langage courant on dit absolt la guerre pour désigner la dernière grande guerre (celle de 1914-1918, puis celle de 1939-1945). || Depuis la guerre; avant la guerre. ⇒ Après-guerre; avant-guerre. || D'une guerre à l'autre. ⇒ Entre-deux-guerres.
33 On a ri longtemps de ce mélodrame où l'auteur faisait dire à des soldats de Bouvines : « Nous autres, chevaliers de la guerre de Cent ans ». C'est fort bien fait, mais il faut donc rire de nous-mêmes : nos jeunes gens s'intitulaient « génération de l'entre-deux guerres » quatre ans avant l'accord de Munich.
Sartre, Situations II, p. 42.
♦ Les guerres des rois, des monarchies. || Guerres de la République, de la liberté… || Guerre nationale, populaire.
34 Nos ennemis font une guerre d'armée, vous faites une guerre de peuple.
Adresse de la Convention, 16 avr. 1793.
♦ La guerre de… (suivi d'un nom exprimant l'objet, la cause du conflit). || Les guerres du pétrole. || La Guerre du feu, roman préhistorique de Rosny aîné.
b En parlant du caractère d'un conflit.
♦ Guerre juste (→ Côté, cit. 35), injuste. || Guerre inexpiable. || La sale guerre, se dit en parlant d'une guerre qu'on veut flétrir. — ☑ Loc. Allus. hist. La guerre fraîche et joyeuse, adaptation d'une phrase du Kronprinz : « Il faut revenir fraîchement et joyeusement à l'état d'esprit des ancêtres » (l'Allemagne en armes, 1913, in Guerlac).
35 Ainsi, la guerre, selon la formule, reste fraîche et joyeuse. Si, par inadvertance, le souverain assistait réellement à toutes les saletés et à toutes les ignominies que procurent à l'humanité la gangrène, le gâtisme précoce et les grandes infections, il serait capable de sentir travailler son imagination et de s'en trouver incommodé.
G. Duhamel, Récits des temps de guerre, IV, XIII.
♦ Une guerre gagnée, perdue (cit. 73) d'avance. || Une guerre facile. → Promenade militaire.
♦ Guerre de défense; guerre de libération (⇒ Résistance). || La guerre de la liberté (→ Avant-garde, cit. 1). || Guerre d'agression, de conquête, d'hégémonie (→ Aller, cit. 49). || Guerre antinationale (cit.). || Guerre de pacification. || Guerre d'extermination. || Guerre raciale (⇒ Génocide). || Guerre coloniale. — Guerre locale; petite guerre (→ Abaissement, cit. 2). || Grandes guerres (→ Cascade, cit. 7). || Guerre continentale, mondiale (→ Exigence, cit. 5; exode, cit. 4), universelle (→ Élévation, cit. 5), planétaire : guerre qui s'étend à une partie importante de la planète. || Guerre ouverte; guerre à mort, (1747) à outrance, qui est menée pour détruire totalement l'adversaire. || Guerre totale, qui utilise tous les moyens pour détruire l'adversaire (→ Écrasement, cit. 3). || Guerre d'usure. — Guerre préventive.
36 (…) les guerres nationales, les batailles, les meurtres, les représailles, qui font frémir la nature et choquent la raison, et tous ces préjugés horribles qui placent au rang des vertus l'honneur de répandre le sang humain.
Rousseau, De l'inégalité parmi les hommes, II.
37 Heureux ceux qui sont morts dans une juste guerre !
Heureux les épis mûrs et les blés moissonnés !
Ch. Péguy, Œuvres, Ève.
38 Guerre d'usure totale. Usure de l'homme vivant, mais aussi de tout ce qui s'attache à lui, de tout ce qui est chose d'homme, de tout ce qu'il a ramassé et créé.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. XV, p. 51.
39 (…) ces guerres généralisées qui semblent témoigner d'une activité prodigieuse de l'homme, alors qu'elles dénoncent au contraire son apathie grandissante (…) Ils finiront par mener à la boucherie, à époques fixes, d'immenses troupeaux résignés.
Bernanos, Journal d'un curé de campagne, p. 162.
40 La guerre totale implique en premier lieu que la multitude des combattants tende à coïncider avec le chiffre même de la population mâle adulte disponible, en second lieu que la quantité du matériel employé corresponde au niveau le plus élevé que peut atteindre l'industrie de la nation belligérante développée au maximum.
Roger Caillois, Quatre essais de sociologie contemporaine, p. 104.
♦ Guerre de positions (→ Combativité, cit. 2). || Guerre de tranchées (1915, in D. D. L.). || Guerre de siège. || Guerre de mouvement. || Guerre éclair (all. Blitzkrieg, ⇒ Blitz), basée sur le principe d'une attaque foudroyante. || Guerre mécanisée (⇒ Blindé, char…). || Guerre terrestre; aérienne (→ Avion, cit. 6). || Guerre sur mer, guerre navale, guerre sous-marine. || Guerre de course. ⇒ Corsaire, course (supra cit. 13). || Bâtiment armé en guerre. || Guerre chimique, bactériologique. || Guerre atomique, nucléaire. || Guerre moderne, scientifique (→ Culture, cit. 18). — ☑ Loc. Guerre presse-bouton, qui se fait au moyen de dispositifs automatiques.
41 (…) à côté des guerres accidentelles il en est d'essentielles pour lesquelles l'instinct guerrier semble avoir été fait. De ce nombre sont les guerres d'aujourd'hui. On cherche de moins en moins à conquérir pour conquérir. On ne se bat plus par amour-propre blessé, pour le prestige, pour la gloire. On se bat pour n'être pas affamé, dit-on, — en réalité pour se maintenir à un certain niveau de vie au-dessous duquel on croit qu'il ne vaudrait plus la peine de vivre. Plus de délégation à un nombre restreint de soldats chargés de représenter la nation. Plus rien qui ressemble à un duel. Il faut que tous se battent contre tous, comme firent les hordes des premiers temps. Seulement on se bat avec les armes forgées par notre civilisation et les massacres sont d'une horreur que les anciens n'auraient même pas imaginée. Au train dont va la science, le jour approche où l'un des adversaires, possesseur d'un secret qu'il tenait en réserve, aura le moyen de supprimer l'autre. Il ne restera peut-être plus trace du vaincu sur la terre.
H. Bergson, les Deux Sources de la morale et de la religion, IV, p. 305.
♦ Guerre de partisans, d'escarmouches, de harcèlement. ⇒ Guérilla. — ☑ Petite guerre : guerre de harcèlement, et, par ext., simulacre de guerre. ⇒ Exercice, manœuvre. || Enfants qui jouent à la petite guerre. → ci-dessous II., 1. au sens fig.
42 Cette petite guerre, qui harcelait sans répit les soldats de la garnison de Bou-Jeloud, créait une atmosphère irritante et débilitante.
P. Mac Orlan, la Bandera, X.
♦ (Désignations spécifiques). || Guerre des Chouans. || La guerre des Gueux. ⇒ Jacquerie (→ Émeute, cit. 5.1).
♦ Guerre sainte : guerre que mènent les fidèles d'une religion au nom de leur foi. || Guerre sainte menée par les chrétiens, au moyen âge (⇒ Croisade). || Guerre sainte des musulmans. — Guerre religieuse (→ Fanatiser, cit. 1). — Guerres de religion (spécialt, en France) : les luttes armées entre catholiques et protestants, aux XVIe et XVIIe siècles. — (1988). || Guerre des pierres : lutte menée à jets de pierres par les Palestiniens dans les territoires occupés par Israël. ⇒ Intifada.
♦ Guerre civile (cit. 1) : lutte armée entre groupes de citoyens d'un même État. ⇒ Barricade (s), émeute, révolte, révolution (→ Apprentissage, cit. 12; arminien, cit.; ballotter, cit. 4; esquiver, cit. 7; flèche, cit. 5). || Guerre civile et étrangère (→ Dedans, cit. 23). || Allumer (cit. 3), exciter la guerre civile (→ Attentat, cit. 10; bon, cit. 119; 1. feu, cit. 42). || Période de guerres civiles (→ Attention, cit. 8). || La guerre civile des Chouans (→ Embuscade, cit. 2), de la Commune (cit. 4). — Guerre intestine (même sens).
43 Les guerres civiles ont cela de pire que les autres guerres, de nous mettre chacun en échauguette en sa propre maison.
Montaigne, Essais, III, IX.
44 Toutes les guerres sont civiles; car c'est toujours l'homme contre l'homme qui répand son propre sang, qui déchire ses propres entrailles.
Fénelon, Dialogues des morts, Socrate et Alcibiade.
45 (La France) dit à ses gouvernants, à vous-mêmes : quand me débarrasserez-vous de ce haillon de guerre civile ?
Gambetta, Disc. à la Chambre, 21 juin 1880.
46 Toute guerre civile est une guerre d'idées où se mêlent des intérêts.
J. Bainville, Hist. de France, VI.
♦ Dr. féod. || Guerre privée : action par laquelle un particulier assurait par la force la réparation d'un tort qui lui avait été causé (par oppos. à guerre publique).
7 Par ext. Hostilité, lutte entre groupes sociaux, États, n'allant pas jusqu'au conflit armé et sanglant et que l'on oppose souvent à la guerre politique, militaire. || Guerre économique, guerre douanière, guerre des tarifs, des débouchés. — Guerre de propagande, guerre des ondes, utilisation de la radio-diffusion, de la télévision, comme moyens de propagande en période de crise. || Guerre électronique, ensemble de dispositifs destinés à l'écoute, au brouillage des émissions radio-électriques de l'adversaire. || Guerre idéologique (→ Expansionniste, cit. 1). || Guerre des cultures (cit. 19). ☑ Guerre des nerfs, visant à briser la résistance morale de l'adversaire. || Guerre psychologique : mise en jeu massive d'une propagande visant à influencer des armées ou des populations. — Guerre larvée.
♦ ☑ (1948). Guerre froide : état de tension, d'hostilité entre États, sans qu'intervienne un conflit armé, par oppos. à guerre chaude, conflit armé (guerre au sens 1, 2, etc.).
47 La guerre froide est une guerre limitée, limitation qui porte non sur les enjeux, mais sur les moyens employés par les belligérants (…) La guerre froide apparaît, dans la perspective militaire comme une course aux bases, aux alliés, aux matières premières et au prestige.
R. Aron, Guerres en chaîne, p. 209-212.
47.1 Entre Dien-Bien-Phu et le prochain désastre ils trouvent le temps de supprimer les représentants des ballets russes, et de renvoyer les danseurs à Moscou. Ils y sont forcés ? Il ne fallait pas se mettre dans ce cas. Quand ils y ont souscrit, la guerre froide sévissait déjà.
F. Mauriac, Bloc-notes 1952-1957, p. 87.
———
1 Combat, lutte. || Guerre littéraire, poétique (→ Acharner, cit. 10). — ☑ Vx. Guerre de plume : querelle d'écrivains, dispute qui se poursuit par des écrits. — Petite guerre (entre personnes). ⇒ Guéguerre. || Journal qui fait la guerre au gouvernement (→ Escarmouche, cit. 3).
48 Je m'intéresse plus à la guerre des Russes contre les Ottomans qu'à la guerre de plume du parlement.
Voltaire, Lettre à Mme du Deffand, 3731, 6 janv. 1771.
♦ ☑ Loc. Vivre en guerre, en état de guerre, sur le pied de guerre avec tout le monde. ⇒ Hostilité, inimitié; dispute, querelle… (→ Armer, cit. 20). ☑ Se mettre sur le pied (cit. 52) de guerre. || Faire la guerre. (→ Blanc-bec, cit. 1). || État de guerre, de guerre ouverte, déclarée entre deux personnes (→ Ferrailler, cit. 2). || Déclarer la guerre (→ Client, cit. 6; exercer, cit. 11). — En parlant d'animaux (→ Allumer, cit. 18, La Fontaine).
49 De là vient le discord sous lequel nous vivons,
De là vient que le fils fait la guerre à son père,
La femme à son mari, et le frère à son frère (…)
Ronsard, Discours des misères de ce temps, Remontrance au peuple de France.
50 Nous pouvons conclure de là
Qu'il faut faire aux méchants guerre continuelle.
La Fontaine, Fables, III, 13.
♦ ☑ Faire la guerre à qqn, sur qqch., à propos de qqch. : combattre, réprimer cette chose en lui (⇒ Corriger, quereller, réprimander).
51 (…) ne lui faites point la guerre trop ouvertement sur tout ceci (…)
Mme de Sévigné, Lettres, 848, 1er sept. 1680.
♦ Faire la guerre à (qqch.) : combattre, chercher à détruire. || Faire la guerre aux abus, aux injustices. Ellipt. || Guerre à l'injustice, aux despotes ! || Guerre à la guerre ! → À bas…
52 Guerre à la rhétorique et paix à la syntaxe !
Hugo, les Contemplations, I, VII.
♦ Les animaux se font mutuellement la guerre (→ An, cit. 1; avec, cit. 49). — Faire la guerre aux lapins… ⇒ Chasser (→ Air, cit. 20).
53 Tous les animaux sont perpétuellement en guerre; chaque espèce est née pour en dévorer une autre (…) Les mâles de la même espèce se font la guerre pour des femelles, comme Ménélas et Pâris (…)
Voltaire, Dict. philosophique, Guerre.
2 Conflit (entre choses). ⇒ Combat, lutte. || Guerre entre la raison et les passions, la conscience et l'intérêt, le devoir et le plaisir. || L'homme doit faire la guerre à ses passions. ⇒ Gouverner, maîtriser, refréner.
54 (…) il ne peut être sans guerre, ne pouvant avoir paix avec l'un qu'ayant guerre avec l'autre (…)
Pascal, Pensées, VI, 412 (→ Diviser, cit. 11).
———
III (Loc. où guerre a le sens I).
1 ☑ (Mil. XVIIIe). De guerre lasse : en renonçant à résister, à combattre… (→ Accommoder, cit. 19). || Céder, accepter de guerre lasse. || De guerre lasse, il dut y renoncer.
REM. Dans cette locution, l'adjectif reste au féminin. Selon Littré, cette tournure « représente une figure hardie où la lassitude est transposée de la personne à la guerre : de guerre lasse, la guerre étant lasse, c'est-à-dire les gens qui font la guerre étant las de la faire ». Selon Grevisse « il semble préférable de voir là un faux accord, qui s'explique par le fait qu'anciennement l's de las était prononcé à la pause ».
55 Enfin, de guerre lasse, à sept heures du soir, on consentit qu'elle y passât la nuit.
Laclos, les Liaisons dangereuses, Lettre CXLVII.
56 (Ils) avaient fini, de guerre lasse, par ne plus s'occuper de ce mystère.
Balzac, Sarrasine, Pl., t. VI, p. 85.
2 ☑ De bonne guerre : par des procédés loyaux, sans hypocrisie ni traîtrise. ⇒ Loyalement. — REM. Cette locution s'est employée autrefois au sens II : « en respectant les lois de la guerre ». Cf. Littré qui cite Retz.
56.1 Lorsque je me suis emparé de Fulber et de ceux qui travaillaient avec lui, c'est-à-dire de sa fille, et du fiancé de sa fille, Fulber, comme il vous l'a fait entendre dans son langage de prophète de malheur inspiré par la plus basse haine, était sur le point de déchaîner contre moi et contre l'Allemagne la foudre la plus cruelle qu'un cerveau humain ait jamais pu concevoir ! (…) Cettte foudre, je la lui ai ravie (…) et c'est à moi qu'elle va servir (…) N'est-ce pas de bonne guerre (…)
G. Leroux, Rouletabille chez Krupp, p. 178.
3 ☑ Loc. prov. À la guerre comme à la guerre : il faut accepter les inconvénients, les privations qu'imposent les circonstances (⇒ Résignation), ou encore : la guerre justifie les moyens.
57 À la guerre comme à la guerre, pensa l'artiste en contemplant la table. Et il se mit à manger en homme qui avait déjeuné à Vierzon, à six heures du matin, d'une exécrable tasse de café.
Balzac, la Rabouilleuse, Pl., t. III, p. 1002.
4 ☑ Prov. Qui terre a guerre a : la possession de terres, de richesses, est source de conflits. — REM. Ce proverbe a inspiré diverses adaptations : Qui plume a guerre a (Voltaire, Lettre d'Argental, 4 oct. 1748); Qui gloire a guerre a (Hugo, Post-Scriptum de ma vie, Tas de pierres, IV).
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DÉR. Guerrier, guerroyer. — V. aussi Aguerrir. — Guéguerre.
COMP. Après-guerre, avant-guerre.
HOM. Guère.
Encyclopédie Universelle. 2012.