DROIT
LE DROIT occupe, dans le monde « occidental », une place de premier plan. Il est regardé comme le grand régulateur de la vie sociale. Héritiers de Rousseau et de Montesquieu, Kant et les rédacteurs de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 demandaient au droit d’assurer « la coexistence des libertés »: la vie en commun de citoyens dont la liberté eût été absolue s’ils n’avaient dû reconnaître aux autres des prérogatives identiques aux leurs. Pour eux, cette mission incombait, plus exactement, à la loi. Un législateur, organe de la souveraineté populaire, devait être institué précisément pour poser les normes de la vie sociale.
Le droit, dans cette conception, s’impose à tous sans que des règles venues d’autres sphères (la morale, la politique) puissent interférer avec le jeu des siennes. Son autorité est exclusive. D’autre part, il n’est rien qui puisse lui échapper des relations entre personnes humaines.
À la réflexion, pourtant, on découvre que cette conception a au moins besoin d’être nuancée. Le droit comparé a même permis d’établir qu’elle est rejetée dans diverses communautés.
Loin que l’autorité du droit soit sans partage, il faut avouer que l’on éprouve grande difficulté à préciser la notion de droit ou de règle juridique. Le philosophe et le sociologue du droit hésitent l’un et l’autre sur cette définition. Le droit leur apparaît comme une sorte de nébuleuse. Autour de la loi qui, elle au moins, est, dans le monde occidental une notion relativement claire, ils observent une série de réalités importantes qui, elles aussi, règlent la vie sociale: les mœurs, les coutumes, les usages, la jurisprudence, la doctrine, le contrat avec toutes ses variantes modernes. Il suffit au surplus à un Européen de franchir la Manche pour trouver en Angleterre un droit contenu en principe dans des décisions judiciaires issues de vieilles coutumes et où la loi, quelle que soit son importance de fait, n’est théoriquement qu’une exception.
Une fois le droit défini, comment croire qu’il puisse être totalement indépendant de la morale, alors qu’on admet qu’il est l’instrument de la justice et qu’il doit faire une certaine place à l’équité? Il est vrai que, dans des nations laïques et idéologiquement divisées, il ne doit pas chercher à imposer une morale plutôt qu’une autre. Il ne peut que refléter les règles de la morale admises par l’ensemble des citoyens. Dans d’immenses communautés humaines, en revanche, le droit est lié, non seulement à une morale, mais à une religion. On a pu dire ainsi que, dans le monde musulman, le droit n’était qu’une des faces de la religion. « Celle-ci comporte d’une part une théologie qui fixe les dogmes et précise ce que le musulman doit croire; elle comporte d’autre part une partie, le shar ‘, qui prescrit aux croyants ce qu’ils doivent faire ou ne pas faire » (R. David). S’il est moins dogmatique que l’isl m, l’hindouisme ne voit pas d’une manière très différente la place du droit. Dans la conception juive, également, Dieu est partie aux relations entre les hommes; le devoir à son égard l’emporte sur les droits de ceux-ci. Si, par exemple, un débiteur néglige de payer sa dette, il méconnaît son devoir religieux: le tribunal le contraindra à accomplir celui-ci, et, incidemment, le créancier sera payé. De même, les droits coutumiers africains sont sacralisés. L’élément juridique et l’élément religieux sont indissociables. Ils illustrent encore le mot de G. Scelle: « À l’époque primitive, tout est droit et rien n’est droit. »
Comment croire aussi que le droit puisse être indépendant de la politique? Le philosophe du droit, on le verra, ne tombe pas dans cette illusion. À l’État gendarme, gardien de la « coexistence des libertés », dont on avait pu rêver au XIXe siècle, s’est substitué un État providence, qui proclame le droit de chacun à la santé, à la sécurité, à l’éducation, au travail, et qui considère de son devoir d’aider au développement des personnalités. Le droit, dès lors, concourt à une politique sociale. Mais, à vrai dire, n’est-il pas toujours l’instrument d’une politique, puisque celle-ci est l’art d’aménager la société dans l’intérêt général? Leurs objectifs s’exprimant à peu près dans les mêmes termes, comment pourraient-ils rester séparés? Il y a surtout entre eux, semble-t-il, une différence de niveau. La politique fixe des objectifs, elle gouverne, elle « fait » de la direction. Le droit fait de l’administration quotidienne. Il y aurait quelque candeur à s’indigner de l’affirmation marxiste de la subordination du droit à la politique, même si cette subordination doit comporter des limites. La fonction de social engineering (construction de la société) du droit est depuis longtemps reconnue aux États-Unis. Et quand la Cour suprême, en 1954, déclare que la ségrégation raciale dans l’enseignement est inconstitutionnelle, elle est si consciente d’énoncer une nouvelle politique qu’elle ordonne qu’on s’abstienne de toute mesure d’intégration avant qu’elle-même ait pu élaborer des directives pour la mettre en œuvre.
On voit combien fragiles et contingentes sont les idées, encore largement répandues, de la souveraineté exclusive du droit sur la société.
L’idée que le droit puisse et doive tout régir n’est pas davantage partagée par tous. Dans le monde occidental, certes, l’homme attend de chacun de ses gestes qu’il soit juridiquement « défendu » ou « permis ». Dans de vieilles sociétés, pourtant, le droit, loin de tout régir, est totalement effacé devant les devoirs, les usages et les rites. Le marxisme prévoit son dépérissement.
C’est dans les plus vieilles civilisations, en Chine, au Japon et, plus généralement, en Asie, que le mépris du droit est le plus profond. « Pour des Japonais honnêtes, écrit Y. Noda, le droit apparaît comme une chose indésirable, voire détestable, dont il est souhaitable de s’éloigner autant que possible. » Les obligations morales et sociales, les rites de la vie en société sont suffisamment puissants pour que des règles juridiques apparaissent inutiles et choquantes par leur vulgaire brutalité. Le droit est aveugle, impersonnel, rigide, il ne tient pas compte des circonstances ni des situations; il s’impose de l’extérieur, en quelque sorte. Le tribunal donnerait raison à l’un des plaideurs et tort à l’autre, alors que l’un et l’autre devront continuer à vivre dans la même communauté. Des sociétés qui aspirent à la sagesse individuelle et à l’harmonie universelle rejettent droit et tribunaux: « L’amitié, reconnaissait Domat, n’est pas régie par les lois civiles. » La conception de ces sociétés peut nous sembler angélique. Il est vrai d’ailleurs que les transformations de l’époque contemporaine contraignent ces sociétés à faire une certaine place au droit. Mais si l’on constate à quel point l’idée, issue de la Déclaration de 1789, selon laquelle « tout ce qui n’est pas défendu est permis » a banni des sociétés occidentales toute considération de morale sociale, toute idée de juste prix ou de bénéfice raisonnable, et si l’on pense à toute la réglementation économique et sociale qui pallie mal cette carence, comment ne pas sentir, avec la pensée orientale, qu’une société obligée de se fonder sur le droit est une société barbare?
On comprend alors, sans même reprendre toute son analyse de l’évolution de l’homme et de la société, que le marxisme ait pu espérer le dépérissement du droit. Pour Lénine, les pressions horizontales devaient remplacer les pressions verticales: « Les hommes s’habitueront graduellement à l’observation spontanée des règles de la vie civile sans contrainte, sans prévention, sans hiérarchie »; de toute manière, « le peuple lui-même sera armé pour réprimer les excès aussi naturellement, aussi simplement qu’un groupe de citoyens règle un litige ou défend une femme offensée ». Le plus curieux est que cette vision fut reprise par une loi soviétique de 1919: « Le prolétariat détruira l’État en tant qu’organe de coercition et le droit comme fonction de l’État », avant que Stuchka n’écrive: « Le communisme signifie non la victoire du droit socialiste, mais la victoire du socialisme sur le droit: l’abolition des classes, avec leurs intérêts antagonistes, fera automatiquement disparaître le droit », et que Pachoukanis, développant les écrits d’Engels sur le dépérissement de l’État, ne donne en 1924 la théorie du dépérissement du droit.
Cependant Pachoukanis mourut fusillé sur l’ordre de Staline, qui trouvait prématuré l’exposé de ses vues, et sa réhabilitation ultérieure ne signifia en rien une reprise de ses thèses: l’Union soviétique s’accommodait désormais fort bien des réalités de l’ordre juridique, traduites par les concepts de droit et de légalité socialistes, instruments de la construction d’une société nouvelle et garants tout relatifs des libertés individuelles. Bien avant l’effondrement du régime, l’idée que le droit doive un jour disparaître n’était plus qu’une hypothèse qui suscitait le doute ou les nuances.
Il faut essayer de se placer au-dessus des idées reçues dans tel continent ou dans tel autre. On admettra sans doute alors que le droit n’est qu’une des techniques de l’organisation de la société, qu’il n’est ni exclusif ni omnipotent. Les forces économiques et politiques et les aspirations vers plus de justice influent sur le droit et, à côté de lui, modèlent la société. On peut même regretter que la morale sociale, qui fait appel à la conscience et non à la contrainte, ne joue pas, auprès de lui, un rôle plus important.
Il faut pourtant « croire » au droit. Son rôle n’est pas seulement d’assurer l’ordre et la paix, mais de promouvoir plus de justice dans une société constamment corrompue par l’égoïsme individuel et collectif des hommes et ainsi, en définitive, de contribuer à promouvoir l’homme lui-même. Il est l’instrument le plus direct et efficace pour modifier les structures et les institutions. Il change les psychologies mêmes: qui songerait aujourd’hui à défendre l’esclavage ou la ségrégation raciale, à s’indigner des congés payés ou à s’inquiéter de l’information des actionnaires et de la participation du personnel? Il est créateur d’avenir.
Au surplus, on a envisagé jusqu’ici le droit dans le cadre d’une communauté nationale. Or, les diverses nations ont, comme les citoyens de Rousseau, à vivre ensemble. À l’échelle du monde, on observe à nouveau l’insuffisance mais aussi la nécessité du droit international public. Par les règles qu’il pose et les institutions dont il assure le fonctionnement, il contribue à réduire le nombre des affrontements armés. Mais, parce que sa force contraignante est moindre que dans le cadre national, on voit plus clairement qu’il ne peut suppléer aux consciences. Et pourtant, le problème, là encore, n’est pas seulement d’assurer la coexistence des libertés, mais aussi, dans un monde où les deux tiers des hommes vivent dans un état de misère plus ou moins tragique, le développement des personnalités. C’est dire la carrière qui s’ouvrira au droit lorsque l’homme aura pris une conscience planétaire de sa solidarité.
1. droit, droite [ drwa, drwat ] adj. et adv.
• XIIe; dreit 1080; lat. directus
I ♦ Adj.
A ♦ (Concret)
1 ♦ Qui est sans déviation, d'un bout à l'autre. Barre, tige droite. Avoir le corps droit. Se tenir droit. « Son nez était droit et mince » ( Green). Loc. Être droit comme un i, un piquet, etc. ⇒ raide. « un palmier gigantesque, droit comme un mât » (Fromentin).
2 ♦ Dont la direction est constante; qui va d'un point à un autre par le chemin le plus court. ⇒ 1. direct, rectiligne. Ligne, voie droite. « une seule allée large, droite, bordée d'arbres » (Chardonne). Le droit fil d'une étoffe. — En droite ligne. Il y a deux kilomètres en ligne droite (cf. À vol d'oiseau). Fig. « Un lit de bois clair [...] venait en droite ligne d'un grand magasin de Paris » (Green). ⇒ directement. — Fig. Le droit chemin, la voie droite : le chemin de l'honnêteté, de la vertu. Ramener qqn dans le droit chemin.
♢ Tennis Coup droit.
♢ Géom. Ligne droite. ⇒ droite.
3 ♦ Perpendiculaire à l'horizontale. ⇒ vertical. Ce mur, ce pylône n'est pas droit, il penche. Tenez la soupière bien droite. Remettre droit ce qui est tombé. ⇒ debout; redresser. Écriture droite (opposé à penché) .
♢ Spécialt Dont les bords sont verticaux. Gilet droit, veston droit (opposé à croisé) . — (En parlant des vêtements féminins) Manteau droit, non cintré ou sans ampleur. Jupe droite, sans ampleur.
♢ (1828) Piano droit.
♢ (1864) Anat. Muscle droit : muscle dont les fibres sont verticales dans la station debout. N. m. Droits antérieurs de la tête; droit latéral de la tête. Grand droit : muscle de la paroi antérieure de l'abdomen.
4 ♦ Angle droit, formé par deux demi-droites perpendiculaires (opposé à aigu, obtus). L'angle droit mesure 90 degrés ou π /2 radian. Tracer un angle droit avec une équerre, un té. Ces deux rues sont à angle droit. ⇒ perpendiculaire. N. m. La somme des angles d'un triangle est égale à deux droits, à 180°. — Géom. Section droite d'un cylindre, par un plan perpendiculaire aux génératrices. Cône, cylindre, hélicoïde, prisme droit, dont l'axe est orthogonal à la base. Astron. Ascension droite d'un astre.
♢ AU DROIT DE (qqch.) :à angle droit.
B ♦ (Abstrait)
1 ♦ Qui ne s'écarte pas d'une règle (morale). Un homme droit, simple et droit. ⇒ équitable, honnête, juste, probe; 2. franc, loyal, sincère. « elle aimait les choses honnêtes, ses penchants étaient droits et vertueux » (Rousseau).
2 ♦ Vieilli Qui suit un raisonnement correct. La droite raison. Une pensée droite, un jugement droit. ⇒ exact, sensé.
II ♦ Adv.
1 ♦ En ligne droite. Viser, couper droit. Papier réglé pour écrire droit. « il allait droit devant lui comme ces voies romaines qui traversent sans se détourner les précipices et les montagnes » (Chateaubriand ). C'est droit devant vous, tout droit.
2 ♦ Fig. Par la voie la plus courte, la plus rapide. ⇒ directement. Aller droit au but. Ça me va droit au cœur, je suis touché.
♢ Marcher droit : bien se conduire, être obéissant. « je pars en guerre et je tuerai tout le monde. Gare à qui ne marchera pas droit ! » (Jarry).
⊗ CONTR. Arqué, brisé, cambré, coudé, courbé, sinueux, voûté. Détourné, indirect. Couché, penché, oblique, renversé; horizontal. Déloyal, 1. faux, fourbe, hypocrite, trompeur. 1. Faux, illogique, insensé.
droit 2. droit, droite [ drwa, drwat ] adj. et n. m.
• XVe; remplace l'a. fr. destre → dextre; de 1. droit
I ♦ Adj. Qui est du côté opposé à celui du cœur de l'observateur (opposé à gauche).⇒ dextre; dextr(o)-. Le côté droit (⇒ droite) . La main, la jambe droite. L'aile droite, la partie droite d'un bâtiment (considérées en se plaçant le dos à la façade). Le côté droit d'un navire (en regardant vers l'avant). ⇒ tribord. La rive droite d'une rivière (dans le sens du courant).— À main droite : du côté droit; à droite. — Être le bras droit de qqn.
♢ Centre droit : dans une assemblée politique, partie du centre qui siège près de la droite (⇒ droite) .
II ♦ N. m. Le poing droit, à la boxe. Direct, crochet du droit. — Coup porté par ce poing. Un droit terrible. ⇒ droite (I, 4o).
⊗ CONTR. Gauche. Revers.
droit 3. droit [ drwa ] n. m.
• XIIe; dreit 842; bas lat. directum, de l'adj. → 1. droit
♦ Ce qui est conforme à une règle.
I ♦ UN DROIT, DES DROITS. Ce qui est exigible, ce qui est permis, dans une collectivité humaine.
1 ♦ Ce qui est permis par conformité à une règle morale, sociale. Droits naturels. « Non seulement tout homme a des droits, mais tout être a des droits » (Renan). Priver qqn de ses droits. Faire valoir ses droits. Revendiquer, soutenir son droit. Cela lui confère le droit; il a acquis le droit de... Renoncer à ses droits. Céder ses droits.
♢ DROITS DE L'HOMME, définis par la Constituante de 1789 et considérés comme droits naturels. La Déclaration des droits de l'homme précède la Constitution du 3 septembre 1791. Violation des droits de l'homme.
♢ Le droit de..., à... « La liberté est le droit de faire tout ce que les lois permettent » (Montesquieu). Le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. Le droit à la parole, à la différence. — AVOIR LE DROIT DE (et l'inf.). ⇒ possibilité, 2. pouvoir, qualité; autorisation, permission. Il a le droit d'en parler (cf. Il a voix au chapitre). Vous n'avez pas le droit de dire cela (cf. Vous êtes mal venu à...). « Et toi tu n'as pas le droit de me juger, puisque tu n'iras pas te battre » (Sartre). — (Avec subst.) Vous avez droit à des excuses. Il n'y a pas droit. — Fam. Avoir droit à (qqch. de fâcheux) :devoir subir, ne pouvoir éviter. Il a eu droit à des reproches. Si la guerre éclate, on y a droit ! (cf. Ne pas y couper).
♢ Avoir un droit sur (qqn, qqch.). « Il a sur nous un droit et de mort et de vie » (P. Corneille).
♢ Être en droit de... : avoir le droit de... « Pour être en droit de lui dire mes sentiments » (Mme de Sévigné). — De quel droit ? en vertu de quel droit, de quelle raison, de quelle autorité ? Être dans son (bon) droit.
2 ♦ Ce qui est exigible ou permis par conformité à une règle précise, formulée (loi, règlement). ⇒ faculté, habilité, prérogative, privilège. Droit exclusif. ⇒ monopole. Titulaire d'un droit. Droits acquis (attribués en vertu d'une règle antérieure ou d'un usage) et droits naturels. Droits civiques, droits du citoyen, droits politiques : électorat, éligibilité, etc. — Droits civils, privés. Droits réels, opposables à tous et permettant d'exercer un pouvoir sur un bien (propriété, usufruit, usage, etc.). Droits de créance ou droits personnels, donnant à une personne (créancier) le droit d'exiger d'une autre (débiteur) une prestation. Auteur, ayant cause d'un droit. Défendre ses droits devant la justice (⇒ procédure, procès) . Droit de visite. — Procéd. Les droits de la défense. Droit de réponse. — Dr. internat. Droit d'asile. — Droit du sol, droit du sang. — Droit de pacage, de chasse, de pêche, de stationnement. — Droit de propriété. Droit de jouissance légale. Droit d'usage et d'habitation. — Droit de grâce. Droit de veto. Droit de grève.
♢ Droit d'auteur (⇒ copyright) , droit de l'inventeur : droit exclusif d'exploitation d'une œuvre par son auteur, d'une invention par son inventeur. Droits d'impression, droits de reproduction réservés. Tous droits réservés.
♢ Hist. Droits féodaux. ⇒ féodalité. Droit de cuissage. Droit d'aînesse. — Droit de cité.
3 ♦ Par ext. Ce qui donne une autorité morale considérée comme légitime. ⇒ prérogative, privilège, titre. Avoir, acquérir des droits à la reconnaissance de qqn. « Les droits de la raison » (Molière).
4 ♦ Somme d'argent, redevance qu'une personne, une collectivité est en mesure d'exiger de qqn. ⇒ accise, contribution, vx imposition, impôt, redevance, taxe. Acquitter un droit. Droit d'entrée à un spectacle, à une réunion. Droit d'inscription.
♢ Hist. Droits domaniaux ou régaliens, perçus par le roi. Droits seigneuriaux. Droits en nature.
♢ Mod. Contribution indirecte. Droit progressif, dont le taux s'accroît à mesure que la valeur à laquelle il s'applique augmente. Droit de circulation (⇒ acquit-à-caution, congé, laissez-passer, passavant) , de consommation, sur les boissons. Droits de douane. Absolt Payer les droits à l'importation. — Droit de timbre. Droit d'entrée, de sortie. Droit spécifique, établi d'après le poids. Marchandises exemptées de droits. Droits de navigation : taxes accessoires des douanes, perçues sur le corps des navires. — Droits d'enregistrement. Droit d'acte; droit de mutation : droits perçus l'un à raison de la rédaction ou de l'usage d'un acte, l'autre à raison du fait juridique qu'il concerne. — Droits de succession.
♢ (1968) Fin. Droit de tirage spécial (D. T. S.) : monnaie de compte du Fonds monétaire international, servant d'instrument de crédit pour les pays membres.
♢ Par ext. Somme d'argent payée à une personne. ⇒ rétribution, salaire. Droit de présence. — DROITS D'AUTEUR : profits pécuniaires de l'auteur. Ellipt « Quant à ses romans mondains, qu'il produisait d'une veine avare, ils ne lui rapportaient que des droits insignifiants » (Romains). — Allocation de fin de droits : dernière somme allouée au chômeur de longue durée, ayant épuisé ses droits à l'allocation de base. N. m. Les fin(s) de droits : chômeurs dont les droits d'allocation touchent à leur fin.
II ♦
A ♦ LE DROIT (droits subjectifs).
1 ♦ Ce qui constitue le fondement des droits de l'homme vivant en société (cf. ci-dessus I), des règles régissant les rapports humains. ⇒ légalité, légitimité; justice, morale... Le concept, l'idée de Droit. Opposer le droit au fait, au réel. Rapports du Droit et de la Morale, du Droit et de la Force. PROV. « La force prime le droit »; « Force passe droit ». Avoir le droit pour soi.
♢ Vieilli Faire droit à : rendre justice (au pr. et au fig.). Faire droit à une demande. ⇒ satisfaire. Avant dire droit : avant jugement définitif.
♢ Loc. adv. À BON DROIT : d'une façon juste et légitime; selon toute raison (cf. À juste titre).
♢ DE DROIT : légitime. « La défense est de droit, la vengeance est infâme » (M.-J. Chénier). Un État de droit.
2 ♦ Par ext. Pouvoir de faire ce que l'on veut. Le droit du plus fort.
B ♦ LE DROIT (ou droit objectif). Ensemble des règles qui régissent les rapports des hommes entre eux. ⇒ juridique.
1 ♦ Ensemble des règles considérées comme existant en dehors de toute formulation. Le droit naturel : principes immuables fondés sur l'équité et le bon sens, et supérieurs à la loi. Droit universel, moral.
♢ DROIT DIVIN : doctrine de la souveraineté, forgée au XVII e s., et d'après laquelle le roi est directement investi par Dieu. Monarchie de droit divin.
2 ♦ Ensemble des règles juridiques en vigueur dans un État (droit positif). Droit français, anglais, allemand, soviétique. Droit romain. Droit écrit : règles juridiques établies par les autorités investies du pouvoir législatif ou réglementaire et constatées par des textes officiels. Droit coutumier. — DROIT COMMUN : règles générales applicables à toutes les situations, lorsqu'il n'y a aucune dérogation particulière. Délit de droit commun. Les prisonniers de droit commun, ou ellipt les droit commun (opposé à prisonnier politique) .
♢ Loc. adv. DE DROIT : légal, prévu par les textes et qui ne peut donner lieu à une discussion. Certificat remis à l'intéressé pour valoir ce que de droit. — DE PLEIN DROIT : sans qu'il soit nécessaire de manifester de volonté, d'accomplir de formalité. — QUI DE DROIT : personne ayant un droit sur..., ayant habilité à... Adressez-vous à qui de droit, à la personne qui a le droit, le pouvoir de décider.
♢ EN DROIT. ⇒ juridiquement. Responsable en droit.
♢ Parties du droit. Droit privé, qui régit les actes accomplis par les particuliers en leur propre nom pour leurs intérêts individuels. Droit civil : la branche essentielle du droit privé traitant des personnes (capacité, famille, mariage), des biens, des successions, des obligations... — Droit commercial : partie du droit privé concernant les actes de commerce et les commerçants. — Droit maritime. — Droit international privé, déterminant les conditions de la nationalité, la situation des étrangers et les conflits de loi (⇒ exequatur) . — Droit canonique ou droit canon, réglant l'organisation de l'Église catholique. — Droit public. — Droit constitutionnel : la partie du droit public interne relative à l'organisation de l'État, à ses règles fondamentales, son mode de gouvernement, l'attribution des pouvoirs politiques, leurs limites et leurs rapports (⇒ 2. pouvoir, souveraineté; constitution, 1. régime) . — Droit administratif : ensemble des règles relatives au fonctionnement du pouvoir exécutif à tous ses degrés, à l'organisation des services publics et à leurs rapports avec les administrés. — Droit financier ou législation financière : ensemble des règles relatives aux finances publiques. — Droit international public, réglant les rapports d'État à État, les traités, la guerre, les relations diplomatiques (⇒ diplomatie) . — Droit pénal ou Droit criminel : ensemble des lois qui réglementent l'exercice de la répression par l'État, en déterminant les infractions punissables, la procédure permettant de les constater, de les poursuivre et de les juger, les peines applicables et les juridictions compétentes pour les prononcer. — Droit médical, déterminant les obligations et les droits du médecin à l'égard des malades, des membres de la profession médicale et de la société en matière de médecine. — Droit aérien. — Droit spatial, de l'espace. — Droit social, régissant les contrats de travail et les rapports des employeurs avec les salariés.
C ♦ La science juridique. Étudiant en droit. Faire son droit. Professeur de droit. ⇒ juriste. Faculté de droit. Cours de droit. Études de droit. Capacité en droit; licence de, en droit.
● droit adverbe En ligne droite : Tirer droit. Verticalement : Écrire droit. ● droit nom masculin En géométrie, phase positive dont la période est 4. (Abréviation : D.) Pied ou poing droit. Synonyme de avers et de droite. ● droit nom masculin (bas latin directum) Ensemble des règles qui régissent les rapports des membres d'une même société ; légalité. Science qui a pour objet l'étude de ces règles. Faculté, légalement ou réglementairement reconnue à quelqu'un par une autorité publique, d'agir de telle ou telle façon, de jouir de tel ou tel avantage : À quel âge a-t-on le droit de vote ? Possibilité morale qu'on a d'agir de telle ou telle manière : Vous n'avez pas le droit de parler ainsi. Possibilité, permission donnée à quelqu'un, par une autorité quelconque, de faire quelque chose ; autorisation : Elle a le droit de sortir ce soir : ses parents le permettent. Ce qui confère un pouvoir, une prérogative, un titre, une autorité considérés comme légitimes : Défendre ses droits. Impôt, taxe : Payer des droits sur les alcools. ● droit (difficultés) adverbe Accord Droit, adverbe, est invariable : ils vont droit au but ; la fumée montait droit vers le ciel. Recommandation Ne pas confondre droit, adverbe, avec droit, adjectif, qui s'accorde : les enfants, tenez-vous droits ! ● droit (expressions) adverbe Aller droit à, en venir sans détour, directement à quelque chose : Il est allé droit à l'essentiel ; aboutir inéluctablement à quelque chose (de mauvais) : Avec une pareille gestion, il va droit à la faillite. Marcher droit, se conduire conformément à la discipline imposée. ● droit (expressions) nom masculin Au droit de, au niveau de, en face de, à la perpendiculaire de quelque chose. ● droit (synonymes) nom masculin
Synonymes :
- avers
- droite
Contraires :
- envers
- revers
● droit (citations)
nom masculin
(bas latin directum)
François Andrieux
Strasbourg 1759-Paris 1833
[…] si nous n'avions pas des juges à Berlin.
Le Meunier sans souci
Commentaire
Ces mots sont cités pour opposer le bon droit à la force : un meunier résistait au roi de Prusse (Frédéric II) qui voulait agrandir son parc au détriment des biens du meunier : « Je suis le maître (dit le roi). — Vous ? de prendre mon moulin ? — Oui, si nous n'avions pas des juges à Berlin. »
Nicolas Boileau, dit Boileau-Despréaux
Paris 1636-Paris 1711
C'est un droit qu'à la porte on achète en entrant.
L'Art poétique
le droit de siffler au théâtre
François René, vicomte de Chateaubriand
Saint-Malo 1768-Paris 1848
C'est le devoir qui crée le droit et non le droit qui crée le devoir.
Mémoires d'outre-tombe
Paul Claudel
Villeneuve-sur-Fère, Aisne, 1868-Paris 1955
Où est le droit il n'y a plus d'affection.
L'Otage, I, 2, Coûfontaine
Gallimard
Auguste Comte
Montpellier 1798-Paris 1857
Nul ne possède d'autre droit que celui de toujours faire son devoir.
Système de politique positive
Paul-Louis Courier
Paris 1772-Véretz 1825
Ce manant devinait les droits de l'homme. Il fut pendu, cela devait être.
Lettres au rédacteur du « Censeur »
Assemblée nationale constituante
Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits ; les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune.
Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, Article premier
Assemblée nationale constituante
La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui […].
Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, Article IV
Assemblée nationale constituante
Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la loi.
Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, Article X
Numa Denis Fustel de Coulanges
Paris 1830-Massy 1889
L'ancien droit n'est pas l'œuvre d'un législateur ; il s'est, au contraire, imposé au législateur.
La Cité antique
Jean Giraudoux
Bellac 1882-Paris 1944
Le droit est la plus puissante des écoles de l'imagination. Jamais poète n'a interprété la nature aussi librement qu'un juriste la réalité.
La guerre de Troie n'aura pas lieu, II, 5, Hector
Grasset
Marcel, dit Jean Guéhenno
Fougères 1890-Paris 1978
Académie française, 1962
On défend bien plus férocement sa chance que son droit.
Changer la vie
Grasset
Édouard Herriot
Troyes 1872-Saint-Genis-Laval, Rhône, 1957
Académie française, 1946
La Déclaration des droits de l'homme provient de tout l'effort historique de la pensée française pour se libérer et libérer les autres en se libérant.
Droit et Liberté
Tallandier
Victor Hugo
Besançon 1802-Paris 1885
L'exil, c'est la nudité du droit.
Ce que c'est que l'exil
Victor Hugo
Besançon 1802-Paris 1885
Si vous avez la force, il nous reste le droit.
Cromwell, IV, 8, le docteur Jenkins
Joseph Joubert
Montignac, Corrèze, 1754-Villeneuve-sur-Yonne 1824
La justice est le droit du plus faible.
Pensées
Gustave Le Bon
Nogent-le-Rotrou 1841-Paris 1931
Un délit généralisé devient bientôt un droit.
Aphorismes du temps présent
Flammarion
Jean-Baptiste Poquelin, dit Molière
Paris 1622-Paris 1673
Bon droit a besoin d'aide.
La Comtesse d'Escarbagnas, 16, M. Tibaudier
Simone Weil
Paris 1909-Londres 1943
Un homme qui serait seul dans l'univers n'aurait aucun droit, mais seulement des obligations.
L'Enracinement
Gallimard
Anonyme
Le droit est l'art du bien et du juste.
Jus est ars boni et aequi.
Digeste
Cicéron, en latin Marcus Tullius Cicero
Arpinum 106-Formies 43 avant J.-C.
Comble du droit, comble de l'injustice.
Summum jus, summa injuria.
Des devoirs, I, 10, 33
Commentaire
Adage latin de droit.
Tite-Live, en latin Titus Livius
Padoue 59 avant J.-C.-Rome 17 après J.-C.
Les Gaulois répondirent fièrement que leur droit était dans leurs armes et que tout appartenait aux braves.
Cum illi se in armis jus ferre et omnia fortium vivorum esse ferociter dicerent…
Histoire romaine, V, 36
Commentaire
Les Romains avaient demandé aux Gaulois de quel droit ils réclamaient des terres à leurs propriétaires en les menaçant de leurs armes.
Otto, prince von Bismarck ou, plus précisément, von Bismarck-Schönhausen
Schönhausen 1815-Friedrichsruh 1898
La force prime le droit.
Macht geht vor Recht.
Commentaire
Bismarck s'est toujours défendu d'être l'auteur de cette maxime. Le comte Schwerin, qui la lui avait reprochée au cours de la séance de la chambre prussienne du 13 mars 1863, déclara ensuite qu'il n'était pas certain de l'avoir entendue.
Napoléon III, empereur des Français
Paris 1808-Chislehurst, Kent, 1873
[La France] a compris que je n'étais sorti de la légalité que pour rentrer dans le droit.
Lettre à la Commission consultative, 31 décembre 1851
Commentaire
Napoléon III évoque ici le plébiscite approuvant le coup d'État du 2 décembre 1851.
Samuel Johnson
Lichfield 1709-Londres 1784
Tout homme a le droit de dire ce qu'il croit la vérité, et tout autre a le droit de l'assommer pour cette bonne raison.
Every man has a right to utter what he thinks truth, and every other man has a right to knock him down for it.
Cité par James Boswell dans The Life of S. Johnson
● droit (difficultés)
nom masculin
(bas latin directum)
Emploi
Avoir le droit de est plus courant que avoir droit de, littéraire et vieilli. L'un et l'autre ont le même sens.
● droit (expressions)
nom masculin
(bas latin directum)
À bon droit, en toute justice, légitimement.
Avoir droit à, être régulièrement bénéficiaire de quelque chose par une loi, un règlement, etc. ; familièrement, ne pas pouvoir éviter quelque chose de désagréable.
Avoir droit de vie et de mort sur quelqu'un, pouvoir disposer de sa vie.
Avoir des droits sur, pouvoir exercer une autorité sur quelqu'un ; pouvoir légitimement revendiquer quelque chose.
De droit, de plein droit, sans faveur spéciale, sans avoir à fournir une justification ; d'office.
Donner droit à, permettre, autoriser légalement, régulièrement quelque chose.
Droit acquis, prérogative d'un individu ou d'une collectivité à laquelle la loi nouvelle ne peut porter atteinte. (La loi nouvelle peut, sans rétroactivité, modifier ou même supprimer, mais uniquement pour l'avenir, les droits acquis sous l'empire de la loi ancienne.)
Droit commun, ensemble des règles juridiques qui s'appliquent à un rapport de droit donné en l'absence de dispositions législatives ou réglementaires impératives et de stipulations particulières des parties ; règles applicables en droit privé.
Droit écrit, ensemble des règles juridiques rédigées et promulguées par le législateur. (S'oppose à droit coutumier.)
Droit des gens, ancienne dénomination du droit international public.
Droits de l'homme, ensemble des droits et des libertés considérés comme inhérents à la nature humaine, ce qui implique notamment leur mise en œuvre et leur respect par tout pouvoir politique.
Droit humanitaire, partie du droit international, distincte du droit de la guerre, affirmée dès le XIXe s. dans des conventions internationales. (Le concept est à la base de la fondation de la Croix-Rouge en 1864.)
Droit incorporel, ensemble des droits en droit romain (sauf le droit de propriété, compris parmi les biens corporels).
Droit intermédiaire, droit élaboré par les assemblées révolutionnaires de 1789 à 1804.
Droit interne, ensemble des règles de droit privé ou public applicables dans un pays donné.
Droit positif, ensemble des règles applicables à un moment donné dans une société, par opposition au droit naturel, ensemble des normes prenant en considération la nature de l'homme et sa finalité dans le monde.
Droit privé, ensemble des règles qui régissent les rapports des individus entre eux. (Les principales branches du droit privé sont les droits civil, pénal, commercial, maritime et le droit international privé. Le droit du travail relève à la fois du droit public et du droit privé.)
Droit public, ensemble des règles relatives à l'organisation de l'État et à ses rapports avec les particuliers. (Les grandes branches du droit public sont les droits administratif et constitutionnel, le droit international public, les finances publiques ainsi que le droit de la sécurité sociale et des transferts sociaux.)
En droit, juridiquement, légalement.
État de droit, celui dans lequel l'exercice du pouvoir par les organes de l'État est encadré par des règles de droit destinées à limiter au mieux l'arbitraire.
Être dans son droit, avoir le droit pour soi, pouvoir légitimement agir comme on le fait.
Être en droit de, être légalement ou légitimement fondé à.
Faire droit à une demande, une requête, l'accueillir favorablement, la satisfaire.
Qui de droit, la personne compétente, qualifiée : Adressez-vous à qui de droit.
Droit d'entrée, frais acquittés lors de la souscription d'un fonds commun de placement (F.C.P.) ou d'une sicav.
Droit de sortie, frais payables lors de la vente d'un fonds commun de placement ou d'une sicav.
● droit (synonymes)
nom masculin
(bas latin directum)
Banque. Droit d'entrée
Synonymes :
- commission de rachat
- commission de souscription
● droit, droite
adjectif
(latin directus)
Se dit d'une ligne qui est sans déviation, sans courbure ; rectiligne : La ligne droite est le plus court chemin d'un point à un autre.
Se dit d'un objet qui a cette forme : Un bâton bien droit.
Vertical, debout, bien stable, par opposition à penché ou de travers : Tenir la tête droite.
Qui agit honnêtement, qui est franc, loyal, honnête : C'est un homme droit.
Qui raisonne sainement ; sensé, judicieux : Il a un jugement droit.
Qui est placé, par rapport au corps humain, du côté opposé au cœur (seulement épithète) : Il est sourd de l'oreille droite.
Chimie
Synonyme de dextrogyre.
Couture
Se dit d'un vêtement qui tombe verticalement, sans ampleur ni pinces.
Géométrie
Se dit d'un cône ou d'un cylindre, considéré comme solide, dont l'axe est orthogonal à la base ou aux deux parties planes.
Se dit d'un prisme dont les arêtes latérales sont orthogonales aux bases.
Monnaies
Se dit du poids et du titre (fixés par la loi) d'une pièce de monnaie.
● droit, droite (citations)
adjectif
(latin directus)
Marc Aurèle, en latin Marcus Annius Verus, puis Marcus Aurelius Antoninus, empereur romain
Rome 121-Vindobona 180
Il faut donc être droit, non redressé.
Pensées, III, 5 (traduction A. I. Trannoy)
Bible
Ce qui est tordu ne peut être droit, ce qui manque ne peut se compter.
Ancien Testament, Ecclésiaste I, 15
Commentaire
Citation empruntée à la « Bible de Jérusalem ».
● droit, droite (expressions)
adjectif
(latin directus)
Angle droit, formé par l'intersection de deux lignes perpendiculaires : L'angle droit est un angle de 90°.
Être, se tenir droit comme un I, comme un cierge, comme un piquet, etc., se tenir très droit, avec raideur.
Muscle droit, nom donné à douze muscles pairs du corps humain, le plus important étant le muscle grand droit de l'abdomen, les autres étant des muscles du cou et de la cuisse.
Muscles droits de l'œil, muscles qui permettent les mouvements du globe oculaire. (Au nombre de quatre, ils naissent du sommet de l'orbite, par un tendon commun, le tendon de Zinn.)
Col droit, col fait d'une bande droit-fil ou en plein biais et qui ne se replie pas.
Pli droit, pli dont le plan axial est vertical et dont les deux flancs ont la même épaisseur et la même inclinaison.
Angle de couple droit, angle de couple de vecteurs (ou de demi-droites) qui est la moitié de l'angle plat .
Dièdre droit, dièdre de paire dont le rectiligne est droit.
Secteur angulaire droit, secteur angulaire ayant ses côtés perpendiculaires.
Lancer en (coup) droit, lancer exécuté d'arrière vers l'avant, la canne à l'horizontale du côté où le pêcheur la tient.
● droit, droite (synonymes)
adjectif
(latin directus)
Se dit d'une ligne qui est sans déviation, sans courbure ;...
Synonymes :
- direct
Contraires :
- arqué
- contourné
- coudé
- courbe
- détourné
- gauchi
- indirect
- sinueux
- tordu
- tors
- tortueux
Se dit d'un objet qui a cette forme
Synonymes :
- debout
- dressé
Contraires :
- oblique
- penché
Vertical, debout, bien stable, par opposition à penché ou de travers
Synonymes :
- debout
Contraires :
- courbé
- penché
- voûté
Qui agit honnêtement, qui est franc, loyal, honnête
Synonymes :
- équitable
- honnête
- juste
- loyal
- net
- probe
- strict
Contraires :
- déloyal
- fourbe
- injuste
- partial
Qui raisonne sainement ; sensé, judicieux
Synonymes :
- logique
- objectif
- sain
- sensé
Contraires :
- déraisonnable
- insensé
- trompeur
Qui est placé, par rapport au corps humain, du côté...
Contraires :
- gauche
Synonymes :
- Chimie. dextrogyre
droit, droite
adj. et n. m.
d1./d adj. Qui est du côté opposé à celui du coeur. La main droite. La rive droite d'un fleuve, celle qui est du côté de la main droite en descendant son cours.
— Fig. Le bras droit de qqn, son collaborateur indispensable.
d2./d n. m. En boxe, le poing droit. Un direct du droit.
————————
droit, droite
adj., n. m. et adv.
rI./r adj.
d1./d Qui n'est pas courbe, qui trace une ligne qui ne dévie pas. Droit comme un I. Un nez droit.
d2./d Qui va par le chemin le plus court d'un point à un autre. Une ligne droite. En droite ligne: directement.
d3./d Vertical. Ce mur n'est pas bien droit.
d4./d (Vêtements) Veste droite (opposé à croisée ou cintrée); jupe droite (opposé à ample).
d5./d ASTRO Ascension droite: angle formé par le méridien de l'astre et le méridien du point vernal.
d6./d GEOM Angle droit.
|| n. m. La somme des angles d'un triangle est égale à deux droits.
d7./d ANAT Muscle droit, dont les fibres sont verticales.
|| n. m. Grand droit de l'abdomen.
d8./d Juste, équitable. Un esprit droit.
d9./d (Personnes) Honnête et loyal. Un homme très droit.
rII./r adv.
d1./d En ligne droite. Tout droit. Aller droit devant soi.
|| Marcher droit: en ligne droite; fig., bien se conduire.
|| (Québec) Fam. Passer tout droit: se réveiller en retard.
d2./d Directement. Aller droit au fait.
————————
droit
n. m.
rI./r
d1./d Faculté d'accomplir une action, de jouir d'une chose, d'y prétendre, de l'exiger. Les droits et les devoirs. La Déclaration des droits de l'homme. être dans son droit.
|| Loc. Avoir droit à: pouvoir prétendre à, bénéficier de. Il a eu droit à une gratification.
— être en droit de: avoir le droit de.
— Avoir un droit sur. Le père de famille de l'ancienne Rome avait droit de vie et de mort sur ses enfants.
— Droit divin, qui vient de Dieu. Monarque de droit divin.
— Droit d'aînesse: privilège qui, dans une succession, avantageait l'aîné.
— Droits civiques, attachés à la qualité de citoyen (notam. éligibilité, droit de vote).
— (Au sens moral.) Les droits de l'amitié.
d2./d Taxe. Droits de péage, d'octroi, d'enregistrement. Payer un droit d'entrée.
— Droits d'auteur: somme que l'auteur touche sur la vente, la reproduction ou la représentation de ses oeuvres.
|| Droits de tirage spéciaux: monnaie internationale créée par le F.M.I. en 1969, servant d'instrument de crédit accordé aux états membres.
rII./r Le droit.
d1./d Ensemble des règles qui régissent les rapports entre les hommes. Opposer le droit à la force.
d2./d Loc. Faire droit à: rendre justice à. Faire droit à une demande, lui donner une suite favorable.
— De droit, de plein droit: par le seul effet de la loi, sans contestation possible. Cela lui revient de droit.
— à qui de droit: à qui est habilité, qualifié. Adressez-vous à qui de droit.
d3./d Pouvoir d'agir selon sa volonté. Le droit du plus fort.
d4./d Ensemble des dispositions juridiques qui règlent les rapports entre les hommes. Droit coutumier. Droit romain. Droit canon. Droit civil, droit pénal. Droit international. Droit commercial. Droit des affaires. Droit du travail. Droit privé, qui régit les rapports des particuliers entre eux et des particuliers avec l'Administration. Droit public, qui régit le fonctionnement de l'état (Constitution, Administration).
d5./d Science du droit. Apprendre le droit. La faculté de droit.
I.
⇒DROIT1, DROITE, adj. et subst.
I.— Adjectif
A.— 1. [En parlant d'un organe, d'une partie du corps] Situé du côté opposé à celui du cœur. Pied, poumon droit; profil droit. Anton. gauche. Je ne souffre pas, mais j'ai tout le côté droit paralysé (MONTHERL., Songe, 1922, p. 116) :
• 1. — Père, tu dois à mon mari affront pour affront. Le père demanda : — Sur quelle joue as-tu reçu le soufflet? — Sur la joue gauche. Le Père souffleta la joue droite et dit : — Te voilà contente. Va dire à ton mari qu'il a souffleté ma fille, mais que j'ai souffleté sa femme.
HUGO, Les Misérables, t. 2, 1862, p. 331.
♦ Loc. adv. vieillie. À main droite. À droite (infra II D 1). La première chose à main droite en entrant dans la chapelle de Sion, c'est un vitrail (BARRÈS, Cahiers, t. 3, 1902-03, p. 20).
♦ Loc. [P. allus. à l'Évangile de St Matthieu VI, 2-3] Quand tu fais l'aumône, que ta main gauche ne sache pas ce que fait ta main droite : fais le bien avec discrétion :
• 2. Du démon auquel l'Espagne est livrée, on ne saurait dire que la main droite ignore ce que fait la main gauche : les protagonistes de cette guerre civile se doutent-ils que dans chaque camp c'est le même esprit qui les meut, qui les précipite les uns contre les autres?
MAURIAC, Journal 2, 1937, p. 199.
2. En partic., emploi mélioratif. [P. réf. au fait que la main droite, le bras droit sont les plus développés, les plus forts par l'éducation chez la majorité des individus] Être le bras droit de qqn (v. bras I B a p. métaph. ou au fig.). Pauvre petit! dit Daniel bouleversé. Pauvre petit! Il aurait donné sa main droite pour pouvoir le consoler ou pleurer avec lui (SARTRE, Mort ds âme, 1949, p. 122) :
• 3. ... si jamais je m'oublie de toi, Jérusalem! ah! que ma main droite se dessèche et que ma langue s'attache à mon palais, si jamais mon cœur s'oublie de toi, Jérusalem! [cf. Psaumes 137, 5-6].
CLAUDEL, Poésies diverses, 1952, p. 846.
3. P. méton. Qui concerne le côté droit du corps. J'ai vu le Dr Rohner (...). Il m'a dit textuellement que c'était une hémiplégie droite, avec troubles de la parole (DUHAMEL, Passion J. Pasquier, 1945, p. 233).
4. Emploi subst. p. ell. du déterminé
a) Subst. masc., SP. (boxe) Droit. Poing droit. Crochet du droit (cf. crochet II B 3 b).
B.— P. ext. [En parlant d'un obj., p. réf. à un observateur] Qui correspond au côté droit de l'observateur.
1. [L'observateur est orienté de la même façon que l'obj.] L'aile droite d'un bâtiment (cf. aile II C 1); le côté droit d'un bureau (cf. bureau II A); la rive droite d'un fleuve; le flanc droit, l'aile droite d'une armée (cf. aile ex. 29).
— En partic., SP. Ailier droit (cf. ailier ex. 5).
2. [L'observateur regarde l'obj.] La partie droite d'une photographie, d'un tableau.
— En partic., POL. [P. réf. au président qui lui fait face] Centre droit d'une assemblée parlementaire (cf. centre I C); aile droite d'une formation (cf. aile ex. 33).
C.— Spéc., CHIM. Synon. de dextrogyre :
• 4. ... par l'action de la chaleur seule, l'acide tartrique droit se transforme en acide racémique qui est la combinaison à poids égaux de l'acide tartrique droit avec l'acide tartrique gauche et qui est résoluble en ces deux acides.
PASTEUR, Recueil de travaux, 1895, p. 17.
II.— Subst. fém.
A.— [P. ell. de main]
1. Main droite. Synon. dextre (cf. ce mot I; cf. aussi ambidextre ex. 1) :
• 5. Donc mes bonnes gens, n'ayez peur
Qu'insidieusement je n'aille
Sot unique et double canaille
Glisser en tant que l'avocat
De la main gauche un beau ducat
Dans ma droite de juge intègre...
MALLARMÉ, Vers de circonstance, 1898, p. 183.
— En partic. La droite du Seigneur. Mon fils est mort, hélas! Vous me l'aviez donné, voici que votre droite Me le reprend à l'heure où mes pauvres pieds las Réclamaient ce cher guide en cette route étroite (VERLAINE, Œuvres compl., t. 2, Amour, 1888, p. 74).
2. Poing droit (supra I A 4 a). Il avait acquis une droite redoutable, une gauche foudroyante (QUENEAU, Loin Rueil, 1944, p. 61).
B.— Côté de la main droite. Une dualité d'éléments opposés susceptibles de permuter entre eux comme permutent la gauche et la droite dans une symétrie (Gds cour. pensée math., 1948, p. 56) :
• 6. On voit des malades confondre leur droite et leur gauche parce qu'ils sont incapables de penser à la fois et relativement l'une et l'autre.
MOUNIER, Traité du caractère, 1946, p. 277.
— Loc. prép. À (la) droite de. Chiffres (...) écrits à la droite de la virgule (COUFFIGNAL, Mach. penser, 1964, p. 48).
♦ Emploi mélioratif. [En parlant de la place des convives par rapport au maître de maison] Désormais, je serai toujours placé à la droite de la maîtresse de maison, et mes articles me seront payés le double, et j'aurai mon nom dans le Larousse (DRUON, Gdes fam., t. 2, 1948, p. 63).
En partic. Salut, peuple, multitude, vous qui êtes assis à la droite de Dieu (CLAUDEL, Euménides, 1920, III, p. 979) :
• 7. Je veux croire que mon vicaire et mon chanoine ont fait tous deux leur salut et qu'ils sont dès maintenant à la droite du Père.
FRANCE, La Vie littér., t. 2, 1890, p. 69.
Rem. L'art. la donne à la loc. un sens plus concr.; il peut être remplacé par un adj. poss. lorsque la loc. prépositive devient loc. adv. Il était assis à ma droite (infra D 3).
— P. méton. [En parlant de qqn qui se déplace] Prendre, garder sa droite. Emprunter le côté droit de la chaussée :
• 8. Il est essentiel, dans des conditions difficiles, de pouvoir lire rapidement l'indication des obstacles (...) trouver sa route, et, dans le brouillard, de tenir sa droite, en axant ses roues sur une bande peinte à même le sol.
Le Figaro, 19-20 janv. 1962, p. 1, col. 5-6.
C.— Spéc., POL. Côté droit de l'hémicycle d'une assemblée parlementaire. Il siégeait isolé, tout au haut de la travée d'extrême droite (VOGÜÉ, Morts, 1899, p. 135).
— P. méton. L'ensemble des parlementaires qui y siègent; les idées, les partis (traditionnellement conservateurs ou réactionnaires) qu'ils représentent, l'opinion publique qui les soutient. Dictature, journal, presse de droite. Les éloges trouvèrent peu d'échos. Mais les aigreurs recueillirent les applaudissements appuyés de la gauche, tandis que la droite s'abstenait de manifester (DE GAULLE, Mém. guerre, 1959, p. 273). Une part non petite de la jeunesse étudiante est de droite et même d'extrême-droite; la tradition maurassienne, et donc vichyssoise, y demeure vivante (MAURIAC, Nouv. Bloc-notes, 1961, p. 363).
D.— Loc. adv.
1. À main droite (supra I A 1)
2. À droite. Du côté de la main droite. Se diriger, obliquer, passer, prendre, tourner à droite. On se reposait dans un pré, ayant Deauville à gauche, Le Havre à droite et en face la pleine mer (FLAUB., Trois contes, Cœur simple, 1877, p. 21).
♦ Cf. dextre II 2 ex. 3 :
• 9. C'est la formation et non pas la forme qui reste mystérieuse. Mais sur le plan de forme à prendre, quelle décision de vie dans le choix initial qui est de savoir si la coquille sera enroulée à gauche ou enroulée à droite?
BACHELARD, La Poétique de l'espace, 1957, p. 106.
— En partic., ARMÉE. Cf. alignement ex. 11.
♦ Emploi subst. Mouvement vers la droite. Franchet d'Esperey comprit que de l'à-droite ou de l'à-gauche qu'allait effectuer son avant-garde dépendait l'avenir du monde (MORAND, Excurs. immob., 1944, p. 92).
— POL. Se situer politiquement à droite :
• 10. — C'est incroyable le succès qu'ils font à ce misérable livre de Volange! dit Nadine.
— Forcément : à l'heure qu'il est, toute la presse est à droite. Dit Henri;
— Même à droite, ils ne sont pas tous idiots.
BEAUVOIR, Les Mandarins, 1954, p. 542.
3. [Avec un déterm. poss.] À (sur) ma (ta, sa, notre, votre, leur) droite. En approchant du petit-pont, ils trouvèrent à leur droite des échoppes de ferrailles, éclairées par des lampes fumeuses (FRANCE, Lys rouge, 1894, p. 30). Il prend place au bout de la longue table, ayant la Mère à sa droite. Tous les serviteurs et les servantes sont debout, chacun à sa place (CLAUDEL, Annonce, 1912, I, 3, p. 161). Elle fit encore quelques pas, découvrit sur sa droite un hangar abandonné à l'abri duquel elle alla s'asseoir (BERNANOS, Mauv. rêve, 1948, p. 1003).
4. À droite et à gauche, de droite et de gauche. De tous côtés. Il (...) jette de droite et de gauche un regard inquiet, comme quêtant une sympathie que personne ne lui accorde (GIDE, Journal, 1931, p. 1040). Les gens courent à droite et à gauche, comme s'il y avait tout le temps le feu ou une alerte (ROMAINS, Hommes bonne vol., 1939, p. 69).
5. De droite à gauche, de gauche à droite :
• 11. Je vais mourir, cria-t-il brusquement. Mourir, sûr! il bondit hors de son fauteuil, resta debout, une main farouchement crispée au dossier, sa jolie tête oscillant de droite à gauche...
BERNANOS, Un Mauvais rêve, 1948, p. 957.
Prononc. et Orth. :[], fém. []; mais aussi [], [] ds WARN. 1968, le timbre post. s'expliquant par l'influence de r vélaire précédent. La forme dret, drette [], fém. [-] correspond au doublet en [] de la diphtongue [oi], [], [wa] qui se rencontre à partir du XIVe s. surtout après consonne + r. FÉR. 1768 et LITTRÉ rappellent que Vaugelas défendait la prononc. [], que Régnier et Buffier prononcent [] pour l'adj. et [] pour le subst. L'adj. et l'adv. sont admis ds Ac. 1694-1932, s.v. droit, droite. Les anc. formes dret, drette n'étant pas attestées ds Ac., on les rencontre toutefois chez des aut. donnant la parole à des paysans, comme MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, Lapin, 1887, p. 249, (qui écrit drait) ou comme GIONO, Colline, 1929, p. 40, GENEVOIX, Raboliot, 1925, p. 151 et Laframboise, 1942, p. 35. Ces formes sont aussi usitées en arg. (cf. QUENEAU, Si tu t'imagines, 1952, p. 310). Étymol. et Hist. A. Adj. XVe s. pied droit (Evangile des Quenouilles, éd. P. Jamet, 3e journée, p. 52). B. Subst. 1. 1532 à droict loc. adv. « du côté droit » (RABELAIS, Pantagruel, éd. V. L. Saulnier, XIX, 120); 1580 à droite « id. » (MONTAIGNE, Essais, éd. A. Thibaudet, II, 12, p. 631); 2. a) 1559 « le côté droit » ici en parlant de l'aile d'une armée (AMYOT, César, 58 ds LITTRÉ); b) 1793 pol. les députés de la droite de l'Assemblée (J. de Paris, n° 184 ds FREY, p. 46; cf. en 1792 le côté droit ds J. de Paris, séance du 19 août, ibid.); 3. 1637 droite p. ell. de main (DISCRET, Alizon, V, 1, 476, éd. Viollet Le Duc, Anc. Th. fr., t. VIII ds IGLF). Emploi de l'adj. droit « juste, régulier, bon » (droit2) qui a supplanté l'a. fr. destre (v. dextre). Bbg. DARM. Vie 1932, p. 167. — FRYKLUND (D.). Les Chang. de droite et de gauche ds les lang. rom. Upsal, 1907, 165 p. — SOULIÉ (M.). La Droite et la Gauche. Vie Lang. 1969, pp. 49-50.
II.
⇒DROIT2, DROITE, adj., adv. et subst.
I.— Adjectif
A.— [En parlant d'une ligne]
a) Qui ne présente ni angle, ni courbure. La plus simple des lignes est la ligne droite, dont un fil tendu nous offre l'image (HADAMARD, Géom. plane, 1898, p. 3). La ligne droite est le plus court chemin d'un point à un autre (P. LAVEDAN, Urban., 1926, p. 52).
b) Loc. En ligne droite, en droite ligne. Suivant une ligne droite (infra II A 1). (Personnes, objets) disposés, placés en ligne droite; marcher, s'avancer, se propager en ligne droite. La propriété de la lumière de se transmettre en ligne droite (COURNOT, Fond. connaiss., 1851, p. 2). Des belles allées à la française, élancées en droite ligne entre des arbres de haute futaie (BOYLESVE, Leçon d'amour, 1902, p. 6). Des fumées s'élevaient, montaient en droite ligne vers le ciel (MARAN, Batouala, 1921, p. 101) :
• 1. Si nous regardons une pierre tomber de la fenêtre d'un train, nous voyons une trajectoire parabolique (...). Pour le voyageur, la pierre est tombée en ligne droite...
RUYER, Esquisse d'une philos. de la structure, 1930, p. 289.
Rem. Dans ce sens, la loc. en ligne droite est la plus usitée.
— P. ext. Directement, sans intermédiaire, sans détour.
♦ [Dans l'espace] La lingerie, toute de soie, semblait venir en droite ligne de la rue de la Paix (BENOIT, Atlant., 1919, p. 175). Le (...) régiment, venu d'Èvres en ligne droite sans avoir eu à faire le crochet par Beauzée (ROMAINS, Hommes bonne vol., 1938, p. 114) :
• 2. Ce n'est pas la première fois que Pierre Corneille se tourne vers l'Espagne, et son Matamore, on l'a vu, en vient en ligne droite.
BRASILLACH, Pierre Corneille, 1938, p. 136.
♦ [Dans le temps] Des coutumes venues en ligne droite de la restauration (ESTAUNIÉ, Ascension M. Baslèvre, 1919, p. 1) :
• 3. Il avait pour épouse Gertrude de Méranie, ou d'Andechs, de la maison peut-être la plus illustre de l'empire à cette époque. Elle descendait en droite ligne de Charlemagne...
MONTALEMBERT, Hist. de Ste Élisabeth de Hongrie, 1836, p. 7.
2. P. anal. Droit fil. Sens des fils (cf. chaîne II A 1 b) d'un tissu; plus rare, sens des fibres d'un bois (cf. CHAMPLY, Nouv. Encyclop. prat., t. 9, 1927, p. 159). Couper un tissu dans le droit fil. Anton. biais :
• 4. Hubert s'était mis à tendre un métier. Il avait posé les deux ensubles sur la chanlatte et sur le tréteau, bien en face, de façon à placer de droit fil la soie cramoisie...
ZOLA, Le Rêve, 1888, p. 42.
— P. méton. Le biais est travaillé de toutes les façons, le droit fil est souvent nervuré (Jardins des modes, janv. 1951, p. 17).
— Au fig. De droit fil. Franchement :
• 5. ... le clochard, suffit qu'on li défende une chose, soit de droit fil ou de ruse, pour qu'il tienne bientôt pus dans s'peau, du besoin de se l'envoyer, de droit fil ou de ruse également itou...
M. STÉPHANE, Ceux du Trimard, 1928, p. 189.
B.— P. ext.
1. Dont le dessin ou la forme a la ligne droite comme élément de référence. Tronc droit; ciseaux droits; nez droit. Quelques individus ont la peau très foncée, avec des cheveux frisés, d'autres ayant au contraire la peau claire avec des cheveux ondulés ou droits (HADDON, Races hum., 1930, p. 237). Parfois un grand morceau de route droite succédait aux lacets (MALÈGUE, Augustin, t. 1, 1933, p. 41). Des vases de cuivre rouge à large panse, col droit et anse anguleuse (T'SERSTEVENS, Itinér. esp., 1963, p. 201).
SYNT. Escalier, sabre droit; dossier droit, chaise droite; manteau droit, tunique droite (anton. cintré, ée); veston droit (anton. croisé).
2. En partic.
a) [En parlant d'un corps au repos, avec une notion de verticalité, de perpendicularité]
) [En parlant d'un obj.] Debout, dressé, vertical. Mur, pli droit; flamme, fumée droite. Anton. couché, penché, oblique. Il revit un temple au dieu du soleil des anciens Incas du Pérou. Ces pierres droites sur la montagne (SAINT-EXUP., Vol nuit, 1931, p. 121) :
• 6. Les fureurs du peintre commençaient dès que Céline avait franchi sa porte. Pour la vingtième fois, il la suppliait de ne pas accrocher sa capeline sur le coin d'un cadre, et elle s'entêtait à ne pas la pendre à un porte-manteau (...); le cadre penchait forcément (...) et elle soutenait que c'était sans importance, que sa coiffe n'abîmait pas la dorure, qu'il n'était pas utile que le tableau fût droit.
HUYSMANS, Les Sœurs Vatard, 1879, p. 224.
♦ Piano droit. Piano dont les cordes et la table d'harmonie sont verticales. Anton. piano à queue.
♦ MATH. Angle droit (cf. angle I A 1) et subst. un droit (cf. angle ex. 2). Prisme droit. Prisme dont les bases sont perpendiculaires aux autres faces. Anton. oblique.
) [En parlant d'une partie du corps] Dressé. Avoir, tenir la tête droite. L'écureuil (...) sautait de branche en branche, les petites oreilles droites à peine pointant (PERGAUD, De Goupil, 1910, p. 135). Elle portait une grande robe un peu (...) solennelle (...) avec une collerette rigide, dorée, qui maintenait droit le cou (VAILLAND, Drôle de jeu, 1945, p. 19).
— P. méton. [En parlant de la pers. phys.] Qui n'est ni courbé, ni voûté, qui se tient bien. Être droit comme un chêne, comme un peuplier; avoir la taille droite. Un peloton de cavaliers, avec, en tête, un sous-off de dragons, droit sur ses étriers, la crinière au vent (MARTIN DU G., Thib., Été 14, 1936, p. 752). Une femme, assise très droite (TRIOLET, Prem. accroc, 1945, p. 51).
♦ Emploi subst. :
• 7. — Francs-tireurs! à mon commandement! Ils sont là, la poitrine bombée, la tête haute, les bras collés au corps raide... trente-cinq... des grands et des petits, des droits et des tordus.
TRIOLET, Prem. accroc, 1945 p. 370.
b) [En parlant d'un mouvement ou d'un corps en mouvement] Qui s'effectue, qui se déplace en un mouvement rectiligne horizontal ou vertical. (La) chute droite (des flocons de neige).
— En partic., ESCR. Coup droit. Attaque qui consiste en un mouvement rectiligne de la pointe du fleuret (cf. Lar. encyclop., s.v. escrime).
— Spéc., ANAT. Muscle droit. Muscle dont l'action s'exerce parallèlement ou perpendiculairement au plan de symétrie du corps.
♦ Emploi subst. Excepté dans les singes et les cétacés, le grand oblique et le grand droit postérieur sont généralement fort considérables (CUVIER, Leçons d'anat. comp., t. 1, 1805, p. 236).
c) Loc. prép., vx. Au droit de. Au niveau de, en face de, à la perpendiculaire de. M. Hirsch (...) a fait, sur la vaporisation dans les chaudières au droit du foyer, de très remarquables expériences (SER, Phys. industr., 1888, p. 246) :
• 8. ... je vis glisser devant moi (...) un petit bâtiment. Il longea un moment la côte, puis, virant au droit de la passe du port et franchissant la limite des patrouilles, piqua vers le large et se perdit bientôt à l'horizon.
GRACQ, Le Rivage des Syrtes, 1951, p. 44.
3. Comme il faut, régulier.
a) Loc. adv. Au droit (vx). Sur le parcours, au bon endroit. Pourtant il y a de bons riches, puisque vous l'êtes, vous, madame Blanchet, c'est le tout de se trouver au droit pour les rencontrer (SAND, F. le Champi, 1850, p. 73).
b) TENNIS. Coup droit. Renvoi de la balle effectué du côté habituel. Anton. revers (cf. ROB., Lar. Lang. fr., Lar. encyclop., Lexis 1975).
c) NUMISM., emploi subst. Synon. de avers (cf. ce mot A).
C.— P. métaph. ou au fig.
1. [Dans le domaine de la morale]
a) [En parlant d'une ligne de conduite] Conforme aux principes de la morale, de la religion. Droit chemin (cf. chemin II B 2); ligne droite :
• 9. « On vous montre la voie droite : vous n'avez qu'à suivre. C'est vrai pour la religion, c'est vrai pour la discipline de l'esprit, pour l'habitude de raisonner qui fut toujours en honneur à Mongazon; c'est vrai aussi pour le latin. »
THIBAUDET, Réflexions sur la litt., 1936, p. 252.
b) [En parlant d'une pers., de ses attributs] Franc, honnête, ouvert, sans compromission. Homme, caractère droit; âme, nature droite. Un aveuglement qui n'exclut ni des intentions droites ni des vertus dignes de respect (LAMENNAIS, L'Avenir, 1831, p. 263). Le regard droit de ses yeux myopes trahit une âme d'une probité exemplaire (GREEN, Journal, 1941, p. 91).
2. [Dans le domaine de l'esprit] Conforme à la raison, juste, sain, sensé. Jugement, raisonnement droit. Avec un sens droit du métier que l'on fait et une volonté persévérante, on arrive à l'estimable (FLAUB., Corresp., 1852, p. 363). Aucune difficulté ne résiste à un esprit droit et qui raisonne juste (MAURIAC, Th. Desqueyroux, 1927, p. 250).
II.— Adverbe
A.— [Correspond à I A 1 b et B 2 b]
1. Suivant une ligne droite. Aller, se diriger (tout) droit (devant soi); tomber droit. Un homme ne peut marcher droit les yeux fermés (CUVIER, Leçons d'anat. comp., t. 1, 1805, p. 487). Il regardait droit devant lui, sans rien voir (DRUON, Gdes fam., t. 2, 1948, p. 229).
2. Directement. Conduire droit à, chez; aller droit au but. Oriante, surmontant l'émoi de cet accueil violent, va droit à son agresseur (BARRÈS, Jard. Oronte, 1922, p. 164). Je t'ai montré la porte de ma chambre; elle donne droit sur l'escalier (GIDE, Faux-monn., 1925, p. 936).
B.— [Correspond à I B 2 a] Verticalement. Se promener en tenant bien droit devant soi, sans en verser une goutte, un verre plein d'eau (MOUNIER, Traité caract., 1946, p. 267).
♦ Se tenir droit. Elle pleurait comme une madeleine, sans faire de bruit, et se tenait droit comme un piquet (BALZAC, Langeais, 1834, p. 340).
Rem. Dans cette dernière constr., droit est plus souvent adjectif.
C.— [Correspond à I C 1] Selon les principes de la morale. Filer droit. Nous autres, leurs prêtres, pourquoi nos enfants nous aimeraient-ils? (...) Nous sommes forcés de les faire marcher droit (MONTHERL., Ville dont prince, 1951, I, 3, p. 872).
III.— Subst. fém., MATH. Ligne telle que deux des points par lesquels elle passe sont nécessaires et suffisants à la définir. Je mets le cap sur le milieu du segment de droite qui joint Alexandrie au Caire (SAINT-EXUP., Terre hommes, 1939, p. 213).
SYNT. Droite euclidienne; droites concourantes, parallèles; congruence de droites; faisceau de droites; décrire une droite.
♦ Demi-droite. Portion de droite indéfinie dans un sens et limité dans l'autre par un point. On appelle bissectrice d'un angle la demi-droite issue du sommet qui partage cet angle en deux angles égaux (ROUX, MIELLOU, Géom., 1946, p. 10).
Prononc. et Orth. :[], fém. []. Mais aussi [] post. ds WARN. 1968 (cf. droit1). Le mot est admis ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. A. Adj. 1. a) ca 1050 « juste, vrai, exact » dreit num (Alexis, éd. Chr. Storey, 215); b) ca 1100 « juste, honnête, franc » (Roland, éd. J. Bédier, 2441); c) 1130-40 « qui ne s'écarte pas de la raison, de bon sens » dreite veie (WACE, Conception N.-D., éd. W. R. Ashford, 1088); 2. a) ca 1100 « sans courbure, sans inclinaison » (Roland, 1043); b) 1155 « direct, sans détour » dreite veie (WACE, Brut, éd. I. Arnold, 762); c) 1160-74 « régulier, bien mis ou bien fait » (WACE, Rou, éd. A. J. Holden, 1317 et 1318). B. Adv. ca 1050 « directement, sans détour » (Alexis, 81). C. Subst. masc. dans la loc. adv. au droit de 1354-76 (Roy Modus, 124, 55 ds T.-L.). D. Subst. fém. p. ell. de ligne 1738 (VOLTAIRE, Newton, II, 9 ds LITTRÉ). Du lat. class. directus « sans courbure, direct, à angle droit », d'où au fig. « direct, sans détour, juste », part. passé adj. du verbe dirigere (v. diriger).
STAT. — Droit1 et 2. Fréq. abs. littér. :4 844. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 7 589, b) 7 081; XXe s. : a) 7 209, b) 5 994. Droite1 et 2. Fréq. abs. littér. :11 007. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 10 106, b) 18 457; XXe s. : a) 18 369, b) 17 251.
BBG. — GOTTSCH. Redens. 1930, passim. — LA LANDELLE (G. de). Le Lang. des marins. Paris, 1859, p. 186, 226, 317. — QUEM. Fichier.
III.
⇒DROIT3, subst. masc.
I.— Au sing.
A.— [Gén. sans compl. ou adj. déterminatif]
1. MOR., PHILOS. Fondement des règles régissant les rapports des hommes en société, et impliquant une répartition équitable des biens, des prérogatives et des libertés. Le respect, le triomphe du droit; avoir le (bon) droit pour soi, de son côté. Aucune personne humaine, dans aucun moment de la durée, ne doit être laissée en dehors de la sphère du droit (JAURÈS, Ét. soc., 1901, p. 131) :
• 1. Songez que pour tirer la France de cette confusion affreuse de toutes les notions de justice et de droit, il suffit de faire exécuter la loi. Nous vous demandons la loi. Oserez-vous répondre par l'arbitraire?
CLEMENCEAU, L'Iniquité, 1899, p. 477.
Rem. Le mot est fréquemment a) Associé à équité, justice, liberté. Les deux nations amies et alliées dans un esprit de droit et d'équité (MAURIAC, Bâillon dén., 1945, p. 457). b) Opposé à force, injustice. Triomphe à jamais mémorable du droit sur la force, de la foi sur l'intérêt matériel (MONTALEMBERT, Ste Élisabeth, 1836, p. XIX). Un témoin honnête homme, qui ait vu clairement de quel côté était le droit, et de quel côté l'injustice (FARRÈRE, Homme qui assass., 1907, p. 346).
— En partic.
a) [La notion de bien connotée par droit est renforcée par l'adj. bon] Le bon droit. Le bon droit triomphait, l'avenir était promis aux hommes de bonne volonté (BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 487).
b) [Droit s'oppose à fait dans la mesure où ce qui est légitime, ce qui devrait être, s'oppose à la réalité] :
• 2. [Jean-Jacques] avait commencé sa vie littéraire en dénonçant le monde comme il allait, l'avilissement de l'homme par l'homme. Il la terminerait en disant à quelles conditions l'homme pouvait être rétabli dans sa dignité naturelle, et la société devenir « légitime ». (...) Il passait du fait au droit (...) [abolissant] tous les faits comme autant de détournements du droit opérés au long de la confuse histoire.
GUÉHENNO, Jean-Jacques, Grandeur et misère d'un esprit, 1952, p. 56.
c) [Droit est corrélatif de devoir dans la mesure où le règne du premier est conditionné par la conscience du second] Cf. devoir2 A, HUGO, Voix intér., 1837, p. 206 :
• 3. Le peuple, enivré et comme étourdi par de longues bacchanales, avait perdu jusqu'à la notion du droit et du devoir...
PROUDHON, Qu'est-ce que la propriété? 1840, p. 144.
2. La science juridique. Faculté de droit. Le titre de docteur en droit (cf. docteur II A).
SYNT. Cours, école, études de droit; livre de droit; professeur de droit; examen de droit; histoire du droit; étudiant en droit; licence, doctorat en droit; enseigner, étudier le droit; faire son droit.
B.— [Gén. avec déterm.]
1. Domaines extra-jur. Ensemble de droits (infra II).
a) [Le déterm. désigne le détenteur du droit] Une autorité sans merci, sans entrailles, sans notion aucune du droit humain (SAND, Hist. vie, t. 2, 1855, p. 399). Cf. aussi affirmer ex. 2 :
• 4. Comte (...) comprenait que sa religion était d'abord une sociolâtrie et qu'elle supposait le réalisme politique, la négation du droit individuel et l'établissement du despotisme.
CAMUS, L'Homme révolté, 1951, p. 243.
— Spéc. Le droit du plus fort. Le droit que s'arroge le plus fort :
• 5. ... Caïn, en prenant pour lui seul la terre, et en établissant sur la terre la propriété exclusive et jalouse, perd la terre, dans le sens profond du mot, comme Adam avait perdu l'Éden. Mais alors nouveau progrès dans le mal : Caïn établira et Dieu permettra la violente législation du fait, ou le droit du plus fort.
P. LEROUX, De l'Humanité, t. 2, 1840, p. 576.
b) [Le déterm. désigne la source du droit]
— Droit divin. Ensemble de prérogatives conférées par Dieu et, p. ext., autorité, pouvoir qui en découlent. Le suffrage universel se peut-il démontrer consciencieux et réel plus que le droit divin d'une dynastie de demi-dieux? (VIGNY, Journal poète, 1850, p. 1273).
♦ Théorie du droit divin et, p. ell., droit divin. Théorie élaborée au XVIIe siècle, selon laquelle le roi tient sa souveraineté de Dieu. Une loi positive de l'Angleterre déclare coupable de haute trahison quiconque soutiendrait le droit divin (STAËL, Consid. Révol. fr., t. 2, 1817, p. 163).
♦ Loc. adj. De droit divin. En vertu du droit divin. Roi, souverain, monarchie de droit divin. Les souverains continentaux restaient des monarques de droit divin au pouvoir théoriquement absolu (LEFEBVRE, Révol. fr., 1963, p. 88).
— Droit naturel. Ensemble des droits inscrits dans la nature de l'homme et, p. ext., ensemble des règles morales et sociales qui en découlent. Théorie du droit naturel. Le droit naturel a des lois qui n'ont jamais été promulguées et qui sont plus efficaces, mieux connues que celles forgées par la société (BALZAC, Splend. et mis., 1846, p. 454). Au-dessus du « droit positif » édicté par l'État, existe un « droit naturel » qui s'impose à l'État (VEDEL, Dr. constit., 1949, p. 106). Cf. aussi ex. 7.
2. Domaine jur. Ensemble de règles à caractère contraignant, régissant le comportement et les rapports des hommes en société. (On dit aussi droit positif, p. oppos. à droit naturel, supra I B 1 b; droit objectif, p. oppos. à droit subjectif, infra II, en partic. ex. 15). Le droit français; la rigueur du droit; les sources du droit. Les rapports entre les nations sont l'objet du droit des gens, comme les rapports entre les familles sont l'objet du droit civil (BONALD, Législ. primit., t. 2, 1802, p. 91). Cf. absolu ex. 10.
♦ Dire le droit. Exposer le contenu du droit :
• 6. ... la doctrine selon laquelle, en l'absence d'une juridiction spécialement organisée, et en vertu de sa mission générale de dire le droit, le juge ordinaire devait accueillir pour examen les exceptions d'inconstitutionnalité élevées à l'encontre des lois dans les procès dont il était saisi.
VEDEL, Manuel élémentaire de dr. constit., 1949, p. 555.
SYNT. Droit public, constitutionnel, administratif; droit pénal ou criminel; droit privé, commun, civil (cf. civil I B 2 a), commercial, maritime, rural; droit interne, international privé, public.
— En partic.
♦ Droit romain. ,,Droit des anciens Romains jusqu'à la codification de Justinien, et qui est resté en application dans certains pays jusqu'à nos jours`` (CAP. 1936) :
• 7. Nous montrerons comment le respect pour le droit positif des Romains a contribué à conserver quelques idées du droit naturel des hommes, ou empêché ensuite ces idées de s'agrandir et de s'étendre; comment nous avons dû au droit romain un petit nombre de vérités utiles, et beaucoup plus de préjugés tyranniques.
CONDORCET, Esquisse d'un tableau hist. des progrès de l'esprit hum., 1794, p. 78.
♦ Droit écrit. ,,Droit créé par le législateur et exprimé dans des textes par lui promulgués`` (CAP. 1936). Tout système de droit écrit ne vaut que comme formulation de règles coutumières sous-jacentes (VEDEL, Dr. constit., 1949, p. 121). Cf. coutumier1 ex. 1.
Rem. Droit écrit est parfois empl. comme synon. de droit romain (cf. CAP. 1936).
— Loc. adj. De droit commun.
♦ [P. oppos. à d'exception] Juridiction de droit commun (VEDEL, Dr. constit., 1949 p. 539) :
• 8. Il va de soi que les juridictions répressives d'exception excitèrent, comme en tout temps, des colères furieuses et des rancunes inexpiables. Mais il ne semble pas que les tribunaux criminels de droit commun et les jurys qu'ils s'associaient aient éveillé la désapprobation.
LEFEBVRE, La Révolution fr., 1963, p. 576.
♦ [P. oppos. à politique] Crime, délit, infraction de droit commun; condamné, détenu, forçat, prisonnier de droit commun et, p. ell., un droit commun (cf. ROB. Suppl. 1970). Vous êtes implacables pour les vaincus dans les luttes civiles, mais vous êtes pleins de tendresse pour les criminels de droit commun (MÉNARD, Rêv. païen mystique, 1876, p. 214).
C.— Locutions
1. Loc. adj.
a) De droit. Conforme au droit, légitime, légal. Une aristocratie, une situation de droit. La colère est de droit dans les choses équitables; renverser la Bastille est une action violente et sainte (HUGO, Actes et par. 3, 1876, p. 10).
— En partic. [P. oppos. à de fait] Légal. Un procès est un débat légal et judiciaire, où les parties belligérantes mettent les voies de droit à la place des voies de fait (BONALD, Législ. primit., t. 2, 1802, p. 81) :
• 9. ... il importe (...) de faire connaître à tous les Français, ainsi qu'aux puissances étrangères, dans quelles conditions de fait et de droit nous avons pris et exerçons le pouvoir.
DE GAULLE, Mémoires de guerre, 1954, p. 314.
— Spéc. Imposé par la loi. Elle [la procédure d'urgence] est de droit si elle est demandée par écrit par le tiers des membres de l'Assemblée (GINESTET, Ass. parlem. eur., 1959, p. 94).
b) En droit. [P. oppos. à en fait] Légal. La restriction en droit ou en fait des possibilités de convoquer des sessions extraordinaires (BELORGEY, Gouvern. et admin. Fr., 1967, p. 34).
2. Loc. adv.
a) À bon droit. À juste titre, légitimement. Quand parut l'Étranger d'Albert Camus, on put croire à bon droit qu'il comblerait tous les espoirs (SARRAUTE, Ère soupçon, 1956, p. 15).
b) De droit. Légitimement, légalement. Ceux qui, purifiés par le saint baptême, appartiennent de droit à l'Église (MARITAIN, Primauté spirit., 1927, p. 141). Cf. branche ex. 8.
— En partic. [P. oppos. à de fait] Cf. advenu ex. 9.
c) De plein droit. Sans qu'aucune formalité juridique ne soit nécessaire :
• 10. L'associé qui devait apporter une somme dans la société, et qui ne l'a point fait, devient, de plein droit et sans demande, débiteur des intérêts de cette somme, à compter du jour où elle devait être payée.
Code civil, 1804, art. 1846, p. 334.
d) En droit. Légitimement, légalement. La régence était en droit exercée par Foulque. Mais deux ambitions inquiètes cherchaient à profiter sur place de l'éloignement du roi (GROUSSET, Croisades, 1939, p. 145).
— Spéc. Selon les principes ou les règles du droit. Les femmes furent écartées de l'héritage paternel et furent considérées comme impropres à fonder en droit un lien de parenté (GAULTIER, Bovarysme, 1902, p. 147).
e) En droit strict. Selon la lettre de la loi :
• 11. Le traité de Versailles interdisait aux troupes du Reich l'accès des territoires de la rive gauche (...). En droit strict, nous pouvions les réoccuper, dès lors que l'Allemagne reniait sa signature.
DE GAULLE, Mémoires de guerre, 1954 p. 17.
3. Loc. nom. Qui de droit. Personne qui possède l'autorité morale ou légale, ou la compétence nécessaire :
• 12. Le droit de réquisition sera exercé par les armées des Alliés et des États-Unis dans tous les territoires occupés, sauf règlement de comptes avec qui de droit.
FOCH, Mémoires, t. 2, 1929, p. 309.
4. Loc. verbale. Faire droit à. Prendre en considération. Faire droit à un argument. La lettre ci-jointe, à laquelle je prie ton mari de faire droit (FLAUB., Corresp., 1874, p. 200).
a) Faire droit à une personne. Lui rendre justice, veiller au respect de ses droits. Faire droit à chacun (Ac.).
b) Usuel. Faire droit à une demande, à une plainte, à une réclamation. Accorder satisfaction au demandeur. Romagné demanda lui-même la permission de loger sous les combles. On s'empressa de faire droit à sa requête (ABOUT, Nez notaire, 1862, p. 170). J'attendais ta demande et j'y veux faire droit (LECONTE DE LISLE, Poèmes barb., 1878, p. 150).
5. Spéc. Avant dire droit, avant faire droit (cf. avant1 II B 2 a).
a) Emploi adj. Jugement avant dire droit, avant faire droit (cf. CAP. 1936) et, p. ell., un avant faire droit.
b) Emploi adv. Il a été ordonné, avant faire droit, que Madame Paturel ferait preuve, par devant maître Camusot, des faits par elle articulés (MEILHAC, HALÉVY, Boule, 1875, III, 1, p. 83).
Rem. La docum. atteste également la loc. équivalente avant de faire droit (cf. autoriser ex. 5).
II.— Au sing. ou au plur.
A.— Avantage, liberté consentis à l'homme en vertu de la nature ou d'un principe de caractère religieux, moral ou légal. Un droit fondamental; le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes; la déclaration des droits de l'homme. Défendre les droits imprescriptibles de la France (PROUST, Fugit., 1922, p. 638). Cf. avantage ex. 4 :
• 13. Liberté de conscience et d'enseignement, liberté de la presse et d'association, libertés civiles et politiques, liberté de travail et d'industrie, tels sont et nos droits naturels et nos droits acquis...
LAMENNAIS, L'Avenir, 1831, p. 170.
Rem. Dans ce sens, le mot est fréquemment a) Associé à garantie, intérêt, liberté, pouvoir, prérogative, privilège. 40 citoyens égaux en droits et en privilèges (VIGNY, Journal poète, 1843, p. 1192). Conformément à ses droits et prérogatives, il en ordonna la révision [du procès] (FRANCE, Île ping., 1908, p. 315). Chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés proclamés dans la présente déclaration (Déclar. univ. dr. homme, 1949, p. 4). b) Opposé à charge, devoir (infra ex. 23; cf. aussi devoir2 ex. 4 et B 1 d 2e rem. a), obligation. Elles voulaient avoir les droits sans les charges de la maternité (LAMART., Nouv. Confid., 1851, p. 67). Association caractérisée par des droits et obligations réciproques (Traité EURATOM, 1957, p. 372).
1. En partic.
a) Droit + adj.
— [L'adj. désigne la qualité du droit] Droit absolu, exclusif, insaisissable, légitime, sacré, souverain. Constitutions à droits déclarés ou garantis, et constitutions sans déclarations ni garanties des droits (VEDEL, Dr. constit., 1949, p. 186). Cf. aussi PROUST, loc. cit., et ex. 13.
— [L'adj. désigne la nature du droit] Droit légal, moral; droit économique, social; droit féodal; droit civil (cf. civil I B 2 b, c), civique :
• 14. ... plutôt que de sentir Blafaphas souffrant de quelque jalousie, il était prêt à lui promettre, sur son honneur, de ne jamais user de ses droits conjugaux.
GIDE, Les Caves du Vatican, 1914, p. 763.
♦ Spéc. Droit réel. ,,Droit opposable à tous et qui permet à une personne d'exercer un pouvoir sur un bien`` (CAP. 1936).
— [L'adj. désigne l'obj. du droit] Droit électoral, syndical.
— [L'adj. désigne le détenteur du droit] Droit individuel. Privé de ses droits paternels par le Lord chancelier (MAUROIS, Ariel, 1923, p. 304).
♦ Spéc. Droit subjectif. ,,Prérogative appartenant à une personne et lui permettant d'exiger d'une autre soit des prestations ou des abstentions (droits personnels), soit le respect d'une situation dont elle profite (droits réels, droits individuels)`` (CAP. 1936) :
• 15. ... les oppositions entre droit public et droit privé, de même qu'entre droit objectif et droit subjectif, ne sont à observer que dans la tradition du droit occidental...
Traité de sociol., 1968, p. 181.
b) Droit + à + subst. [Le subst. désigne l'obj. du droit] Le dauphin Charles (...) était déchu de ses droits au trône par un document signé de Charles VI (BAINVILLE, Hist. Fr., t. 1, 1924, p. 116). Il n'arrivait pas dans la grande ville en mendiant, mais en homme libre, qui, papiers en mains, fait valoir ses droits au patrimoine commun (ARLAND, Ordre, 1929, p. 107).
— Locutions
♦ Avoir droit à (cf. avoir1 II A 2 a). Pouvoir légitimement exiger. Tout homme a droit à toute la part d'humanité, c'est-à-dire d'action et de joie qu'il peut développer en lui (BARRÈS, Cahiers, 1909-11, p. 186). Mon cher enfant, vous avez droit à des éclaircissements (AUDIBERTI, Quoat, 1946, 2e tabl., p. 71).
♦ Donner droit à :
• 16. À une heure du matin, le gouvernement avait enfin décidé de distribuer les armes au peuple; à trois heures, la carte syndicale donnait droit aux armes.
MALRAUX, L'Espoir, 1937, p. 435.
♦ Spéc. Ouvrir droit à. Remplir les conditions et obligations administratives permettant au détenteur d'un droit d'en faire bénéficier ses ayants droit :
• 17. Les veuves d'allocataires bénéficient au moins pour leurs enfants à charge des prestations familiales auxquelles ouvrait droit leur conjoint.
La Réforme de la Sécurité soc., 1968, p. 49.
Rem. La docum. atteste la constr. plus rare droit + à + inf. Volontiers me serais-je acquis un nouveau droit à vivre, si c'est un droit à vivre que d'être utile en ce monde au bonheur d'une autre âme (GUÉHENNO, Journal homme 40 ans, 1934, p. 176).
c) Droit + de + subst.
— [Le subst. désigne l'orig. du droit, le principe qui confère le droit] Droit d'aînesse, d'ancienneté, d'aubaine (cf. aubaine ex. 2 et 3), de cité (cf. cité ex. 2), de naissance. La succession par droit de primogéniture (CHATEAUBR., Mém., t. 3, 1848, p. 674).
— [Le subst. désigne la qualité ou la fonction à laquelle est attaché le droit] Droit d'auteur, de citoyen (cf. citoyen A). Comme ils insistaient pour faire respecter leur droit légal de locataire, la police, qui, seule, était cause du droit lésé, arrêta les réclamants (CLEMENCEAU, Vers réparation, 1899, p. 264). Olivier avouait, non sans un peu de honte, qu'il ne se souvenait pas d'avoir usé de ses droits d'électeur (ROLLAND, J.-Chr., Buisson ard., 1911, 1273).
— [Le subst. désigne l'obj. du droit] Un reste du droit de jambage qu'avaient exercé ses ancêtres (ARAGON, Beaux quart., 1936, p. 32) :
• 18. ... les droits qui constituent la souveraineté, le droit de paix et de guerre, le droit de législation, le droit de taxe, etc., sortirent de chaque ville et allèrent se concentrer à Rome.
GUIZOT, Hist. gén. de la civilisation en Europe, Leçon 7, 1828, p. 36.
SYNT. Droit d'amendement, d'appropriation, d'asile, d'association, d'aubaine (cf. aubaine ex. 6), de créance, de dissolution, d'expropriation, de grève, de parole; droit de pêche, de préemption, de propriété, de réunion; droit de veto; droit de vie et de mort; droit de cuissage.
— [Le subst. désigne le détenteur du droit; il est précédé de l'art. déf.] Les plus inutiles atrocités et les plus violentes atteintes aux droits de l'humanité (FOCH, Mém., t. 1, 1929, p. 11). Respecter les droits de la défense et les règles de la justice pour [les] prisonniers politiques (GIDE, Journal, 1938, p. 1320). Cf. aussi PROUST, loc. cit.
SYNT. Droit de l'individu, du faible, de l'opprimé; droit des minorités, des nations, des peuples.
♦ Spéc. Les droits de l'Homme. ,,Ensemble des garanties qui appartiennent, en face de la puissance publique, à toute personne humaine, quels que soient sa nationalité, son âge et son sexe, c'est-à-dire l'égalité et la liberté civiles et le droit de propriété`` (CAP. 1936). Déclaration des droits de l'Homme; commission, ligue des droits de l'Homme. Cette liste était la nomenclature complète des sections du quatrième arrondissement de la Société des Droits de l'Homme, avec les noms et les demeures des chefs de sections (HUGO, Misér., t. 2, 1862, p. 36).
d) Droit + de + inf. Le droit de vivre (cf. conquérir ex. 6), d'agir, de choisir, d'intervenir, d'ordonner :
• 19. L'armistice signé (...) les hommes et les femmes subitement retrouvèrent (...) le droit d'aimer, de s'aimer, sans que cela parût une gageure héroïque ou une provocation au destin.
GUÉHENNO, Journal homme 40 ans, 1934 p. 219.
— Locutions
♦ Avoir le droit de. Avoir légitimement ou légalement la liberté, la possibilité de :
• 20. J'ai le droit de plaisanter ma mort, si la plaisanterie me réjouit. (...) J'ai le droit de savourer les paradoxes.
SAINT-EXUPÉRY, Pilote de guerre, 1942, p. 333.
♦ Être en droit de. Être légitimement ou légalement autorisé à. Je comprends aujourd'hui combien l'abbé était en droit d'accuser mon orgueil dans ma révolte d'hier (GIDE, École femmes, 1929, p. 1291) :
• 21. Nous sommes en droit de penser que les chercheurs, brisant ou construisant les atomes à volonté, sauront réaliser des réactions nucléaires en chaînes explosives.
GOLDSCHMIDT, L'Aventure atomique, 1962, p. 21.
e) Subst. + de + art. + droit. Garantie d'un droit; exercice, jouissance d'un droit; déchéance, perte, privation, violation d'un droit. L'abolition des droits féodaux (L. FEBVRE, Combats pour hist., Henri Pirenne, 1920, p. 364). Les « services civils » et les « services militaires » comptent pour l'ouverture du droit à pension (LUBRANO-LAVADERA, Législ. et admin. milit., 1954, p. 260).
f) Verbe trans. + droit. Sauvegarder les droits de la personne (BIOT, Pol. santé, 1933, p. 59). Ils finissaient par craindre vaguement d'outrepasser leur droit et de s'attirer quelque fâcheuse affaire (AMBRIÈRE, Gdes vac., 1946, p. 280). Cf. aussi ARAGON, ARLAND, LAMART., loc. cit., et GIDE, Journal, 1938, p. 1320 :
• 22. ... il demeure entendu que cette procédure est exceptionnelle. Le gouvernement français reprend tous ses droits, dès lors que ses représentants sont en mesure de remplir à nouveau leurs fonctions.
DE GAULLE, Mémoires de guerre, 1959, p. 485.
SYNT. Abandonner, abdiquer, abolir un droit; accorder, attribuer, céder (cf. céder I A 1, en partic.), concéder un droit; conférer (cf. conférer ex. 2), exercer, garantir, invoquer un droit; perdre, proclamer, reconnaître, revendiquer, usurper un droit; faire valoir ses droits.
g) Verbe trans. indir. + droit. Cf. BAINVILLE, ROLLAND, loc. cit., et ex. 14 :
• 23. ... le peuple tomba en république; c'est-à-dire qu'il répudia son héritage, qu'il renonça à ses droits et à ses devoirs, pour se gouverner à son gré...
FRANCE, L'Orme du mail, 1897, p. 149.
SYNT. Abuser (cf. abuser ex. 8), bénéficier, jouir, être investi d'un droit; rentrer dans ses droits; rétablir (qqn) dans ses droits.
h) Verbe pronom. + droit. S'arroger, se reconnaître, se réserver un droit (le droit de). Je me refuse le droit de vous conseiller aussi longtemps que je vous connaîtrai si mal (MONTHERL., Songe, 1922, p. 14). C'était comme si je m'étais cru des droits sur tes pensées (ARLAND, Ordre, 1929, p. 50). Cf. aussi Déclar. univ. dr. homme, loc. cit.
2. Loc. diverses
a) De quel droit...? En vertu de quel droit, sur quelle base? Si Jean se tait sur la naissance virginale, de quel droit affirmer pour lui qu'il la rejette? (MALÈGUE, Augustin, t. 1, 1933, p. 351).
b) Être dans son (bon) droit. Avoir le (bon) droit de son côté, avoir raison. Je ne plaide que pour les gens qui me paraissent être dans leur droit (MONTHERL., Fils personne, 1943, II, 3, p. 300). Cf. aussi devoir ex. 4.
c) Être assuré, être certain, avoir la certitude de son (bon) droit. Être certain d'avoir raison. Si nous avons pu résister jusqu'à présent, c'est que la certitude de notre bon droit nous servait d'armature (MARTIN DU G., J. Barois, 1913, p. 426).
d) (Avoir) des droits sur qqn. Exercer légitimement son autorité sur quelqu'un, (avoir) des exigences légitimes à son égard. Le seul fait qu'elle [ma mère] revendiquât des droits sur moi me glaçait (BEAUVOIR, Mém. j. fille, 1958, p. 191) :
• 24. Le refus de se soumettre à l'Église devait nécessairement entraîner le refus de se soumettre à Dieu, et de reconnaître ses droits sur l'État...
MARITAIN, Primauté du spirituel, 1927, p. 115.
e) Ayant-droit (cf. ayant(-)cause rem.). L'ensemble des parts recueillies par des conjoints et des ayants droit en ligne directe (Univ. écon. et soc., 1960, p. 4809).
f) Passe-droit. Nous pouvons du reste nous faire une idée des passe-droits qui se pratiquent dans l'armée allemande (DAVOUT, Réorg. milit., 1871, p. 16).
3. P. métaph. ou au fig. Déjà s'éclaire la ville, vers le centre, où sont les plaisirs. Car la nuit reprend ses droits sur les hommes, elle restitue à la folie, au rire, à l'ivresse, au plaisir, les mannequins corrects de l'ouest (ARAGON, Beaux quart., 1936, p. 192) :
• 25. ... le mathématicien, lorsqu'il extrapole par analogie, s'expose à voir les faits lui donner un démenti; mais le risque ainsi couru ne saurait lui interdire cette forme d'exploration, pourvu que la logique ne perde jamais ses droits.
Les Grands courants de la pensée mathématique, 1948, p. 50.
B.— P. méton. Somme d'argent perçue par l'administration (ou par une personne privée [infra droit d'auteur]) en échange d'une autorisation, d'un droit (supra II A). La folle avoine, auprès du lierre son voisin, Pousse, sans acquitter le droit diocésain! (HUGO, Légende, t. 6, 1883, p. 116). Les droits de timbre, tu le sais, sont à la charge de la personne qui bénéficie du reçu (DUHAMEL, Cécile, 1938, p. 110) :
• 26. Comptez et n'en oubliez rien : droit d'entrée, droit de remuage, droit de patente, droit de police, droit direct, droits indirects, droits réunis plusieurs ensemble, droit de mutation, c'est tout; faisant bien chaque année treize cents francs pour les courtisans, ou douze cent nonante et six, que je ne mente.
COURIER, Pamphlets pol., Gazette du village, 1823, p. 181.
SYNT. Droits régaliens, seigneuriaux; droit de circulation (cf. circulation C); droit de douane, d'enregistrement; droit d'octroi, de péage; droit de visa; paiement, perception d'un droit; payer, régler un droit; prélever, percevoir un droit; être dispensé, exempté d'un droit; être frappé d'un droit.
♦ Droit constaté. ,,Droit recouvré postérieurement au fait qui lui a donné naissance`` (CAP. 1936). Registre des droits constatés (Encyclop. éduc., 1960, p. 116).
♦ Droit d'auteur (cf. auteur II C 3 b) :
• 27. ... la série des Thibault était suspendue depuis 1929; la vente baissait de trimestre en trimestre. Mes droits d'auteur se trouvaient réduits des quatre cinquièmes...
MARTIN DU GARD, Souvenirs autobiographiques et littér., 1955, p. XCIC.
Prononc. et Orth. :[]. Mais aussi [] post. ds WARN. 1968 (cf. droit1). Le mot est admis ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. A. Gén. au sing., employé absol. 1. 842 « ce qui est moral et juste, l'ensemble des principes moraux et de justice qui sont censés régir les relations entre les hommes » (Serments de Strasbourg ds HENRY Chrestomathie t. 1, 6); 2. a) 1155 « lois et coutumes d'un peuple, législation » (WACE, Brut, éd. I. Arnold, 5238); b) début XIIIe s. « règlement ou principe particulier » ici droit del geu (R. DE HOUDENC, Vengeance Raguidel, éd. M. Friedwagner, 5768); c) fin XIIIe s. « science des lois » (R. LULLE, Doctrine d'enfant, éd. A. Llinarès, § 76). B. Au sing. et au plur. 1. ca 1100 « ce qui est permis ou exigible selon les principes d'une morale » (Roland, éd. J. Bédier, 3290); 2. ca 1100 « ce qui est permis ou exigible selon la législation ou des règlements officiels » ici spéc. avoir dreit (en) « avoir des droits (sur) » (Roland, 2747); 3. a) 1160-74 « ce qui est dû selon un règlement, une loi, un traité; redevance » (WACE, Rou, éd. A. J. Holden, III, 3770); b) ca 1455 « revenu, salaire pour quelque chose » (Archives du Nord, B 3537, n° 125792 ds IGLF). Du b. lat. directum, substantivation de l'adj. directus (droit2, droite), attesté au VIe s. au sens général de « justice, application des principes du droit » (Édit de Chilpéric ds NIERM.), puis au VIIIe s. au sens de « règles du droit, ensemble des lois » (Concil. Vern., ibid.) et de « droit officiel sur quelque chose (cf. B 2 supra) » (D. Karolin., ibid.), cf. aussi au VIe s. verbum directum « la parole juste, le bon droit » (Grégoire de Tours, ibid.). Fréq. abs. littér. :19 278. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 33 234, b) 27 435; XXe s. : a) 26 943, b) 22 722. Bbg. DAUZAT Ling. fr. 1976, p. 13. — FABRE-LUCE (A.). Les Mots qui bougent. Paris, 1970, p. 71. — GOHIN 1903, pp. 334-335. — RITTER (E.). Les Quatre dict. fr. B. de l'Inst. nat. genevois. 1905, p. 406.
1. droit, droite [dʀwa, dʀwat] adj. et adv.
ÉTYM. XIIe; dreit, 1050; du lat. directus. → Direct.
❖
———
I Adj. (le plus souvent après le nom en épithète).
1 Qui est sans déviation, d'un bout à l'autre. || Barre, tige droite. || Arbre, poteau droit. || Avoir le corps droit, la taille droite. || Se tenir droit. ☑ Être droit comme un cierge, un échalas, un I, un jonc, un peuplier, un pieu, un piquet, une statue. ⇒ Raide. || Un nez droit. → Un nez grec. — (Personnes). || Tenir la tête droite (→ Attitude, cit. 10).
1 Levez la tête. Encor. Soyez droite, approchez.
Faut-il tendre toujours le dos quand vous marchez ?
J.-F. Regnard, le Distrait, I, 4.
2 Te voilà sur tes pieds droit comme une statue.
Dégourdis-toi.
Racine, les Plaideurs, III, 3.
3 (…) un palmier gigantesque, droit comme un mât.
E. Fromentin, Un été dans le Sahara, II, p. 114.
4 Finalement, raides et lents, droits comme des I, les deux corps se penchèrent l'un vers l'autre (…)
H. Bergson, le Rire, p. 60.
5 Son nez était droit et mince, quoique les narines en fussent bien ouvertes.
J. Green, Adrienne Mesurat, II, IV, p. 237.
6 (…) il ouvrit largement la porte d'entrée, se tenant très droit, le visage rigide, comme M. Pommerel lorsqu'il quête à la porte du temple.
J. Chardonne, les Destinées sentimentales, p. 50.
REM. En parlant des personnes, de leur corps, l'adj. implique en général aussi l'idée de verticalité. → ci-dessous, 3.
2 Dont la direction est constante; qui va d'un point à un autre par le chemin le plus court. ⇒ Direct, rectiligne. || Ligne, voie droite. || Route, rue droite, tirée au cordeau (⇒ Aligné). || Droit comme une flèche. || Chemin droit, sans coudes, sans tournants. || C'est tout droit; c'est droit devant vous. || Fil droit. ⇒ Tendu. || Le droit fil d'une étoffe (I., 1.), et, fig., le droit fil. || Aller de droit fil. ☑ Dans le droit fil de quelque chose, dans la même direction.
7 (…) des prairies traversées d'une seule allée large, droite, bordée d'arbres géants.
J. Chardonne, les Destinées sentimentales, II, p. 222.
7.1 Le droit fil politique de l'Express est aujourd'hui le même qu'en 53.
F. Giroud, Si je mens, p. 196.
♦ En ligne droite. ⇒ Directement. || Ce chemin vous conduira chez vous en droite ligne. || Il y a deux kilomètres en ligne droite (→ À vol d'oiseau). — ☑ Fig. Hériter de quelqu'un en droite ligne.
8 Un lit de bois clair (…) venait en droite ligne d'un grand magasin de Paris (…)
J. Green, Adrienne Mesurat, I, XIII, p. 116.
♦ Fig. || La droite voie : la voie du salut, en termes de dévotion. ☑ Le droit chemin (cit. 34), la voie droite, la droite voie (littér.) : le chemin de l'honnêteté, de la vertu… || Un raisonnement en ligne droite, direct, simple.
9 (…) les voies de Dieu sont droites; mais les méchants y trébucheront.
Pascal, Pensées, VIII, 571.
10 (…) ceux qui ne marchent que fort lentement peuvent avancer beaucoup davantage, s'ils suivent toujours le droit chemin, que ne font ceux qui courent et qui s'en éloignent.
Descartes, Discours de la méthode, I.
11 L'âme féminine est d'une simplicité à laquelle les hommes ne peuvent croire. Où il n'y a qu'une ligne droite ils cherchent obstinément la complexité d'une trame : ils trouvent le vide et s'y perdent.
Pierre Louÿs, Aphrodite, II, II.
12 On vous montre la voie droite; vous n'avez qu'à suivre. C'est vrai pour la religion, c'est vrai pour la discipline de l'esprit, pour l'habitude de raisonner (…)
A. Thibaudet, Réflexions sur la littérature, p. 252.
13 Combien de garçons, engagés déjà sur de mauvaises pentes, ai-je ramenés dans le droit chemin.
Martin du Gard, Notes sur André Gide, Pl., p. 1399.
♦ (1890). Sports. Escrime. || Coup droit : coup porté sans dégager le fer. — Fig. || C'est un coup droit porté à ses prérogatives. — (1927). Tennis. || Coup droit (angl. drive), par oppos. au revers.
♦ Mar. || Mettre la barre droite, parallèle à la quille. — Archit. || Porte, voûte droite, perpendiculaire à une direction principale (opposé à biais, II.).
3 Perpendiculaire à l'horizontale. ⇒ Vertical. — (Choses). || Ce mur, ce pylône n'est pas droit, il penche. || Falaise droite. ⇒ Abrupt, à-pic. || Tenez la soupière bien droite, sans la pencher. || Remettre droit ce qui est tombé. ⇒ Redresser. || Une écriture droite, opposé à penchée. — (Personnes). || Être droit sur ses pieds. ⇒ Debout. || Se mettre droit. ⇒ Lever (se), redresser (se). — Avec l'idée de raideur. → ci-dessus, 1. (cit. 2 et 6).
14 Celui qui reste droit devant celui qui tombe (…)
Hugo, les Années funestes, XL.
15 (…) ici le roc s'est dentelé comme une scie, là ses tables trop droites ne souffrent ni le séjour de la neige, ni les sublimes aigrettes des sapins du nord (…)
Balzac, Séraphîta, Pl., t. X, p. 458.
15.1 Pour la vingtième fois, il la suppliait de ne pas accrocher sa capeline sur le coin d'un cadre (…) elle soutenait que c'était sans importance, que sa coiffure n'abîmait pas la dorure, qu'il n'était pas utile que le tableau fût droit.
Huysmans, les Sœurs Vatard, p. 224.
♦ Spécialt. Dont les bords sont verticaux. || Gilet droit, veston droit, par oppos. à gilet, veston croisé. — En parlant des vêtements féminins. || Manteau droit, non cintré ou sans ampleur. || Jupe droite, sans ampleur.
♦ (1828). || Piano droit, dont les cordes et la table d'harmonie sont verticales.
♦ (1864). Anat. || Muscle droit : muscle dont les fibres sont verticales dans la station debout. — N. m. || Droits antérieurs de la tête; droit latéral de la tête. || Grand droit : muscle de la paroi antérieure de l'abdomen. || Droit interne, à la partie interne de la cuisse.
4 Géom. || Angle droit, formé par deux droites perpendiculaires (90°); opposé à aigu, obtus. || Le fil à plomb forme un angle droit avec l'horizontale. || Tracer un angle droit avec une équerre, un té. || Ces deux rues sont à angle droit. ⇒ Perpendiculaire. || Les angles droits d'un rectangle, d'un carré. — N. m. || Un droit. || La somme des angles d'un triangle est égale à deux droits (180°).
♦ ☑ Loc. Au droit de… : à angle droit.
16 Il (le peintre) a gardé de ses séjours en Orient je ne sais quel amour des angles droits, des horizons rectilignes, des intersections brusques, dont il a composé pour ainsi dire la formule et la géométrie de son art.
E. Fromentin, Une année dans le Sahel, p. 231.
♦ Par ext. || Section droite. || Prisme droit, dont les arêtes sont perpendiculaires aux bases. || Cylindre, cône droit, dont l'axe est perpendiculaire à la base. — Ascension droite d'un astre. ⇒ Ascension, 2.
♦ (Objets concrets). En angle droit, en angle (opposé à rond, arrondi). || Col droit. || Ciseaux à bout droit.
1 (Personnes). Qui ne s'écarte pas d'une règle (morale ou intellectuelle). || Un homme droit, simple et droit. ⇒ Équitable, honnête, juste, probe; franc, loyal, sincère. || Homme droit et ferme. → (vx). Barre (cit. 2) de fer. || Volonté droite. || Cœur droit. ⇒ Pur. || Conscience droite. → Probe, cit. || Intention droite.
17 (…) un homme simple et droit et craignant Dieu, et s'éloignant du mal.
Bible (Sacy), Job, I, 8.
18 Comme toute conscience n'est pas droite, tout ce qui est selon la conscience n'est pas toujours droit (…)
Bourdaloue, Fausse conscience, 1er avent.
19 (…) il faut le dire à l'honneur des lettres, la philosophie fait un cœur droit, comme la géométrie fait l'esprit juste (…)
Voltaire, Dict. philosophique, Locke.
20 Le cœur de l'homme est toujours droit sur tout ce qui ne se rapporte pas personnellement à lui.
Rousseau, Lettre à d'Alembert.
21 (…) elle aimait les choses honnêtes, ses penchants étaient droits et vertueux (…)
Rousseau, les Confessions, V.
♦ Qui exprime la droiture. || Un visage droit et franc. || Un regard droit. → Crânerie, cit. 1.
2 (Raison, pensée, jugement…). Qui suit un raisonnement correct, ne dévie pas. || Une pensée droite, un jugement droit. ⇒ Judicieux, sain, sensé; direct, positif, strict. || Sa parole est droite et ferme. || Jugement, sens droit. — Vieilli ou littér. (avant le nom). || La droite raison.
22 Il se trompe dans tous ses raisonnements, il est tout de travers : j'ai tâché de le redresser avec des raisons toutes droites et toutes vraies (…)
Mme de Sévigné, Lettres, 794, 29 mars 1680.
23 Dans la droite raison jamais n'entre la vôtre,
Et toujours d'un excès vous vous jetez dans l'autre.
Molière, Tartuffe, V, 1.
♦ Qui exprime cette pensée.
24 Ce qui est élu par la fantaisie est exécrable; ce qui est conçu par l'autorité est judicieux. Ainsi doit s'exprimer une voix saine, stricte et droite.
Pierre Louÿs, les Aventures du roi Pausole, V, p. 38.
3 Techn. || Monnaie droite, qui a le titre prescrit par la loi.
———
II Adv.
1 Selon une ligne droite. ⇒ Droitement (vx), dret (régional). || Viser droit. || Écrire droit. || Marcher droit, aller (cit. 21) droit, droit devant soi. || Courir, s'enfuir, foncer droit devant soi. || Ce chemin mène, conduit tout droit chez vous. ⇒ Directement. || Aller droit au but. — Interj. || Droit au but !
25 Mère écrevisse un jour à sa fille disait :
Comme tu vas, bon Dieu ! ne peux-tu marcher droit ?
La Fontaine, Fables, XII, 10.
26 Chez le marchand tout droit il s'en alla (…)
La Fontaine, Fables, VIII, 18.
27 Il ne s'occupait point de retraites; il allait droit devant lui comme ces voies romaines qui traversent sans se détourner les précipices et les montagnes.
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. III, p. 174.
28 Il repartit, sans s'en apercevoir, cheminant droit devant lui.
Martin du Gard, les Thibault, t. III, p. 103.
♦ Dans un plan horizontal. || Tenir droit un plateau, une assiette pleine de soupe.
2 Fig. Par la voie la plus courte, la plus rapide. ⇒ Directement. ☑ Aller (cit. 67) droit au but, droit à ses fins, sans détour, sans ambages (→ Tout de go, d'emblée). ☑ Parler droit, brièvement et simplement. || Parler droit pour être compris de tous (→ Comprendre, cit. 41). ☑ Cette intention me va droit au cœur (cit. 92). || Conduire une arme de trait droit à son but (→ 2. Droit, cit. 1.1), droit au but.
29 Cette inquiétude trop bien fondée pour une santé qui m'est si chère, avec l'absence d'une personne comme vous, dont tout me va droit au cœur et dont rien ne m'est indifférent (…)
Mme de Sévigné, Lettres, 729 bis, 13 sept. 1679.
30 Dans ce conflit d'ambitions, au milieu de ces difficultés entrecroisées, allez toujours droit au fait, marchez résolument à la question, et ne vous battez jamais que sur un point, avec toutes vos forces.
Balzac, le Lys dans la vallée, Pl., t. VIII, p. 894.
31 Sans doute il eût été bien simple d'aller droit au fait; mais précisément mon esprit répugne au plus simple et prend irrésistiblement le biais.
Gide, les Faux-monnayeurs, III, XV, p. 458.
32 Il y a peut-être des médecins mathématiciens, qui traitent leur malade comme un théorème, et qui vont droit au but comme un boulet de canon.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. III, XXII, p. 293.
♦ ☑ Marcher droit : bien se conduire, être obéissant.
33 Mais c'est égal, je pars en guerre et je tuerai tout le monde. Gare à qui ne marchera pas droit !
A. Jarry, Ubu Roi, III, 8.
♦ Sans s'écarter de la vérité. || Juger, penser droit.
3 Selon un axe vertical, ou dans un plan vertical. || Remettre un tableau droit. || Tiens-toi droit, ma petite !
❖
CONTR. Anfractueux, arqué, brisé, cambré, contourné, coudé, courbe, courbé, déjeté, détourné, déversé, faussé, fléchi, infléchi, recourbé, sinueux, tordu, tors, tortu, tortueux, voûté; crochu, retroussé (nez). — Couché, étalé, renversé; horizontal. — Aigu, obtus (angle). — Faux, fourbe, hypocrite, trompeur. — Anormal, bizarre, faux.
DÉR. Droitement, droiture.
————————
2. droit, droite [dʀwa, dʀwat] adj. et n.
ÉTYM. XVe; même mot que le précédent; a supplanté l'anc. franç. destre. → Dextre.
❖
———
I Adj.
1 Qui est du côté opposé à celui du cœur de l'observateur, au côté gauche. ⇒ Dextre, et préf. dextro-. || Le côté droit; le bras, le flanc, le pied droit. || Boiter (cit. 3) du pied droit. || Se lever du pied droit. || La jambe droite. || La main droite. ⇒ Droite. || Prédominance de la main droite. ⇒ Droiterie, droitier; dextralité. || L'œil droit. || Hémisphère droit et hémisphère gauche du cerveau. Par ext. || Le cerveau droit, le cerveau gauche. — La partie droite d'un tableau, d'une gravure (quand on regarde l'objet). || L'aile droite, la partie droite d'un bâtiment (considérée en se plaçant le dos à la façade). || Le côté droit d'un navire (en regardant vers l'avant). ⇒ Tribord. || La rive droite d'une rivière (dans le sens du courant). Par ext. || La rive droite, dans une ville, les quartiers qui se trouvent sur cette rive. — Cristal droit. ⇒ Dextrogyre.
1 Pourtant les trois promotions étaient là au complet, les littéraires dans la moitié droite de la salle, les scientifiques dans la moitié gauche.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. III, III, p. 47.
1.1 La main droite est aussi la main adroite, celle qui conduit l'arme droit à son but.
Roger Caillois, l'Homme et le Sacré, p. 51.
♦ ☑ Fig. Être le bras droit de quelqu'un, être son principal agent.
♦ Allus. biblique. || Que ta main gauche ne sache pas ce que fait ta main droite. ⇒ Aumône, cit. 2.
2 Que si votre œil droit vous est un sujet de scandale, arrachez-le et jetez-le loin de vous (…) Et si votre main droite vous est un sujet de scandale, coupez-la et jetez-la loin de vous (…)
Bible (Sacy), Évangile selon saint Matthieu, V, 29-30.
♦ À main droite : du côté droit; à droite.
2 Spécialt. Dans une assemblée politique. || Centre droit : la partie du centre qui siège près de la droite (⇒ Droite, I., B.).
———
II N. m.
1 ☑ Loc. adv. (1532, à droict, « du côté droit », Rabelais). Vx. À droit : à droite. ⇒ Droite (cit. 7); → Débauche, cit. 2.
2 Droit. N. m. (1898, in Petiot). Boxe et cour. Le poing droit; coup porté par ce poing. ⇒ Droite (I., C., 2.). || Direct, crochet (cit. 2) du droit. || Le challenger a reçu un droit terrible.
———
III Droite, n. f. ⇒ Droite.
❖
CONTR. Gauche.
DÉR. Droite, droiterie, droitier.
————————
3. droit [dʀwa] n. m.
ÉTYM. XIIe; dreit, 842; du bas lat. directum, de l'adj. directus. → 1. Droit.
❖
♦ Ce qui est conforme à une règle.
———
I Un droit, des droits. Ce qui est exigible, ce qui est permis, dans une collectivité humaine (⇒ Pouvoir).
1 Ce qui est permis par conformité à une règle morale, sociale… || Droits naturels. || Les droits de l'homme, de l'individu, de la personne humaine. || Des droits sacrés, imprescriptibles, inaliénables.
♦ Reconnaître, consacrer les droits de quelqu'un. || Contester un droit. || Violer un droit. || Priver quelqu'un de ses droits. || Aller sur les droits de quelqu'un. || Agir au mépris des droits de…
♦ Exercer son droit. || Faire quelque chose en vertu du droit de… || Faire valoir ses droits. || Revendiquer, soutenir son droit. || S'arroger un droit. || Conquérir un droit. || Cela lui confère le droit…; il a acquis le droit de… || Rentrer dans ses droits, recouvrer ses droits. || Renoncer à tous ses droits, se démettre (cit. 10) de ses droits. || Céder ses droits; cession de droit.
1 Un auteur n'y fait pas (au théâtre) de faciles conquêtes (…)
Chacun le peut traiter de fat ou d'ignorant;
C'est un droit qu'à la porte on achète en entrant.
Boileau, l'Art poétique, III.
2 La liberté est le droit de faire tout ce que les lois permettent (…)
Montesquieu, l'Esprit des lois, XI, 3.
3 Nul ne possède d'autre droit que celui de toujours faire son devoir.
4 Non seulement tout homme a des droits, mais tout être a des droits.
Renan, Dialogues et fragments philosophiques, préface, Œ., t. I, p. 556.
5 Attendons avec espérance et ne renonçons jamais à nos droits.
A. Jarry, Ubu Roi, II, 5.
6 Je veux que Jean-Paul ait pour mère une femme indépendante, une femme qui se soit assuré, par son travail, le droit de penser ce qui lui plaît, et d'agir selon ce qu'elle croit être bien (…)
Martin du Gard, les Thibault, t. IX, p. 103.
♦ Droits de l'homme. (1774). Spécialt. Ces droits définis par la Constituante de 1789 et considérés comme droits naturels. || La Déclaration des droits de l'homme précède la Constitution du 3 septembre 1791. || La Ligue des droits de l'homme : mouvement de défense des droits de l'homme. || La Déclaration universelle des droits de l'homme. || Défense des droits de l'homme. || Violations des droits de l'homme.
7 Les Représentants du Peuple Français, constitués en Assemblée Nationale (…) ont résolu d'exposer, dans une déclaration solennelle, les droits naturels, inaliénables et sacrés de l'homme (…)
Art. 1. Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits.
Art. 2. Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l'homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté, et la résistance à l'oppression (…)
Art. 12. La garantie des droits de l'homme et du citoyen nécessite une force publique (…)
Déclaration des droits de l'homme (Constit. 1791).
8 Au lendemain de la victoire remportée par les peuples libres sur les régimes qui ont tenté d'asservir et de dégrader la personne humaine, le peuple français proclame à nouveau que tout être humain, sans distinction de race, de religion, ni de croyance, possède des droits inaliénables et sacrés. Il réaffirme solennellement les droits et les libertés de l'homme et du citoyen consacrés par la Déclaration des Droits de 1789 et les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République.
Constitution de la République française, 27 oct. 1946, Préambule.
9 Le premier des droits de l'homme c'est la liberté individuelle, la liberté de la propriété, la liberté de la pensée, la liberté du travail.
Jaurès, Hist. socialiste…, t. I, p. 186.
9.1 Faut-il revendiquer les droits de la parole ? Certes, mais pas n'importe quelle parole et pas n'importe quels droits. Est-il possible de mettre le droit à la parole à côté du droit au travail, du droit à l'instruction, à la santé, au logement, à la Ville ? Une déclaration des droits concrets de l'Homme, ou des droits de l'Homme concret, n'aurait ni plus ni moins d'efficacité que l'ancienne. Peut-être le droit à la parole se situe-t-il à côté du droit à la Ville, comme horizon de civilisation plus que comme droit tendant à sa reconnaissance institutionnelle.
Henri Lefebvre, la Vie quotidienne dans le monde moderne, p. 298.
9.2 (…) c'était horrible. Je n'ai pas dit qu'on n'y peut rien, Maryvonne. Il y a des organisations puissantes qui s'en occupent. Il y a Amnesty International et la Ligue des Droits de l'Homme.
É. Ajar (R. Gary), l'Angoisse du roi Salomon, p. 277.
♦ Le droit de (quelqu'un) à… || Le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes (⇒ Autodétermination). || Le droit de l'individu au travail. || Le droit à la parole.
♦ Avoir le droit de… (avec l'inf.). ⇒ Possibilité, pouvoir, qualité; autorisation, permission. || Avoir le droit d'entrer quelque part, de faire quelque chose. || Il en a, il n'en a pas le droit. || Il a le droit d'en parler (→ Il a voix au chapitre). || Vous n'avez pas le droit de dire cela (→ Vous êtes mal venu à, de…). || Vous en avez le droit. || Le droit de vivre, d'aimer. — Par ext. || Un médecin n'a pas le droit d'être négligent, il a le devoir moral de ne pas être négligent.
10 Chacun a le droit de défendre son bien (…)
Pascal, les Provinciales, 7.
11 Il y a là-dedans des lettres de ma novia. Je ne veux pas qu'on les lise. Entendez-vous, brutes, vous n'avez pas le droit de les lire !
P. Mac Orlan, la Bandera, V, p. 59.
12 Certaine insuffisance de la glande thyroïde se rencontre chez les maigres aussi bien que chez les gras; s'ensuit-il que je n'aurai pas le droit d'en parler, dans un exposé qui traite de la seule obésité ?
J. Paulhan, Entretien sur des faits divers, p. 95.
13 Et toi tu n'as pas le droit de me juger, puisque tu n'iras pas te battre.
Sartre, le Sursis, p. 56.
♦ Avoir droit à… (suivi d'un subst.). || Vous avez droit à des excuses. || Il n'y a pas droit. Fam. || Avoir droit à (quelque chose de fâcheux) : devoir subir, ne pouvoir éviter. || Il a eu droit à des reproches. || On a eu droit à une de ces engueulades ! || Si la guerre éclate, on y a droit !, on n'y coupera pas.
13.1 Celle-là, dit l'homme en fouillant dans une autre poche, je peux dire que je l'ai vue tomber. J'ai eu que le temps de m'aplatir. Ça a fait zim ! et j'ai bien cru que j'y avais droit.
Robert Merle, Week-end à Zuydcoote, p. 103.
♦ Avoir un droit sur quelqu'un, sur quelque chose. || Avoir un droit moral sur… || Prendre son droit, ses droits…
14 — Quel droit as-tu reçu d'enseigner, de prédire ?
— Le droit qu'un esprit vaste et ferme en ses desseins
A sur l'esprit grossier des vulgaires humains.
Voltaire, Mahomet, II, 5.
♦ Avoir droit sur la vie de quelqu'un. ☑ Avoir sur quelqu'un droit de vie et de mort.
15 Un particulier n'a pas droit sur la vie d'un autre (…)
Pascal, les Provinciales, 14.
16 Il a sur nous un droit et de mort et de vie (…)
Corneille, Horace, V, 2.
♦ ☑ Loc. Avoir (un) droit de regard sur (qqch.).
♦ Donner à quelqu'un le droit de… || Qui vous a donné le droit de faire ceci ? ⇒ Autoriser, permettre.
♦ ☑ Loc. où droit a une valeur collective (le droit) par rapport à une personne (« ensemble des droits de quelqu'un »). En droit. || Être en droit de… : avoir le droit de…
17 Pour être en droit de lui dire mes sentiments (…)
Mme de Sévigné, Lettres, 44.
18 Le père de famille est en droit de punir chacun de ses enfants ou petits-enfants qui fait une mauvaise action.
Fénelon, Télémaque, VII.
19 (…) ces conditions, qu'un auteur (…) est en droit d'exiger (…)
La Bruyère, Préface.
♦ ☑ Vieilli ou littér. Prendre droit sur… : s'appuyer sur, s'autoriser de…
20 Je prends droit sur ce qu'il nous a lui-même avoué (…)
Bossuet, Tradition défendue sur… la communion.
♦ ☑ De quel droit ? : en vertu de quel droit, de quelle raison, de quelle autorité ?
21 De quel droit les Français, portant partout leurs pas,
Se sont-ils établis dans nos riches climats ?
Voltaire, Tancrède, I, 1.
♦ ☑ Être dans son droit, dans son bon droit.
21.1 Le mouvement de révolte s'appuie en même temps sur le refus catégorique d'une intrusion jugée intolérable et sur la certitude confuse d'un bon droit, plus exactement l'impression, chez le révolté, qu'il est « en droit de… ».
Camus, l'Homme révolté, p. 7.
2 Dr. et cour. (de nombreux syntagmes sont seulement de l'usage juridique). Faculté reconnue par la loi à une personne pour lui permettre de faire des actes déterminés. ⇒ Faculté, habilité, prérogative, privilège. || Droit exclusif. ⇒ Monopole. || Titulaire d'un droit. — Droits acquis, attribués en vertu d'une règle antérieure ou d'un usage, par oppos. aux droits naturels. — Droits civiques, droits du citoyen, droits politiques : droits attachés à la qualité de citoyen et dont les principaux sont constitués par l'électorat, et l'éligibilité (⇒ Élection, vote). || Priver quelqu'un de ses droits politiques. ⇒ Dégradation, cit. 1; antiq. atimie. — Droits civils, droits privés. || Droits réels, opposables à tous et permettant d'exercer un pouvoir sur un bien (⇒ Propriété, usage, usufruit; habitation; emphytéose, servitude). || Droits de créance ou droits personnels, donnant à une personne (⇒ Créancier) le droit d'exiger d'une autre (⇒ Débiteur) une prestation. || Droits réels accessoires (ex. : le droit de suite, permettant de saisir un bien en quelque main qu'il se trouve). || Droits mobiliers, immobiliers. — Droits du patrimoine, ayant une valeur pécuniaire. Anciennt. || Droits de famille, ayant pour objet les rapports de famille (ex. : droit de garde, droit de visite…). — Droit éventuel, issu d'un acte auquel un élément essentiel fait défaut. — Droit relatif : droit existant au profit d'une personne contre une autre personne déterminée, par oppos. au droit absolu, opposable à tous. — Droit litigieux, sur le fond duquel il y a une contestation donnant lieu à un procès. — Auteur, ayant cause d'un droit. || Ayant droit. ⇒ Ayant droit. || Défendre ses droits devant la justice. ⇒ Procédure, procès. || Personnalités chargées, dans divers pays, de faire respecter les droits des citoyens face à l'administration. ⇒ Médiateur, ombudsman, protecteur (du citoyen).
22 L'exercice des droits civils est indépendant de l'exercice des droits politiques, lesquels s'acquièrent et se conservent conformément aux lois constitutionnelles et électorales.
Tout Français jouira des droits civils.
Code civil, art. 7 et 8.
♦ Spécialt (syntagmes en de). || Droit d'affouage; droit d'appui, droit d'attache. || Droit de pacage. || Droit d'épaves. || Droit de chasse, de pêche. || Droit de place, de stationnement.
♦ Droit de grève, droit de vote.
♦ Droit de propriété (droits mobiliers et immobiliers). — Droit de jouissance légale. || Droit d'usage, droit d'habitation. || Droit de succession, droit successif, héréditaire. || Droit de tester. || Droit de retour au donateur. — Droit de préemption. || Droit de prélation. — Droit de préférence, que possèdent certains créanciers, certains détenteurs de titres. || Droit de reprise du bailleur. || Droit de rétention, du créancier sur un objet appartenant au débiteur.
♦ Droit d'auteur (⇒ Copyright), droit de l'inventeur : droit exclusif d'exploitation d'une œuvre par son auteur, d'une invention par son inventeur. || Droit de reproduction. || Droits d'impression, droits de reproduction réservés. || Tous droits réservés, mention précisant que l'auteur d'une œuvre, ou son représentant, s'en est réservé exclusivement les droits de reproduction et d'exploitation (→ aussi ci-dessous, cit. 31 et supra).
♦ Procéd. || Droits de la défense. || Droit d'évocation. || Droit de communication. — Droit de présentation. — Droit de réponse.
♦ Dr. internat. || Droit d'asile (au sens fig. → Asile, cit. 14). || Droit de légation active et passive. || Droit de visite, sur les navires étrangers.
♦ Droit de grâce. — Droit de veto.
♦ Hist. || Droits féodaux. ⇒ Féodalité. || Droits honorifiques, par oppos. aux droits utiles. || Droit de four, de moulin banal. || Droit de banvin. || Droit du seigneur, droit de cuissage. || Le Droit du seigneur, comédie de Voltaire. — Droit d'aubaine. ⇒ Aubaine (cit. 1). || Droit de nommer à un bénéfice. ⇒ Collation. || Droit de patronage. || Droit de haute et basse justice. || Droit de glaive : droit de connaître des affaires impliquant la peine de mort — Droit de la couronne, droits royaux, droits régaliens : droit de guerre, de battre monnaie, d'imposer… ⇒ aussi Régale. — Droit d'aînesse (cit. 1 et 2), droit de primogéniture.
♦ Droit de cité, de bourgeoisie. ⇒ Bourgeois, bourgeoisie; cité (cit. 2).
23 La plupart de ces peuples ne s'étaient pas d'abord fort souciés du droit de bourgeoisie chez les Romains (…)
Montesquieu, Grandeur et décadence des Romains, IX.
3 Par ext. (au plur. ou en loc.). Ce qui donne une influence, une autorité morale, etc. considérée comme légitime. ⇒ Prérogative, privilège, titre. || Les droits du sang, de l'amitié. || Avoir, acquérir des droits à la reconnaissance de quelqu'un. || N'avoir pas de droits, n'avoir aucun droit à… || Les droits de l'hospitalité. || La nature ne perd jamais ses droits.
24 La nature en tout temps garde ses premiers droits (…)
Corneille, Horace, III, 4.
25 Mais vous ne savez pas ce que c'est qu'une femme :
Vous ignorez quels droits elle a sur toute l'âme.
Corneille, Polyeucte, I, 1.
26 Les droits de la raison (…)
Molière, les Femmes savantes, IV, 1.
27 J'ai vu jusqu'au fond de cette âme, la terre n'y a plus aucun droit.
Balzac, le Curé de village, Pl., t. VIII, p. 757.
♦ ☑ Loc. Avoir droit de… : avoir lieu, avoir sujet de…
28 La plus fausse apparence a droit de nous troubler.
Corneille, Suréna, 112.
4 Somme d'argent, redevance qu'une personne, une collectivité est en mesure d'exiger de quelqu'un. ⇒ Contribution, imposition, impôt, redevance, taxe. || Établir un droit sur un acte, sur une marchandise. || Acquitter un droit. || Percevoir un droit; droit perçu à raison de… || Droit que l'on paye pour passer sur un pont, emprunter un bac, une autoroute. ⇒ Péage. || Droit d'entrée à un spectacle, à une réunion. || Droit d'inscription à une société, à un groupe. || Droit d'inscription et cotisation.
♦ Hist. (Féodalité, Ancien Régime). || Droits domaniaux ou régaliens, perçus par le roi. || Droits seigneuriaux. || Droits en nature : droit de mouture, champart, etc. || Droit de relief : droit de mutation dû au seigneur. — Droit payé au roi par les officiers de justice. ⇒ Paulette.
♦ (Premier Empire). || Droits réunis : les contributions indirectes. || L'administration des droits réunis.
♦ Mod. (Contributions indirectes). || Droit au comptant, effectivement payé lors de la déclaration faite par le contribuable. || Droit constaté, recouvré postérieurement au fait qui l'a créé. || Droit fraudé, non acquitté. || Droit progressif, dont le taux s'accroît à mesure que la valeur à laquelle il s'applique augmente. || Demi-droit; double droit. || Droit en sus : pénalité fiscale.
♦ Droit de circulation, de consommation, de fabrication, sur les boissons.
29 C'est alors en effet, le 24 avril 1806, que Gaudin faisait voter la loi qui établissait définitivement les droits sur les boissons, en attendant que l'impôt sur les tabacs fût, en 1810, remplacé par le monopole, car il faudra quatre ans encore pour briser, sur ce point, les oppositions.
Louis Madelin, Hist. du Consulat et de l'Empire, Vers l'Empire d'Occident, V, p. 67.
♦ Droits de douane. || Droit d'entrée, de sortie, de statistique. || Droit de transit. || Droit ad valorem. || Droit spécifique, établi d'après le poids. || Droits protecteurs (⇒ Protectionnisme), droits compensateurs (→ Montants compensatoires). — Droit d'octroi. — Marchandises assujetties aux droits, exemptes de droits.
♦ Droits de navigation : taxes accessoires des douanes, perçues sur le corps des navires. || Droit de congé. || Droit de francisation, de passeport. || Droit d'ancrage (cit. 1), de quai (quayage), de bassin. || Droit de tonnage.
30 Les lamanages, touages, pilotages, pour entrer dans les havres et rivières, ou pour en sortir, les droits de congés, visites, rapports, tonnes, balises, ancrages et autres droits de navigation, ne sont point avaries; mais ils sont de simples frais à la charge du navire.
Code de commerce, art. 406.
♦ Droits d'enregistrement. || Droit d'acte; droit de mutation : droits perçus l'un à raison de la rédaction, de l'usage d'un acte, l'autre à raison du fait juridique qu'il concerne. || Droit de titre. || Droit fixe, sur les actes ne constatant aucun mouvement de valeurs. || Droit gradué. || Droit proportionnel. — Droit de timbre. — Droit de licence, sur l'exercice de certains commerces. || Droit de garantie. || Droit de transmission, sur les valeurs mobilières. — Droits de succession.
♦ Droit de vérification des poids et mesures (taxe directe).
♦ Procéd. || Droit de poste, élément des frais de justice.
♦ Droit des pauvres, perçu au profit d'établissements charitables sur les entrées à un spectacle.
♦ ☑ Prov. Où il n'y a rien, le roi perd ses droits.
♦ Par ext. Somme d'argent payée à une personne et correspondant à un droit (ci-dessus, 2.). ⇒ Rétribution, salaire. || Droit de présence, droit de signature. — Droits d'auteur : profits pécuniaires de l'auteur. Ellipt. || Ce romancier ne peut vivre de ses droits.
31 Quant à ses romans mondains, qu'il produisait d'une veine avare, ils ne lui rapportaient que des droits insignifiants.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. III, XIII, p. 177.
♦ Droit de greffe : émoluments perçus par un greffier.
———
II Le droit (droits [I.] subjectifs).
1 Ce qui constitue le fondement des droits de l'homme vivant en société (→ ci-dessus, I.), des règles régissant les rapports humains (→ ci-dessous, III.). ⇒ Légalité, légitimité; justice, morale… || Le concept, l'idée de Droit. || Discuter l'existence du droit. || Opposer le droit au fait, au réel. || Réduire le droit à la force. || Rapports du Droit et de la Morale, du Droit et de la Force. ☑ « La force prime le droit »; « force passe droit » (prov.). || Le droit et la raison.
32 Le droit n'est autre chose que la raison même, et la raison la plus certaine, puisque c'est la raison reconnue par le consentement des hommes.
Bossuet, Hist. des variations…, Avertissement, V, 3.
33 Le Droit est le souverain du monde.
34 C'est la force et le droit qui règlent toutes choses dans le monde, la force en attendant le droit.
Le droit et la force n'ont entre eux rien de commun par leur nature. En effet, il faut mettre le droit où la force n'est pas, la force étant par elle-même une puissance.
Joseph Joubert, Pensées, XV, II-III.
35 Il n'y a de droit que lorsqu'il y a une loi pour défendre de faire telle chose, sous peine de punition. Avant la loi, il n'y a de naturel que la force du lion, ou le besoin de l'être qui a faim, qui a froid, le besoin en un mot (…)
Stendhal, le Rouge et le Noir, II, XLIV, p. 498.
36 (…) ils obligèrent la morale à enseigner que le fait accompli est sacré, que le succès est providentiel, et que par conséquent la force prime le droit.
Fustel de Coulanges, Questions contemporaines, p. 70.
37 En demandant si le droit existe et ce qu'il est, on peut avoir deux questions en vue :
La première est celle de savoir si l'homme vivant dans une société donnée est par là-même soumis à une règle de conduite (…) Cette règle de conduite (est) le droit objectif.
(…) l'homme depuis des siècles, sans écarter (…) le problème du droit objectif, le met au second plan et veut résoudre avant tout le problème insoluble du droit subjectif (…) y a-t-il certaines volontés qui ont (…) une qualité propre qui leur donne le pouvoir de s'imposer comme telles à d'autres volontés ? Si ce pouvoir existe, il est un droit subjectif (…)
L. Duguit, Traité de droit constitutionnel, t. I, p. 14.
38 « Nous sortons de la Légalité pour rentrer dans le Droit », affirmait le troisième Bonaparte (…)
Bernanos, les Grands Cimetières sous la lune, I, II, p. 67.
39 Si le droit n'est pas l'armurier des innocents, à quoi sert-il ?
Giraudoux, La guerre de Troie n'aura pas lieu, p. 148.
40 Avons-nous donc été réellement les soldats du droit pour que la victoire fasse de nous les sbires de la bestialité ?
G. Duhamel, Récits des temps de guerre, IV, XX, p. 75.
♦ Avoir le droit pour soi. || Le droit est pour lui, de son côté.
♦ ☑ Donner droit à quelqu'un, lui donner raison. — ☑ Faire droit à quelqu'un, lui rendre justice, au propre et au fig. || Faire droit à une demande. ⇒ Satisfaire. || Dire le droit : exposer le contenu du droit; par ext., rendre justice. || Avant dire droit : avant jugement définitif.
41 Est-ce là faire droit ? Est-ce là comme on juge ?
Racine, les Plaideurs, I, 7.
2 ☑ Loc. Le bon droit, le mauvais droit : ce qui est considéré comme conforme ou non conforme à l'idée de Droit. — Proverbe : ☑
42 (…) bon droit a besoin d'aide (…)
Molière, la Comtesse d'Escarbagnas, 5.
43 (…) La raison, mon bon droit, l'équité.
Molière, le Misanthrope, I, 1.
♦ ☑ Loc. adv. À bon droit : d'une façon juste et légitime; selon toute raison. ⇒ Titre (à juste titre).
44 (…) j'ai vu dans mon voyage
Gens experts et savants, leur ai dit la langueur
Dont Votre Majesté craint à bon droit la suite.
La Fontaine, Fables, VIII, 3.
♦ ☑ Loc. adv. De droit : d'une façon légitime, incontestable (→ Sans discussion).
45 Ses grâces appartiennent de droit aux pauvres (…)
46 La défense est de droit, la vengeance est infâme (…)
M.-J. Chénier, Charles IX, IV, 1.
REM. Pour le sens juridique de certaines expressions (de droit, de plein droit…), → ci-dessus, III.
3 Pouvoir de faire ce que l'on veut. || Le droit du plus fort. || Le droit du conquérant, du vainqueur; le droit de conquête, de l'épée, de la guerre.
47 Ces montagnes de morts (…)
Sont les titres affreux dont le droit de l'épée,
Justifiant César, a condamné Pompée.
Corneille, Pompée, I, 1.
48 Elle doit être à moi (la première part), dit-il, et la raison,
C'est que je m'appelle Lion (…)
La seconde par droit me doit échoir encor :
Ce droit, vous le savez, c'est le droit du plus fort.
La Fontaine, Fables, I, 6.
49 Il usait du droit de la force avec autant d'assurance, avec aussi peu de remords, que s'il avait connu le droit divin, le droit politique et le droit civil.
G.-T. Raynal, Hist. philosophique, XIV, 37.
50 Il y a bien un droit du plus sage, mais non pas un droit du plus fort.
Joseph Joubert, Pensées, XV, IV.
———
III Le droit (droit objectif; → ci-dessus, II., cit. 37). Ensemble des règles qui régissent les rapports des hommes entre eux. ⇒ Juridique.
1 Ensemble des règles, considéré comme existant en dehors de toute formulation; on dit aussi droit naturel (→ Concilier, cit. 6). || Pour l'école du droit de la nature et des gens et pour les encyclopédistes, le droit naturel, immuable et universel, découle de la nature humaine. — Hist. (lat. jus gentium). || Droit des gens, appliqué par Rome à l'égard des citoyens et des hommes libres en général; (mod.) ensemble des règles de droit communes à tous les pays; droit international public (→ ci-dessous, III., 2., b). || Le droit des minorités.
51 Il existe un Droit universel, immuable, source de toutes les lois positives; il n'est que la raison naturelle en tant qu'elle gouverne tous les hommes.
Art. 1er du livre préliminaire du Code civil rédigé par la Commission de l'an VIII, in A. Colin et H. Capitant, Traité de droit civil, t. I, p. 3.
52 (…) il est (…) vrai de dire, avec les auteurs du Code civil, qu'il (le droit naturel) est universel. En revanche, il serait inexact de le présenter comme immuable. Il est en effet, tout au contraire, essentiellement variable et progressif. Le Droit naturel des peuples modernes diffère profondément de celui des peuples de l'antiquité.
A. Colin et H. Capitant, Traité de droit civil, t. I, p. 4.
53 (…) l'expression « droit naturel » nous paraît (…) captieuse, et bonne à éviter. On peut la remplacer (…) soit par le terme loi (biologique, psychologique, sociale), soit par l'expression droit moral (… résultant de l'opinion morale et non de la législation).
Lalande, Voc. de la philosophie, art. Droit.
♦ Droit divin : doctrine de la souveraineté, forgée au XVIIe siècle, et d'après laquelle le roi est directement investi par Dieu. || Monarchie de droit divin. — Par ext. : || le Droit naturel, considéré comme issu de Dieu, par oppos. au Droit humain.
54 Ses titres n'étant pas de droit humain, il prétend qu'ils sont de droit divin; mais nous sommes assurés qu'ils sont de droit diabolique (…)
Voltaire, Lettre à M. Mille, 13 sept. 1771.
2 Droit positif :
55 On appelle « droit positif » les règles juridiques en vigueur dans un État, quel que soit d'ailleurs leur caractère particulier, constitutions, lois, décrets, ordonnances, coutumes, jurisprudence. Ces règles sont « positives » en ce sens qu'elles forment un objet d'étude concret et certain; on les connaît; elles ont un texte, une formule arrêtée et précise (…)
M. Planiol, Traité élémentaire de droit civil, t. I, p. 2.
♦ Droit français, anglais, allemand, soviétique… : le droit positif de la France, de l'Angleterre, etc.
♦ Droit écrit; droit coutumier : droit dérivant de la loi; de la coutume. → Plaisir, cit. 2. || Droit coutumier berbère.
♦ Droit prétorien : droit issu de la jurisprudence (en droit romain, droit créé par le préteur dans son édit).
♦ Droit commun : règles générales applicables à une catégorie de rapports de droit, lorsqu'il n'y a aucune dérogation particulière. || Délit de droit commun, par oppos. à délit politique, militaire. || Prisonnier de droit commun. || Mettre (un bâtiment) sous le régime du droit commun. ⇒ Banaliser.
♦ Par métonymie. || Un droit commun se dit, par ext., d'un prisonnier de droit commun, par oppos. au (prisonnier) politique. (Plur. invar : des droit commun). || Les droit commun et les politiques sont d'ordinaire séparés.
55.1 Mais les menottes aux poignets de Claude Bourdet, ce compagnon de la Libération mis nu comme un ver à son arrivée parmi les « droit commun » à la Santé, puis à Fresnes, voilà qui diminue curieusement la distance entre le style de M. Bourgès-Maunoury et celui de M. Tixier-Vignancour.
F. Mauriac, Bloc-notes 1952-1957, p. 225.
♦ Droit étroit, droit strict : règle de droit strictement limitée par ses termes mêmes et ne pouvant pas être étendue. || Règle de droit étroit. || Ceci est de droit strict.
♦ ☑ Loc. Faire droit. || Faire droit à une demande : accorder ce qui est demandé. — Spécialt (usage juridique). || Avant faire droit : avant de juger définitivement. || Jugement avant faire droit, et, n. m., un avant faire droit.
♦ ☑ Loc. adv. De droit, se dit de ce qui est légal, prévu par les textes et qui ne peut donner lieu à une discussion. — ☑ De plein droit : sans qu'il soit nécessaire de manifester de volonté, d'accomplir de formalité.
56 La compensation s'opère de plein droit par la seule force de la loi, même à l'insu des débiteurs (…)
Code civil, art. 1290.
♦ ☑ Qui de droit : personne ayant un droit sur…, ayant habilité à… || L'héritage échut à qui de droit. || Adressez-vous à qui de droit, à celui qui a le droit, le pouvoir de décider.
♦ Voies de droit : recours à la justice pour attaquer un acte, un jugement, ou pour agir contre une personne. — Contr. : voies de fait.
♦ En droit. ⇒ Juridiquement. || Responsable en droit. || En droit et non en fait.
♦ Histoire du droit. || Droit romain. || Les trois périodes du droit romain : ancien droit romain, droit de la période classique, droit du Bas-Empire. || Sources du droit romain. ⇒ Code, digeste.
57 Le Droit romain, grâce à l'abondance de ses sources et à sa durée millénaire (…) fournit un champ d'observation incomparable pour l'historien du Droit. Il lui permet de voir, mieux qu'aucun autre Droit ancien, comment le Droit naît et se transforme sous l'action des facteurs économiques et politiques, religieux et moraux (…) L'utilité de l'étude du Droit romain pour les juristes tient à sa valeur technique et à son influence.
A.-E. Giffard, Précis de droit romain, t. I, p. 1.
♦ Ancien droit français. || La France était divisée en pays de droit écrit (droit romain conservé dans le Sud. → Conception, cit. 6), et en pays de droit coutumier (coutumes d'esprit germanique, dans le Nord). || Éléments d'unité de l'ancien droit : le droit canonique (→ ci-dessous, cit. 63 et 64), les ordonnances royales, la doctrine.
♦ Droit intermédiaire : lois élaborées par les assemblées révolutionnaires de 1789 à 1800. — Abrogation de l'ancien droit, par la loi du 30 Ventôse an XII (21 mars 1804). ⇒ Code (→ infra cit. 2).
♦ Classification du droit positif. || Droit international et Droit national, droit interne. || Droit privé et droit public.
58 On doit d'abord distinguer le droit public du droit privé, distinction capitale et très usuelle, mais dont la raison d'être n'est pas toujours nettement aperçue. Le droit public règle les actes des personnes qui agissent dans un intérêt général, en vertu d'une délégation directe ou médiate du souverain; le droit privé règle les actes que les particuliers accomplissent en leur propre nom pour leurs intérêts individuels.
M. Planiol, Traité élémentaire de droit civil, t. I, p. 9.
♦ a Droit privé.
♦ Droit civil : la branche essentielle du droit privé, traitant des personnes (capacité, famille, mariage), des biens, des successions, des obligations… || Chez les Romains le droit civil (jus civile) ou droit du peuple romain s'opposait au droit des gens (jus gentium), commun à tous les peuples. Auj. || Droit civil désigne la branche essentielle du droit privé. — Principales questions de droit civil : sujets de droit (⇒ Personne; domicile, état [civil], nom; famille; adoption, alliance, divorce, filiation, légitimation, mariage, parenté, séparation; capacité, aliéné, curatelle, émancipation, incapacité, interdit, mineur, puissance [paternelle], tutelle); patrimoine (⇒ Bien, immeuble, meuble, patrimoine; → supra Droits réels); obligations (⇒ Contrat, délit [civil]…, obligation); preuve (⇒ Présomption, preuve); sûretés (⇒ Cautionnement, hypothèque, nantissement, privilège, sûreté…); régimes matrimoniaux (⇒ Mariage; communauté, dot, dotal, séparation [de biens]); successions (⇒ Héritage, liquidation, partage, renonciation, saisine, succession, testament…); libéralités (⇒ Donation, fondation, legs, libéralité).
59 Le droit civil contient la plupart des matières du droit privé et c'est lui qui représente le droit commun chez une nation (…) Pendant tout le moyen âge, l'expression « droit civil » a désigné le droit romain. Ce droit était représenté par les compilations de Justinien (…) Le jus civile (…) comprenait à la fois le droit public et le droit privé (…) mais (…) les États modernes se gouvernaient par d'autres règles; ils avaient d'autres institutions politiques. Par suite, les jurisconsultes n'allaient plus chercher dans les recueils de Justinien que les règles du droit privé.
M. Planiol, Traité élémentaire de droit civil, t. I, p. 10-11.
♦ Droit commercial : partie du droit privé concernant les actes de commerce et les commerçants. || Principales questions de droit commercial : sociétés (⇒ Société; action, commandite…); contrats (⇒ Commission, gage, vente, warrant); effets de commerce et opérations de banque (⇒ Banque, billet, change, chèque, crédit, dépôt, escompte, virement…); valeurs mobilières et opérations de bourse (⇒ Bourse, titre); faillite et liquidation (⇒ Banqueroute, faillite, liquidation; concordat, créancier, union…). ⇒ aussi Commerçant, commerce. || La source principale du droit commercial français est le Code de Commerce de 1808.
60 Le droit privé se divise en deux grandes branches, le droit civil et le droit commercial (…) Le Code de commerce renferme des dispositions spéciales aux actes de commerce et aux commerçants, qui dérogent au Code civil dans un esprit de faveur et de protection pour le commerce. En somme, le droit civil est la règle, le droit commercial l'exception.
L. Lacour et L. Julliot de la Morandière, Précis de droit commercial, p. 1.
♦ Droit maritime. || Droit privé maritime (par oppos. au droit international public maritime, au droit administratif maritime et au droit international privé maritime). || Le droit maritime a pour objet les navires; les personnes (⇒ Armateur, capitaine, travailleur [maritime]); les contrats (⇒ Affrètement, passage); les accidents (⇒ Abordage, assistance, avarie, sauvetage); les assurances et le crédit maritime. || Sources du droit maritime : livre II du Code de Commerce et diverses lois.
61 L'expression « droit maritime » peut s'entendre dans un sens très large. Elle désigne l'ensemble des règles juridiques qui intéressent la navigation et le commerce maritime…
Le droit privé maritime (…) s'applique aux rapports qui, par suite de cette même navigation, s'établissent entre les particuliers (propriétaires de navires, armateurs, gens de mer, chargeurs, assureurs, etc…).
L. Lacour, Précis de droit maritime, p. 1.
♦ Partie du droit réglant la manière de faire valoir et de défendre les droits devant la justice : procédure civile et commerciale réglant l'organisation judiciaire (⇒ Procédure, juridiction, justice; arbitrage, cassation, conseil, cour, juge, prud'homme, tribunal…; magistrat, ministère [public]; agréé, avocat, avoué, greffier, huissier, officier ministériel); la compétence (⇒ Action, défense); la procédure proprement dite (⇒ Procédure; jugement; recours : appel, pourvoi, requête, opposition); les voies d'exécution (⇒ Saisie; contribution, ordre). Cf. Code de Procédure civile.
♦ Droit international privé, déterminant les conditions de la nationalité (⇒ Nationalité; naturalisation; déchéance), la situation des étrangers (⇒ Admission, assignation [de résidence], expulsion, immigration, refoulement) et les conflits de loi (⇒ Exequatur…).
62 L'expression, introduite et vulgarisée en France par le Traité de droit international privé de Fœlix (1843), est aujourd'hui universellement employée (…les) trois matières (du droit international privé) ont un lien commun : les difficultés qu'elles renferment dérivent de la division du monde en États souverains, de structure et de culture différentes, division qu'il faut concilier avec les relations établies entre les peuples (…)
P. Lerebours-Pigeonnière, Précis de droit international privé, p. 1.
♦ Droit canonique ou droit canon, réglant l'organisation de l'Église catholique. || Le droit canonique eut une importance universelle au moyen âge. ⇒ 2. Canon. || La dernière codification du droit canon est le Codex Juris Canonici de 1917.
63 Le droit canonique, ou canon, est, suivant les idées vulgaires, la jurisprudence ecclésiastique : c'est le recueil des canons, des règles des conciles, des décrets des papes, et des maximes des Pères.
Voltaire, Dict. philosophique, Droit canonique.
64 Le droit canonique (…) est l'ensemble des règles par lesquelles se gouverne l'Église catholique (…) Le droit canonique existe encore, mais il est confiné dans l'ordre purement religieux (Il) eut son apogée au XIIIe siècle : peu à peu il fut refoulé par l'autorité royale dans le domaine restreint qui lui est resté.
M. Planiol, Traité élémentaire de droit civil, t. I, p. 18.
♦ Vx. || Droit politique. || Du Contrat social ou Principes du droit politique, œuvre de J.-J. Rousseau.
65 Le droit politique est encore à naître, et il est à présumer qu'il ne naîtra jamais. Grotius, le maître de tous nos savants en cette partie, n'est qu'un enfant (…) Le seul moderne en état de créer cette grande et inutile science eût été l'illustre Montesquieu. Mais il n'eut garde de traiter des principes du droit politique; il se contenta de traiter du droit positif des gouvernements établis (…)
Rousseau, Émile, V.
♦ Droit constitutionnel : la partie du droit public interne relative à l'organisation et au fonctionnement de l'État. ⇒ Nation, peuple, pouvoir, souveraineté; constitution, régime (absolutisme, démocratie, monarchie, république…); élection, scrutin, suffrage, vote; assemblée, parlement, parti; gouvernement, cabinet, conseil, ministre, président; décret, loi…; aussi politique. — Droit public général, réglant l'exercice des libertés individuelles. ⇒ Liberté (association, conscience, culte, presse, radio, réunion…).
66 Si l'on considère l'entité juridico-politique que forme l'État, on discerne (…) qu'elle obéit au droit tant par les règles qui lui donnent l'être que par les normes qu'elle suit pour agir. Ainsi se distinguent les deux grandes parties du droit public :
Celle dans laquelle on découvre et explique les règles ayant trait à la structure de l'État; c'est le droit public constitutionnel, ou tout simplement le droit constitutionnel.
Celle où l'on recherche et fixe les règles s'appliquant aux relations de l'État : c'est le droit public relationnel ou droit public tout court.
Marcel Prélot, Précis de droit constitutionnel, p. 10.
♦ Droit administratif : ensemble des règles relatives à l'organisation des services publics et à leurs rapports avec les administrés. ⇒ Administration; arrondissement, district, région, sous-préfecture; commune, maire, municipalité, syndicat (communal); département, préfet; conseil (d'État); expropriation, police, réquisition; aussi public (domaine, service public, travaux publics, utilité publique). || Le droit administratif régit « les personnes morales de droit privé d'intérêt général ». ⇒ Association; congrégation, établissement (d'utilité publique), société, syndicat.
♦ Droit financier ou législation financière : ensemble des règles relatives aux finances publiques. ⇒ Budget. || Le droit fiscal fait partie de la législation financière. ⇒ Impôt; assiette, liquidation, recouvrement; fisc; emprunt…
♦ Droit international public, droit des gens, réglant les problèmes de la communauté internationale : Droit de la paix (⇒ Conseil, union…; cf. Société des nations, Organisation des Nations Unies…); relations de l'État avec les autres États (⇒ Diplomatie); droit préventif de la guerre (⇒ Charte, médiation, pacte, sécurité) et droit de la guerre (⇒ Guerre; neutralité : droit des neutres). || Droit de la guerre et de la paix, ouvrage de Grotius (1625).
67 Le droit international public (ou droit des gens, ou encore « droit international » tout court) se définit l'ensemble des règles juridiques qui régissent les relations entre les États et les autres entités internationales (l'Église, les belligérants reconnus, l'O. N. U., etc.).
Louis Delbez, Manuel de droit international public, p. 11.
c Droit pénal ou droit criminel (⇒ Criminel, cit. 12), que l'on rattache parfois au droit privé (cf. Répertoire Dalloz, II, p. 224), et qui a trait à la détermination et à la sanction des infractions (⇒ Infraction; contravention, crime, délit…, tentative; délinquant; complicité, cumul, participation, récidive; peine; amende, bannissement, confiscation, dégradation, déportation, détention, emprisonnement, interdiction, mort, relégation, transportation; amnistie, grâce, libération, réhabilitation, sursis), à la procédure criminelle (⇒ Instruction, jugement, recours). || Le code pénal et le code d'instruction criminelle contiennent les règles du droit pénal. || Droit pénal international.
68 Le droit pénal fait certainement partie du droit public. L'État seul, représentant la nation, a le droit de punir; la poursuite et la condamnation se font en son nom.
M. Planiol, Traité élémentaire de droit civil, t. I, p. 10.
♦ Droit civil ecclésiastique : ensemble des règles de droit public concernant les rapports de l'État et de l'Église. ⇒ Concordat, séparation (de l'Église et de l'État).
d Branches du droit de formation récente, déterminées par leur objet et groupant des règles de droit public et privé.
♦ Droit médical, déterminant les obligations et les droits du médecin à l'égard des malades, des membres de la profession médicale et de la société en matière de médecine.
♦ Droit aérien, réglementant les instruments de l'aviation marchande (immatriculation, certificat de navigabilité des aéronefs); le statut du personnel; les règles d'utilisation de ces éléments (police de l'air, survol, escale technique, commerciale; contrats de transports); les compagnies de transport aérien. || Spécialiste du droit aérien. ⇒ Aérianiste. — Droit spatial, droit de l'espace.
♦ Droit social, réglant les obligations de la collectivité pour assurer la protection économique des individus. || Droit (ou législation) du travail (Code du travail, 1910). || Droit professionnel, réglementant l'organisation des professions.
69 La marche, le progrès du Droit ne s'arrêtent jamais. Depuis longtemps, des concepts nouveaux ont grandi, parmi lesquels une notion surtout tend à acquérir une influence chaque jour grandissante. C'est celle de la solidarité (…) Cette notion du Droit social (…) conduit à élargir, de plus en plus, la sphère d'intervention de l'État (…)
Le développement de la grande industrie et de la classe du prolétariat (…) a fait clairement apparaître les lacunes de la législation civile. Il a fallu combler ces lacunes (…) De là (…) toute une législation en voie de formation, la législation ouvrière et sociale dont on peut dire qu'elle correspond à une catégorie nouvelle du Droit naturel.
A. Colin et H. Capitant, Traité de droit civil, t. I, p. 5-6.
♦ Droit des assurances, réglant les contrats d'assurances des sociétés privées et nationalisées, des assurances sociales (→ Assurance, sécurité sociale).
♦ Anciennt. || Droit colonial, droit des pays d'outre-mer, droit d'outre-mer : législation spéciale des territoires d'outre-mer (opposé à droit métropolitain).
♦ Droit forestier : législation résultant du Code Forestier de 1827 et applicable à la propriété boisée en France. — Droit des mines. — Droit rural : règles relatives à la propriété rurale, en partie codifiée (Code rural).
♦ Droit des transports.
———
IV Connaissance, description, analyse du droit positif. ⇒ Juridique (science). || Science, étude du droit. || Étudier le droit. || Étudiant en droit. || Faire son droit. || Enseigner le droit; professeur de droit. || Faculté de droit. || Cours de droit. || Manuel, précis de droit civil, etc. (→ supra). || Études de droit. ⇒ Capacité; licence; doctorat; agrégation. || Baccalauréat en droit. || Licencié, docteur en droit. || Être savant en droit. ⇒ Juriste. || L'économie politique est enseignée à la faculté de droit.
♦ Différentes disciplines de droit : droit privé, public; civil, criminel (→ ci-dessus, III.). || Droit comparé : étude comparée du droit de plusieurs pays, de plusieurs époques, etc.
70 D'Alembert se trouva chez Voltaire avec un célèbre professeur de droit de Genève. Celui-ci, admirant l'universalité de Voltaire, dit à d'Alembert : « Il n'y a qu'en droit public que je le trouve un peu faible. — Et moi, dit d'Alembert, je ne le trouve un peu faible qu'en géométrie. »
Chamfort, Caractères et anecdotes, Universalité de Voltaire.
71 En se livrant à l'étude du Droit, il se sentit d'abord poussé bien moins vers les lois civiles que vers les lois politiques (…)
Sainte-Beuve, Causeries du lundi, 8 avril 1850, t. II, p. 28.
➪ tableau Noms de sciences et d'activités à caractère scientifique.
❖
COMP. Ayant-droit, non-droit, passe-droit.
Encyclopédie Universelle. 2012.