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PAPIER
PAPIER

Depuis son apparition au XIIe siècle dans le monde occidental, le papier est intuitivement associé à l’écriture, à la transmission et à la diffusion de la pensée. Demeuré rare et cher pendant sept siècles, c’est-à-dire aussi longtemps qu’il est resté fabriqué feuille par feuille en faisant appel à une matière première très élaborée (les chiffons de lin, de chanvre et de coton), il est devenu depuis cent ans un produit de grande consommation, préparé à vitesse élevée dans des installations puissantes à partir de ressources végétales – essentiellement le bois – pratiquement inépuisables car se reconstituant chaque année par photosynthèse. Contrairement à une idée répandue, la fabrication du papier ne détruit pas les forêts, mais fournit à leurs propriétaires les moyens de les entretenir et de les renouveler.

La chute spectaculaire des coûts due à la production de masse a ouvert au papier de nombreux autres débouchés hors du domaine graphique, notamment dans l’emballage, les usages industriels et les emplois domestiques. Sa vocation initiale a cependant été conservée, puisque la moitié au moins des tonnages actuellement fabriqués servent toujours à l’impression et à l’écriture. Sa consommation s’accroît régulièrement tous les ans. Elle est très inégalement répartie dans le monde. Elle est forte (de 100 à 200 kg ou plus par an et par habitant) dans les pays industrialisés, faible (moins de 20 kg par an et par habitant) ailleurs.

Papier à la cuve

L’origine du papier doit être cherchée en Chine, où sa fabrication aurait commencé dès le IIe siècle. La technique utilisée est restée secrète jusqu’au VIIIe siècle, époque à laquelle les conquérants mongols l’ont acquise, puis transmise à l’ouest, notamment à Samarcande, ville qui était devenue vers 750 un centre de production important. De là, elle s’est répandue au Moyen-Orient, notamment en Syrie (Damas) et en Mésopotamie (Bagdad), où les croisés l’ont trouvée. Un premier centre de production s’est créé en Italie dès 1250 dans la petite ville de Fabriano, près d’Ancône, et a approvisionné l’Europe entière jusqu’au moment – le milieu du XIVe siècle – où les gros consommateurs français (les universités, les abbayes, les chancelleries) ont importé, non plus le produit fini, mais la technique pour le fabriquer. La matière première – les chiffons – était opportunément devenue disponible grâce au port du linge de corps (notamment de la chemise), qui s’est généralisé à cette époque et a entraîné une grande expansion de la culture du lin. Deux cents ans plus tard, la France non seulement se suffisait à elle-même, mais était exportatrice dans tous les pays d’Europe (la diffusion de ses produits est suivie à l’aide des filigranes qui marquent les feuilles en transparence et en attestent la provenance).

Le rôle prééminent de la France dans la fabrication du papier a duré jusqu’à la révocation de l’édit de Nantes, qui a forcé les meilleurs artisans à s’expatrier. Dès 1725, la plupart des pays européens, ainsi que les colonies anglaises d’Amérique, s’étaient dotés d’une production nationale. La technique était la même partout. Des moulins à papier installés le long des rivières utilisaient la force motrice du courant pour actionner des maillets armés de dents tranchantes qui réduisaient des chiffons de lin, de chanvre et de coton à l’état de pâte papetière, autrement dit d’une suspension aqueuse contenant quelques grammes de matières solides par litre. Le papier était confectionné feuille après feuille, au moyen d’instruments appelés formes. Les formes étaient des cadres rectangulaires en bois fermés d’un côté par quinze à vingt minces tiges parallèles en sapin, appelées pontuseaux, sur lesquelles reposait un réseau serré de fils transversaux en laiton, dits vergeurs. Elles étaient plongées manuellement dans une cuve emplie de pâte, puis retirées. L’eau s’écoulait à travers les ouvertures du réseau, mais non les matières solides, qui se rassemblaient sur les vergeurs en créant un matelas fibreux. Ce matelas fibreux était déposé (par renversement) sur un feutre, puis introduit avec son support – en même temps que d’autres – entre les plateaux d’une presse, qui expulsait une bonne partie du liquide aqueux et faisait naître une feuille suffisamment solide pour être mise à sécher sur des cordes.

Les feuilles produites par cette méthode, dite à la cuve, avaient la dimension des formes qui leur donnaient naissance. Cette dimension a varié selon les époques et selon les lieux. À partir du XVIIe siècle, les différents formats (de 31 cm 憐 40 cm à 56 cm 憐 76 cm) ont été identifiés par un motif graphique – dans l’ordre des grandeurs croissantes un pot, une couronne, une coquille, des raisins, un jésus –, qui était visible en filigrane dans l’épaisseur de la feuille en même temps qu’une image fantôme des pontuseaux et des vergeurs. Ce motif et cette image ont disparu à la fin du XVIIIe siècle, quand lesdits pontuseaux et vergeurs ont été remplacés par une fine toile métallique ne laissant aucune trace discernable en transparence (les papiers fabriqués antérieurement à ce remplacement sont dits vergés, les papiers fabriqués postérieurement ont été appelés vélins).

Machines à papier

L’idée de construire une machine capable d’exécuter automatiquement les quatre opérations de la mise en feuille – l’écoulement de l’eau à travers une toile métallique, le transfert du matelas fibreux sur un feutre, l’expulsion de l’eau par pression et le séchage final par évaporation – est née en France à la fin du XVIIIe siècle dans le cerveau de Louis-Nicolas Robert, employé à la Papeterie d’Essonnes, qui a construit un prototype. Cependant, la première machine à papier du monde a été réalisée en Angleterre, pays industriellement en avance sur le continent, et a fonctionné en 1803.

Les machines à papier modernes (fig. 1 et 2) sont des mécaniques énormes qui respectent le principe mis en œuvre par les machines primitives, lesquelles reprenaient elles-mêmes le schéma des opérations manuelles. La pâte très diluée (quelques grammes par litre) est déversée sur une toile (métallique ou plastique) tendue entre deux rouleaux qui l’animent d’un mouvement de translation horizontal (à la vitesse de 100 m à la minute sur les machines lentes, de 1 000 m à la minute sur les machines rapides). Cette toile, dont la longueur se mesure en mètres, repose sur de petits rouleaux auxquels on a donné le nom de pontuseaux. La tendance, en particulier lorsque les machines sont destinées à produire des papiers de grande consommation comme le journal, est d’utiliser deux toiles décrivant chacune un parcours différent – pas toujours horizontal –, mais fusionnant in fine en un seul les deux matelas fibreux qu’elles créent.

Le matelas fibreux formé à la fin de la toile (ou des deux toiles) est très humide. Il contient à peu près 80 p. 100 d’eau. Il ne possède aucune cohésion. C’est pourquoi il est engagé par un cylindre ad hoc sur le feutre sans fin d’une presse, dispositif mécanique fait de deux rouleaux rapprochés, parallèles et superposés, tournant en sens inverse autour d’un axe horizontal. Porté par le feutre, il passe dans l’étroit intervalle séparant les deux rouleaux, où il perd une partie de son eau. L’opération est répétée sur une deuxième et sur une troisième presse, parfois aussi sur une quatrième et sur une cinquième. Elle a pour résultat de transformer le matelas humide initial en un ruban continu dont la teneur aqueuse est un peu supérieure à 50 p. 100 et qui possède dès lors une structure suffisamment cohérente pour entrer seul en sécherie.

La sécherie est un grand ensemble mécanique fait de plusieurs dizaines de gros cylindres métalliques creux chauffés à la vapeur, de diamètre égal ou supérieur à 1,5 m et superposés en deux niveaux par batteries de six à dix. Dans chaque batterie, la feuille – provenant de la section des presses – est étroitement appliquée sur le pourtour des cylindres par un feutre (ou par une toile plastique). Elle quitte la sécherie à l’état sec, c’est-à-dire avec une teneur aqueuse voisine de 7 p. 100, pouvant varier de quelques pour-cent pendant la vie du matériau qui, étant de nature hygroscopique, capte ou perd facilement de l’humidité en fonction de la pression exercée par la vapeur d’eau contenue dans l’atmosphère où il se trouve.

De nombreuses machines à papier comprennent aux deux tiers ou aux trois quarts de la sécherie un dispositif à deux rouleaux transversaux caoutchoutés, dit presse encolleuse, servant à déposer sur la feuille encore humide une enduction légère (deux ou trois grammes de matière sèche par mètre carré et par face) d’une substance telle que l’amidon. La plupart d’entre elles possèdent, par ailleurs, à la fin de la sécherie un dispositif mécanique, la lisse, comprenant de trois à huit rouleaux superposés en fonte polie, entre lesquels la feuille passe en pression avant d’être bobinée.

Le bois, matière première

La mécanisation de la fabrication a posé dans toute son ampleur le problème de la matière première – les chiffons –, qu’une armée de ramasseurs parcourant les villes et les campagnes arrivait difficilement à collecter en quantités suffisantes au temps du procédé à la cuve. Le remède à la pénurie endémique a été trouvé dans le bois. Le bois a commencé à être utilisé vers 1850, lorsqu’on s’est aperçu qu’il était aisément râpé sur une meule et que le produit résultant pouvait être incorporé en proportions élevées à la pâte de chiffons. L’exploitation totale de ses ressources a eu lieu une trentaine d’années plus tard, quand on s’est avisé qu’il contient de 40 à 50 p. 100 de cellulose – constituant essentiel des chiffons – et quand on a trouvé le moyen d’isoler cette cellulose en éliminant les 50 à 60 p. 100 restants. Ce matériau est alors devenu la matière première universelle du papier.

La cellulose se trouve dans les fibres du bois, qui sont longues de 2 à 4 millimètres chez les résineux (les sapins, les épicéas, les pins), d’environ 1 millimètre chez les feuillus (les peupliers, les trembles, les bouleaux, les hêtres, les chênes, les châtaigniers), ainsi que chez les eucalyptus. Elle est constituée de macromolécules linéaires répétant plusieurs milliers de fois un même motif chimique, dans lequel des atomes de carbone, d’hydrogène et d’oxygène sont présents en quantités définies et sont situés à des endroits déterminés (fig. 3). Elle est un polymère élevé doté d’une insolubilité quasi totale. Elle est accompagnée par des hémicelluloses (de 15 à 40 p. 100) et par de la lignine (de 15 à 25 p. 100). Les hémicelluloses ont à peu près la même composition qu’elle, mais possèdent des macromolécules moins longues et souvent ramifiées. Très hydrophiles et très adhésives, elles sont associées aux fibres et à la lignine. Elles se laissent dissoudre dans bon nombre de réactifs. Quant à la lignine, c’est une sorte de matière plastique naturelle à laquelle les végétaux doivent leur rigidité. Elle est faite elle aussi de carbone, d’hydrogène et d’oxygène, mais ces éléments sont présents dans des proportions et dans des arrangements différents. N’étant que très faiblement polymérisée, elle est soluble dans bon nombre d’agents.

L’exploitation papetière des matériaux ligneux s’est développée dans les deux filières découvertes avant la fin du XIXe siècle, c’est-à-dire dans l’utilisation du bois simplement râpé d’une part et dans la mise en œuvre du bois débarrassé des éléments étrangers à la cellulose d’autre part. La première a donné naissance aux pâtes mécaniques, la seconde aux pâtes chimiques.

Pâtes mécaniques et pâtes chimiques

Les pâtes mécaniques sont faites de bois simplement râpé ou broyé. Contenant tous les constituants du matériau ligneux qui leur donne naissance, à savoir la cellulose, les hémicelluloses et la lignine, elles sont obtenues avec un rendement élevé (voisin de 95 p. 100), mais au prix d’une grande dépense d’énergie (de 1 à 2 kW par kilogramme de pâte sèche). Elles sont traditionnellement préparées à partir de résineux à fibres longues dans de puissants engins mécaniques appelés défibreurs, où le bois est pressé sous forme de rondins – et en présence d’eau – contre d’énormes meules. Elles sont toutefois de plus en plus souvent produites à partir de bois débité en chips, qui sont désintégrés par des appareils à disques équipés de lames tranchantes. Inventées pour servir de substitut abondant et bon marché aux pâtes de chiffons, elles ont conservé ce rôle lorsque la cellulose du bois a remplacé la cellulose du lin, du chanvre et du coton. Elles sont en fait des charges nobles, autrement dit des matériaux incapables de former à eux seuls une feuille cohérente, mais susceptibles d’entrer en proportion élevée (jusqu’à 80 p. 100) à côté des pâtes chimiques dans la composition du papier. Elles sont appelées thermomécaniques lorsque le râpage ou la désintégration sont réalisés sous pression, autrement dit à une température supérieure à 100 0C. Elles ont alors une cohésion plus forte et peuvent intervenir en proportion plus grande (allant jusqu’à 90 p. 100). Dans les deux cas, elles sont recueillies sous l’aspect d’une suspension aqueuse très diluée contenant des fibres isolées et des paquets de fibres – ou de fragments de fibres – cimentés par la lignine. Elles sont presque toujours préparées à proximité des machines à papier, vers lesquelles elles sont acheminées par des tuyauteries appropriées.

Les pâtes chimiques ont complètement remplacé les pâtes de chiffons. Elles sont devenues la base de tous les papiers, qu’elles soient employées seules (dans les papiers dits sans bois) ou combinées à des pâtes mécaniques et thermomécaniques (dans les papiers dits avec traces de bois, avec peu de bois ou avec bois). Elles sont constituées par la cellulose du matériau ligneux et par une certaine portion de ses hémicelluloses. Elles sont obtenues indifféremment à partir de résineux, de feuillus et d’eucalyptus par dissolution des éléments indésirables – la lignine et la portion non souhaitée des hémicelluloses – dans un milieu aqueux renfermant les réactifs appropriés. Deux procédés assurent la quasi-totalité de la production. Le premier, dit au bisulfite, a pour agent actif l’anhydride sulfureux. Le second, dit au sulfate, met en œuvre un mélange de soude et de sulfure de sodium. Dans les deux cas, la dissolution est obtenue en milieu aqueux par cuisson sous pression au sein d’immenses vaisseaux verticaux, les lessiveurs (fig. 4), à l’intérieur desquels le matériau ligneux, débité en chips, est introduit par le haut, tandis que des tuyauteries apportent les réactifs et la vapeur nécessaires. Après quelques heures de traitement, les éléments indésirables sont dissous dans le milieu aqueux, qui devient une liqueur résiduaire à évacuer. La cellulose et les fractions conservées des hémicelluloses apparaissent sous la forme solide au bas du lessiveur. Elles représentent à peu près 50 p. 100 du bois initial lorsque la cuisson est réglée (en température et en durée) de manière à préparer de vraies pâtes chimiques. Elles représentent jusqu’à 70 p. 100 du bois initial quand la cuisson est conduite de manière à préparer des pâtes mi-chimiques à haut rendement. Elles sont désintégrées dans le premier cas par simple soufflage d’air, dans le second cas par une action mécanique plus ou moins importante, puis sont dispersées, lavées et éventuellement blanchies dans un grand volume d’eau. Elles sont ensuite envoyées sous la forme liquide – par canalisations – vers les machines à papier quand celles-ci se trouvent dans leur proximité immédiate. Elles sont transformées – par un presse-pâte (une machine à papier simplifiée) – en plaques sèches épaisses de quelques centimètres lorsqu’elles sont appelées à être mises en œuvre loin de leur lieu de production.

Autres matières premières

L’idée est venue très tôt aux industriels du papier d’exploiter en plus du bois, qui met de dix à soixante ans (selon les espèces et les climats) à se reconstituer, soit des plantes annuelles poussant à l’état sauvage dans de vastes espaces impropres à toute autre culture (l’alfa en Afrique du Nord, les roseaux dans le delta du Danube, les bambous en Asie), soit les sous-produits de plantes annuelles faisant l’objet d’une activité agricole (la paille des céréales, les bagasses des cannes à sucre). Outre le fait que ces matériaux contiennent moins de cellulose que le bois, plusieurs raisons, dont quelques-unes sont techniques, font que leur exploitation n’est rentable que si leur prix d’achat est nul ou quasi nul. C’est pourquoi elles ne constituent qu’une faible fraction – quelques pour-cent – du total des matières premières papetières utilisées.

Une autre source de matière première papetière, beaucoup plus importante, est la récupération des vieux papiers. Elle représente 25 p. 100 des tonnages consommés dans le monde (40 p. 100 dans les pays industrialisés). Le principal problème que son exploitation pose n’est pas technique. Il réside dans la collecte, qui ne peut être organisée d’une manière rentable que dans de grands centres très peuplés. Les vieux papiers non triés – les gros de rue – servent depuis longtemps à faire des cartons gris, dont les emplois sont multiples (en France, le mot carton désigne un papier dont le poids atteint au moins 225 g par mètre carré). Les vieux papiers triés par lots homogènes, notamment les périodiques et les quotidiens invendus, font l’objet de traitements élaborés – désencrage, lavage, blanchiment –, qui les transforment en une pâte pouvant entrer en proportion élevée (parfois jusqu’à 100 p. 100) dans la composition de papiers impression-écriture.

Blancheur et pollution

La blancheur étant intuitivement associée à la notion de qualité, des efforts ont toujours été déployés pour améliorer cette propriété, d’abord dans les feuilles issues du procédé à la cuve, qui étaient simplement exposées au soleil, puis, lorsque des agents adéquats sont devenus disponibles, dans les pâtes papetières elles-mêmes.

Les pâtes mécaniques sont consommées dans leur grande majorité écrues, c’est-à-dire avec leur teinte naturelle, qui est celle du bois d’origine (notamment quand elles servent à fabriquer du papier journal). Elles sont blanchies quand elles interviennent à côté des pâtes chimiques dans la composition de papiers impression-écriture de qualité. Les pâtes chimiques, elles, sont toujours blanchies, sauf quand elles servent à fabriquer des papiers d’emballage dits kraft, très résistants et très bruns. Les agents de blanchiment sont des oxydants, le chlore et l’oxygène, généralement fournis in situ par des dérivés tels que l’eau de Javel et le dioxyde de chlore pour le chlore, les peroxydes – dont l’eau oxygénée – pour l’oxygène. Ces dérivés, devenus abondants et relativement peu coûteux après la Seconde Guerre mondiale, sont travaillés dans de vastes cuves horizontales ou verticales, à l’intérieur desquelles la pâte, très diluée, circule pendant plusieurs heures. Les opérations comprennent une ou deux phases quand les pâtes sont relativement claires et les exigences de blancheur modestes, plusieurs phases (jusqu’à sept) quand les pâtes sont foncées et les exigences de blancheur élevées. Des considérations écologiques et commerciales font que la tendance actuelle est de favoriser l’oxygène aux dépens du chlore.

La mise au point de méthodes de blanchiment très actives a introduit un grand changement dans la production des pâtes chimiques et a éliminé du même coup une source de pollution. Elle a permis l’abandon du procédé au bisulfite, qui jouissait jusqu’alors d’un quasi-monopole parce qu’il fournit des pâtes claires faciles à blanchir, mais qui donnait naissance à des liqueurs résiduaires dont on ne savait que faire et qu’on déversait trop souvent dans la nature. Elle a fait le succès du procédé au sulfate, qui produit des pâtes naturellement très foncées (dont le seul débouché a longtemps été le papier kraft), mais qui ne pollue pas, parce qu’il traite ses liqueurs résiduaires. Lesdites liqueurs sont concentrées après récupération de l’agent actif qui s’y trouve dissous, puis brûlées dans des chaudières fournissant de la vapeur. Les eaux usées résultantes sont envoyées dans des stations d’épuration efficaces, qui restituent à leur sortie un liquide ayant des propriétés physiques et chimiques souvent meilleures que lors de leur prélèvement dans les rivières, les lacs ou les puits. Une nuisance subsistante est d’ordre olfactif: c’est une odeur fétide typique – celle d’un composé organique soufré échappé des lessiveurs sous forme gazeuse – qui est parfois perceptible dans le voisinage des installations.

Traitements superficiels

Les papiers se différencient les uns des autres par de nombreux critères, dont les principaux sont la composition interne et le traitement superficiel reçu. La composition interne précise les proportions relatives de pâtes chimiques et de pâtes mécaniques intervenant dans la fabrication, ainsi que la présence éventuelle d’adjuvants divers et de charges minérales (fines poudres de kaolin, de talc ou de carbonate de chaux utilisées en proportion pouvant aller jusqu’à 35 p. 100 en poids). Le traitement superficiel a pour but d’améliorer l’état de surface de la feuille sortant de la sécherie, état qui doit à la structure interne du matériau cellulosique de se présenter comme un ensemble de crêtes fibreuses séparées par des vallées profondes de quelques dixièmes de millimètre. Des différences de niveau aussi importantes sont rarement acceptables par les utilisateurs. C’est pourquoi elles sont soit atténuées, soit masquées par diverses méthodes. La première méthode fait passer la feuille entre les rouleaux superposés – en fonte polie – de la lisse située juste avant la bobineuse sur la plupart des machines à papier. Elle produit – par compression – des matériaux dits apprêtés. La seconde méthode poursuit le travail d’atténuation accompli par la première. Elle fait appel à des calandres, dispositifs mécaniques indépendants de la machine à papier, comprenant de dix à vingt rouleaux superposés, alternativement faits de métal poli et de coton comprimé. Elle engendre – par compression et friction – des matériaux dits satinés.

Les passages en lisse et en calandre n’arrivant pas toujours à conférer l’état de surface souhaité, une troisième méthode, le couchage, est largement pratiquée. Elle consiste à masquer les inégalités superficielles du papier en déposant sur ses deux faces (parfois sur une seule) un mince enduit minéral (le plus souvent composé de kaolin et de carbonate de calcium), dont les minuscules particules (ordre de grandeur, quelques micromètres) sont unies entre elles et au support par un adhésif (un latex synthétique associé à des substances comme l’amidon et la caséine). Cet enduit comble les vallées ouvertes entre les crêtes fibreuses et, lorsqu’il est suffisamment épais, recouvre en plus les crêtes fibreuses. Il est déposé en phase aqueuse par des machines (fig. 5) équipées de rouleaux enducteurs et de râcles égalisatrices, ainsi que de puissants systèmes de séchage permettant de travailler à quelques centaines de mètres à la minute (son application est souvent précédée d’une légère enduction pratiquée au moyen de la presse encolleuse présente dans bon nombre de sécheries). Il produit des surfaces particulièrement unies, dont les plus hauts reliefs n’excèdent pas – au pire – la dimension des plus gros agrégats de particules, c’est-à-dire quelques centièmes de millimètre.

Les machines à papier fournissent une bande dont la largeur – la laize – est rarement inférieure à 2 mètres et atteint parfois 10 mètres, voire davantage. Les bobines mères qui en sortent passent telles quelles dans les lisses. Elles sont parfois sectionnées en deux avant d’entrer dans les calandres et dans les coucheuses. Après les traitements superficiels, elles sont débitées en bobines filles plus étroites, qui sont directement envoyées aux utilisateurs ou sont découpées en formats.

papier [ papje ] n. m.
XIIIe; lat. papyrus, gr. papuros « roseau d'Égypte » → papyrus
I
1Matière fabriquée avec des fibres végétales réduites en pâte, étendue et séchée pour former une feuille mince. Du papier, une feuille de papier. Pâte à papier : pâte servant à fabriquer le papier. — Papier en rouleaux, en feuilles ( main, 1. rame, 2. ramette ) . Format, grain, filigrane du papier. Papier glacé, moiré, vergé. Papier uni, rayé, quadrillé. Papiers de luxe, pour l'impression ( 1. chine, hollande, japon, vélin) . Papier de chiffon. Papier à dessin. Papier bible, pelure. Papier à musique. Papier à cigarettes. Papier de soie : papier très fin. Papier crépon. Papier cristal, translucide et assez raide. Papier bristol, papier couché. Papier calque. Papier buvard. Papier absorbant. Papier de ménage ou papier-torchon . Papier-filtre , servant à la filtration des liquides (papier poreux, épais ou plissé). Papier d'emballage, papier kraft. Papier cadeau. Papier hygiénique, papier-toilette , très fam. papier cul. P. Q.
Feuille, morceau, bout de papier. Allumer du feu avec du papier. Corbeille à papier. Serviette, nappe en papier. aussi non-tissé. Mouchoir en papier ( kleenex) . Cocotte en papier.
(Le papier servant de support à un produit quelconque) Papier carbone. Papier collant, gommé. Papier sulfurisé. Phot. Papier sensible, au gélatinobromure d'argent. Papier au ferroprussiate, pour la reproduction des plans. Papier d'Arménie, qui brûle lentement en dégageant un parfum caractéristique. — Papier émeri, papier de verre. — PAPIER PEINT, PAPIER, que l'on colle sur les murs à l'intérieur d'une maison. Chambre tapissée de papier à fleurs.
♢ PAPIER MÂCHÉ : pâte à papier encollée, malléable. Figurine en papier mâché. Avoir une mine de papier mâché.
(1727) Hist. ou didact. PAPIER-MONNAIE. Monnaie de papier inconvertible en or. billet (de banque).
Spécialt (papiers à écrire, à imprimer) Papier écolier, papier de brouillon ( bloc-notes, cahier, carnet) . Papier ministre. Papier à lettres, pour la correspondance. Papier à en-tête. Papier d'impression. feuille, feuillet, 1. page. Imprim. Marger, régler, plier le papier. Édition grand papier, dont les pages ne sont pas rognées. — Papier recyclé. Papier journal, de qualité inférieure et peu encollé. — Dr. Papier timbré.
2 Feuille très mince de métal, servant à envelopper. Papier d'étain, papier d'argent, papier doré. Papier d'aluminium, fam. papier alu.
3Spécialt Le papier, support de ce qu'on écrit. Jeter une phrase, une idée sur le papier. écrire. Gratter du papier : écrire; fig. gratte-papier. Chiffon de papier. Loc. Sur le papier : théoriquement. Sur le papier, tout est résolu, mais concrètement il y aura des difficultés.
(Matérialisant la création littéraire) Écrivain devant son papier. Noircir du papier. « La clarté déserte de ma lampe Sur le vide papier que la blancheur défend » (Mallarmé).
II ♦ UN, DES PAPIERS .
1Feuille, morceau de papier (fam. 2. papelard). Notez plutôt cela dans votre carnet que sur un papier (cf. Feuille volante). Des papiers gras. Spécialt Bx-arts. Papiers collés de Picasso, de Braque. collage.
Article destiné à un journal. Envoyer son papier.
2Papier écrit de quelque importance. document, note. Serviette pleine de papiers. Classer, ranger des papiers. Papiers inutiles. paperasse. Réunir les papiers nécessaires à un mariage. pièce. Signer un papier. Papiers d'un navire ou papiers de bord. Papiers militaires. Papiers de famille.
Loc. fig. et fam. Être dans les petits papiers de qqn, jouir de sa faveur, de sa considération. — Rayez cela de vos papiers ! n'y comptez pas.
(1835) Papiers d'identité, et absolt papiers : ensemble des pièces d'identité. Vos papiers ! Avoir ses papiers en règle. Se faire faire de faux papiers. Immigré sans papiers ( clandestin) .
Fin. effet (de commerce), titre, valeur. Papiers de commerce. Papier à vue, payable à vue. Bon papier, signé par des gens solvables. Papier sur Londres. devise.

Papier, carton, apprêté dont on a amélioré le lissé et l'uniformité des deux faces à l'aide d'une lisse ou d'une calandre.

papier
n. m.
d1./d Matière faite d'une pâte de fibres végétales étalée en couche mince et séchée. Papier à dessin, à cigarettes, d'emballage.
Papier peint: papier décoré, dont on tapisse les murs d'une pièce.
|| (Spécial., papier à usage d'écriture ou d'impression.) Papier d'écolier. Papier à lettres. Papier réglé.
|| Papier de soie ou (oc. Indien) papier mousseline: papier très fin, utilisé notam. pour décalquer les patrons de couture, ou emballer les objets fragiles.
|| Papier (d')émeri, de verre ou (Maurice) papier sablé: papier abrasif utilisé pour poncer.
|| Papier mâché: pâte de papier encollée, plastique et se prêtant bien au modelage de menus objets. Marionnettes en papier mâché.
|| (Associé à certains produits.) Papier carbone: V. carbone.
Papier sensible pour la photographie.
|| INFORM Papier digital: support de données numériques permettant l'enregistrement et la lecture par laser.
|| Papier-monnaie: monnaie fiduciaire, sans garantie d'encaisse métallique. V. monnaie.
|| FIN Papier bancable: titre bancable.
|| En loc. Mettre, coucher ses idées sur le papier, par écrit.
d2./d Feuille très mince (de métal). Papier d'argent, d'étain.
d3./d Feuille, morceau de papier, et, par ext., feuille écrite ou imprimée. Inscrire qqch sur un papier. Vieux papiers.
Papier timbré, revêtu du timbre de l'état, exigé pour dresser certains actes (par oppos. à papier libre).
|| Journaliste qui rédige un papier, un article.
|| Note; document. Classer des papiers.
|| Loc. fig., Fam. être dans les petits papiers de quelqu'un, jouir de son estime, de sa faveur.
(Québec) Je t'en passe un papier!: je t'assure, tu peux me croire.
|| MAR (Au Plur.) Papiers de bord: rôles d'équipage, brevets, connaissements, etc.
|| (Au Plur.) Papiers d'identité et, absol., papiers: pièces d'identité.
|| Effet de commerce. Papier au porteur.

⇒PAPIER, subst. masc.
I. A. —Matière à base de cellulose, faite de fibres végétales naturelles ou transformées, réduites en une pâte homogène que l'on étend et sèche pour former une feuille mince. Étendage, séchage du papier; forme, moulin, pâte, usine à papier; bobine, rouleau de papier; feuille, main, rame, tonne de papier; cornet, nappe, paravent, sac, serviette en papier; couper, déchirer, découper, plier du papier. Ici prend fin l'ensemble désigné sous le nom de «partie humide» de la machine à papier. À ce moment, le papier contient encore une quantité d'eau (Civilis. écr., 1939, p.6-7). L'utilisation, dans l'industrie du papier et dans l'industrie textile, de pâtes à fibres courtes (Industr. fr. bois, 1955, p.19).
Papier + déterm. (adj., subst. en appos. ou en compos., ou subst. en compl.).
1. [Nature et fabrication du papier]
Papier (d')alfa, de chiffon, de bois, de riz; papier recyclé; papier (de) paille; papier torchon.
Papier à la/de cuve, à la forme, à la main.
2. [Aspect du papier] Papier blanc; papier épais, fort, mince; papier lisse; papier mat; papier translucide, transparent; papier filigrané, gaufré, vergé; grain du papier, main de papier. Périodiques tirés sur papier glacé ou satiné (COSTON, A.B.C. journ., 1952, p.172). Ces armures se représentent graphiquement (ou mise en carte) sur du papier quadrillé dont chaque rangée longitudinale de cases représente un fil de chaîne et chaque rangée transversale un fil de trame (THIÉBAUT, Fabric. tissus, 1961, p.60).
Papier bouffant; papier crépon; papier cristal; papier de soie; papier marbré; papier maroquin; papier(-)pelure.
Papier maïs. Papier très mince, de couleur jaune foncé, destiné à envelopper des cigarettes. Tiens, vous fumez des blondes (...)? J'aurais parié plutôt pour la pipe ou pour ces horreurs, là, comment dit-on, à papier-maïs (A. TERREL, Le Témoin est à la noce, Paris, Librairie des Champs-Élysées, 1984, p.34).
3. [Qualité du papier] Les bons textes publiés par Jouaust en élégants elzévirs et sur papier de choix (DACIER 1944, p.127):
1. L'édition utilise des papiers ordinaires pour l'impression courante et des papiers de luxe (vélins et vergés, bible et simili-bible à base de chiffons ou d'alfa) pour les éditions soignées de bibliophilie. Les périodiques et catalogues utilisent du papier ordinaire blanc ou teinté ou du papier couché destiné aux publications plus soignées. Au journal est destinée une qualité spéciale; (...) ce papier, qui jaunit vite à la lumière, est de mauvaise conservation. Pour l'affiche, généralement de couleur, on utilise un papier de basse qualité contenant un pourcentage élevé de vieux papiers.
Civilis. écr., 1939, p.6-8.
a) [Qualité supérieure] Papier bible; papier chiffon; papier couché; papier de Chine ou (papier) chine; papier du Japon ou (papier) japon.
Papier collé. ,,Papier traité de façon qu'il ne boive pas l'encre ordinaire, c'est-à-dire dont la pâte est imprégnée de résine avec addition du sulfate d'alumine`` (Lar. encyclop.).
Papier contrecollé. ,,Ensemble de deux feuilles de papier collées l'une contre l'autre`` (Lar. encyclop.).
Papier de Hollande ou (papier) hollande (v. hollande2). Papier originairement fabriqué en Hollande, dont la surface présente des vergeures. J'ai à votre disposition un des vingt-cinq exemplaires sur papier de Hollande de Dernières chansons (FLAUB., Corresp., 1872, p.10).
Papier de sûreté. ,,Papier pour les billets de banque et autres valeurs, tel qu'on ne puisse le contrefaire`` (Forest. 1946).
b) [Qualité inférieure] Papier bulle; papier journal.
Papier gris. ,,Papier d'emballage grossier, de couleur grise, à base de vieux papiers de qualité inférieure`` (Lar. encyclop.).
c) P. ext.
Papier mâché. Pâte à papier mêlée de colle, de plâtre ou de poix, malléable et qui se prête à la fabrication de petits objets. Des ornements en bois et en papier mâché imitant le marbre (STENDHAL, Rome, Naples et Flor., t.1, 1817, p.43).
Loc. adj. fig. [En parlant du teint] De papier mâché. Dont l'aspect pâle ou terne indique la fatigue ou une mauvaise santé. Dans le chemin de fer en face de moi, un monsieur au teint de papier mâché, aux traits nerveusement tiraillés, aux yeux doucement ironiques (GONCOURT, Journal, 1894, p.498).
Papier-pierre. ,,Carton très dur, obtenu avec la pâte à papier fortement comprimée`` (Forest. 1946).
4. [Format du papier] Papier grand/petit aigle; papier colombier (v. colombier2); papier coquille; papier couronne; papier écu (v. écu2); papier Jésus; papier(-)ministre (v. ministre rem. 2 b); papier pot; papier raisin.
5. [Destination du papier] Papier brouillard (v. brouillard2); papier buvard; papier cache (v. cache2); papier d'emballage; papier de bonbon; papier(-)filtre (v. filtre); papier garde (v. garde1); papier joseph (v. joseph2); papier kraft; papier(-) témoin (v. témoin).
Papier à cigarettes. Papier très mince dont on enveloppe le tabac pour faire des cigarettes. —Donne-moi une feuille de papier à cigarettes. —Pis avec ça? —Une allumette (BENJAMIN, Gaspard, 1915, p.38).
Papier hygiénique, papier de toilette, papier-cul (vulg., souvent abrégé en P.Q.). Papier doux utilisé quand on va aux toilettes. Rouleau de papier hygiénique. Nous appelons votre attention sur l'utilité, pour la bonne tenue des W.C., d'un distributeur de «papier hygiénique» (R. mens. Touring-Club de France, nov. 1901, p.489a ds QUEM. DDL t.14). N'avait-il pas imaginé, dans son zèle hitlérien de l'épargne, de réglementer jusqu'aux dimensions de ce que nous appelions le «papier-cul»? (AMBRIÈRE, Gdes vac., 1946, p.109). Les 2,5 kg de papier Q utilisés en moyenne chaque année par les Français (R.-H. GUERRAND, Les Lieux, Paris, Éd. La Découverte, 1985, p.182).
Papier mural, papier(-)peint, papier de tenture ou papier-tenture ou, p.ell., papier. Papier utilisé pour tapisser. Papier décoré, à carreaux, à fleurs; papier uni; rouleau de papier peint. Quoi de plus joli, par exemple, que les papiers-tentures qui ornent les murs de nos appartemens? (SAY, Écon. pol., 1832, p.119). Les papiers peints ont un large emploi dans la décoration (Civilis. écr., 1939, p.6-8). [Le papier d'apprêt] évitera au papier de tenture d'être taché (BONNEL-TASSAN 1966, p.151).
6. [Papier ayant reçu un apprêt particulier ou servant de support à une autre matière] Papier abrasif, adhésif; papier gommé, imperméabilisé, paraffiné; papier-parchemin; papier argenté. Enveloppez-le d'une feuille de papier huilé, la longueur du filet seulement (Gdes heures cuis. fr., Carême, 1833, p.139). Une carcasse de tête de cheval (...) nettoyée, lavée avec soin, recouverte de papier doré et ornée de rubans de toutes les couleurs (MENON, LECOTTÉ, Vill. Fr., 1, 1954, p.61).
Papier collant; papier émeri, papier de verre; papier(-) parchemin (v. parchemin); papier à réactif; papier sulfurisé.
Papier d'Arménie. Papier odoriférant, qui se consume lentement, destiné à assainir et à parfumer l'atmosphère. Toutes ces âmes de l'élite qui brûlent d'un petit feu comme le papier d'Arménie, en laissant derrière elles une mauvaise odeur (COCTEAU, Crit. indir., 1932, p.194).
Papier de boucherie. ,,Papier rendu translucide par calandrage, et résistant à la graisse et au sang`` (Lar. encyclop.).
Papier goudron, papier goudronné. Papier très épais, contrecollé à l'aide de goudron. V. pâte B 2 a, ex. de Haton de La Goupillière.
Papier à mouches. Synon. de papier tue-mouches. P. métaph. Nestor est un papier à mouches; il colle (COCTEAU, Gd écart, 1923, p.49).
Papier sablé. Synon. (surtout région., Canada) de papier émeri, papier de verre (d'apr. BÉL. 1974).
B. P. anal. Feuille très mince (d'étain ou d'aluminium) utilisée pour présenter ou emballer divers produits. Papier d'aluminium. La machine à influence [de Wimshurst] (...) se compose (...) de deux plateaux (...) portant un certain nombre de secteurs métalliques formés de papier d'étain (TURPAIN, Applic. prat. ondes électr., 1902, p.38). Les broderies de leur collet étaient faites de papier d'argent (AMBRIÈRE, Gdes vac., 1946, p.232).
C. —[Le papier considéré comme support de l'écriture ou d'une techn. de reproduction] Feuille ou ensemble de feuilles sur quoi l'on écrit ou reproduit quelque chose. Bloc de papier; papier à lettres; papier millimétré, quadrillé, rayé, réglé; papier vierge; papier à en-tête; papier photographique (synon. papier sensible); papier à autographie ou autographique; papier(-)calque (v. calque); papier carbone. Il prit du papier et écrivit beaucoup (STENDHAL, Rouge et Noir, 1830, p.375). V. papetier ex. 2:
2. L'échine pliée, perdu dans des choses graves, il mettait sa grande ombre noire au milieu de la douceur effacée de la mansarde. Et, parfois, un pinson qu'il avait ramassé dans les halles, par un temps de neige, se trompait en voyant la lumière, jetait son cri dans le silence que troublait seul le bruit de la plume courant sur le papier.
ZOLA, Ventre Paris, 1873, p.732.
IMPR. (Exemplaire) à grand papier. Dont les marges sont très larges (d'apr. Lar. 20e). (Exemplaire) à petit papier. Dont les marges sont très étroites (d'apr. Lar. 20e).
En partic.
Papier Canson. ,,Papier à dessin, résistant et lisse, fabriqué principalement dans la région d'Annonay`` (Lar. encyclop.).
Papier brouillon. ,,Papier de qualité inférieure quelque peu brouillard, pour faire des calculs ou des brouillons`` (Forest. 1946). Onglets et cavaliers (...) papier brouillon (Catal. Papest, Nancy, 1976, p.52).
Papier-copie, à copie. Papier mince, employé pour copier un texte, pour le mettre au net. J'avais plié mon papier-copie comme pour un devoir scolaire (BARRÈS, Cahiers, t.10, 1913, p.153).
Papier Ingres. Type de papier vergé, dont le poids varie de 80 à 160 g et généralement employé pour les dessins au crayon.
Papier à dessin. ,,Papier apprêté blanc et solide`` (Lar. encyclop.). La direction de la tête de l'oiseau est juste par rapport à l'angle formé par le papier à dessin (WARCOLLIER, Télépathie, 1921, p.265).
Papier à/de musique. Au fig. Réglé comme du papier à musique.
Papier d'écolier. ,,Papier de petit format, destiné aux devoirs des écoliers et aux écritures courantes`` (Lar. encyclop.).
[Le papier matérialisant l'écriture, le dessin dans la création littér. ou artist.] Confier au papier; coucher, mettre sur le papier. Seignobos n'a point écrit son livre pour le vain plaisir de noircir du papier (L. FEBVRE, Entre Benda et Seignobos, [1933] ds Combats, 1953, p.97).
Barbouiller, gratter, gribouiller du papier; jeter sur le papier.
Expr., le plus souvent au fig. Sur le papier. Par écrit, en projet, théoriquement. Je faisais partie (...) sur le papier, de la dernière classe à prendre sur cette nouvelle milice (VERLAINE, OEuvres compl., t.5, Confess., 1895, p.156).
II. A. —Feuille, morceau de papier sans forme définie ni destination précises. Bout de papier; cocotte en papier; ramasser les vieux papiers. L'histoire de la lettre d'un mystérieux agent, soi-disant trouvée dans une corbeille à papiers, n'existe naturellement que dans l'imagination et n'a jamais été une réalité (Affaire Dreyfus, 1898, p.195). La corbeille débordante de papiers récoltés dans les coins et sous les bancs (FRAPIÉ, Maternelle, 1904, p.264). V. boulette ex. 7.
Papiers gras. Papiers ayant contenu de la nourriture et maculés de graisse. Autour de leur banquette, devant ce morceau de plancher souillé de papiers gras, de pelures de bananes et d'oranges, qu'eux-mêmes ne voyaient pas, un cercle de curiosité fugitive s'établissait (MALÈGUE, Augustin, t.2, 1933, p.490).
Chiffon de papier.
BEAUX-ARTS. Papiers collés. ,,OEuvres d'art ou de décoration constituées avec des papiers collés sur une surface`` (BÉG. Peinture 1982, p.936). Synon. collage.
B. —1. Feuille sur laquelle est écrit ou imprimé un texte. Liasse de papiers; papier dactylographié, manuscrit; papier confidentiel, précieux, secret; brûler, cacher des papiers; fouiller dans les papiers de qqn; mettre de l'ordre dans ses papiers; serviette bourrée de papiers; papiers d'affaires; lire, signer un papier. Il excellait à écouter aux portes, (...) à fureter des papiers intimes ou à se servir de fausses clefs, pour voir le dedans d'un secrétaire (BOURGES, Crépusc. dieux, 1884, p.56). Le coureur tend un papier griffonné au crayon; mais pendant que l'officier essaye de lire, le coureur lui débite, en haletant toujours, le contenu du message qu'il s'est gravé dans la tête pour le cas où il perdrait le papier (ROMAINS, Hommes bonne vol., 1938, p.39).
Loc. verb. fig.
Être dans les (petits) papiers de qqn. Être bien vu de quelqu'un. Au reste elle m'a beaucoup demandé de vos nouvelles, il faut que vous soyez terriblement bien dans ses papiers (Mme DE CHATEAUBR., Mém. et lettres, 1847, p.207).
Vieilli. Rayer qqn/qqc. de ses papiers. Ne plus faire cas de, ne plus compter sur quelqu'un/quelque chose. Conserver la Chambre est absurde et odieux, maintenir les lois d'exception est folie: je ne sais pas marcher au rebours du bon sens. Rayez-moi donc de vos papiers (CHATEAUBR., Corresp., 1821, p.157).
En partic.
Jeu des petits papiers. Jeu dans lequel chacun des joueurs écrit un élément de phrase sur une feuille de papier qu'il passe à son voisin après l'avoir pliée de façon à ce que ce dernier ignore ce qu'il a écrit avant de lire. La vicomtesse d'Oilly aimait les jeux d'esprit, bien qu'elle n'en eût guère. On jouait chez elle (...) aux petits papiers, comme c'est encore la mode aujourd'hui (FEUILLET, Camors, 1867, p.239).
Vx, le plus souvent au plur. Gazette, journal. Papier-nouvelles; papier public et, p.ell., papier. Il serait, sans doute, à désirer que l'Assemblée nationale proscrivît tous ces papiers-nouvelles qui circulent dans les rues de Paris (Le Dénonciateur national, 5 août 1789, n° 3, in WALTER, La Révolution fr. vue par ses journaux, p.38 ds QUEM. DDL t.11). Les versions des nouvellistes et des papiers publics ne sont pas moins diverses sur ce qui se passe à Coblentz et dans les autres lieux (ROBESP., Discours, Guerre, t.8, 1792, p.133). Tout retentit de ma gloire, les papiers de Lyon etc., les sociétés, les préfectures; on annonce mon passage comme celui d'un personnage important (CHATEAUBR., op.cit., 1802, p.72).
Vieilli, pop. Papier à douleur, papier-douleur. Papier (traite, facture, quittance) présenté au paiement ou à propos d'un paiement. La Comédie humaine est souvent le drame de la vie pénible —le pain ou l'habit arraché à crédit ou payé à terme, avec les fièvres de la faim et les frissons du papier-douleur (VALLÈS, L'Insurgé, 1886, p.41 ds QUEM. DDL t.1).
2. En partic.
a) Pièce ou document administratif. Entre Volat et Tancogne existait un pacte tacite, aux clauses multiples et délicates, de ces clauses qu'un papier officiel ne pourra jamais mentionner (GENEVOIX, Raboliot, 1925, p.87).
Spécialement
DR. CIVIL. Papiers domestiques, papiers de famille. Papiers privés possédés par une famille, pouvant servir de commencement de preuve par écrit. Dépouiller les archives des particuliers, les papiers de famille, les actes privés, les journaux du temps, les arrêtés municipaux (VALÉRY, Variété IV, 1938, p.131).
DR. FISCAL
Papier timbré ou, moins usuel, papier marqué. ,,Papier mis en vente par l'Administration de l'enregistrement, marqué d'un timbre officiel (...) et dont l'emploi est obligatoire pour certains actes`` (BARR. 1974). L'engagement, sur papier timbré avec signature légalisée, de servir pendant dix ans dans l'enseignement public (Encyclop. éduc., 1960, p.382).
Papier libre ou, moins usuel, papier mort (p.oppos. à papier timbré). Papier qui ne porte pas de timbre fiscal. Tout amateur voulant pratiquer ce sport [la chasse sous-marine] doit en faire la déclaration sur papier libre au service de l'Inscription maritime (BOYER, Pêches mar., 1967, p.22).
Au plur. Papiers (d'identité). Papiers qui établissent l'identité de quelqu'un. Se procurer de faux papiers; avoir ses papiers en règle; perdre [tous] ses papiers. L'adjudant remit Fabrice à un officier de gendarmerie qui, d'un air grave, lui demanda ses papiers. Fabrice montra son passeport qui le qualifiait marchand de baromètres «portant sa marchandise» (STENDHAL, Chartreuse, 1839, p.31):
3. J'ai à peine mangé ma mortadelle qu'ils se lèvent, viennent à moi et me disent: Monsieur, vous avez mangé de la mortadelle, vos papiers d'identité, s'il vous plaît! Je leur ai donc dit que quand on avait dîné comme ils avaient dîné, on ne venait pas chicaner les gens pour une rondelle de saucisson et leur demander les papiers d'identité... J'ai refusé de montrer mes papiers...
TRIOLET, Prem. accroc, 1945, p.33.
En partic. Papiers de bord. Documents réglementaires que le commandant d'un navire ou d'un avion doit avoir à son bord. Tout navire est ainsi astreint d'avoir, parmi ses papiers de bord une «patente de santé» délivrée par l'autorité sanitaire (M. BENOIST, PETTIER, Transp. mar., 1961, p.200). Papiers de bord, du véhicule ou, p.ell., papiers. Ensemble des documents justificatifs de la situation régulière d'un véhicule automobile et de son conducteur.
Papiers militaires. Livret militaire et diverses pièces attestant la situation militaire de quelqu'un. (Dict. XXes.).
b) COMM., FIN.
Papier bancable.
Papier-monnaie. P. ell. L'or ne leur suffit plus [aux filles], il leur faut du papier maintenant (POULOT, Sublime, 1872, p.116). V. filigrane ex. 2.
Papier commercial, de commerce. Effet de commerce qui peut être remis à l'escompte d'une banque. Je reçus enfin de Francfort tout l'argent de la lettre de change (...). Ceci me parut valoir beaucoup mieux que le papier de commerce qui m'avait été adressé d'abord (NERVAL, Lorely, 1852, p.41). Papier financier, papier de crédit. Effet financier représentatif d'un crédit divers (d'apr. Gestion fin. 1979). Papier court, long. ,,Le papier est qualifié de court lorsque son échéance est prochaine, et long si celle-ci est éloignée`` (BAUDHUIN 1968).
c) Arg. des courses hippiques. Liste des chances théoriques, établie d'après leurs performances, que peuvent avoir les concurrents d'une épreuve. Sur le papier, P. est indiqué comme vainqueur du Derby (Le Sport, 10 janv. 1872 ds PETIOT 1982).
Faire, jouer le papier. ,,Choisir les chevaux sur lesquels on misera, d'après la lecture du journal spécialisé`` (GALTIER-BOISSIÈRE, DEVAUX, Dict. arg., 1939, p.77).
d) JOURN. Article rédigé pour un journal. Il avait fini son papier et gagné sa consommation (VALLÈS, Réfract., 1865, p.139). On entendait, au premier lointain, les coups de battoir d'Adolphe, tirant une morasse du papier tant attendu (L. DAUDET, Vers le roi, 1920, p.191). V. papelard2 ex. de Beauvoir:
4. L'écrivain a le temps de revoir minutieusement ce qu'il a écrit, de corriger, de modifier, de polir, de fignoler ses phrases, de soigner son style. Tout cela est refusé au journaliste qui, tout en respectant les règles ordinaires de la composition littéraire, est contraint de rédiger ses papiers [it. ds le texte] dans des conditions peu confortables.
COSTON, A.B.C. journ., 1952, p.93.
REM. -papier, élém. de compos. V. coupe-papier, gratte-papier.
Prononc. et Orth.: [papje]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist.I. Fin XIIIe-déb. XIVes. [ms.] (Arch. Douai CC156 ds J. FINOT, Relations commerciales entre la France et la Flandre, 1894, p.172: Queval qui porte papiers); 1355, 25 nov. Troyes moulin à paupier (Arch. départ. Aube G 3423, Bail du moulin le roi); 1387, 19 sept. Ville-sur-Saulx, Meuse molin a papier (Arch. départ. Meurthe-et-Moselle, B 343, fol. CCCXXVII); 1451 Lorraine pauppier (Hist. de Metz, V, 571 dsGDF.); spéc. A. Papiers de différentes qualités, destinés à différents usages a) XIVes. utilisé en méd. (Moamin et Ghatrif, III, 8, 5 ds T.-L.); 1543 papier painct (Inventaire du mobilier de Guy de Mergey ds HAVARD t.4, col. 70); 1575 papier collé (PARÉ, OEuvres, éd. J. Malgaigne, XVII, t.2, p.610b); 1671 papier blanc (POMEY); 1680 papier bleu, gris (RICH.); 1760 papier verré (L'Avant-coureur, 10 nov., p.687-688 d'apr. HAVARD t.4, col. 60); 1850 papier filtre (DORVAULT, L'Officine, p.790 ds QUEM. DDL t.12); b) 1695 papier mâché (Ch. G. LE CLERC, Chirurg. complette, 265 d'apr. FEW t.7, p.590a [cette réf. paraît erronée]); 1775 (Mercure, août d'apr. HAVARD t.4, col. 60); 1773 fig. des organes de papier mâché (VOLTAIRE, v. mâcher1 A 1 b); 1835 visage de papier mâché (Ac.). B. Papiers apprêtés pour différents usages ca 1508 papier d'acquit (Comptes de la construction du château de Gaillon, éd. A. Deville, p.499); 1674 papier marqué (SÉVIGNÉ, Lettres, 29 janv., éd. Gérard-Gailly, t.1, p.699); 1675 papier timbré (ID., ibid., 30 oct., p.895); 1680 papier réglé (RICH.); 1690 papier de musique (FUR.). II. Support de l'écriture. A. Feuille, ensemble de feuilles sur lesquels figure un texte écrit; document écrit 1. a) 1308 pappier a registrer les lettres (doc. ds GDF. Compl.); ca 1393 papier de la despense (Ménagier, II, 58 ds T.-L.); 1552 papiers brouillars «minutes, brouillons» (EST., s.v. Adversus - adversaria); 1573 papiers terriers (G. PARADIN, Hist. de Lyon, p.107 ds GDF. Compl.); b) loc. ) 1585 estre en le papier de (qqn) «avoir des comptes à lui rendre, un mauvais traitement à lui faire subir» (DU FAIL, Contes d'Eutrapel, éd. J.M. Guichard, § 15, p.225); av. 1755 être mal sur les papiers de (qqn) (SAINT-SIMON, Mém., éd. G. Truc, t.5, p.332); 1798 être bien (ou mal) dans les papiers de (qqn) (Ac.); ) 1587 en papier «par écrit» [opposé à «dans les faits»] (LANOUE, /4 ds LITTRÉ); av. 1592 en papier opposé à en effet (CASTELNAU, 115, ibid.); ) 1640 rayez cela de vos papiers (OUDIN, Curiositez, s.v. rayer); 1654 rayer quelqu'un de ses papiers (SCARRON, Virgile travesti, éd. Paris, 1858, IV, 170a ds RICHARDSON); 2. a) fin XIVes. «engagement par écrit» (E. DESCHAMPS, VII, 236, 103 ds T.-L.); 1670 papier volant «papier qui ne fait pas foi en justice» (PATRU, Plaidoyers, 3 ds LITTRÉ); b) 1748 «effet (lettre de change, billet au porteur...) représentant de l'argent comptant» (MONTESQUIEU, Esprit des Lois ds OEuvres, éd. R. Caillois, p.651: Comme l'argent est le signe des valeurs des marchandises, le papier est un signe de la valeur de l'argent); 3. a) 1736 plur. «tous les documents qu'un navire doit avoir à bord» (AUBIN); b) 1835 (Ac.: Ce voyageur n'avait pas ses papiers). B. Ca 1349 «feuille destinée à recevoir un texte écrit» (Dial. fr.-flam., F 3 a ds T.-L.); ca 1393 (Ménagier, II, 250, ibid.: escripre sur le papier); 1606 papier à escrire lettres (NICOT). III. Papyrus (la plante) 1re moitié XIVes. (Gloss. Abavus, Vat. lat. 2748, 4022 ds ROQUES t.1, p.192: papirus: jonc vel papier). Le lat. papyrus «papyrus, roseau d'Égypte» a désigné la plante et deux produits fabriqués avec ses fibres: la feuille mince servant de support à l'écriture (Ier s.) et la mèche de lampe, de cierge (IVes. Hilaire, Paulin de Nole). D'une var. lat. vulg. papilus (THOMAS (A.), Nouv. Essais, p.177), l'a. prov. pabil «mèche» (XIIes. — gasc. Marmande XIVes. [ms.] ds LEVY Prov.; gasc. mod. babit «id.» ds LESPY-RAYM.); d'une autre var. en -ellu, l'a. prov. pabel «id.» (gasc. ca 1230 d'apr. FEW t.7, p.589b; déb. XIVes. [ms.] Petit Thalamusg de Montpellier, éd. Soc. archéol. de Montpellier, 1840, p.273); d'une 3e var. papelius, le judéo-fr. paveil «sorte de jonc» (fin XIes., RASCHI, Gl., éd. A. Darmesteter et D. S. Blondheim, 782) type répandu dans divers dial., v. FEW, loc. cit. Les feuilles de papyrus furent exportées d'Égypte en Europe occidentale jusque vers la fin du VIIIes., l'arrivée des Arabes dans la vallée du Nil au VIes. ayant progressivement mis un terme à leur exportation. Il fut dès lors peu à peu remplacé dans les pays occidentaux par le parchemin presque exclusivement en usage encore au XIIes. À cette époque, papyrus commença à désigner le papier de chiffon, d'orig. chinoise, fabriqué ensuite par les Arabes (après la prise de Samarkand, 751) qui l'introduisirent vers le déb. du XIes. en Espagne et de là en Italie du Nord (lat. médiév. papirus relevé à Gênes en 1163, FEW t.7, p.593b), d'où il se répandit en France où fonctionnent des moulins à papier vers le mil. du XIVes. en Champagne et en Lorraine, v. A. BLUM, La Route du papier, 1946, p.22 et supra I. En Italie du Nord, le mot se présente sous deux formes: le type paper à l'Ouest, issu par voie demi-sav. de paperium (altération de papyrum d'apr. le suff. -erium), relevé au XIIIes. (Statuta mercatorum de Piacenza, p.451 d'apr. FEW t.7, p.595 a, note 32), d'où le fr. papier; le type palpei (parpé) au Centre, issu d'une forme en palp- (d'orig. discutée, peut-être issu de paper devenu parper (n palper, cf. lat. médiév. palperium XIIIes., Statuta [...] Piacenza, p.484, ibid.), d'où le fr. paupier, répandu en Lorraine et en Champagne, supra, cf. aussi le dér. paupelier, v. papetier. L'a. prov. papier (1268 papir Langon ds A. LUCHAIRE, Rec. de textes de l'anc. dial. gasc.,Paris, 1888, gloss.; 1296 bala de papier [papier transporté de Majorque à Marseille] Notules de Giraud Amalric d'apr. A. BLUM, op.cit., p.54; 1343 papier ds Comptes des frères Bonis, éd. E. Forestié, t.1, p.19; 1344 papier lombart e catala, ibid., p.111) est —soit directement venu de l'Italie du Nord [cf. la présence dans le Comtat, au XIVes., de papetiers de Florence, de Turin, de Savoie, v. H. CHOBAUD, Les débuts de l'industr. du papier dans le Comtat Venaissin, 1930, pp.7-27 et 40] —soit empr. au fr. Fréq. abs. littér.: 9812. Fréq. rel. littér.: XIXes.: a) 12129, b) 16083; XXes.: a) 15323, b) 13545. Bbg. BARB. Loan-words 1921, p.258. —DAUZAT Ling. fr. 1946, p.325. —HUMBLEY t.2 1974, p.642. —QUEM. DDL t.1, 6, 11, 12, 13, 14, 16, 17, 20, 21, 25.

papier [papje] n. m.
ÉTYM. XIIIe; adapt. du lat. papyrus, du grec papuros « roseau d'Égypte », utilisé comme le papier qui fut inventé au IIe s. par les Chinois et connu en Europe au XIe s. → Papyrus.
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I (Le, du papier).
1 Matière à base de cellulose, faite de fibres végétales (naturelles ou déjà transformées) réduites en pâte, qu'on étend et sèche pour former une feuille mince. || Du papier. || Une feuille de papier. || Pâte à papier : pâte liquide de matières broyées et épurées dont on fait le papier. || Papier de chiffon (coton, lin, chanvre), le premier en date, devenu depuis le XIXe siècle papier de luxe. || Chiffons à papier. Défilé, drapeau, 2. drille, peille, pilot; bouillie. || Papier de bois (conifères, peuplier, bouleau, hêtre). || Papier de paille (→ Liant, cit. 4), de riz (→ Encre, cit. 4), d'alfa… || Papier fabriqué avec de vieux papiers désencrés.Papier à la main (dit aussi à la forme, à la cuve), fabriqué à la main jusqu'au XIXe siècle et encore de nos jours pour les produits de grand luxe. || Papier à la machine, pour lequel la forme est remplacée par une toile métallique sans fin, ou table. || Préparation de la pâte à papier. Défilage, défibrer, délissage, effilochage, râperie; affleurage, affleurer; blanchiment; élaver; pourrissage, pourrissoir; raffineur. || Machine à papier, qui transforme la pâte en feuilles (et qui comprend : cuve, épurateur, table, caisses aspirantes, presses, cylindres, sécheurs, refroidisseurs, apprêteur, mouilleuse, enrouleuse, calandre). || Fabrication du papier : papeterie. || Traitement de la feuille de papier. Calandrer, calandrage; collage (ou encollage); glacer; lisser, lissoir; moirage; satiner, satinage; apprêt, sandaraque. || Ouvriers du papier. Leveur, lisseur, moireur. || Faux-pli dans le papier. Fronce. || Défaut du papier dû à un amas de matière. Andouille; pâton. || Papier mis en rouleaux, en bobines. Cylindrer. || Feuilles de papier entassées sur la selle. || Papier en feuilles. Main (cit. 112), rame, ramette. || Maculature enveloppant une rame de papier. || Formats du papier. Format.Grain, filigrane du papier. || Papier bouffant (qui a conservé un aspect grenu), granuleux (cit.), sans grain ( Vélin), lisse, glacé, couché (cit. 6), moiré, vergé ( Pontuseau, vergeure). || Papier souple, solide, résistant; papier fin, translucide, transparent; épais, fort.
REM. On réserve le nom de papier aux feuilles dont l'épaisseur n'excède pas 3 dixièmes de millimètre et dont le poids au mètre carré n'est pas supérieur à 150 g ( Carte, carton).
Papier blanc (→ Figurer, cit. 3), de couleur; uni, marbré, ligné, rayé, réglé, quadrillé (→ Feuille, cit. 9). || Réglure d'un papier.
1 Le papier, produit non moins merveilleux que l'impression à laquelle il sert de base, existait depuis longtemps en Chine, quand, par les filières souterraines du commerce, il parvint dans l'Asie-Mineure, où, vers l'an 750, selon quelques traditions, on faisait usage d'un papier de coton broyé et réduit en bouillie. La nécessité de remplacer le parchemin, dont le prix était excessif, fit trouver, par une imitation du papier bombycien (tel fut le nom du papier de coton en Orient), le papier de chiffon, les uns disent à Bâle, en 1170, par des Grecs réfugiés; les autres disent à Padoue, en 1301, par un Italien nommé Pax.
Balzac, Illusions perdues, Pl., t. IV, p. 557.
Feuille (cit. 6) de papier. || Bande, carré de papier. || Un morceau de papier (→ Crayon, cit. 1; faux, cit. 57). || Papier pour écrire, imprimer, dessiner. || Papier pour emballer, envelopper (→ Charcutier, cit 1; in-octavo, cit. 2). || Papier jauni (→ Manuscrit, cit. 4), usagé. || Papier qu'on plie, froisse, chiffonne, déchire… || Papier qui brûle, flambe (→ Envoler, cit. 2).Cornet de papier (→ Friture, cit. 4).En papier. || Sac, emballage, couverture en papier (→ 1. Marron, cit. 2). || Serviette, nappe, mouchoir en papier. || Vitres, panneaux, décor, paravent de papier (→ Frileux, cit. 4; jouet, cit. 2). || Un chapeau, une ombrelle en papier. || Fleurs (→ Frisotter, cit. 1), lanterne (→ Japonaiserie, cit. 3), guirlandes (cit. 3), confetti, ruban en papier ( Serpentin). || Bigoudi de papier. Papillote. || Allumettes en papier. || Cocotte en papier.Calfeutrer une porte avec du papier. || Monnaie (cit. 7 et 8) de papier ou fiduciaire. ci-dessous Papier-monnaie.Bout de papier (→ Ombrer, cit. 1).
2 Pour éviter d'avoir affaire à la concierge, inscrivez-moi ça sur un bout de papier, que vous glisserez sous mon paillasson, demain dimanche à la première heure.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. II, VI, p. 67.
2.1 (…) la feuille de mauvais papier quadrillé, grisâtre, constellé des paillettes jaunes englobées dans la pâte de bois, scintillantes comme du mica dans les reflets de lumière.
Claude Simon, le Palace, p. 49.
Sortes, qualités de papier. || Papiers de luxe, pour l'impression. Hollande, japon, vélin. || Papier de Chine, papier alfa. || Papier Ingres, Whatman. || Papier torchon. || Papier bible, pelure. || Papier à cigarettes (→ Gaufrer, cit. 2). || Papier de soie (→ Froissement, cit. 6) : papier très fin. || Papier de sûreté, papier des billets de banque.(1675, Mme de Sévigné). Dr., cour. || Papier timbré : papier vergé portant la marque du sceau de l'État et l'indication du prix de la feuille en filigrane, servant à certains actes. || Extrait de naissance sur papier timbré. || Feuille de papier timbré (→ Grosse, cit. 45). || Papier libre, qui n'est pas timbré.(1900). || Papier-calque. || Papier cristal, complètement transparent. || Papier bristol (→ Légende, cit. 6), papier maroquin. || Papier buvard, qui n'a pas subi l'encollage. || Papier brouillard, servant à filtrer les liquides (papier poreux, épais ou plissé).(1850). || Papier-filtre. || Papier joseph. || Papier gris, ou d'emballage : papier grossier non blanchi (→ Lebel, cit. 2). || Papier (de) boucherie. || Papier bulle, papier paille, papier kraft. || Papier crépon. || Papier imperméabilisé, goudronné (cit. 3). || Papier absorbant, à usage domestique. Essuie-tout.
3 Le papier de Hollande (ce nom reste au papier fabriqué tout en chiffon de fil de lin, quoique la Hollande n'en fabrique plus) est légèrement collé; mais il se colle feuille à feuille par une main-d'œuvre qui renchérit le papier.
Balzac, Illusions perdues, Pl., t. IV, p. 944.
4 (…) il avait agi de même pour ses papiers. Las, un beau jour, des chines argentés, des japons nacrés et dorés, des blancs wathmans (sic), des hollandes bis (…) et dégoûté aussi par les papiers fabriqués à la mécanique, il avait commandé des vergés à la forme, spéciaux, dans les vieilles manufactures de Vire où l'on se sert encore des pilons naguère usités pour broyer le chanvre.
Huysmans, À rebours, p. 187.
5 (…) quelquefois elle agitait un étendard de papier jaune craquant, le papier de la boucherie; c'est qu'elle espérait rassembler (…) ses chattes vagabondes, affamées de viande crue (…)
Colette, la Maison de Claudine, p. 12.
6 (…) dans le cartable, quelques flacons, enveloppés de papier de soie, des prospectus, avaient remplacé les cahiers et les livres.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. III, XXIII, p. 315.
Papier sulfurisé, immergé dans une solution d'acide sulfurique, puis de glycérine pour accroître sa résistance. Syn. : papier-parchemin (1868, Littré).
Papier-pierre : carton très dur obtenu par une forte compression de la pâte et utilisé comme pierre lithographique. Papyrographie.
Papier mâché : matière faite de pâte à papier additionnée de colle forte, susceptible d'être moulée et assez résistante. || Objet en papier mâché (→ Ferraille, cit. 3). || Marionnette de papier mâché verni.Fig. et fam. Figure, mine de papier mâché, d'une pâleur maladive.
(1901, in D. D. L.). || Papier hygiénique, utilisé dans les cabinets. || Rouleau, feuilles de papier hygiénique; distributeur de papier hygiénique. Syn. : papier (de) toilette, fam. papier de cabinets, très fam. papier de chiottes, papier-cul, P. Q. [peky].
7 Petite parenthèse scatologique. — J'ai lu, sur un bateau (…) au seuil du « petit endroit » des premières, l'inscription (…) qui me priait en termes courtois de « ne point jeter dans les cabinets autre chose que du papier ».
Colette, Belles saisons, p. 162.
(Le papier servant de support à un produit). || Papier carbone. || Papier collant, gommé, adhésif. || Papier tue-mouches, colle-mouches (vx). || Papier sinapisé. || Papier bakélisé, servant d'isolant électrique.Papier photographique. || Papier sensible (au gélatino-bromure d'argent), pour la photo. || Papier cache. || Papier au ferroprussiate pour la reproduction des plans des épures. Bleu.Papier d'Arménie : papier aromatique imprégné d'une substance qui lui permet de brûler lentement sans flamme en dégageant un parfum caractéristique. Fumigatoire (→ Consumer, cit. 17).Papier-émeri, papier de verre (→ Granit, cit. 2).Papier à tapisser, que l'on colle sur les murs à l'intérieur d'une maison. || Papier peint, papier (même sens). → Garnir, cit. 10. || Bronzage, fonçage, gaufrage du papier peint. || Papier (peint) uni, décoré (par impression). || Papier lisse; velouté ( Tontisse). || Rouleaux, lés, frises, panneaux de papier peint. || Le papier des murs (→ Force, cit. 84). || Papier mal collé, qui gode. || Chambre tendue de papier historié (cit. 2), tapissée d'un papier à fleurs (→ Horizon, cit. 14), à carreaux (→ Lithographie, cit. 3).Papier-tenture.
8 (…) la loge, tapissée d'un papier à sept sous le rouleau, des fleurs roses courant sur un treillage vert.
Zola, Nana, V.
9 Les chambres : de naïfs papiers aux murs s'élancent,
Papiers de fleurs, d'oiseaux, de personnages clairs
Papiers simples et doux, qui répètent leurs airs
Comme une monotone et sensible romance.
Anna de Noailles, l'Ombre des jours, « Attendrissement. »
(1727). Hist. ou didact. || Papier-monnaie : monnaie de papier inconvertible. Billet (de banque), monnaie (supra cit. 7). → Dépréciation, cit. 2; déprécier, cit. 7; dévaluation, cit. 2.
REM. 1. On ne dit plus un papier-monnaie pour un billet.
2. On utilise maintenant, dans les milieux économiques, le mot papier pour désigner la monnaie (→ cit. 11.1).
10 L'opération s'acheva sans grande souffrance, et Achmet remit à l'artiste un papier-monnaie de dix piastres, provenant de la bourse d'Aziyadé.
Loti, Aziyadé, III, LVIII.
11 Il (le Régent) fut conquis par le Système de Law, très séduisant en apparence, et qui consistait à créer une richesse artificielle et des ressources fictives, sans avoir l'air de rien demander à personne, en imprimant du papier-monnaie.
J. Bainville, Hist. de France, XIV, p 263.
11.1 Cependant, la pénurie subsistait partout, non du fait de la baisse de la production, mais de l'abondance de papier.
A. Sauvy, Croissance zéro ?, p. 65.
Papier d'impression, destiné à l'impression des livres. Livre; feuille, feuillet, page. Imprim. || Marger, régler, plier le papier. Plieuse, régleuse; réglage. || Couteau, machine à rogner le papier. Massicot. || Rogneur, rognure de papier. || Édition grand papier, dont les pages ne sont pas rognées. || Bande de papier dans un livre. Onglet. || Papier de journal, papier journal : papier de qualité inférieure et peu encollé. || Papier pour la polycopie. Stencil.
Papier à dessin : papier granulé dit papier Ingres ou Whatman. || Peindre sur toile ou sur papier (→ Homoncule, cit. 2). || Papier millimétré. || Papier autographique. Autographie.Papier à musique.Loc. Réglé comme du papier à musique. Musique (I., 2.).
Papier (d')écolier, pour les cahiers utilisés à l'école (souvent quadrillé ou réglé). Bloc-notes, cahier, carnet, copie. || Papier (de) brouillon. || Papier ministre.(1795, in D. D. L.). || Papier à lettres, pour la correspondance (→ Faute, cit. 9; missive, cit. 2). || Bloc de papier à lettres. || Boîte de papier à lettres contenant tout le nécessaire ( Carte-lettre, enveloppe, lettre). || Papier (à lettres) à en-tête, à vignette, à initiales (→ Glaçure, cit.).
12 Je n'ai pas voulu prendre pour t'écrire mon papier à lettres; il est bordé de noir (…)
Flaubert, Correspondance, 112, 4 août 1846.
13 Cette maison ignorait le papier à lettres; on écrivait sur n'importe quoi. Elle déplia une feuille quadrillée, un papier de lettre anonyme.
Cocteau, les Enfants terribles, p. 181-182.
Dessiner, écrire sur du papier (→ aussi ci-dessous, 3.). || Noter qqch. sur une feuille de papier. || Papier qui glisse, qui accroche. || Papier qui boit (l'encre). || Plume d'oie (cit. 3) grinçant sur le papier.Couper le papier (d'un livre) avec un coupe-papier.
Loc. fam., vx. Sac à papier ! (interj.).
2 Papier d'étain : feuille très mince de métal, servant à envelopper. || Papier doré.Papier d'aluminium, utilisé pour l'emballage ménager (fam : papier alu).
Loc. cour. || Papier d'argent : papier d'étain.
3 Spécialt. || Le papier, support de ce qu'on écrit. || Du papier, des plumes et de l'encre (→ Écrire, cit. 25; gauche, cit. 7). || Jeter (cit. 24), coucher un mot, une phrase sur le papier. Écrire (→ Bouillonner, cit. 6; essentiel, cit. 20). || Idées qui tombent sur le papier (→ Éparpiller, cit. 13). || Faire sans papier une division de quinze chiffres, sans écrire, de tête (→ Hercule, cit. 4).Gratter du papier. Fig. Gratte-papier.
14 Le papier, vous le savez, joue le rôle d'un accumulateur et d'un conducteur; il conduit non seulement d'un homme à un autre, mais d'un temps à un autre, une charge très variable d'authenticité ou de crédibilité.
Valéry, Variété III, p. 222.
(Matérialisant la création littéraire). || Poète, écrivain devant son papier (→ Attraper, cit. 24; exutoire, cit. 1).Noircir du papier (→ Irrévérencieusement, cit.). — ☑ Péj. Barbouiller (cit. 7 et 9), salir du papier. || Barbouilleur (cit. 1 et 4) de papier (→ Farrago, cit.). → Pisseur de copie. || Perdre de l'encre et du papier. — ☑ Loc. prov. Le papier souffre tout. Souffrir, cit. 7.1 et supra.
15 (…) la clarté déserte de ma lampe
Sur le vide papier que la blancheur défend (…)
Mallarmé, Poésies, « Brise marine ».
Loc. Sur le papier : par écrit, en projet. Théoriquement. || Chose qui n'existe (cit. 3) que sur le papier. || C'est beau sur le papier, en fait c'est tout différent, c'est complètement irréalisable.
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II (Un, des papiers).
1 Feuille, morceau de papier ( argot 2. papelard). || Des papiers. || Papier écrit ( Écrit, n. m.), manuscrit, imprimé ( Imprimé, n. m.). || Un papier griffonné (cit. 1) couvert de figures. || Papier peu présentable. Chiffon. || Notez plutôt cela dans votre carnet que sur un papier (→ Feuille volante). || Faire un coin, une corne à un papier. || Papier corné. || « Ce papier n'est autre que la lettre de mon cousin » (→ Déplaire, cit. 12, Beaumarchais). || Jeter des papiers, des vieux papiers (aussi au sens 2). || Jeter des papiers au panier. || Corbeille à papiers. || Papiers gras qui traînent (→ Foule, cit. 7). || Papier beurré pour faire cuire une viande. Papillote.
16 J'aime beaucoup ramasser les marrons, les vieilles loques, surtout les papiers (…) En été au début de l'automne, on trouve dans les jardins des bouts de journaux que le soleil a cuits, secs et cassants comme des feuilles mortes, si jaunes qu'on peut les croire passés à l'acide picrique (…) D'autres tout neufs et même glacés, tout blancs, tout palpitants, sont posés comme des cygnes, mais déjà la terre les englue par en dessous.
Sartre, la Nausée, p. 22.
Arts. || Papiers collés : œuvre picturale composée entièrement ou partiellement de papiers imprimés découpés et collés. || Les papiers collés de Picasso, de Braque. Collage.
17 (…) une synthèse de ces intentions sera réalisée d'une façon plus complète avec ce qu'on appellera les « papiers collés ». La composition sera généralement exécutée sur papier à dessiner et comportera, comme en surimpression, des fragments de papiers imprimés, colorés ou décoratifs. Le découpage de ces papiers, qui seront accompagnés ou surchargés de traits ou de couches de crayon, de gouache ou d'encre, se fera selon les procédés de la peinture proprement dite (…)
M. Raynal, Peinture moderne, Les papiers collés, p. 176.
Techn. || Papier à pierres : feuilles destinées à contenir des pierres précieuses.Loc. || Diamant sur papier, non monté.
Vx. || Papier public, ou papier journal.
18 L'homme qui tient son papier favori ressemble à un cavalier bien en selle. Il est plein d'assurance et même de morgue. Il sait dans quelle colonne gîte la vérité (…)
G. Duhamel, Récits des temps de guerre, IV, « Les moutons ».
Journal. Article manuscrit ou dactylographié destiné à un journal. || Envoyer un papier à son journal. || Je n'ai pas encore lu votre papier.
19 Et c'est un inconnu, qui veut savoir de lui si le roman est périmé, et qui une fois sur deux ne publiera même pas sa réponse, parce que son « papier » est déjà trop long, ou parce qu'on a renoncé entre-temps à cette enquête.
Montherlant, les Lépreuses, I, III.
2 Papier écrit de quelque importance (par son caractère confidentiel, documentaire, administratif, juridique…). Document, note. || Liasse (cit. 1) de papiers. || Serviette pleine de papiers (→ Battre, cit. 69). || Papiers cachés dans le double fond (cit. 2) d'un tiroir. || Fouiller (cit. 26) dans les papiers de son mari. || Classer, ranger des papiers. Carton, cartonnier, chemise, classeur, dossier (→ Classification, cit. 1; joncher, cit. 4). || Papiers en ordre (→ Finasser, cit. 2). || Vieux papiers (→ Bouquiner, cit. 2; document, cit. 1 et 2). Paperasse. || Papiers des archives. || Ensemble de papiers relatifs à une affaire. Dossier. || Réunir les papiers nécessaires à un mariage (→ Ban, cit. 1). Pièce. || Papier qui autorise (cit. 15) à faire qqch., atteste une chose. Billet, carte. || Papiers timbrés (→ Exploit, cit. 8; huissier, cit. 8; et ci-dessus, I., 1. : Du papier timbré). || Signer un papier (→ Mandataire, cit. 2). || Signature d'un papier blanc. Blanc-seing.Papiers diplomatiques (→ Grille, cit. 20; histoire, cit. 7). || Papiers d'un navire ou papiers de bord. Navire. || Papiers militaires : le livret militaire et d'autres pièces concernant la situation militaire d'une personne (→ Munir, cit. 5). || Papiers de famille (cit. 13).
20 (…) il (Javert) s'assit souverainement devant la table, où étaient restées la chandelle et l'écritoire, tira un papier timbré de sa poche et commença son procès-verbal.
Hugo, les Misérables, III, VIII, XXI.
21 (…) il avait signé un papier avec le père Saucisse, par lequel celui-ci, après sa mort, lui cédait un arpent de terre, à la condition qu'il toucherait quinze sous chaque matin, sa vie durant.
Zola, la Terre, IV, IV.
22 (…) il voulait faire, ce soir, un rapide inventaire des papiers intimes qu'avait pu laisser M. Thibault (…)
Martin du Gard, les Thibault, IV, p. 223.
23 Prestement, Alfreda rassembla les papiers épars, et les rangea dans la serviette.
Martin du Gard, les Thibault, t. V, p. 94.
24 (…) il emportait une liasse volumineuse de papiers se rapportant plus ou moins à la succession (…)
Montherlant, les Célibataires, I, IV.
Loc. fam. Être dans les petits papiers de qqn, jouir de sa faveur, de sa considération. — ☑ Rayez cela de vos papiers ! : n'y comptez pas.
25 Moi, votre ami ? Rayez cela de vos papiers.
Molière, le Misanthrope, I, 1.
3 (1835). || Papiers d'identité, et, absolt, papiers : ensemble des papiers d'identité. Identité, état (civil). || La carte d'identité, le passeport, le permis de conduire sont des papiers d'identité (cit. 15). || Vos papiers ! || Mettre ses papiers dans son portefeuille. || Avoir ses papiers en règle. || Individu, enfant (cit. 27) sans papiers. || Perdre ses papiers. || Se faire faire de faux papiers.
26 Un jeune homme s'est présenté à mon bureau vers huit heures, ce matin, dit le secrétaire (…) Il prétendait être déserteur et porteur de faux papiers. Nous avons en effet trouvé sur lui un passeport espagnol grossièrement imité. Il s'est refusé à décliner son identité véritable.
Sartre, le Sursis, p. 321.
27 Tous mes papiers, permis de circulation pendant les émeutes, cartes de séjour pendant les révolutions, médailles d'identité pour la ration des denrées indigènes, entrée gratuite aux Pinacothèques et à tous les Musées germaniques, abonnements spéciaux au gaz et à l'électricité, j'en débarrasse tout à l'heure mon portefeuille.
Giraudoux, Siegfried et le Limousin, p. 299.
4 Fin. Effet (de commerce), titre, valeur (→ Monnaie scripturale). || Papiers de commerce, commerçables (→ Agent, cit. 13), négociables (→ Banque, cit. 2). || Papier commercial; papier financier ou de crédit. || Papier à vue, payable à vue. || Papier court : effet de commerce ayant au plus 15 jours d'échéance. || Trafiquer sur les papiers (→ Boursicoter, cit. 2). || Bon, mauvais papier, signé par des gens solvables ou non solvables. || Papier sur Londres, New York… Devise.
5 (En franc. d'Afrique). || Le papier : les livres; la lecture, l'écriture.Connaître le papier : être instruit, lettré.
DÉR. 2. Papelard, paperasse, paperisé, paperole, papeterie, papetier.
COMP. Coupe-papier, gratte-papier, porte-papier, presse-papiers, sans-papiers, serre-papiers.

Encyclopédie Universelle. 2012.